Bundesstrafgericht Tribunal pénal fédéral Tribunale penale federale Tribunal penal federal

Numéro de dossier: RR.2019.352

Arrêt du 10 mars 2020 Cour des plaintes

Composition

Les juges pénaux fédéraux Roy Garré, président, Giorgio Bomio-Giovanascini et Stephan Blättler, le greffier Federico Illanez

Parties

A., actuellement détenu en France, représenté par Me Philippe Ohayon, avocat, recourant

contre

Office fédéral de la justice, Unité extraditions, partie adverse

Objet

Extradition à la France

Extension de l'extradition (art. 39 et 55 EIMP)

Faits:

A. Le 27 novembre 2013, la France a émis un signalement dans le Système d’Information Schengen (SIS), fondé sur un mandat d’arrêt du 13 septembre 2013 décerné par les autorités judiciaires françaises, à l’encontre de A. pour des faits qualifiés de, notamment, vols en bande organisée avec arme (act. 6.1).

B. Par ordonnance du 1er avril 2016, l’Office fédéral de la Justice (ci-après: OFJ) a ordonné la détention provisoire à titre extraditionnel du prénommé (act. 6.2).

C. A. a été auditionné par le Ministère public de la République et canton de Genève le 2 avril 2016. L’intéressé a consenti à son extradition simplifiée au sens de l’art. 54 de la Loi fédérale du 20 mars 1981 sur l’entraide internatio-nale en matière pénale (EIMP; RS 351.1). L’extradition, accordée par l’OFJ en date du 4 avril 2016, a été exécutée le 6 avril 2016 (v. act. 2, p. 1 et 6.3).

D. Par note diplomatique n° 2019-0170464 du 20 mars 2019, l’Ambassade de France à Berne a sollicité, sur la base d’un mandat d’arrêt décerné le 11 janvier 2019, l’extension de l’extradition de A. pour des faits de violences volontaires ayant entraîné une incapacité totale de travail inférieure à 8 jours commises en réunion, avec usage ou menace d’une arme et dans un local de l’administration (act. 6.5).

E. Par décision du 23 avril 2019, notifiée à A. le 29 novembre 2019, l’OFJ a accordé l’extension de l’extradition à la France (act. 6.7 et 6.8).

F. Par courriers des 8, 10 et 15 décembre 2019, A. a déclaré interjeter recours contre la décision de l’OFJ susmentionnée et mandaté Me Philippe Ohayon (ci-après: Me Ohayon), avocat à Paris, pour assurer sa défense (act. 1.1, 4 et 6.8).

G. Par missive du 19 décembre 2019 (timbre postal), reçue par la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral le 27 décembre 2019, Me Ohayon a déclaré être mandaté afin de former recours contre la décision de l’OFJ du 23 avril 2019 (act. 1).

H. Invité à répondre, l’OFJ conclut, par envoi du 16 janvier 2020, et en l’absence de griefs à l’appui du recours contre sa décision du 23 avril 2019, au rejet du recours dans la mesure de sa recevabilité (act. 6).

I. Par acte du 20 janvier 2020, la Cour des plaintes a sollicité à la France, en tant qu’État requis selon la Convention européenne du 24 novembre 1977 sur la notification à l’étranger des documents en matière administrative (en vigueur pour la Suisse dès le 1er octobre 2019 et pour la France dès le 1er no­vembre 1982 [RS 0.172.030.5]), la notification à Me Ohayon de l’invitation à se déterminer « […] dans le délai de 10 jours dès la remise des documents » (act. 8 et 9).

J. Le 27 janvier 2020, les autorités françaises ont procédé à la notification au conseil susmentionné (act. 10).

Les arguments et moyens de preuve invoqués par les parties seront repris, si nécessaire, dans les considérants en droit.

La Cour considère en droit:

1. Les procédures d’extradition entre la Suisse et la France sont prioritairement régies par la Convention européenne d’extradition du 13 décembre 1957 (CEExtr; RS 0.353.1) entrée en vigueur pour la Suisse le 20 mars 1967 et pour la France le 11 mai 1986 et par l’Accord du 10 février 2003 conclu entre le Conseil fédéral suisse et le Gouvernement de la République française relatif à la procédure simplifiée d'extradition et complétant la CEExtr (RS 0.353.934.92) entré en vigueur par échange de notes le 1er janvier 2006. Les art. 59 ss de la Convention d’application de l’Accord de Schengen du 14 juin 1985 (CAAS; n° CELEX 42000A0922[02]; Journal officiel de l’Union européenne [ci-après: JO] L 239 du 22 septembre 2000, p. 19-62; texte non publié au RS, mais disponible sur le site de la Confédération suisse sous la rubrique « Recueil de textes juridiques sur les accords bilatéraux » onglet « 8.1. Annexe A » in https://www.admin.ch/opc/fr/european-union/interna­tional-agreements/008.html) s’appliquent également à l’entraide pénale entre la Suisse et la France (arrêt du Tribunal pénal fédéral RR.2008.296 du 17 décembre 2008 consid. 1.3), de même que les art. 26 ss de la Décision 2007/533/JAI du Conseil du 12 juin 2007 sur l’établissement, le fonctionne­ment et l’utilisation du Système d’information Schengen de deuxième génération (SIS II; JO L 205 du 7 août 2007, p. 63-84; in site susmentionné onglet « 8.4. Développements de l’acquis Schengen ») et les dispositions correspondantes du Règlement du 28 novembre 2018 du Parlement européen et du Conseil sur l’établissement, le fonctionnement et l’utilisation du système d’information Schengen (SIS) dans le domaine de la coopération policière et de la coopération judiciaire en matière pénale, modifiant et abrogeant la décision 2007/533/JAI du Conseil, et abrogeant le règlement (CE) n° 1986/2006 du Parlement européen et du Conseil et la décision 2010/261/UE de la Commission (JO L 312/56 du 7 décembre 2018, p. 56 ss; v. art. 79, p. 103), appliqué provisoirement par la Suisse dès le 28 décembre 2019 (v. RS 0.362.380.086); étant précisé que les dispositions du CAAS n’affectent pas le champ d’application plus large des accords en vigueur entre la France et la Suisse (art. 59 par. 2 CAAS).

2. Pour le surplus, l'EIMP et son ordonnance d'exécution du 24 février 1982 (OEIMP; RS 351.11) règlent les questions qui ne sont pas régies, explicitement ou implicitement, par la CEExtr (ATF 130 II 337 consid. 1; 128 II 355 consid. 1 et la jurisprudence citée). Le droit interne s'applique en outre lorsqu'il est plus favorable à l'octroi de l'extradition que le droit international (principe « de faveur »; ATF 142 IV 250 consid. 3; 140 IV 123 consid. 2; 137 IV 33 consid. 2.2.2; 136 IV 82 consid. 3.1). Le respect des droits fondamentaux est réservé (ATF 135 IV 212 consid. 2.3; 123 II 595 consid. 7c; TPF 2008 24 consid. 1.1).

3. La décision par laquelle l'OFJ accorde l'extradition (art. 55 al. 1 EIMP) ou son extension (art. 39 EIMP) peut faire l'objet d'un recours auprès de la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral (art. 55 al. 3 et 25 al. 1 EIMP). Étant donné son statut de personne extradée, le recourant a la qualité pour recourir contre la décision d’extension de l’extradition de l’OFJ.

4. Le délai de recours contre la décision d’extension de l’extradition est de 30 jours dès la communication écrite de celle-ci (v. art. 21 al. 1 et 50 al. 1 de la loi fédérale sur la procédure administrative du 20 décembre 1968 [PA; RS 172.021], applicable par renvoi de l'art. 39 al. 2 let. b de la loi fédérale sur l'organisation des autorités pénales de la Confédération du 19 mars 2010 [LOAP; RS 173.71]). En l'occurrence, ce délai a été respecté.

5.

5.1 À teneur de l’art. 52 PA (applicable par renvoi de l’art. 30 al. 2 let. b LOAP), le mémoire de recours indique les conclusions, motifs et moyens de preuve et porte la signature du recourant ou de son mandataire; celui-ci y joint l’expédition de la décision attaquée et les pièces invoquées comme moyens de preuve, lorsqu’elles se trouvent en ses mains (al. 1). Lorsque le recours ne satisfait pas à ces exigences, ou si les conclusions ou les motifs du recourant n'ont pas la clarté nécessaire, sans que le recours soit mani­festement irrecevable, l'autorité de recours impartit au recourant un court délai supplémentaire pour régulariser le recours (al. 2).

5.2

5.2.1 Aux termes de l'art. 80i EIMP, le recours peut notamment être formé pour violation du droit fédéral, y compris l'excès ou l'abus du pouvoir d'appré­ciation (al. 1 let. a). Bien que cela ne ressorte pas de la disposition précitée, la Cour de céans examine également l'opportunité de la décision querellée en application de l'art. 39 al. 2 let. b LOAP en lien avec l'art. 37 al. 2 let. a LOAP et art. 49 let. c PA (v. arrêt du Tribunal pénal fédéral RR.2010.2 du 5 février 2010 consid. 3 et références citées). Le contrôle étendu à l’oppor­tunité est toutefois exclu lorsque le traité impose à la Suisse l’obligation d’accorder sa coopération dès le moment où les conditions prévues par un traité, comme la CEExtr, sont remplies (v. arrêt du Tribunal pénal fédéral RR.2013.175+RP.2013.35 du 23 octobre 2013 consid. 8; Zimmermann, La coopération judiciaire internationale en matière pénale, 5e éd. 2019, n° 519).

5.2.2 En application du principe de célérité, qui tient une place toute particulière dans le domaine de l’entraide judiciaire internationale en matière pénale (v. art. 17a EIMP), la Cour de céans peut valablement s’attendre à ce qu’une partie qui décide de contester une décision ou une ordonnance par-devant elle soit en mesure de déposer, dès le début, un acte de recours suffisamment motivé.

5.2.3 Pour satisfaire à l’exigence de motivation, l’acte de recours doit indiquer précisément les raisons pour lesquelles le recourant estime que la décision attaquée viole le droit. Il n’est pas indispensable que les dispositions légales – le numéro des articles de loi – soient expressément désignées puisqu’il suffit qu’à la lecture de son exposé, on comprenne clairement quelles règles juridiques auraient été, selon le recourant, transgressées. Il appartient dès lors à ce dernier de discuter, au moins brièvement les considérants de la décision litigieuse (consid. 2 non publié de l’ATF 140 III 86; 140 III 115 consid. 2; 134 II 244 consid. 2.1). En particulier, la motivation doit se rapporter à l’objet du litige tel qu’il est circonscrit par la décision attaquée (ATF 133 IV 119 consid. 6.4; arrêt du Tribunal fédéral 1B_586/2019 du 18 décembre 2019 consid. 3).

5.2.4 En l’occurrence, la Cour des plaintes constante, d’une part, que ni les divers courriers du recourant, ni l’acte dans lequel Me Ohayon a déclaré être mandaté afin de former recours contre la décision de l’OFJ du 23 avril 2019, ne contiennent la moindre motivation et, d’autre part, que nonobstant le délai octroyé à Me Ohayon pour se déterminer, aucune réponse ou requête de prolongation de délai n’est, à ce jour, parvenue à la Cour de céans.

5.3 Au vu des éléments qui précèdent, il s’ensuit que le recours est irrecevable.

6. En règle générale, les frais de procédure comprenant l'émolument d'arrêté, les émoluments de chancellerie et les débours sont mis à la charge de la partie qui succombe (art. 63 al. 1 PA); la partie dont le recours est irrecevable étant également considérée comme ayant succombé. Le montant de l'émo­lument est calculé en fonction de l'ampleur et de la difficulté de la cause, de la façon de procéder des parties, de leur situation financière et des frais de chancellerie (art. 73 al. 2 LOAP). Le recourant supportera ainsi les frais du présent arrêt, lesquels sont fixés à CHF 500.-- (v. art. 8 al. 3 du règlement du Tribunal pénal fédéral sur les frais, émoluments, dépens et indemnités de la procédure pénale fédérale du 31 août 2010 [RFPPF; RS 173.713.162] et art. 63 al. 5 PA).

Par ces motifs, la Cour des plaintes prononce:

1. Le recours est irrecevable.

2. Un émolument de CHF 500.-- est mis à la charge du recourant.

Bellinzone, le 10 mars 2020

Au nom de la Cour des plaintes

du Tribunal pénal fédéral

Le président: Le greffier:

Distribution

- Me Philippe Ohayon, France (notification selon la Convention européenne sur la notification à l’étranger des documents en matière administrative, par l’entremise de l’autorité centrale française)

- Office fédéral de la justice, Unité extraditions

Indication des voies de recours

Le recours contre une décision en matière d’entraide pénale internationale doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 10 jours qui suivent la notification de l’expédition complète (art. 100 al. 1 et 2 let. b LTF).

Le recours n’est recevable contre une décision rendue en matière d’entraide pénale internationale que s’il a pour objet une extradition, une saisie, le transfert d’objets ou de valeurs ou la transmission de renseignements concernant le domaine secret et s’il concerne un cas particulièrement important (art. 84 al. 1 LTF). Un cas est particulièrement important notamment lorsqu’il y a des raisons de supposer que la procédure à l’étranger viole des principes fondamentaux ou comporte d’autres vices graves (art. 84 al. 2 LTF).
Information de décision   •   DEFRITEN
Document : RR.2019.352
Date : 10 mars 2020
Publié : 23 mars 2020
Source : Tribunal pénal fédéral
Statut : Non publié
Domaine : Cour des plaintes: entraide pénale
Objet : Extradition à la France. Extension de l'extradition (art. 39 et 55 EIMP).


Répertoire des lois
Décision: 26
EIMP: 17a  25  39  54  55  80i
LOAP: 30  37  39  73
LTF: 84  100
PA: 21  49  50  52  63
RFPPF: 8
Répertoire ATF
123-II-595 • 128-II-355 • 130-II-337 • 133-IV-119 • 134-II-244 • 135-IV-212 • 136-IV-82 • 137-IV-33 • 140-III-115 • 140-III-86 • 140-IV-123 • 142-IV-250
Weitere Urteile ab 2000
1B_586/2019 • L_312/56
Répertoire de mots-clés
Trié par fréquence ou alphabet
tribunal pénal fédéral • cour des plaintes • extension de l'extradition • office fédéral de la justice • convention européenne • moyen de preuve • acte de recours • loi fédérale sur l'organisation des autorités pénales de la confédération • loi fédérale sur la procédure administrative • ue • décision d'extension • communication • greffier • opportunité • viol • mandat d'arrêt • entrée en vigueur • tribunal fédéral • parlement européen • calcul • motif du recours • tribunal pénal • titre • membre d'une communauté religieuse • loi fédérale sur l'entraide internationale en matière pénale • norme • jour déterminant • frais • acquis de schengen • lettre • décision • fausse indication • étendue • confédération • envoi postal • suisse • information • autorisation ou approbation • condition • délai de recours • droit fondamental • provisoire • pouvoir d'appréciation • cas particulièrement important • objet du litige • conseil fédéral • situation financière • droit interne • champ d'application • détention provisoire • extradition simplifiée • qualité pour recourir • procédure pénale • violation du droit • vue • autorité judiciaire • autorité de recours • examinateur
... Ne pas tout montrer
BstGer Leitentscheide
TPF 2008 24
Décisions TPF
RP.2013.35 • RR.2008.296 • RR.2010.2 • RR.2019.352 • RR.2013.175
EU Verordnung
1986/2006