Tribunal administratif fédéral
Tribunale amministrativo federale
Tribunal administrativ federal
Cour V
E-4653/2010
Arrêt du 7 février 2013
Jenny de Coulon Scuntaro (présidente du collège),
Composition Claudia Cotting-Schalch, Christa Luterbacher, juges,
Astrid Dapples, greffière.
A._______,
Irak,
représenté par Philippe Stern,
Parties
Service d'Aide Juridique aux Exilé-e-s (SAJE),
(...),
recourant,
contre
Office fédéral des migrations (ODM),
Quellenweg 6, 3003 Berne,
autorité inférieure.
Exécution du renvoi (recours contre une décision en matière de réexamen) ;
Objet
décision de l'ODM du 4 juin 2010 / N (...).
Faits :
A.
A.a L'intéressé a déposé une demande d'asile en Suisse le 12 mars 2007. Au cours de ses auditions, l'intéressé a, en particulier, déclaré appartenir à la communauté kurde et être originaire de Dohuk (nord de l'Irak). A l'appui de sa demande, il a allégué avoir travaillé en qualité de peshmerga et, à ce titre, avoir assisté au mois de juillet 2006 à un attentat à la voiture piégée, au cours duquel nombre de ses camarades auraient été tués. Lui-même aurait été blessé à la colonne vertébrale. Après un congé maladie d'un mois, il aurait repris le travail mais, craignant d'être à nouveau la cible d'un attentat, il aurait finalement donné son congé à la fin de l'année 2006 et aurait quitté son pays.
A.b Par décision du 6 avril 2007, l'ODM n'est pas entré en matière sur la demande d'asile de l'intéressé, en application de l'art. 32 al. 2 let. a


SR 142.31 Loi du 26 juin 1998 sur l'asile (LAsi) LAsi Art. 3 Définition du terme de réfugié - 1 Sont des réfugiés les personnes qui, dans leur État d'origine ou dans le pays de leur dernière résidence, sont exposées à de sérieux préjudices ou craignent à juste titre de l'être en raison de leur race, de leur religion, de leur nationalité, de leur appartenance à un groupe social déterminé ou de leurs opinions politiques. |

SR 142.31 Loi du 26 juin 1998 sur l'asile (LAsi) LAsi Art. 7 Preuve de la qualité de réfugié - 1 Quiconque demande l'asile (requérant) doit prouver ou du moins rendre vraisemblable qu'il est un réfugié. |
L'intéressé n'a pas recouru contre cette décision.
A.c Par courrier du 18 octobre 2007, l'ODM a pris contact avec l'intéressé et lui a fait savoir qu'ensuite des changements intervenus dans les trois provinces du nord de l'Irak (Dohuk, Erbil et Souleymanieh), l'exécution du renvoi y était en principe raisonnablement exigible. Il a donc informé l'intéressé qu'il entendait lever l'admission provisoire prononcée en son encontre et l'a invité à lui faire part de ses éventuelles observations.
Par courrier daté du 31 octobre 2007, l'intéressé a considéré, qu'au vu de la fonction qu'il avait exercée avant son départ, il devrait craindre pour sa vie. Il a par ailleurs évoqué la situation générale régnant dans son pays et le fait que son village avait été récemment bombardé par les forces turques. En annexe à son courrier, il a joint sa carte d'identité, une carte de membre du PDK ainsi que sa carte militaire.
A.d Par décision du 4 décembre 2007, l'ODM a prononcé la levée de l'admission provisoire ordonnée le 6 avril 2007 et chargé l'autorité cantonale compétente de procéder à l'exécution du renvoi de l'intéressé.
A.e Par arrêt du 20 novembre 2009, le Tribunal administratif fédéral (ci-après : le Tribunal) a rejeté le recours formé le 4 janvier 2008 contre cette décision. Il a, en particulier, considéré que l'exécution du renvoi de l'intéressé était licite et raisonnablement exigible, la situation générale dans les trois provinces du nord de l'Irak ne s'étant pas notablement modifiée depuis l'arrêt de principe ATAF 2008/5 et l'intéressé étant un jeune célibataire sans charge de famille, disposant d'un réseau familial et social, et sans problèmes de santé allégués.
A.f En date du 10 décembre 2009, l'intéressé a été entendu par les autorités cantonales chargées de l'exécution de son renvoi, en vue de préparer son départ de Suisse. Il a alors déclaré ne pas pouvoir retourner chez lui, rencontrant des problèmes avec sa famille pour avoir changé de religion.
B.
Par acte daté du 19 mai 2010, l'intéressé a sollicité le réexamen de la décision prononcée le 4 décembre 2007, concluant à l'illicéité et à l'inexigibilité de l'exécution de son renvoi en raison de ses problèmes de santé. Il a mis en exergue la situation précaire de sa famille, rendant impossible le paiement des frais engendrés par une prise en charge médicale. L'intéressé a précisé qu'un renvoi dans sa province d'origine aurait des conséquences irréversibles sur sa santé. A l'appui de ses dires, il a produit un rapport médical, daté du 20 avril 2010, duquel il ressort qu'il présente un épisode dépressif sévère, sans symptômes psychotiques (F32.2), une anxiété généralisée (F41.1) ainsi qu'un état de stress post-traumatique (F43.1). Une prise en charge psychothérapeutique et médicamenteuse a été mise en place. L'intéressé conclu en outre à l'octroi de mesures provisionnelles lui permettant de résider en Suisse jusqu'à droit connu sur sa requête et à l'assistance judiciaire partielle
C.
Par décision du 4 juin 2010, notifiée le 7 juin suivant, l'ODM a rejeté cette demande de réexamen, constatant que l'apparition de troubles dépressifs chez des étrangers sous décision de renvoi n'était pas inhabituelle, que les autorités cantonales compétentes étaient en mesure de soutenir l'intéressé dans la préparation de son retour et que ce dernier pouvait solliciter une aide individuelle médicale au retour.
D.
Dans son recours interjeté le 28 juin 2010 (date du sceau postal) auprès du Tribunal, l'intéressé a conclu à l'annulation de la décision attaquée, au prononcé d'une admission provisoire pour illicéité et inexigibilité de l'exécution de son renvoi ainsi qu'à l'assistance judiciaire partielle et au prononcé de mesures provisionnelles l'autorisant à rester en Suisse jusqu'à l'issue de la procédure. Il a répété que l'exécution de son renvoi au nord de l'Irak devait être considérée comme inexigible en raison de l'aggravation de son état de santé et du fait qu'il ne pourrait pas y être pris en charge de manière adéquate par sa famille, elle-même sans ressources. Par ailleurs, la situation sécuritaire en Irak et le manque d'infrastructures médicales sont autant d'éléments parlant en faveur de la poursuite de son séjour en Suisse. Enfin, il a mis en exergue le risque d'un nouvel épisode dépressif sévère et de suicide en cas de renvoi.
E.
Par décision incidente du 1er septembre 2010, la juge chargée de l'instruction a accordé des mesures provisionnelles au recours permettant à l'intéressé de rester en Suisse jusqu'à droit connu sur l'issue de son recours. En outre, elle a renoncé au versement d'une avance de frais. Elle a également invité l'ODM à se déterminer sur le recours.
F.
L'ODM a proposé le rejet du recours dans sa réponse succincte du 6 septembre 2010, transmise par ordonnance du 9 septembre 2010 au recourant, pour observations. Par courrier du 22 septembre 2010, l'intéressé a maintenu ses conclusions.
G.
A la demande de la juge chargée de l'instruction, l'intéressé a, par courrier du 23 novembre 2012, produit un nouveau rapport médical daté de ce jour. Selon le diagnostic établi par un médecin de l'association Appartenances, l'intéressé souffre d'un épisode dépressif moyen sans syndrome somatique (F32.10) ainsi que d'un état de stress post-traumatique avec une évolution chronique (F43.1).
H.
Les autres faits de la cause seront examinés, si nécessaire, dans les considérants qui suivent.
Droit :
1.
1.1 Sous réserve des exceptions prévues à l'art. 32

SR 173.32 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal administratif fédéral (LTAF) LTAF Art. 32 Exceptions - 1 Le recours est irrecevable contre: |

SR 173.32 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal administratif fédéral (LTAF) LTAF Art. 31 Principe - Le Tribunal administratif fédéral connaît des recours contre les décisions au sens de l'art. 5 de la loi fédérale du 20 décembre 1968 sur la procédure administrative (PA)23. |

SR 172.021 Loi fédérale du 20 décembre 1968 sur la procédure administrative (PA) PA Art. 5 - 1 Sont considérées comme décisions les mesures prises par les autorités dans des cas d'espèce, fondées sur le droit public fédéral et ayant pour objet: |
|
1 | Sont considérées comme décisions les mesures prises par les autorités dans des cas d'espèce, fondées sur le droit public fédéral et ayant pour objet: |
a | de créer, de modifier ou d'annuler des droits ou des obligations; |
b | de constater l'existence, l'inexistence ou l'étendue de droits ou d'obligations; |
c | de rejeter ou de déclarer irrecevables des demandes tendant à créer, modifier, annuler ou constater des droits ou obligations. |
2 | Sont aussi considérées comme des décisions les mesures en matière d'exécution (art. 41, al. 1, let. a et b), les décisions incidentes (art. 45 et 46), les décisions sur opposition (art. 30, al. 2, let. b, et 74), les décisions sur recours (art. 61), les décisions prises en matière de révision (art. 68) et d'interprétation (art. 69).25 |
3 | Lorsqu'une autorité rejette ou invoque des prétentions à faire valoir par voie d'action, sa déclaration n'est pas considérée comme décision. |

SR 173.32 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal administratif fédéral (LTAF) LTAF Art. 33 Autorités précédentes - Le recours est recevable contre les décisions: |

SR 173.32 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal administratif fédéral (LTAF) LTAF Art. 34 |

SR 142.31 Loi du 26 juin 1998 sur l'asile (LAsi) LAsi Art. 105 Recours contre les décisions du SEM - Le recours contre les décisions du SEM est régi par la loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal administratif fédéral370. |
1.2 Le recourant a qualité pour recourir. Présenté dans la forme et les délais prescrits par la loi, le recours est recevable (48ss PA et 108 al. 1 LAsi).
2.
2.1 La personne concernée par une décision entrée en force peut en demander la reconsidération à l'autorité de première instance, en se prévalant d'un changement notable de circonstances ("demande d'adaptation") ; peu importe qu'elle ait fait ou non l'objet d'une décision sur recours. En outre, lorsqu'une décision n'a pas fait l'objet d'un recours ou que le recours interjeté contre celle-ci a été déclaré irrecevable, son destinataire peut, par une "demande de reconsidération qualifiée", en demander la modification auprès de l'autorité de première instance, en invoquant un des motifs de révision prévus à l'art. 66

SR 172.021 Loi fédérale du 20 décembre 1968 sur la procédure administrative (PA) PA Art. 66 - 1 L'autorité de recours procède, d'office ou à la demande d'une partie, à la révision de sa décision lorsqu'un crime ou un délit l'a influencée. |
|
1 | L'autorité de recours procède, d'office ou à la demande d'une partie, à la révision de sa décision lorsqu'un crime ou un délit l'a influencée. |
2 | Elle procède en outre, à la demande d'une partie, à la révision de sa décision: |
a | si la partie allègue des faits nouveaux importants ou produit de nouveaux moyens de preuve; |
b | si la partie prouve que l'autorité de recours n'a pas tenu compte de faits importants établis par pièces ou n'a pas statué sur certaines conclusions; |
c | si la partie prouve que l'autorité de recours a violé les art. 10, 59 ou 76 sur la récusation, les art. 26 à 28 sur le droit de consulter les pièces ou les art. 29 à 33 sur le droit d'être entendu, ou |
d | si la Cour européenne des droits de l'homme a constaté, dans un arrêt définitif, une violation de la Convention du 4 novembre 1950 de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (CEDH)119 ou de ses protocoles, ou a conclu le cas par un règlement amiable (art. 39 CEDH), pour autant qu'une indemnité ne soit pas de nature à remédier aux effets de la violation et que la révision soit nécessaire pour y remédier. |
3 | Les motifs mentionnés à l'al. 2, let. a à c, n'ouvrent pas la révision s'ils pouvaient être invoqués dans la procédure précédant la décision sur recours ou par la voie du recours contre cette décision. |
2.2 La demande d'adaptation vise à faire réexaminer par l'autorité de première instance sa décision parce que, depuis son prononcé (ou en cas de recours depuis le prononcé de l'arrêt sur recours), s'est créée une situation nouvelle dans les faits ou exceptionnellement sur le plan juridique, qui constitue une modification notable des circonstances (cf. Arrêts du Tribunal administratif fédéral [ATAF] 2010/27 consid. 2.1 p. 368 ; Arrêt du Tribunal fédéral [ATF] 109 Ib 253 et jurisp. cit. ; cf. également Pierre Tschannen/Ulrich Zimmerli, Allgemeines Verwaltungsrecht, 2e éd., Berne 2005, p. 275 ; Pierre Moor, Droit administratif, vol. II, 2e éd. Berne 2002, p.347 ; Alfred Kölz/Isabelle Häner, Verwaltungsverfahren und Verwaltungsrechtspflege des Bundes, 2e éd., Zurich 1998, p. 160). Conformément au principe de la bonne foi, le requérant ne peut pas, par le biais d'une telle demande, invoquer des faits qu'il aurait pu invoquer précédemment (cf. ATAF 2010/27 consid. 2.1 en particulier 2.1.2).
2.3 La demande d'adaptation doit être suffisamment motivée (cf. ATAF 2010/27 consid. 2.1.2), en ce sens que l'intéressé ne peut pas se contenter d'alléguer l'existence d'un changement de circonstances, mais doit expliquer, en substance, en quoi les faits dont il se prévaut représenteraient un changement notable des circonstances depuis la décision entrée en force; à défaut, l'autorité de première instance n'entre pas en matière et déclare la demande irrecevable.
3.
En l'occurrence, l'intéressé a demandé la reconsidération de la décision de l'ODM du 4 juin 2010 en tant qu'elle prononçait l'exécution de son renvoi au nord de l'Irak. Il a produit deux rapports médicaux datés des 20 avril 2010 et 23 novembre 2012 relatifs à son état de santé psychique, tendant à faire admettre le caractère inexigible de l'exécution de son renvoi. Dans la mesure où le recourant invoque une aggravation de son état de santé à l'aide de moyens de preuve postérieurs à l'arrêt du Tribunal du 20 novembre 2009, c'est à juste tire que l'ODM s'est saisi de cette demande de réexamen. Il s'agit, dès lors, d'examiner si ces documents peuvent mener à une appréciation différente de celle effectuée en procédure ordinaire, à savoir si l'état de santé actuel de l'intéressé peut conduire à considérer l'exécution de son renvoi au Kurdistan irakien désormais comme illicite ou inexigible.
4.
L'exécution du renvoi est ordonnée si elle est licite, raisonnablement exigible et possible (art. 44 al. 2

SR 142.31 Loi du 26 juin 1998 sur l'asile (LAsi) LAsi Art. 44 Renvoi et admission provisoire - Lorsqu'il rejette la demande d'asile ou qu'il refuse d'entrer en matière, le SEM prononce, en règle générale, le renvoi de Suisse et en ordonne l'exécution; il tient compte du principe de l'unité de la famille. Pour le surplus, la décision d'exécuter le renvoi est régie par les art. 83 et 84 LEI132. |

SR 142.20 Loi fédérale du 16 décembre 2005 sur les étrangers et l'intégration (LEI) LEI Art. 83 Décision d'admission provisoire - 1 Le SEM décide d'admettre provisoirement l'étranger si l'exécution du renvoi n'est pas possible, n'est pas licite ou ne peut être raisonnablement exigée.264 |
5.
5.1 L'exécution du renvoi est illicite lorsque le renvoi de l'étranger dans son Etat d'origine, dans son Etat de provenance ou dans un Etat tiers est contraire aux engagements de la Suisse relevant du droit international (cf. art. 83 al. 3

SR 142.20 Loi fédérale du 16 décembre 2005 sur les étrangers et l'intégration (LEI) LEI Art. 83 Décision d'admission provisoire - 1 Le SEM décide d'admettre provisoirement l'étranger si l'exécution du renvoi n'est pas possible, n'est pas licite ou ne peut être raisonnablement exigée.264 |

IR 0.101 Convention du 4 novembre 1950 de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (CEDH) CEDH Art. 3 Interdiction de la torture - Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. |
5.2 Il sied donc d'examiner particulièrement si l'art. 3

IR 0.101 Convention du 4 novembre 1950 de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (CEDH) CEDH Art. 3 Interdiction de la torture - Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. |
5.3 Si l'interdiction de la torture, des peines et traitements inhumains ou dégradants s'applique indépendamment de la reconnaissance de la qualité de réfugié, cela ne signifie pas encore qu'un renvoi ou une extradition serait prohibée par le seul fait que dans le pays concerné des violations de l'art. 3

IR 0.101 Convention du 4 novembre 1950 de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (CEDH) CEDH Art. 3 Interdiction de la torture - Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. |

IR 0.101 Convention du 4 novembre 1950 de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (CEDH) CEDH Art. 3 Interdiction de la torture - Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. |
5.4 En l'espèce, il faut admettre que l'état de santé du recourant n'est pas d'une gravité telle que l'exécution du renvoi puisse être considérée comme illicite au sens de l'art. 3

IR 0.101 Convention du 4 novembre 1950 de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (CEDH) CEDH Art. 3 Interdiction de la torture - Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. |

IR 0.101 Convention du 4 novembre 1950 de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (CEDH) CEDH Art. 3 Interdiction de la torture - Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. |
5.5 En outre, selon la jurisprudence de la CourEDH toujours, l'existence d'un risque de comportement auto-agressif de la personne dont l'éloignement a été ordonné n'astreint pas l'Etat contractant à s'abstenir d'exécuter la mesure envisagée s'il prend des mesures concrètes pour en prévenir la réalisation (cf. décision du 7 octobre 2004 de la CourEDH sur la recevabilité en l'affaire Sanda Dragan et autres c. Allemagne, requête no 33743/03, consid. 2a ; JICRA 2005 no 23 consid. 5.1 p. 212). Des antécédents de comportement suicidaire ou des idées suicidaires ne peuvent, en d'autres termes, motiver ordinairement une mesure de substitution pour illicéité du renvoi, aussi longtemps que l'ODM et les autorités cantonales compétentes parviennent à réduire fortement le risque de suicide, immanent à cette situation précaire, en mettant notamment en place des mesures réglementaires propres à assurer leur protection (cf. décision CourEDH, Adam Shafik Saied Al-Zawatia c. Suède, du 22 juin 2010, req. n° 50068/08,§ 57). Dans le cas présent, le recourant méconnaît le caractère strict de la jurisprudence, dès lors que les faits qu'il invoque ne révèlent pas l'existence d'un cas exceptionnel justifiant, sous l'angle de l'art. 3

IR 0.101 Convention du 4 novembre 1950 de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (CEDH) CEDH Art. 3 Interdiction de la torture - Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. |

SR 142.31 Loi du 26 juin 1998 sur l'asile (LAsi) LAsi Art. 92 Frais d'entrée et de départ - 1 La Confédération peut prendre à sa charge les frais d'entrée et de départ de réfugiés et de personnes à protéger. |

SR 142.312 Ordonnance 2 du 11 août 1999 sur l'asile relative au financement (Ordonnance 2 sur l'asile, OA 2) - Ordonnance 2 sur l'asile OA-2 Art. 58 Frais d'accompagnement - 1 La Confédération accorde un forfait de 200 francs par accompagnant, lorsqu'une escorte policière est nécessaire pour accompagner un étranger de son domicile à la représentation consulaire compétente la plus proche. |
5.6 Dans ces conditions, l'exécution du renvoi du recourant ne transgresse aucun engagement de la Suisse relevant du droit international, de sorte qu'elle demeure licite (art. 44 al. 2

SR 142.31 Loi du 26 juin 1998 sur l'asile (LAsi) LAsi Art. 44 Renvoi et admission provisoire - Lorsqu'il rejette la demande d'asile ou qu'il refuse d'entrer en matière, le SEM prononce, en règle générale, le renvoi de Suisse et en ordonne l'exécution; il tient compte du principe de l'unité de la famille. Pour le surplus, la décision d'exécuter le renvoi est régie par les art. 83 et 84 LEI132. |
6.
6.1 Selon l'art. 83 al. 4

SR 142.20 Loi fédérale du 16 décembre 2005 sur les étrangers et l'intégration (LEI) LEI Art. 83 Décision d'admission provisoire - 1 Le SEM décide d'admettre provisoirement l'étranger si l'exécution du renvoi n'est pas possible, n'est pas licite ou ne peut être raisonnablement exigée.264 |
6.2 S'agissant de la jurisprudence portant sur les trois provinces kurdes du nord de l'Irak (Dohuk, Erbil et Suleimaniya), le Tribunal a considéré que l'exécution du renvoi y était raisonnablement exigible, à condition que l'intéressé soit originaire de l'une de ces provinces ou qu'il y ait vécu pendant une longue période, et qu'il y dispose d'un réseau social (famille, parenté ou amis) ou de liens avec les partis dominants. Pour les femmes seules et les familles avec enfants, ainsi que pour les malades et les personnes âgées, l'exigibilité de l'exécution du renvoi ne doit toutefois être admise qu'avec une grande retenue (cf. ATAF 2008/5 consid. 7.5, spéc. 7.5.8 p. 72 s.).
6.3 En l'occurrence, le recourant est originaire de B._______, dans la province de Dohuk (nord de l'Irak) où il a toujours vécu et où il dispose encore d'un réseau familial (en particulier ses parents, trois frères et deux soeurs ; cf. pv. de l'audition sommaire p. 3, pv. de l'audition fédérale p. 4). Scolarisé, il a travaillé comme peshmerga, afin de contribuer aux besoins de la famille (cf. pv. de l'audition sommaire p. 5, pv. de l'audition fédérale p. 2). Il reste, par conséquent, à examiner si, comme le soutient l'intéressé, les motifs médicaux allégués peuvent conduire à la reconnaissance de l'inexigibilité de l'exécution de son renvoi.
6.4 S'agissant des personnes en traitement médical en Suisse, il convient de rappeler que l'exécution du renvoi ne devient inexigible, en cas de retour dans leur pays d'origine ou de provenance, que dans la mesure où elles pourraient ne plus recevoir les soins essentiels garantissant des conditions minimales d'existence ; par soins essentiels, il faut entendre les soins de médecine générale et d'urgence absolument nécessaires à la garantie de la dignité humaine. L'art. 83 al. 4

SR 142.20 Loi fédérale du 16 décembre 2005 sur les étrangers et l'intégration (LEI) LEI Art. 83 Décision d'admission provisoire - 1 Le SEM décide d'admettre provisoirement l'étranger si l'exécution du renvoi n'est pas possible, n'est pas licite ou ne peut être raisonnablement exigée.264 |
Ainsi, si les soins essentiels nécessaires peuvent être assurés dans le pays d'origine ou de provenance de l'étranger concerné, l'exécution du renvoi sera raisonnablement exigible. Elle ne le sera plus, au sens de l'art. 83 al. 4

SR 142.20 Loi fédérale du 16 décembre 2005 sur les étrangers et l'intégration (LEI) LEI Art. 83 Décision d'admission provisoire - 1 Le SEM décide d'admettre provisoirement l'étranger si l'exécution du renvoi n'est pas possible, n'est pas licite ou ne peut être raisonnablement exigée.264 |
6.5 Ceci dit, le Tribunal constate que les troubles diagnostiqués chez l'intéressé ne constituent pas des affections psychiques d'une gravité telle qu'un retour au Kurdistan irakien serait, de manière certaine, de nature à mettre concrètement et sérieusement en danger sa vie ou sa santé à brève échéance, respectivement que son état de santé nécessite impérativement des traitements médicaux ne pouvant être poursuivis qu'en Suisse, sous peine d'entraîner de telles conséquences. Cette appréciation se voit confirmée par la constatation que l'intéressé a eu des activités lucratives dans son pays d'accueil et qu'il se déplace en voiture. Le Tribunal retient par ailleurs que le trouble dépressif grave, diagnostiqué au mois d'avril 2010 a évolué favorablement. En effet, selon le rapport médical du 23 novembre 2012, l'intéressé ne présente aujourd'hui plus d'idéation suicidaire et il souffre dorénavant d'un trouble dépressif moyen.
Si l'intéressé devait néanmoins ressentir la nécessité de poursuivre son traitement médicamenteux, il faut préciser que le nord de l'Irak n'est pas dépourvu d'établissements de soins et de praticiens (cf. UK Border Office, Irak Country of Origin information (COI) report, 30 août 2011, ch. 28.23 - 28.27), même si ces derniers font face à une sollicitation accrue en raison des nombreuses années de privation. Or, dans le cas présent, le recourant n'allègue - ni a fortiori n'établit - qu'il ne bénéficierait pas des mêmes conditions prévues par les législations en matière sociale et sanitaire que l'ensemble des citoyens kurdes du nord de l'Irak, en premier lieu un accès non discriminatoire aux lieux de santé et aux médicaments de sorte que rien n'indique qu'il ne puisse pas bénéficier de son traitement médicamenteux dans sa région d'origine, si celui-ci devait être poursuivi.
6.6 Certes, le Tribunal est conscient des risques d'aggravation de l'état de santé psychique de l'intéressé en réaction à une nouvelle décision négative et au stress lié à son renvoi au Kurdistan irakien. Il appartient cependant à l'intéressé, avec l'aide d'un thérapeute, de mettre en place les conditions adéquates qui lui permettront d'appréhender son retour au pays. Cela étant, de tels risques ne permettent toutefois pas en soi de conclure à une mise en danger concrète au sens de l'art. 83 al. 4

SR 142.20 Loi fédérale du 16 décembre 2005 sur les étrangers et l'intégration (LEI) LEI Art. 83 Décision d'admission provisoire - 1 Le SEM décide d'admettre provisoirement l'étranger si l'exécution du renvoi n'est pas possible, n'est pas licite ou ne peut être raisonnablement exigée.264 |

SR 142.20 Loi fédérale du 16 décembre 2005 sur les étrangers et l'intégration (LEI) LEI Art. 83 Décision d'admission provisoire - 1 Le SEM décide d'admettre provisoirement l'étranger si l'exécution du renvoi n'est pas possible, n'est pas licite ou ne peut être raisonnablement exigée.264 |
6.7 Au vu de ce qui précède et en l'absence d'une modification notable des circonstances, l'analyse effectuée dans la décision rendue le 4 décembre 2007 conserve sa pertinence. Par conséquent, l'exécution du renvoi du recourant demeure raisonnablement exigible en l'état.
7.
Il s'ensuit que la décision attaquée se révèle conforme au droit et que le recours ne peut qu'être rejeté.
8.
Au vu de l'issue de la cause, il y aurait lieu de mettre les frais de procédure à la charge du recourant, conformément aux art. 63 al. 1

SR 172.021 Loi fédérale du 20 décembre 1968 sur la procédure administrative (PA) PA Art. 63 - 1 En règle générale, les frais de procédure comprenant l'émolument d'arrêté, les émoluments de chancellerie et les débours sont mis, dans le dispositif, à la charge de la partie qui succombe. Si celle-ci n'est déboutée que partiellement, ces frais sont réduits. À titre exceptionnel, ils peuvent être entièrement remis. |
|
1 | En règle générale, les frais de procédure comprenant l'émolument d'arrêté, les émoluments de chancellerie et les débours sont mis, dans le dispositif, à la charge de la partie qui succombe. Si celle-ci n'est déboutée que partiellement, ces frais sont réduits. À titre exceptionnel, ils peuvent être entièrement remis. |
2 | Aucun frais de procédure n'est mis à la charge des autorités inférieures, ni des autorités fédérales recourantes et déboutées; si l'autorité recourante qui succombe n'est pas une autorité fédérale, les frais de procédure sont mis à sa charge dans la mesure où le litige porte sur des intérêts pécuniaires de collectivités ou d'établissements autonomes. |
3 | Des frais de procédure ne peuvent être mis à la charge de la partie qui a gain de cause que si elle les a occasionnés en violant des règles de procédure. |
4 | L'autorité de recours, son président ou le juge instructeur perçoit du recourant une avance de frais équivalant aux frais de procédure présumés. Elle lui impartit pour le versement de cette créance un délai raisonnable en l'avertissant qu'à défaut de paiement elle n'entrera pas en matière. Si des motifs particuliers le justifient, elle peut renoncer à percevoir la totalité ou une partie de l'avance de frais.101 |
4bis | L'émolument d'arrêté est calculé en fonction de l'ampleur et de la difficulté de la cause, de la manière de procéder des parties et de leur situation financière. Son montant est fixé: |
a | entre 100 et 5000 francs dans les contestations non pécuniaires; |
b | entre 100 et 50 000 francs dans les autres contestations.102 |
5 | Le Conseil fédéral établit un tarif des émoluments.103 L'art. 16, al. 1, let. a, de la loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal administratif fédéral104 et l'art. 73 de la loi du 19 mars 2010 sur l'organisation des autorités pénales105 sont réservés.106 |
(dispositif page suivante)
Par ces motifs, le Tribunal administratif fédéral prononce :
1.
Le recours est rejeté.
2.
La demande d'assistance judiciaire partielle est admise.
3.
Il est statué sans frais.
4.
Le présent arrêt est adressé au recourant, à l'ODM et à l'autorité cantonale compétente.
La présidente du collège : La greffière :
Jenny de Coulon Scuntaro Astrid Dapples
Expédition :