Bundesverwaltungsgericht
Tribunal administratif fédéral
Tribunale amministrativo federale
Tribunal administrativ federal


Cour I

A-3334/2019, A-3382/2019

Arrêt du 3 novembre 2020

Claudia Pasqualetto Péquignot (présidente du collège),

Composition Maurizio Greppi, Jérôme Candrian, juges,

Manuel Chenal, greffier.

1. A._______,

(...),

2. Symbios Orthopédie SA,

Avenue des Sciences 1, 1400 Yverdon-les-Bains,
Parties
représentée par Maîtres Gregor Bühler et Aliénor De Dardel, Homburger AG,

Hardstrasse 201,

8005 Zürich,

recourantes,

contre

Swissmedic, Institut suisse des produits thérapeutiques, Hallerstrasse 7,

Case postale,

3000 Berne 9,

autorité inférieure.

Objet demande d'accès à des documents officiels au sens de la LTrans.

Faits :

A.
A._______(la demanderesse) a déposé le 19 décembre 2018 une demande d'accès adressée à l'Institut suisse des produits thérapeutiques Swissmedic (Swissmedic ou l'Institut) portant sur les "rapports d'incidents concernant la prothèse MaxiMOM (la prothèse) de Symbios Orthopédie SA (la fabricante) caviardés de leurs données personnelles". Par entretien téléphonique du 24 janvier 2019, la demanderesse a précisé sa demande à Swissmedic, en indiquant s'intéresser principalement aux rapports portant sur des cas de métallose.

B.
Le 31 janvier 2019, Swissmedic a consulté la fabricante, en lui soumettant les "rapports fabricants relatifs à un incident" (rapports fabricants) caviardés des données personnelles des tiers. Les rapports émanant des utilisateurs (rapports utilisateurs) n'ont pas fait l'objet de cette consultation. Par réponse du 12 février 2019, la fabricante s'est opposée à la divulgation des informations figurants au paragraphe 11 de chaque rapport fabricant en se prévalant du secret d'affaire.

C.
Par prise de position du 14 février 2019, Swissmedic a accordé partiellement l'accès aux rapports fabricants et les a transmis, dans cette mesure, à la demanderesse. Concrètement, il a transmis à cette dernière les rapports fabricants, après avoir caviardé non seulement des données personnelles de tiers mais également la date de survenance de l'incident, les pays dans lesquels des incidents similaires avaient eu lieu et dans lesquels la prothèse avait été distribuée. Par contre, l'accès aux rapports joints en annexes des rapports fabricants (rapports annexes) a été refusé, de même que l'accès aux rapports utilisateurs.

D.

D.a
Le 19 février 2019, la demanderesse a déposé une demande en médiation auprès du Préposé fédéral à la protection des données et à la transparence (Préposé).

D.b La séance de médiation s'est tenue le 12 mars 2019. A son issue, Swissmedic a communiqué qu'il envisageait, concernant les rapports fabricants, d'accorder l'accès aux noms des pays de distribution de la prothèse et de ceux où un incident s'est produit, ainsi qu'aux rapports annexes. Dans cette optique, il a informé qu'il consulterait au préalable la fabricante. Par contre, l'Institut a refusé d'accorder l'accès aux rapports utilisateurs.

D.c Par courrier du 13 mars 2019, Swissmedic a accordé à la demanderesse l'accès à la date de survenance de l'incident figurant dans les rapports fabricants et lui a transmis une version desdits formulaires où cette information n'était plus caviardée.

D.d Par courrier du 27 mars 2019 et courriel du 28 mars 2019, Swissmedic a informé le Préposé des résultats de la consultation de la fabricante. Celle-ci s'est opposée à la divulgation des rapports annexes ainsi qu'à la divulgation des noms des pays de distribution de la prothèse et de ceux où un incident s'est produit (informations figurant dans les rapports fabricants). Swissmedic a maintenu son intention d'accorder l'accès à ces informations.

D.e Les parties ne s'étant pas mises d'accord, le Préposé a prononcé une recommandation en date du 23 avril 2019 par laquelle il a, concernant les rapports fabricants, accordé l'accès aux noms des pays où la prothèse a été distribuée et à ceux où un incident s'est vérifié ainsi qu'aux rapports annexes. Il a également accordé l'accès aux rapports utilisateurs.

E.
Par requête du 8 mai 2019, la fabricante a requis de Swissmedic une décision.

F.
Par décision du 29 mai 2019, Swissmédic (l'autorité inférieure) a accordé l'accès aux noms des pays ayant connu des incidents similaires avec la prothèse ainsi que le nom des pays où elle a été distribuée ainsi que l'accès aux rapports annexes, sous réserve des données personnelles de tiers. L'autorité inférieure a en revanche refusé l'accès aux rapports utilisateurs.

G.
Par acte du 28 juin 2019, la demanderesse (la recourante 1) a recouru contre cette décision auprès du Tribunal administratif fédéral (le Tribunal ou le TAF), concluant à ce que l'accès aux rapports utilisateurs lui soit accordé (cause A-3334/2019).

H.
Par acte du 1er juillet 2019, la fabricante (la recourante 2) a recouru contre cette décision auprès du TAF, concluant principalement à ce que l'entier des informations demandées ne soient pas divulguées (cause A-3382/2019).

I.
Par ordonnance du 29 août 2019, le Tribunal a joint les causes A-3334/2019 et A-3382/2019, dorénavant traitées sous le numéro de procédure A-3334/2019.

J.
Par réponse du 27 septembre 2019, l'autorité inférieure a maintenu sa position et conclu au rejet des deux recours formés contre sa décision.

K.
Par courrier du 2 décembre 2019, la recourante 2 a fait parvenir sa prise de position sur le recours de la recourante 1 et conclu, à titre principal, à son rejet.

L.
Par courrier du 14 juillet 2020, l'autorité inférieure a fait parvenir une prise de position.

M.
Par courrier du 21 août 2020, la recourante 2 a déposé ses observations finales.

N.
Par courrier du 21 septembre 2020, la recourante 2 a fait parvenir une prise de position complémentaire.

O.
Les autres faits pertinents seront examinés dans les considérants en droit ci-dessous.

Droit :

1.

1.1 La procédure de recours devant le Tribunal administratif fédéral est régie par la procédure administrative fédérale (cf. ég. art. 16 al. 1 de la loi fédérale sur le principe de la transparence dans l'administration [LTrans; RS 152.3]), pour autant que la loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal administratif fédéral (LTAF, RS 173.32) n'en dispose pas autrement (art. 37 LTAF). Le Tribunal examine d'office sa compétence (art. 7 PA) et la recevabilité des recours qui lui sont soumis. Conformément à l'art. 31 LTAF, et sous réserve des exceptions matérielles prévues à l'art. 32 LTAF, le Tribunal administratif fédéral connaît des recours contre les décisions au sens de l'art. 5 PA prises par les autorités précédentes listées à l'art. 33 LTAF.

En l'espèce, la décision attaquée a été rendue par Swissmedic, établissement autonome (art. 33 let. e LTAF) chargé de surveiller la sécurité des produits thérapeutiques (cf. annexe 1 ch, B. II. 2.2.3 de l'ordonnance du 25 novembre 1998 sur l'organisation du gouvernement et de l'administration [OLOGA, RS 172.010.1] en relation avec l'art. 58 al. 8 de la loi fédérale sur les médicaments et les dispositifs médicaux [LPTh, RS 812.21]). Elle satisfait aux conditions prévalant à la reconnaissance d'une décision au sens de l'art. 5 al. 1 PA et ne tombe pas sous le coup des exceptions de l'art. 32 LTAF, de sorte que le Tribunal administratif fédéral est compétent pour connaître des recours.

1.2 Tant la recourante 1 que la recourante 2 sont destinataires de la décision attaquée qui fixe le principe et l'étendue du droit d'accès aux documents requis. Elles ont ainsi un intérêt digne de protection à sa modification au sens de l'art. 48 al. 1 PA.

1.3 Pour le surplus, déposés en temps utile (art. 50 al. 1 PA) et en la forme requise (art. 52 PA), les recours sont recevables.

2.

2.1 Le Tribunal constate les faits et applique le droit d'office, sans être lié par les motifs invoqués (cf. art. 62 al. 4 PA) ni par l'argumentation juridique développée dans la décision entreprise (Madeleine Camprubi, in: Auer/Müller/Schindler, VwVG Bundesgesetz über das Verwaltungsverfahren, 2e éd. 2019, art. 62, n°16). La procédure est régie par la maxime inquisitoire, ce dont il découle que le Tribunal définit les faits et apprécie les preuves d'office et librement (cf. art. 12 PA). Les parties doivent toutefois collaborer à l'établissement des faits (cf. art. 13 PA) et motiver leur recours (cf. art. 52 PA). En conséquence, l'autorité saisie se limite en principe aux griefs soulevés et n'examine les questions de droit non invoquées que dans la mesure où les arguments des parties ou le dossier l'y incitent (cf. ATF 122 V 157 consid. 1a ; ATAF 2012/23 consid. 4, ATAF 2007/27 consid 3.3 ; Alfred Kölz /Isabelle Häner/Martin Bertschi, Verwaltungsverfahren und Verwaltungsrechtspflege des Bundes, 3e éd., Zurich/Bâle/Genève 2013, ch. 1135).

2.2 Les recourantes peuvent invoquer la violation du droit fédéral, y compris l'excès ou l'abus du pouvoir d'appréciation (cf. art. 49 let. a PA), la consta-tation inexacte ou incomplète des faits pertinents (cf. art. 49 let. b PA) ou l'inopportunité (art. 49 let. c PA; cf. Ulrich Häfelin /Georg Müller /Felix Uhlmann, Allgemeines Verwaltungsrecht, 7e éd., Zurich/St-Gall 2016, ch. 1146 ss André Moser /Michael Beusch /Lorenz Kneubühler, Prozessieren vor dem Bundesverwaltungsgericht, 2e éd., Bâle 2013, ch. 2.149, p. 73).

3.

3.1 L'objet du litige consiste à déterminer si c'est conformément au droit que l'autorité inférieure a admis partiellement la demande d'accès de la recourante 1 fondée sur la LTrans. Ladite demande porte sur tous les rapports d'incidents annoncés à Swissmedic concernant les cas de métallose en lien avec la prothèse produite par la fabricante (la recourante 2), à l'exclusion des données personnelles de tiers. Les rapports d'incidents se composent des rapports émanant des utilisateurs (rapports utilisateurs; consid.3.2.1) et de ceux émanant de la fabricante (rapports fabricants; consid. 3.2.2) y compris les rapports annexés à ces derniers (rapports annexes; consid. 3.2.3). Swissmedic a autorisé l'accès aux rapports d'incidents lorsqu'ils émanaient de la fabricante et l'a refusé lorsqu'ils émanaient des utilisateurs.

3.2 Les rapports d'incidents sont les formulaires par lesquels les utilisateurs (soit tous ceux qui, dans le cadre de leur activité professionnelle, ont recours à un dispositif médical) et les fabricants annoncent à Swissmedic les incidents graves dont ils ont connaissance, conformément à leur obligation (art. 59 al. 1 et 3 LPTh et 15 de l'ordonnance sur les dispositifs médicaux [ODim, RS 812.213]) émanant du système de la matériovigilance qu'il convient très brièvement de préciser.

3.2.1 L'utilisation d'un dispositif médical (une prothèse de hanche en l'espèce) peut présenter des risques pour la santé. Afin de limiter ces derniers, le législateur a mis en place un système de contrôle qui s'exerce autant avant qu'après la mise sur le marché d'un tel produit. Avant de mettre un dispositif médical sur le marché pour la première fois, le fabricant ou l'importateur doit soumettre son produit à une procédure d'évaluation de conformité et, selon la classe à laquelle le produit appartient, réaliser différents essais cliniques afin de démontrer la sûreté et l'utilité du produit. Une fois mis sur le marché, la surveillance des dispositifs médicaux incombe à Swissmedic (art. 58 al. 3 LPTh). L'Institut peut notamment procéder à des contrôles aléatoires et à des inspections (art. 26 ss ODim). Ce sont principalement les spécialistes de la santé (les utilisateurs) qui, au contact direct des patients, sont susceptibles de détecter les problèmes liés à un dispositif médical en circulation; ils ont l'obligation d'annoncer à Swissmedic les incidents graves dont ils ont connaissance (art. 59 al. 3 LPTh et 15 al. 2 ODim). Concrètement, ils doivent faire parvenir à Swissmedic un rapport d'incident (rapport utilisateur) qui comprend notamment une brève description de l'incident, l'indication du dispositif médical concerné et certaines caractéristiques du patient (âge et poids notamment).

3.2.2 Les utilisateurs, ou à défaut Swissmedic, informent également immédiatement le fabricant. Ce dernier doit clarifier les causes de l'incident grave en lien avec son dispositif médical. Il prendra également, si nécessaire, des mesures pour éviter d'autres incidents ou limiter leurs répercussions. L'identification des causes d'un problème présuppose l'analyse du produit et de ses éventuels accessoires. Swissmedic surveille l'enquête du fabricant et prend le cas échéant des mesures supplémentaires. Swissmedic veille en particulier à ce que le fabricant analyse suffisamment les problèmes qui lui ont été signalés concernant son produit et à ce qu'il prenne éventuellement les mesures correctives nécessaires afin de garantir la sécurité du produit et l'adéquation avec l'état des connaissances techniques et scientifiques. Concrètement, les fabricants font faire parvenir à Swissmedic un rapport d'incident (rapport fabricant) qui comprend différentes rubriques, dont la principale se trouve au paragraphe 11 et est intitulée "Résultats de l'investigation finale du fabricant". Les rapports fabricants contiennent également l'indication des pays dans lesquels des incidents similaires en lien avec la prothèse se sont produits- chaque incident ayant sa propre référence, on peut aisément dénombrer le nombre d'incidents par pays - ainsi que ceux dans lesquels la prothèse a été distribuée.

3.2.3 La recourante 2 a parfois fait part des résultats de son investigation finale (consid.3.2.2 supra) en remplissant directement le paragraphe 11 du formulaire d'annonce; d'autres fois, elle a renvoyé à des rapports qu'elle a joints en annexe, de sorte que les résultats de ses analyses ne figuraient pas sur le formulaire prévu à cet effet mais sur un document annexe (les rapports annexes).

3.3 En date du 13 mars 2019, Swissmedic a transmis à la demanderesse (la recourante 1) les rapports fabricants caviardés non seulement des données personnelles concernant des tiers - données qui n'étaient pas visées par la demande d'accès - mais également de l'indication des pays dans lesquels la prothèse a été distribuée et dans lesquels des incidents similaires se sont produits. Dans la décision attaquée du 29 mai 2019, Swissmedic a toutefois accordé l'accès à ces informations. Swissmedic a également accordé l'accès aux rapports annexes mais l'a refusé concernant les rapports utilisateurs.

La recourante 1 conclut à ce que l'accès aux rapports utilisateurs lui soit également octroyé. La recourante 2 s'oppose quant à elle à la divulgation de l'indication des pays dans lesquels la prothèse a été distribuée et dans lesquels des incidents similaires se sont produits (informations figurant dans les rapports fabricants) ainsi qu'à la divulgation des rapports annexes.

A des fins de clarté, il convient encore de préciser que la recourante 1 a non seulement formulé sa demande d'accès en précisant d'emblée qu'elle ne requérait pas l'accès aux données personnelles de tiers, mais que de surcroît, elle n'a jamais revendiqué l'accès ni à la date de naissance ni aux poids des patients, y compris après que l'autorité inférieure lui ait transmis, en date du 13 mars 2019, les rapports fabricants caviardés notamment de ces informations-là. Il y a par conséquent lieu de retenir que la recourante 1 ne demande pas l'accès à ces informations, sans qu'il y ait lieu de se demander si celles-ci pourraient véritablement être rattachées au patient considéré, sachant que le nom de ce dernier serait en tout état de cause caviardés, au même titre que celui de l'établissement concerné. En d'autres termes, il n'y a pas lieu de se demander si ces informations sont des données personnelles au sens juridique du terme, ce qui présupposerait d'examiner dans quelle mesure et selon quelle vraisemblance elles permettraient d'identifier la personne qu'elles concernent. Concernant l'indication du sexe du patient, cette information a déjà été communiqué à la recourante 1.

4.

4.1 Concernant les rapports utilisateurs, l'autorité inférieure a justifié son refus d'y accorder l'accès en invoquant que la divulgation des informations s'y trouvant entraverait l'exécution de mesures concrètes en matière de matériovigilance (art. 7 al. 1 let. b LTrans), qu'elle mettrait en danger la santé publique (art. 7 al. 1 let. c LTrans) et qu'elle compromettrait les relations entre la Confédération et les cantons (art. 7 al. 1 let. e LTrans). Concernant les rapports annexes ainsi que les noms des pays dans lesquels la prothèse a été distribuée et dans lesquels des incidents similaires se sont produits, l'autorité inférieure a nié que les premiers contenaient des secrets de fabrication et que les seconds relevaient du secret commercial de la recourante 2, refusant ainsi dans les deux cas de faire application de la clause d'exception figurant à l'art. 7 al. 1 let. g LTrans. Elle a outre refusé de transposer aux rapports fabricants son raisonnement tenu en lien avec les rapports utilisateurs et selon lequel une divulgation des données risquerait d'entraver l'exécution de mesures concrètes.

Il convient d'examiner successivement ces différents points à l'aune des dispositions applicables.

4.2 Selon l'art. 7 al. 1 let. b LTrans, le droit d'accès est limité, différé ou refusé lorsque l'accès à un document officiel peut avoir pour effet d'entraver l'exécution de mesures concrètes prises par une autorité conformément à ses objectifs.

4.2.1 Cette disposition garantit que des informations puissent être gardées secrètes lorsqu'elles servent à la préparation de mesures concrètes d'une autorité, notamment en matière de mesures de surveillance, d'inspections des autorités fiscales ou de certaines campagnes d'information (ATF 144 II 77 consid. 4.3 ; Message LTrans, 1850 ch. 2.2.2.1.2). Selon la jurisprudence, les enquêtes, les inspections et le contrôle administratif visant à garantir que les citoyens respectent la loi sont protégés par cette disposition (arrêts du TAF A-4781/2019 précité consid. 5.4.1 et réf. cit.). Cette exception peut donc être invoquée lorsque, avec une grande probabilité, une mesure n'atteindrait plus ou pas entièrement son but si certaines informations qui préparent cette mesure étaient rendues accessibles (Message LTrans, 1850 ch. 2.2.2.1.2 ; pour un développement complet de la question, voir arrêt du TAF A-683/2016 du 20 octobre 2016 consid. 5.4). Le maintien du secret de l'information doit être vu comme la clé de la bonne exécution de la mesure (FF 2003 1850 ; TAF arrêt A-4571/2015 du 10 août 2016, c. 6.1 et les références citées).

4.2.2 L'autorité inférieure prétend que les utilisateurs n'annonceraient plus d'incidents à l'Institut si les rapports y relatif devaient être librement accessibles, et ce nonobstant l'obligation d'annonce à laquelle ils sont soumis. Ils craindraient en effet que les informations y figurant soient utilisées à leur encontre dans le cadre de procédures judiciaires. La menace pesant sur eux en cas de manquement avéré à leur obligation d'annonce, à savoir le prononcé d'une amende (art. 87 al. 1 let. c LPTh), ne serait pas suffisamment dissuasive pour l'emporter sur la crainte de suites judiciaires. Faute d'annonce, l'Institut cesserait d'être informé des incidents liés aux dispositifs médicaux et serait ainsi, de fait, privé de la possibilité de réagir par des mesures appropriées. L'Institut prétend en outre - contrairement à l'avis émis par le Préposé dans sa recommandation du 23 avril 2019 - que les analyses d'incidents représentent déjà des mesures concrètes au sens de l'art. 7 al. 1 let. b LTrans, soit parce que, en cas d'urgence, une mesure peut immédiatement être ordonnée, soit parce qu'elles constituent une étape en vue d'éventuelles mesures provisoires et/ou finales, lesquelles seront prises une fois qu'une tendance aura définitivement été détectée. L'autorité inférieure est en revanche d'avis que ces considérations ne sont pas transposables aux rapports émanant des fabricants, puisque ces derniers encourent, en cas de manquement à leur obligation d'annonce, des sanctions plus dissuasives que les utilisateurs, telles notamment le retrait du marché du produit considéré.

4.2.3 La recourante 1 conteste le raisonnement de l'autorité inférieure. Elle fait en particulier valoir que rien ne démontre que la confidentialité des données est nécessaire pour que les utilisateurs continuent à annoncer les incidents. Elle est d'avis qu'en tout état de cause la confidentialité est garantie par l'anonymisation des documents requis. Elle conteste enfin que des documents anonymisés puissent être utilisés en justice, pour des raisons de forme mais également parce qu'ils ne sont pas, sur le fond, à même de soutenir une action en responsabilité dès lors qu'ils ne permettent pas de savoir qui était l'intervenant médical.

4.2.4 La recourante 2 reprend pour l'essentiel l'argumentation de l'autorité inférieure concernant les rapports utilisateurs. Elle prétend que cette argumentation doit valoir mutatis mutandis pour les rapports fabricants, y compris les rapports annexes.

4.2.5 Le Tribunal de céans observe que la connaissance des incidents par les fabricants provient essentiellement des utilisateurs. Ce sont en effet ces derniers qui, au contact des patients, apprennent ou découvrent concrètement les incidents qu'ils ont alors l'obligation de rapporter. D'ailleurs, les informations qui se trouvent dans les rapports utilisateurs se retrouvent dans les rapports fabricants (y comprisles rapports annexes). Ces derniers comprennent au surplus fréquemment des données complémentaires résultant d'analyses plus approfondies, de sorte que, sous l'angle de la responsabilité médicale, ils sont par nature plus incriminants que les rapports utilisateurs. Par conséquent et en bonne logique, si l'on devait admettre l'argument selon lequel la divulgation des formulaires émanant des utilisateurs entrainerait chez ces derniers des réticences à rapporter les incidents auxquels ils sont confrontés par crainte de possibles suites judiciaires, alors il faudrait admettre qu'il en va de même en cas de divulgation des rapports fabricants (y compris les rapports annexes), puisque précisément ces rapports-ci comprennent au moins toutes les informations de ces formulaires-là, et même souvent des données supplémentaires plus à même d'alimenter une hypothétique action en justice. En tant qu'ils sont à la base du système d'annonce, les utilisateurs sont en mesure d'empêcher que les informations prétendument incriminantes remontent à l'Institut et aux fabricants, se retrouvent dans les rapports de ces derniers et puissent - dussent-ils en avoir la crainte - être divulguées. Ainsi, si l'on devait suivre le raisonnement de l'autorité inférieure et qu'il fallait rejeter l'accès aux rapports utilisateurs afin d'éviter que les incidents ne remontent plus à l'autorité de surveillance, alors il faudrait également, pour les mêmes raisons et ainsi que le soutient la recourante 2, rejeter l'accès aux rapports fabricants, y comprisles rapports annexes. Cette solution reviendrait à refuser systématiquement l'accès aux données obtenues en vertu du système d'annonce de la matériovigilance en lien avec les dispositifs médicaux, puisqu'un tel accès compromettrait, dans son principe même, le bon fonctionnement du système de surveillance du marché.

Or, cette solution ne paraît pas compatible avec le système institué par le législateur. Premièrement, il apparaît sur le principe même déjà extrêmement douteux que le Tribunal puisse, en recourant à une exception - soit l'art. 7 al. 1 let. b LTrans - soustraire un pan entier de la LPTh au principe de la transparence, sauf à annihiler le changement de paradigme voulu par le législateur faisant précisément de la transparence le principe et du secret l'exception. A cet égard, au moment d'adopter la LTrans et après avoir examiné les conséquences que la divulgation de certaines informations pouvait engendrer, le législateur a décidé de sortir du champ d'application de la loi certains textes légaux, ce qu'il n'a précisément pas fait concernant la LPTh. Il a en effet déjà été jugé, en lien avec les médicaments, que l'art. 62 LPTh ne présentait pas le degré de concrétisation suffisant pour constituer une disposition spéciale au sens de l'art. 4 LTrans, qu'en outre les règles sur le secret et l'accès à des documents préexistantes à la LTrans devaient être interprétées en tenant compte du changement de paradigme introduit par cette loi et qu'enfin l'art. 62 LPTh ne figurait pas parmi les exemples de dispositions citées par le Conseil fédéral comme tombant dans le champs d'application de l'art. 4 LTrans (arrêt du TAF A-3621/2014 du 2 septembre 2015), soit des considérations qui valent mutatis mutandis pour les dispositifs médicaux, ce que les parties ne contestent au demeurant pas. Enfin, l'art. 62 al.1 LPTh dispose que "l'autorité compétente est tenue de traiter confidentiellement les données collectées [...] pour le maintien du secret desquelles il existe un intérêt prépondérant digne d'être protégé". En adoptant cette disposition, le législateur a expressément prévu que la confidentialité des données devait être appréciée de cas en cas, rejetant ainsi une solution "en bloc" selon laquelle les informations récoltées devraient systématiquement être traitées confidentiellement. Certes, cette disposition est antérieure à la LTrans; néanmoins, en consacrant une pesée des intérêts antagonistes, le législateur arbitrait déjà le conflit mettant au prise l'intérêt à la confidentialité des données avec l'intérêt à leur divulgation.

4.2.6 En outre, il paraît hautement douteux que l'on puisse admettre de considérer que le traitement confidentiel, par l'autorité, de certaines données, soit nécessaire pour que les utilisateurs et fabricants continuent à transmettre ces dernières lorsque, comme en l'espèce, la loi les oblige purement et simplement à cette transmission. Cela reviendrait à reconnaitre, en fait, une condition à la transmission des données que le législateur n'a pas voulue. En adoptant le système de la matériovigilance, le législateur est parti du principe que les différents acteurs, moyennant la menace de certaines sanctions (cf. notamment ainsi que l'art. 87 al. 1 let c LPTh en lien avec l'art. 59 al. 1 et 3 LPTh ainsi que l'art. 66 LPTh en lien avec l'art. 27 ODim), se conformeraient à leurs obligations. S'il devait s'avérer que l'efficacité du système était trop faible, il appartiendrait alors au législateur d'y remédier, cas échéant en durcissant les sanctions à l'encontre des acteurs récalcitrants. Il lui serait également loisible de soustraire la LPTh du champ d'application de la LTrans. En revanche, il n'appartient pas au Tribunal d'interpréter extensivement l'exception figurant à l'art. 7 al. 1 let. b LTrans pour faire face à d'éventuelles lacunes dans le système répressif de la LPTh.

4.2.7 Quoiqu'il en soit, et par-delà ces objections de principe, on ne voit pas en quoi les utilisateurs devraient concrètement craindre de possibles actions judiciaires en cas de divulgation des informations demandées. Ni l'autorité inférieure ni la recourante 2 ne l'expliquent précisément. Tout d'abord, il faut rappeler que les documents seront caviardés de toutes données personnelles relatives aux patients, à l'établissement médical, au médecin et à toute autre personne, la demanderesse ayant d'emblée précisé qu'elle ne sollicitait pas l'accès à ces informations. Certes, l'indication de la date de l'implantation de la prothèse et celle de la survenance de l'incident peuvent permettre au patient concerné, qui connait évidemment déjà ces informations, de découvrir, parmi les différents formulaires, celui qui le concerne, selon un certain degré de vraisemblance. Par-delà la question de savoir si ces pièces seraient utilisables en justice et si leur degré de vraisemblance serait suffisant, on ne voit guère en quoi ces informations, en soi, seraient de nature à affaiblir la position juridique des utilisateurs. Concernant tout d'abord les informations consignées dans les rapports émanant de ces derniers (rapports utilisateurs), elles sont extrêmement sommaires et descriptives. Sous la rubrique "description de l'incident", les plus détaillés sont du type "Explantation d'une prothèse métal/métal posée en [année]. Patient dont le taux de chrome est [quantité] nmol/l et le taux de cobalt [quantité] nmol/l. Au CT scan de [année], il est mis en évidence une volumineuse zone de résorption osseuse autour de la cupule prothétique, une collection péri-articulaire et une probable bursite de l'ilio-psoas". Dans la plupart des formulaires, les descriptions sont plus sommaires encore et se limitent à indiquer qu'il s'agit d'une explantation d'une prothèse métal/métal et à rapporter le taux de chrome et de cobalt. Ainsi, on voit mal en quoi ces informations pourraient fonder ou même simplement étayer une action en responsabilité à l'encontre des médecins et autres intervenants. D'autre part, on voit mal que ces informations ne soient pas en tout état de cause déjà accessibles au patient dont la santé est concernée au premier chef, notamment par la consultation de son dossier médical.

Concernant les rapports fabricants (y compris les rapports annexes), les informations supplémentaires y figurant consistent essentiellement en une analyse approfondie de l'état du dispositif médical, soit la prothèse, de sorte qu'elles ne sont guère davantage susceptibles d'alimenter des griefs à l'encontre des utilisateurs. Ce serait tout au plus les fabricants qui encourraient un tel risque, puisque lesdites informations pourraient éventuellement être utilisées pour étayer la thèse d'un défaut du produit (au sens notamment de la loi fédérale sur la responsabilité du fait des produits, RS 221.112.944). Or, comme il l'a été rappelé ci-avant, les incidents sont d'abord connus des utilisateurs qui ont l'obligation de les rapporter à l'Institut. Par conséquent, l'éventuelle réticence des fabricants à collaborer n'empêchera pas l'Institut d'avoir connaissance des différents incidents et d'ordonner au fabricant récalcitrant différentes mesures, sous peine, outre l'amende, du retrait du dispositif du marché.

4.2.8 Enfin, l'argument selon lequel "un avocat pourrait [...] se servir d'anciennes annonces pour reprocher à un médecin de ne pas avoir toutes les dispositions nécessaires pour éviter la survenue d'un incident" n'est guère convaincant. Tout d'abord et comme déjà précisé ci-avant (consid.4.2.7 supra), les rapports en cause portent essentiellement sur le dispositif médical lui-même et ne sont par conséquent pas de nature à incriminer directement le médecin mais tout au plus le fabricant. Aussi, on voit mal qu'un patient puisse reprocher à un médecin de n'avoir pas pris en considération des annonces antérieures avant de lui avoir implanté le dispositif médical en cause. En effet, il n'apparaît pas que les médecins aient accès aux annonces faites par leurs confrères ou homologues, de sorte qu'on ne saurait leur reprocher de ne pas en avoir pris connaissance. Le règlement d'utilisation du registre suisse des implants SIRIS prévoit en particulier que "les médecins ont le droit de consulter le registre pour l'utilisation des données livrées par leurs soins [...]. L'accès reste limité aux données fournies par ses soins" (mis en évidence par le Tribunal; consultable sur https://www.siris-implant.ch/fr > Professionnels > accès aux données et évaluation > le règlement d'utilisation). Dans le cas où il s'agirait d'incidents que le médecin ciblé aurait lui-même annoncé par le passé et dont il devrait évidement avoir connaissance, il ne sera pas possible pour le patient de reconstituer "ce passé", puisque précisément les formulaires litigieux auront été caviardés de toutes les données personnelles, y compris du nom de l'intervenant médical. Ainsi, le justiciable ne pourra pas reprocher au médecin en cause de ne pas avoir tiré les leçons de sa propre expérience.

4.2.9 Il résulte de ce qui précède que la divulgation des données litigieuses n'est pas de nature à affaiblir sensiblement la position juridique des utilisateurs. On ne saurait pas conséquent admettre que l'admission de la demande de la recourante 1 suscite chez eux une réticence à annoncer les incidents dont ils auront connaissance.

4.3 L'autorité inférieure a également justifié son refus d'accorder l'accès en invoquant que la divulgation des informations demandées mettrait en danger la santé publique au sens de l'art. 7 la. 1 let. c LTrans et risquerait de compromettre les relations entre la Confédération et les cantons au sens de l'art. 7 al. 1 let. e LTrans. Dans les deux cas, l'argumentation de l'autorité inférieure se fonde sur la prémisse que la divulgation des formulaires émanant des utilisateurs entrainerait chez ces derniers des réticences à rapporter les incidents auxquels ils sont confrontés par crainte de possibles représailles judiciaires. L'Institut n'étant plus informé des incidents et ne pouvant plus réaliser sa tâche de surveillance du marché, la santé publique s'en trouverait compromise. Aussi, et dans la mesure où figurent, parmi les utilisateurs, des établissements cantonaux, les bonnes relations entre la Confédération et les cantons seraient menacées.

Il a déjà été expliqué ci-avant que la prémisse de la recourante 2 selon laquelle une divulgation des rapports utilisateurs entrainerait chez ces derniers des réticences à collaborer n'était pas fondée (consid 4.2.7 et 4.2.8 supra). Il y est intégralement renvoyé. L'hypothèse de départ étant invalidée, l'argumentaire de l'autorité inférieure doit être rejeté, que ce soit en lien avec l'art. 7 al. 1 let. c (santé publique) ou avec l'art. 7 al. 1 let d. LTrans (relations Confédération et cantons), sans qu'il y ait lieu d'analyser plus en avant ces questions.

5.

5.1 La recourante 2 se prévaut de l'art. 7 al. 1 let. h LTrans. Elle estime que les rapports annexes qu'elle a fournis à l'autorité dépassent ce que l'obligation d'annonce exige, respectivement qu'ils ont été transmis sur une base volontaire et en raison de la confiance légitime en ce qu'ils seraient traités confidentiellement. Elle précise que le formulaire à remplir électroniquement ne permet pas, à plus forte raison n'exige pas, que des photographies soient jointes alors que les rapports annexes contiennent précisément des photographies de prothèses retirées et des images radiographiques. Elle soutient également que le formulaire n'exige pas non plus que soient fournis les analyses radiographiques, le dosage sanguin de chrome/cobalt et les analyses histologiques. Elle prétend en outre que l'Institut lui a garanti le secret des données en lui adressant un aide-mémoire dans lequel figure un passage relatif au traitement confidentiel de ces dernières.

5.1.1 Selon l'art. 7 al. 1 let. h LTrans, le droit d'accès prévu à l'art. 6 est limité, différé ou refusé lorsque l'accès à un document officiel peut avoir pour effet de divulguer des informations fournies librement par un tiers à une autorité qui en a garanti le secret.

5.1.2 L'information doit avoir été donnée à l'autorité par un particulier et non pas par une autre autorité, ce qui se justifie dans la mesure où les autorités sont, contrairement aux privés, soumises au principe de la transparence (Message LTrans, 1853 ch. 2.2.2.1.8). Les informations sont fournies librement lorsqu'elles ont été produites sans contrainte, soit en l'absence d'obligation légale ou contractuelle. Lorsqu'une personne a l'obligation légale - une loi au sens matériel suffit - ou contractuelle de donner une information, elle ne peut en exiger le secret (arrêts du TAF A-2352/2017 du 11 décembre 2019 consid. 4.5.3 ; A-3667/2017 du 3 avril 2018 consid. 6.2 ; A-3291/2010 du 17 juin 2011 consid. 5.2). Lorsqu'une personne communique librement une information à l'administration, sans toutefois préciser que celle-là doit demeurer secrète, l'art. 7 al. 1 let. h LTrans ne s'applique pas non plus. L'assurance du secret doit donc, par principe, être demandée et donnée expressément ; les demandes ou les garanties implicites ne devraient donc être admises qu'avec une très grande retenue (ATAF 2011/52 consid. 6.3.3 ; Message LTrans, 1853 ch. 2.2.2.1.8 ; voir aussi Isabelle Häner, in : BSK DSG/BGÖ, art. 7 LTrans n° 48). L'absence de contrainte légale à fournir les informations et la garantie du secret doivent exister de manière cumulative (Message LTrans, 1853 ch. 2.2.2.1.8), faute de quoi, le tiers ne peut invoquer sa bonne foi (arrêt du TAF A-2352/2017 précité ibid. consid. 4.5.3).

5.1.3 L'autorité inférieure fait valoir que le contenu des rapports annexes fournis par la recourante 2 correspond non seulement à ce qu'écrivent les autres fabricants mais également aux éléments contenus dans le formulaire, soit un résumé des analyses faites et les conclusions tirées ainsi qu'une description d'éventuelles mesures prises.

5.1.4 Pour décider si la recourante 2 a transmis certaines informations sur une base volontaire, il convient de déterminer l'étendue de son obligation d'annonce. Contrairement à ce que semble penser la recourante 2 lorsqu'elle rapporte que le formulaire idoine ne permet pas de joindre des photographies, lesquelles auraient en conséquence été transmises sur une base volontaire, l'étendue et les modalités de l'obligation d'annonce ne se définissent pas selon le formulaire établi par l'autorité mais bien par la teneur des dispositions applicables au jour de la transmission et dont la teneur n'a pas substantiellement changé depuis. L'art. 59 al. 1 aLPTh en vigueur au moment où les documents ont été transmis disposait que "quiconque fabrique des produits thérapeutiques ou en distribue qui sont prêts à l'emploi doit mettre en place un système d'annonce. Il est tenu d'annoncer à l'institut tout effet indésirable ou incident qui est ou pourrait être imputable au produit thérapeutique lui-même, à son administration ou à un étiquetage ou à un mode d'emploi incorrects (let. a) ou qui pourrait mettre en péril ou altérer la santé du consommateur, du patient, de tiers ou des animaux traités (let. b)". L'al. 2 prévoyait quant à lui que "quiconque fabrique ou distribue des produits thérapeutiques est tenu en outre d'annoncer à l'institut tout défaut et tout fait ou évaluation susceptibles d'influer sur les bases de l'appréciation". L'art. 15 al. 1 aODim disposait que "si le responsable de la première mise sur le marché prend connaissance d'un incident grave en Suisse, il est tenu de le déclarer à l'institut. Les déclarations d'incidents graves dans un Etat contractant doivent être adressées à l'autorité compétente de l'Etat contractant concerné". Enfin, l'art. 26 aODim prévoyait que "afin de vérifier la conformité des dispositifs médicaux, les organes chargés du contrôle ultérieur peuvent, à titre gratuit exiger les preuves et les informations nécessaires (let a), prélever des échantillons (let b), faire procéder à des contrôles (let c) pénétrer, pendant les heures usuelles de travail, dans les locaux commerciaux des personnes tenues de renseigner ainsi que visiter leurs installations (let d), demander à voir leurs documents et exiger que ceux-ci ou des compléments d'information soient rédigés dans l'une des langues officielles ou en anglais (let e)".

Au regard desdites dispositions, lesquelles doivent notamment s'interpréter à l'aune de la sécurité thérapeutique, soit l'une des finalités de la LPTh (art. 1 LPTh), on peine à voir en quoi la recourante 2 aurait transmis des informations qui iraient par-delà son obligation légale d'annonce, étant précisé qu'il n'est plus contesté que les incidents rapportés dans les formulaires litigieux sont graves au sens des art. 59 LPTh et 3 al. 1 let. d ODim. Face à un incident de cette nature, les fabricants ont l'obligation de procéder à des analyses afin d'en déterminer les causes et d'évaluer, à l'aune des nouvelles données empiriques, si le dispositif en cause présente toujours un degré de sécurité suffisant (consid. 3.2.1 et 3.2.2 supra). L'Institut, au vu de ses tâches de contrôle, doit avoir accès à ces analyses et mesures. A cette fin, il dispose de certaines prérogatives et les fabricants ont l'obligation de collaborer (cf. notamment art. 26 ss ODim). Or, toutes les informations qui dépasseraient selon la recourante 2 son obligation d'annonce s'inscrivent à l'évidence dans l'analyse de l'incident considéré, respectivement dans le travail d'identification de ses causes ainsi que des risques que pourrait présenter le produit pour les patients. En particulier, la métallose se définit comme un "phénomène anormal d'usure d'un implant, accompagné de débris métalliques imprégnant les tissus alentours [...] qui peut être visible à la radiographie sous la forme d'une opacité floue anormale [... ] Un autre signe de métallose est un taux élevé de métal sanguin". Ainsi, il parait évident que le dosage sanguin cobalt / chrome dans le sang autant que les analyses histologiques, radiographique et les analyses de la prothèse retirée sont des éléments importants tant pour confirmer les premiers soupçons de métallose que pour en définir l'importance et en identifier les causes, à tout le moins en lien avec le dispositif médical considéré. La recourante 2 ne conteste d'ailleurs pas que l'Institut était en droit de requérir les informations litigieuses sur la base des art. 26ss ODim, mais elle argue qu'elle les lui a transmis spontanément à l'occasion de l'exécution de son obligation d'annonce et non pas sur requête de celui-ci. Cette distinction s'avère excessivement artificielle au regard du but de la loi - à savoir la santé publique - et du système légal rappelé ci-dessus en vertu duquel les fabricants, à la suite d'un incident grave, doivent procéder à certaines analyses et, cas échéant, prendre des mesures que l'Institut doit pouvoir contrôler. En outre, cette distinction aurait pour conséquence qu'un fabricant pourrait tenter de soustraire des informations à la LTrans en se précipitant de les transmettre à
l'Institut, respectivement de les lui faire parvenir avant même que celui-ci les ait requis.

5.1.5 Au vu de ce qui précède, on ne saurait admettre que la recourante 2 a transmis certaines informations sur une base volontaire. Par conséquent, une des deux conditions cumulatives à l'application de l'art. 7 al. 1 let. h LTrans faisant défaut, cette disposition ne saurait faire obstacle au droit d'accès exercé par la recourante 1. En outre, le Tribunal observe, sans qu'il soit nécessaire de trancher définitivement cette question, que la seconde condition ne semble pas davantage réalisée. En effet, l'aide-mémoire auquel se réfère la recourante 2 mentionne expressément les art. 61 à 64 LPTh. Or, l'art. 61 al. 1 LPTh, qui traite de la confidentialité des données, commande précisément d'opérer une pesée des intérêts au cas par cas (consid. 4.2.5 supra), de sorte qu'on voit mal que l'aide-mémoire invoqué puisse être assimilé à une garantie de confidentialité donnée par l'autorité inférieure, garantie qui eût été donnée par avance pour tous les cas futurs, sans examen de leur particularité comme le requiert pourtant clairement la loi.

6.

6.1 La recourante 2 se prévaut encore de l'art. 7 al. 1 let. g LTrans, invoquant encore que la divulgation des informations litigieuses révéleraient des secrets de fabrication de sa prothèse ainsi que sa stratégie de distribution.

6.1.1 La recourante 2 prétend d'abord que le nom des pays de distribution de la prothèse et que les pays où ces incidents sont survenus sont des informations qui relèvent de sa stratégie commerciale. En particulier, elle fait valoir que la stratégie de distribution d'un produit dépend de nombreux facteurs, dont les offres existantes, la demande, le niveau de vie sur place, le type et le niveau de hôpitaux. A l'objection de l'autorité inférieure selon laquelle la fabrication de la prothèse a cessé en 2008, la recourante 2 affirme que la stratégie de commercialisation des nouvelles prothèses suit celles des modèles précédents.

6.1.2 Le Tribunal observe que si les informations litigieuses portent sur les pays de distribution de la prothèse, elles ne permettent cependant pas de connaitre ni les partenaires contractuels de la recourante 2, soit principalement des hôpitaux, ni même, à l'intérieur des différents pays concernés, les régions où la prothèse a été concrètement distribuée. Or, si l'on suit la recourante 2 qui prétend que la stratégie de commercialisation d'un dispositif médical dépend de différents facteurs dont notamment "les offres existantes, la demande, le niveau de vie sur place, le type et le niveau des hôpitaux", il faut alors reconnaître que ces facteurs peuvent considérablement varier à l'intérieur même d'un pays, non seulement d'une région à l'autre mais aussi d'un hôpital (ou d'une clinique) à l'autre, voir même selon le caractère privé ou public de l'établissement considéré. Or, les données litigieuses ne donnent aucune indication à ce sujet. Par conséquent, on ne saurait considérer que les informations litigeuses permettent d'appréhender la stratégie de distribution de la recourante 2.

6.1.3 En outre, la prothèse n'est plus fabriquée depuis 2008 et, selon l'affirmation de l'autorité inférieure non contestée, n'est plus mis sur le marché depuis 2012. Si l'on peut aisément concevoir que les prothèses actuelles s'inscrivent dans la stratégie de commercialisation des précédentes, il paraît peu vraisemblable que dite stratégie n'ait pas, en huit années, subi des adaptations importantes.

6.1.4 Enfin, sur le site internet même de la recourante 2 figure une page avec l'option "trouver un chirurgien". Concrètement, il s'agit d'une liste de chirurgiens pouvant implanter les prothèses de la recourante 2, avec l'indication, pour chaque chirurgien, non seulement du pays où il se trouve mais également de l'hôpital pour lequel il travaille où avec lequel il collabore (https://symbios.ch/patients/trouver-un-chirurgien/, site consulté le 9 octobre 2020). A chaque fois il est indiqué si le chirurgien est compétent pour les implantations de prothèses de hanches, de genoux, où des deux. Même s'il fallait admettre que les chirurgiens en question ne sont pas tous disposés à implanter chacune des différentes prothèses produites par la recourante 2 mais seulement certaines d'entre elles (ce dont on peut douter, dans la mesure où le choix de la prothèse à implanter devrait plutôt dépendre d'une analyse de l'adéquation de chaque prothèse, selon ses caractéristiques, avec les particularités de la pathologie du patient considéré), de sorte que l'on ne connaitrait finalement pas précisément les pays de distribution d'une prothèse donnée, il n'en demeure pas moins que ces informations permettent d'appréhender beaucoup plus précisément la stratégie de distribution actuelle de la recourante 2 et, surtout, sont beaucoup plus utiles pour les concurrents qui ont ainsi accès à l'identité de certains partenaires contractuels de la recourante 2 qu'ils peuvent contacter afin de promouvoir leur produit. Le fait qu'il s'agisse d'autres prothèses que celles concernées par la présente procédure ne diminue en rien la portée de ce qui précède, au contraire. En effet, l'intérêt au maintien du secret est plus grand pour les prothèses actuellement commercialisées par rapport à celles qui ne le sont plus depuis longtemps. En outre, on voit assez mal que la fabricante considère des mêmes informations comme relevant du secret de commercialisation lorsqu'elles concernent une prothèse, et non plus lorsqu'elles en concernent une autre. Enfin, la recourante 2 a elle-même invoqué que la stratégie de distribution des nouveaux modèles suivait celle des anciens.

6.1.5 Au vu de ce qui précède, il faut nier que la divulgation des informations litigieuses puisse révéler la stratégie de distribution de la recourante 2 et aboutir à une distorsion de la concurrence.

6.2 La recourante 2 prétend également que certaines informations contenues dans les documents demandés contiennent des secrets de fabrications. Dans son courrier du 8 mai 2019 adressé à l'autorité inférieure, elle donnait comme exemple les matériaux composant la prothèse, les tailles des différentes pièces et les tolérances de fabrications. Dans sa décision du 29 mai 2019, l'autorité relevait que les matériaux et les tailles des pièces étaient des informations publiées par la recourante 2 elle-même et accessibles sur son site internet, alors que concernant la tolérance de fabrication, la recourante 2 n'avait pas expliqué en quoi les concurrents pourraient se servir de cette information. Dans son recours du 1er juillet 2019, la recourante 2 a prétendu que le lien internet référencé par l'autorité inférieure n'était pas valable et que nulle part sur son site internet se trouvait la description détaillée (schéma, matériaux, etc.) de ses produits; elle a encore fait valoir que les formulaires contenaient des informations sur la conception (photo, schéma, etc), ainsi que sur les résultats de l'utilisation du produit. Dans sa réponse du 27 septembre 2019, l'autorité inférieure, en plus de renvoyer à nouveau au l'adresse internet déjà référencée dans sa décision attaquée, a indiqué qu'une version papier de la page internet en question se trouvait en réalité déjà au dossier. La recourante 2 a alors admis la validité du lien internet et reconnu que les informations mentionnées par l'autorité inférieure s'y trouvaient bel et bien. Elle a toutefois argué que les informations étaient en partie différentes, invoquant en particulier que les photographies reproduites dans les rapports annexes montrent comment la cupule et la tête s'emboitent, la géométrie et l'emboitage des implants et la proportion de la cupule en relation avec la tête, mais aussi la méthode d'assemblage ou de connexion entre les pièces. Elle ajoute que les radiographiques montrent le placement de la prothèse dans le patient et ne correspondent pas à des informations disponibles sur internet.

6.2.1 L'on ne saurait suivre la recourante 2. Tout d'abord, parmi toutes les informations qu'elle mentionne, il paraît évident, sous l'angle du secret de fabrication, que les plus sensibles sont celles relatives aux matériaux, à la forme et à la taille des pièces, soit des informations que la recourante 2 a elle-même publiées, ainsi qu'elle a fini par l'admettre. D'ailleurs, c'est précisément en se fondant sur ces informations là - en plus de la tolérance de fabrication - que la recourante 2 se prévalait du secret de fabrication dans son écrit du 8 mai 2019 qu'elle a dû revoir une fois qu'il n'était plus possible de prétendre que ces données n'avaient pas déjà été publiées. En outre, on voit mal, en ce qui concerne tout ce qui touche à l'emboitement, que ces informations ne se déduisent pas déjà de la forme des pièces.

6.2.2 Par ailleurs, on observera que sur la version anglaise du site de la recourante 2 figurent des informations au moins autant détaillées que celles présentement litigieuses. On y voit notamment ce qui est présenté par la recourante 2 comme l'une de ses dernières avancées technologiques au niveau de l'articulation de la prothèse de la hanche, avec la cupule "Serenity", où l'emboitement des pièces (coupule, tête, tige fémorale) est non seulement très clair mais où encore son fonctionnement technique est expliqué et promu (https://www.symbiosorthopaedics.co.uk/ > surgeons > downloads > SERENITY® Dual Mobility Cup- Surgical Technique). Il en va de même pour la cupule "April" ou encore les tiges fémorales "Harmony", "Atlantis" et "SPS" (https://www.symbiosorthopaedics.co.uk/ > surgeons > downloads > choisir la rubrique correspondante). On y trouve au surplus des schémas, l'indication des matériaux utilisés et certaines spécificités techniques permettant au produit de gagner en performance. Le fait qu'il s'agisse d'autres prothèses que celle qui est concernée par la présente procédure ne diminue en rien la portée de ce qui précède, au contraire. En effet, l'intérêt au maintien du secret est de toute évidence plus grand pour les prothèses actuellement commercialisées par rapport à celles qui ne le sont plus depuis longtemps, étant rappelé que la production de la prothèse en cause a cessé en 2008. D'ailleurs la recourante 2 justifie l'intérêt au maintien du secret d'une prothèse qui n'est plus fabriquée au motif que les prothèses actuelles sont des évolutions des précédentes. En outre, on voit assez mal que la fabricante considère des mêmes informations comme relevant du secret de fabrication lorsqu'elles concernent une prothèse, et non plus lorsqu'elles en concernent une autre. Concernant les radiographies, on observera qu'aux pages internet référencées ci-avant figurent également des radiographies de la hanche réalisée avant et après la pose de prothèses, et ce en lien avec les modèles récents. Il y a même un document qui explique techniquement comment implanter une prothèse de la recourante 2 (https://www.symbiosorthopaedics.co.uk/ > surgeons > downloads > SERENITY® Dual Mobility Cup- Surgical Technique).

6.2.3 Au vu de ce qui précède, il faut nier que la divulgation des rapports annexes puisse révéler des secrets de fabrications de la recourante 2 et aboutir à une distorsion de la concurrence.

7.

7.1 La recourante 2 fait encore valoir que les formulaires en cause contiennent des données personnelles la concernant et dont la divulgation est de nature à nuire à sa réputation et d'entrainer, chez les consommateurs, une perte de confiance dans ses produits, cas échéant de se répercuter négativement sur ses ventes. En particulier, elle explique que l'existence d'annonces d'incidents relatives à un dispositif médical donné sera perçue par le public comme la marque d'un manque de sécurité du produit considéré. Elle invoque également que les documents sont rédigés en un jargon médical qui s'adresse à des professionnels de la santé et que, mis entre les mains de tout citoyen non initié, les termes utilisés peuvent être détournés de leur sens et mal interprétés, cas échéant être utilisés pour nuire à l'entreprise. La recourante 2 nie en outre que la publication des informations litigieuses réponde à un quelconque intérêt, faisant notamment valoir qu'il existe depuis 2012 un registre suisse des implants.

7.1.1 En vertu de l'art. 7 al. 2 LTrans, le droit d'accès peut être limité, différé ou refusé si l'accès à un document officiel peut porter atteinte à la sphère privée de tiers, à moins qu'un intérêt public à la transparence ne soit exceptionnellement jugé prépondérant.

7.1.2 L'art.13 al. 1 Cst. garantit de manière générale le droit à la sphère privée et à la sphère intime ; l'art. 13 al. 2 Cst. protège de manière spécifique le droit à l'autodétermination en matière de données personnelles. Ce droit garantit à chacun de pouvoir déterminer si et dans quel but des données qui le concernent peuvent être conservées et traitées par des tiers, publics ou privés (ATF 142 II 340 consid. 4.2, ATF 140 I 2 consid. 9.1). La notion du traitement de données inclut la divulgation, à savoir l'octroi de l'accès aux données personnelles, leur transmission ou leur publication (cf. ATF 142 II 340 consid. 4.2, arrêt du Tribunal fédéral 1C_74/2015 du 2 décembre 2015, consid. 4.1). La définition de données personnelles figure à l'art. 3 let. a de la loi fédérale du 19 juin 1992 sur la protection des données (LPD, RS 235.1).

Afin de résoudre le conflit qui peut opposer l'intérêt à la protection de la sphère privée et l'intérêt à l'accès aux documents officiels, la LTrans consacre à son article 9 des règles de coordination entre elle-même et la LPD. D'après l'art. 9 al. 1 LTrans, les documents officiels contenant des données personnelles doivent être si possible rendus anonymes avant qu'ils ne soient consultés. Pour le cas où il n'est pas possible de rendre anonyme un document (cf. Message LTrans, FF 2003 1807ss, spéc. 1873 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_50/2015 du 5 février 2016 consid. 5.2.2 ; ATAF 2013/50 consid. 9.5 p. 791 s.), l'art. 19 LPD s'applique (cf. art. 9 al. 2 LTrans). L'art. 19 al.1bis LPD consacre lui aussi une norme de coordination sur l'accès à des documents officiels contenant des données personnelles (cf. arrêt du TAF A-6/2015 du 26 juillet 2017 consid. 4.5.2.2, Message LTrans, FF 2003 1807ss, spéc. 1873 ; David Rosenthal/Yvonne Jöhri, Handkommentar zum Datenschutzgesetz, Zurich, Bâle, Genève, 2008, ad art. 19 N 31) et fixe les conditions auxquelles les organes fédéraux peuvent communiquer des données personnelles en vertu de la LTrans.

Ainsi, l'art. 9 al. 2 LTrans en relation avec l'art. 19 al. 1bis LPD, commande de déterminer au cas par cas, après évaluation minutieuse des intérêts en présence, le type de données pouvant être publiées. Lors de la pondération de ces intérêts privés, il faut en particulier tenir compte du genre des données visées, du rôle et de la position de la personne concernée, et de la gravité des conséquences que la divulgation entraînerait pour elle (cf. ATF 142 II 340 consid. 4.4). Le besoin de protection relatif aux données personnelles est naturellement moins important s'agissant des personnes morales que des personnes physiques (arrêt du TAF A-7874/2015 du 15 juin 2016, consid. 9.6.2).

7.1.3 En l'espèce, la demande d'accès porte sur un produit identifié comme fabriqué par la recourante 2, de sorte qu'une anonymisation des données personnelles la concernant - à l'inverse des données personnelles concernant des tiers - n'est pas possible. Il y a par conséquent lieu d'opérer une pesée des intérêts en présence afin de déterminer si les données en cause peuvent être divulguées.

7.1.4 Le Tribunal observe d'abord que les données dont la consultation est demandée ne concernent pas une personne physique mais une personne morale. Il ne s'agit pas de données sensibles au sens de l'art. 3 let. c LPD, ainsi que le seraient par exemple des données portant sur des activités politiques ou sur l'existence de sanctions administratives ou pénales.

7.1.5 Ensuite, une éventuelle atteinte à la réputation de la recourante 2 résulterait de discussions et de critiques portant soit sur les qualités techniques du dispositif médical considéré, soit sur l'évaluation de sa réaction à la suite d'incidents qui lui auraient été rapportés. Il s'agit là de discussions et de critiques qu'une entreprise qui met sur le marché des produits qui concernent directement la santé des consommateurs doit assumer dans un régime démocratique.

7.1.6 Enfin, les éventuels effets d'une atteinte à la réputation de la fabricante - qui paraissent très hypothétiques à ce stade - doivent être relativisés. En effet, il ne s'agit pas d'un produit ordinaire qui se trouve en libre accès. Lorsqu'un patient se trouve confronté à des problèmes de hanche, il consultera un spécialiste qui aura tâche de le renseigner. Celui-ci évoquera les risques des différents dispositifs médicaux envisagés, leurs avantages et leurs inconvénients selon l'état des connaissances actuelles. Or, on voit assez mal que l'avis du spécialiste ne soit pas, à tout le moins dans la grande majorité des cas, prépondérant, reléguant au second plan ce qui aurait éventuellement pu se dire dans les médias et qui ne serait scientifiquement pas justifié.

7.1.7 Concernant l'intérêt à la transparence, on ne saurait prétendre que l'accès aux documents litigieux ne réponde à aucun intérêt comme le laisse entendre la recourante 2. En effet, afin d'apprécier la mission et l'activité de l'administration (soit la finalité de la LTrans; cf. art. 1 LTrans), respectivement le travail effectué par l'Institut, l'accès aux documents sur la base desquels celui-ci a décidé de la nécessité ou de l'opportunité de prendre ou non des mesures, d'entreprendre des démarches complémentaires ou non ou encore d'exiger des examens plus approfondis, est évident. En outre, le domaine en cause est relatif à la santé publique, domaine sensible qui revêt un intérêt public important. Enfin, il n'est pas rare de trouver dans les médias des articles concernant les prothèses de hanche et les problèmes qui en découlent parfois, ce qui témoigne d'un intérêt certain du public pour cette problématique.

7.1.8 Au vu de ce qui précède, l'intérêt public à la transparence doit être jugé prépondérant.

8.

8.1 Il résulte de ce qui précède que c'est à tort que l'autorité inférieure a partiellement rejeté la demande d'accès de la requérante, laquelle doit être intégralement admise. Par conséquent, l'autorité inférieure est tenue, dès l'entrée en force du présent arrêt, d'accorder à la recourante 1 l'accès aux noms des pays ayant connu des incidents similaires avec la prothèse MaxiMOM, aux noms des pays où la prothèse MaxiMOM a été distribuée ainsi qu'aux rapports d'incidents concernant les cas de métallose impliquant la prothèse MaxiMOM de Symbios et émanant des utilisateurs (rapports utilisateurs), après caviardage des données personnelles relatives aux tiers.

8.2 Concrètement, le caviardage des rapports utilisateurs se fera de la manière expliquée ci-après en lien avec les versions françaises des formulaires et valant dans la même mesure pour les versions allemandes. L'autorité inférieure ayant, au cours du temps, modifié le formulaire type à remplir par les utilisateurs, il y a deux types de formulaires, soit le formulaire "MU510_00_002 FO" et le formulaire " MU101_30_002_FO (selon indication en pied de page desdits formulaires). Le caviardage à opérer est détaillé ci-après en fonction du formulaire considéré.

8.2.1 Relativement au formulaire "MU510_00_002 FO", le caviardage se fera de la manière suivante.

Concernant la rubrique "1. Auteur de l'annonce", tous les champs seront caviardés, à l'exclusion de celui dont la teneur est "correspondant de matériovigilance selon l'art. 15 al. 4 ODim, oui/non".

Concernant la rubrique "2. Description du dispositif impliqué", aucun champ ne sera caviardé.

Concernant la rubrique "3. Description de l'incident", les seuls champs "site de l'établissement de soins (en cas de regroupement hospitalier)" et "année de naissance du patient/utilisateur/tiers" seront caviardés.

Concernant la rubrique "Autres acteurs, Fabricant du dispositif médical, Fournisseur ", les seuls champs "personne de contact" et "E-Mail" seront caviardés.

8.2.2 Relativement au formulaire "MU101_30_002_FO", le caviardage se fera de la manière suivante.

Concernant la rubrique "1. Origine du rapport", tous les champs seront caviardés, à l'exclusion des champs "personne de contact selon l'art. 15 al. 4 ODim oui/non" et "date à laquelle l'annonceur a été informé de l'incident".

Concernant la rubrique "2. Description du dispositif impliqué", le seul champ qui sera caviardé est celui portant sur la "Personne de contact".

Concernant la rubrique "3. Description de l'incident", le seul champ "année de naissance du patient/utilisateur/tiers" sera caviardé.

8.3 Concernant le caviardage des rapports où sont consignés les analyses de la recourante 2 (rapports annexes), le caviardage se fera tel que l'autorité inférieure envisageait de le faire et que cela ressort des pièces n°151 à 183 du dossier de première instance, à ceci près que le poids, la taille et l'indice de masse corporelle (BMI) sont des données qui doivent également être caviardées (consid. 3.3 in fine supra).

9.

9.1 Les frais de procédure sont généralement mis à la charge de la partie qui succombe (cf. art. 63 al. 1 1ère phrase PA). Dans la mesure où la recourante 1 obtient gain de cause et où aucun frais de procédure n'est mis à la charge des autorités inférieures (cf. art. 63 al. 2 PA), les frais de procédure, arrêtés à Fr. 1'500.-, sont mis à la charge de la recourante 2 qui succombe sur le tout. L'avance de frais d'un montant de Fr. 1'500.- versée par la recourante 1 en date du 27 juillet 2019 lui sera restituée dans un délai de trente jours à compter de l'entrée en force du présent arrêt, à charge pour elle de communiquer au Tribunal un numéro de compte sur lequel ladite somme pourra lui être versée.

9.2 Le Tribunal peut allouer d'office ou sur requête à la partie ayant entièrement ou partiellement gain de cause une indemnité pour les frais indispensables et relativement élevés qui lui ont été occasionnés (art. 64 al. 1 PA et art. 7 ss
SR 173.320.2 Règlement du 21 février 2008 concernant les frais, dépens et indemnités fixés par le Tribunal administratif fédéral (FITAF)
FITAF Art. 7 Principe
1    La partie qui obtient gain de cause a droit aux dépens pour les frais nécessaires causés par le litige.
2    Lorsqu'une partie n'obtient que partiellement gain de cause, les dépens auxquels elle peut prétendre sont réduits en proportion.
3    Les autorités fédérales et, en règle générale, les autres autorités parties n'ont pas droit aux dépens.
4    Si les frais sont relativement peu élevés, le tribunal peut renoncer à allouer des dépens.
5    L'art. 6a s'applique par analogie.7
FITAF, RS 173.320.2]. En l'espèce, la recourante 1, qui a obtenu gain de cause, s'est défendue seule, sans faire appel à un mandataire, et il n'est pas démontré qu'elle ait subi de ce fait des frais considérables. En outre, elle n'a réclamé aucune indemnité. Partant, il ne sera pas alloué de dépens.

Par ces motifs, le Tribunal administratif fédéral prononce :

1.
Le recours du 28 juin 2019 de la recourante 1 est admis.

2.
Le recours du 1er juillet 2019 de la recourante 2 est rejeté.

3.
Le chiffre 3 du dispositif de la décision attaquée est modifié en ce sens que l'accès aux rapports d'incidents concernant les cas de métallose impliquant la prothèse MaxiMOM de Symbios et émanant des utilisateurs (rapports utilisateurs) est accordé au sens des considérants.

4.
Les frais de procédure de 1'500 francs sont mis à la charge de la recourante 2 et prélevés sur l'avance de frais versée le 15 juillet 2019.

5.
L'avance de frais de 1'500 francs versée par la recourante 1 le 27 juillet 2019 lui sera restituée dès l'entrée en force du présent arrêt.

6.
Le présent arrêt est adressé :

- à la recourante 1 (acte judiciaire)

- à la recourante 2 (acte judiciaire)

- à l'autorité inférieure (n° de réf.[...]; acte judiciaire)

- au Préposé fédéral à la protection des données et à la transparence (pour information ; courrier A)

L'indication des voies de droit se trouve à la page suivante.

La présidente du collège : Le greffier :

Claudia Pasqualetto Péquignot Manuel Chenal

Indication des voies de droit :

La présente décision peut être attaquée devant le Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par la voie du recours en matière de droit public, dans les trente jours qui suivent la notification (art. 82 ss
SR 173.320.2 Règlement du 21 février 2008 concernant les frais, dépens et indemnités fixés par le Tribunal administratif fédéral (FITAF)
FITAF Art. 7 Principe
1    La partie qui obtient gain de cause a droit aux dépens pour les frais nécessaires causés par le litige.
2    Lorsqu'une partie n'obtient que partiellement gain de cause, les dépens auxquels elle peut prétendre sont réduits en proportion.
3    Les autorités fédérales et, en règle générale, les autres autorités parties n'ont pas droit aux dépens.
4    Si les frais sont relativement peu élevés, le tribunal peut renoncer à allouer des dépens.
5    L'art. 6a s'applique par analogie.7
, 90
SR 173.320.2 Règlement du 21 février 2008 concernant les frais, dépens et indemnités fixés par le Tribunal administratif fédéral (FITAF)
FITAF Art. 7 Principe
1    La partie qui obtient gain de cause a droit aux dépens pour les frais nécessaires causés par le litige.
2    Lorsqu'une partie n'obtient que partiellement gain de cause, les dépens auxquels elle peut prétendre sont réduits en proportion.
3    Les autorités fédérales et, en règle générale, les autres autorités parties n'ont pas droit aux dépens.
4    Si les frais sont relativement peu élevés, le tribunal peut renoncer à allouer des dépens.
5    L'art. 6a s'applique par analogie.7
ss et 100 LTF). Ce délai est réputé observé si les mémoires sont remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 48 al. 1
SR 173.320.2 Règlement du 21 février 2008 concernant les frais, dépens et indemnités fixés par le Tribunal administratif fédéral (FITAF)
FITAF Art. 7 Principe
1    La partie qui obtient gain de cause a droit aux dépens pour les frais nécessaires causés par le litige.
2    Lorsqu'une partie n'obtient que partiellement gain de cause, les dépens auxquels elle peut prétendre sont réduits en proportion.
3    Les autorités fédérales et, en règle générale, les autres autorités parties n'ont pas droit aux dépens.
4    Si les frais sont relativement peu élevés, le tribunal peut renoncer à allouer des dépens.
5    L'art. 6a s'applique par analogie.7
LTF). Le mémoire doit être rédigé dans une langue officielle, indiquer les conclusions, les motifs et les moyens de preuve, et être signé. La décision attaquée et les moyens de preuve doivent être joints au mémoire, pour autant qu'ils soient en mains de la partie recourante (art. 42
SR 173.320.2 Règlement du 21 février 2008 concernant les frais, dépens et indemnités fixés par le Tribunal administratif fédéral (FITAF)
FITAF Art. 7 Principe
1    La partie qui obtient gain de cause a droit aux dépens pour les frais nécessaires causés par le litige.
2    Lorsqu'une partie n'obtient que partiellement gain de cause, les dépens auxquels elle peut prétendre sont réduits en proportion.
3    Les autorités fédérales et, en règle générale, les autres autorités parties n'ont pas droit aux dépens.
4    Si les frais sont relativement peu élevés, le tribunal peut renoncer à allouer des dépens.
5    L'art. 6a s'applique par analogie.7
LTF).

Expédition :
Information de décision   •   DEFRITEN
Document : A-3334/2019
Date : 03 novembre 2020
Publié : 19 novembre 2020
Source : Tribunal administratif fédéral
Statut : Non publié
Domaine : protection des données
Objet : demande d'accès à des documents officiels au sens de la LTrans


Répertoire des lois
Cst: 13
FITAF: 7
SR 173.320.2 Règlement du 21 février 2008 concernant les frais, dépens et indemnités fixés par le Tribunal administratif fédéral (FITAF)
FITAF Art. 7 Principe
1    La partie qui obtient gain de cause a droit aux dépens pour les frais nécessaires causés par le litige.
2    Lorsqu'une partie n'obtient que partiellement gain de cause, les dépens auxquels elle peut prétendre sont réduits en proportion.
3    Les autorités fédérales et, en règle générale, les autres autorités parties n'ont pas droit aux dépens.
4    Si les frais sont relativement peu élevés, le tribunal peut renoncer à allouer des dépens.
5    L'art. 6a s'applique par analogie.7
LPD: 3  9  19
LPTh: 1  58  59  61  62  64  66  87
LTAF: 31  32  33  37
LTF: 42  48  82  90
LTrans: 1  4  7  9  16
ODim: 15  26  26__  27
PA: 5  7  12  13  48  49  50  52  62  63  64
Répertoire ATF
122-V-157 • 140-I-2 • 142-II-340 • 144-II-77
Weitere Urteile ab 2000
1C_50/2015 • 1C_74/2015
Répertoire de mots-clés
Trié par fréquence ou alphabet
incident • fabricant • autorité inférieure • swissmedic • données personnelles • dispositif médical • obligation d'annoncer • tribunal administratif fédéral • vue • examinateur • internet • droit d'accès • communication • photographe • tribunal fédéral • d'office • champ d'application • avance de frais • intérêt public • acte judiciaire
... Les montrer tous
BVGE
2013/50 • 2012/23 • 2011/52 • 2007/27
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A-2352/2017 • A-3291/2010 • A-3334/2019 • A-3382/2019 • A-3621/2014 • A-3667/2017 • A-4571/2015 • A-4781/2019 • A-6/2015 • A-683/2016 • A-7874/2015
FF
2003/1850