Bundesverwaltungsgericht
Tribunal administratif fédéral
Tribunale amministrativo federale
Tribunal administrativ federal


Cour III
C-3164/2009
{T 0/2}

Arrêt du 3 février 2010

Composition
Bernard Vaudan (président du collège),
Marianne Teuscher, Andreas Trommer, juges,
Cédric Steffen, greffier.

Parties
A._______,
représenté par le Syndicat interprofessionnel de travailleuses et
travailleurs (SIT),
rue des Chaudronniers 16, case postale 3287, 1211 Genève 3,
recourant,

contre

Office fédéral des migrations (ODM),
Quellenweg 6, 3003 Berne,
autorité inférieure.

Objet
Exception aux mesures de limitation (réexamen).

Le Tribunal administratif fédéral considère en fait et en droit:

que par arrêt C-336/2006 du 2 novembre 2007, auquel il se réfère pour les faits antérieurs, le Tribunal administratif fédéral (ci-après: le TAF ou le Tribunal) a rejeté la demande d'exception aux mesures de limitation de A._______, ressortissant péruvien né le 13 avril 1972,
que le 5 mai [recte: juin] 2008, A._______ a adressé à l'ODM une demande de réexamen, fondée sur les liens qu'il entretenait avec son fils C._______ (20.03.1998), titulaire d'une autorisation de séjour à Genève,
qu'il a fait valoir que son fils avait rencontré de graves difficultés psychologiques ayant commandé la mise en place d'un encadrement spécialisé,
que l'état de santé de C._______, très sensible à tout changement, nécessitait le maintien du cadre familial actuel, dont A._______ était une composante essentielle au vu de son rôle stabilisateur, sans quoi l'on assisterait certainement à une régression importante du fonctionnement de l'enfant et à la réapparition de troubles psychiatriques chez ce dernier,
que le 4 juillet 2008, le Service de protection des mineurs du canton de Genève (SPM) a établi un rapport d'évaluation sociale duquel il ressortait que l'intéressé était très investi dans la vie de son fils, qu'il avait construit un lien fort avec lui, ce qui avait contribué de manière indéniable aux progrès de C._______,
que le SPM a conclu que le départ du père mettrait en péril tous les progrès d'intégration et l'équilibre de C._______, de sorte qu'il était dans l'intérêt de l'enfant de maintenir et favoriser les relations personnelles entre le père et son fils,
que dans un second rapport du 10 septembre 2008, le SPM a estimé qu'il était dans le bien de l'enfant de ratifier la nouvelle convention passée entre les parents de C._______ portant sur l'attribution de l'autorité parentale conjointe sur leur fils,
que par ordonnance du 22 septembre 2008, le Tribunal tutélaire de la République et canton de Genève a attribué à B._______ et à A._______ l'autorité parentale conjointe sur C._______ et a ratifié la convention conclue le 1er juillet 2008,
que le 13 octobre 2008 est née à Genève E._______, de nationalité brésilienne, fille de D._______ (25.12.1978), que A._______ a reconnue le 18 mars 2009,
que par décision du 17 avril 2009, l'ODM n'est pas entré en matière sur la demande de réexamen de A._______, considérant que l'intéressé n'alléguait aucun changement notable de circonstances ni n'invoquait aucun fait ou moyen de preuve important qui n'était pas connu ou qui n'aurait pas pu être produit à l'époque,
que le 14 mai 2009, A._______ a recouru contre cette décision auprès du TAF, concluant à son annulation,
qu'il a soutenu qu'au vu des pièces produites (attestations de psychologues, enseignant, services médicaux pédagogiques et de la protection des mineurs), son départ de Suisse entraînerait des conséquences irrémédiables et dramatiques pour C._______, lequel comptait sur son soutien et sa présence,
que par ailleurs, il avait obtenu l'autorité parentale conjointe sur son fils depuis le 22 septembre 2008, fait supplémentaire propre à ouvrir la voie du réexamen,
qu'appelé à se prononcer sur le recours, l'ODM en a proposé le rejet par préavis du 10 juillet 2009,
que dans sa réplique du 18 août 2009, le recourant a relevé qu'il avait apporté, à l'appui de sa demande de reconsidération, des éléments nouveaux importants qui devaient amener l'ODM à réexaminer sa décision de refus d'exception aux mesures de limitation,
que par mémoire ampliatif du 12 octobre 2009, A._______ a insisté sur le fait que l'attribution de l'autorité parentale conjointe entraînait des obligations nouvelles de sa part, situation qui n'avait pas été examinée par l'ODM,
que, sous réserve des exceptions prévues à l'art. 32 de la loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal administratif fédéral (LTAF, RS 173.32), le TAF, en vertu de l'art. 31 LTAF, connaît des recours contre les décisions au sens de l'art. 5 de la loi fédérale du 20 décembre 1968 sur la procédure administrative (PA, RS 172.021) prises par les autorités mentionnées à l'art. 33 LTAF,
qu'en particulier, les décisions en matière de refus d'exception aux mesures de limitation prononcées par l'ODM - lequel constitue une unité de l'administration fédérale telle que définie à l'art. 33 let. d LTAF - sont susceptibles de recours au TAF, qui statue définitivement (art. 1 al. 2 LTAF en relation avec l'art. 83 let. c ch. 5 de la loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral [LTF, RS 173.110]),
qu'à moins que la LTAF n'en dispose autrement, la procédure devant le TAF est régie par la PA (cf. art. 37 LTAF),
que A._______ a qualité pour recourir (art. 48 al. 1 PA) et que son recours, présenté dans la forme et les délais prescrits par la loi, est recevable (art. 50 et 52 PA),
que la demande de réexamen (aussi appelée demande de nouvel examen ou de reconsidération) - définie comme étant une requête non soumise à des exigences de délai ou de forme, adressée à une autorité administrative en vue de la reconsidération d'une décision qu'elle a rendue et qui est entrée en force - n'est pas expressément prévue par la PA,
que la jurisprudence et la doctrine l'ont cependant déduite de l'art. 66 PA, qui prévoit le droit de demander la révision des décisions, et des art. 8 et 29 al. 2 de la Constitution fédérale du 18 avril 1999 (Cst, RS 101) (cf. arrêt du TAF C-5375/2008 du 10 mars 2009 consid. 3 et références citées),
que dans la mesure où la demande de réexamen est un moyen de droit extraordinaire, l'autorité administrative n'est tenue de s'en saisir qu'à certaines conditions: tel est le cas, selon la jurisprudence et la doctrine, lorsque le requérant invoque l'un des motifs de révision prévus par l'art. 66 PA ou lorsque les circonstances se sont modifiées dans une mesure notable depuis que la première décision a été rendue (cf. arrêt précité ibidem),
que selon la pratique en vigueur en matière de révision, applicable par analogie à l'institution du réexamen, les faits et moyens de preuve nouveaux au sens de l'art. 66 PA ne peuvent entraîner la révision (respectivement la reconsidération) d'une décision entrée en force que s'ils sont importants, c'est-à-dire de nature à influer - ensuite d'une appréciation juridique correcte - sur l'issue de la contestation,
que cela suppose, en d'autres termes, que les faits nouveaux soient décisifs et que les moyens de preuve offerts soient propres à les établir (cf. arrêt du TAF C-1645/2009 du 29 septembre 2009 consid. 2.2 et références citées),
que lorsque l'autorité de première instance n'est pas entrée en matière sur une demande de réexamen, le requérant peut seulement recourir en alléguant que l'autorité a nié à tort l'existence des conditions requises pour l'obliger à statuer au fond, et l'autorité de recours ne peut qu'inviter cette dernière à examiner la demande au fond, si elle admet le recours,
que les conclusions du recourant (soit "l'objet du litige" ou "Streitgegenstand") sont donc limitées par les questions tranchées dans le dispositif de la décision querellée (soit "l'objet de la contestation" ou "Anfechtungsgegenstand"),
que celles qui en sortent, en particulier les questions portant sur le fond de l'affaire, ne sont pas recevables (cf. ATF 135 II 38 consid. 1.2; arrêt précité consid. 2.3 et références citées),
qu'en l'espèce, A._______ a appuyé sa demande de réexamen, d'un côté, sur les liens étroits existant entre lui et son fils, attestés par différents professionnels de la santé et de l'enfance, ainsi que sur les conséquences qu'entraînerait son départ pour l'équilibre psychologique de C._______ et, de l'autre, par l'attribution de l'autorité parentale conjointe sur son enfant,
que suite à un examen prima facie, le Tribunal avait considéré, dans un premier temps, ne pas être en présence de motifs de réexamen (cf. décision incidente du 25 mai 2009), étant constaté que, par arrêt du 2 novembre 2007, il s'était déjà prononcé de façon circonstanciée sur les rapports entre le recourant et son fils,
qu'en outre, la fragilité psychologique de C._______ était connue du recourant depuis plusieurs années, de sorte que l'intéressé aurait dû être en mesure de s'en prévaloir dans le cadre de la procédure ordinaire,
qu'il résulte cependant d'une analyse plus approfondie du dossier que par ordonnance du Tribunal tutélaire du 22 septembre 2008, soit postérieurement à l'arrêt du TAF C-336/2006, l'autorité parentale conjointe a été attribuée au recourant et à la mère de C._______,
qu'il s'agit là d'un élément juridique nouveau qui modifie l'état de fait retenu à l'appui des décisions antérieures,
que le TAF relève également que, dans ses considérants, le Tribunal tutélaire s'est référé tant à la nouvelle convention du 1er juillet 2008 portant sur l'exercice des relations personnelles entre le recourant et C._______ qu'au rapport d'évaluation du SPM du 10 septembre 2008,
qu'il apparaît ainsi que pour tenir compte du bien de l'enfant, facilement perturbé par le changement, et pour éviter que les progrès acquis au cours des dernières années par le suivi thérapeutique et le placement en centres de jour ne soient galvaudés, il était important de consolider la relation entre le recourant et son fils,
que cette évaluation détaillée, émanant d'un service cantonal spécialisé, vient compléter une attestation de janvier 2008 et un rapport du 4 juillet 2008, qui soulignent l'importance du rôle joué par A._______ dans les progrès réalisés par son fils, dont l'équilibre demeure précaire,
qu'il doit encore être noté que ces différentes prises de position ont toutes été produites subséquemment à l'arrêt du TAF du 2 novembre 2007,
qu'il en découle que l'attribution de l'autorité parentale conjointe au recourant, de par les raisons qui ont conduit les autorités tutélaires à préconiser cette solution, est un fait nouveau susceptible d'avoir une incidence sur l'issue de la contestation,
qu'en conséquence, l'ODM aurait dû entrer en matière sur la demande de réexamen du recourant du 5 juin 2008,
que cela ne signifie pas encore que celle-ci doivent être automatiquement admise,
qu'en effet, l'ODM devra déterminer si le fait nouveau invoqué est à même de modifier sa décision de refus d'exception aux mesures de limitation,
que cela impliquera notamment pour l'ODM de connaître le contenu exact de la convention du 1er juillet 2008, de savoir si une garde partagée a été instaurée, d'examiner si les relations entre le père et le fils sont effectivement vécues et d'évaluer, dans une pesée des intérêts en présence, l'influence qu'un départ du recourant pourrait avoir sur l'état de santé de C._______, afin de déterminer si l'on se trouve en présence d'un cas personnel d'extrême gravité,
qu'au vu de ce qui précède, le recours est admis, la décision attaquée annulée et l'ODM invité à entrer en matière sur la demande de réexamen du recourant,
qu'obtenant gain de cause, le recourant n'a pas à supporter de frais de procédure (art. 63 al. 1 PA a contrario et art. 63 al. 3 PA),
que, bien qu'elle succombe, aucun frais n'est mis à la charge de l'autorité inférieure (art. 63 al. 2 PA),
que le recourant a droit à des dépens (art. 64 al. 1 PA en relation avec l'art. 7
SR 173.320.2 Règlement du 21 février 2008 concernant les frais, dépens et indemnités fixés par le Tribunal administratif fédéral (FITAF)
FITAF Art. 7 Principe
1    La partie qui obtient gain de cause a droit aux dépens pour les frais nécessaires causés par le litige.
2    Lorsqu'une partie n'obtient que partiellement gain de cause, les dépens auxquels elle peut prétendre sont réduits en proportion.
3    Les autorités fédérales et, en règle générale, les autres autorités parties n'ont pas droit aux dépens.
4    Si les frais sont relativement peu élevés, le tribunal peut renoncer à allouer des dépens.
5    L'art. 6a s'applique par analogie.7
du règlement du 21 février 2008 concernant les frais, dépens et indemnités fixés par le Tribunal administratif fédéral [FITAF, RS 173.320.2]),
qu'au vu de l'ensemble des circonstances, de l'importance de l'affaire, de son degré de difficulté et du travail accompli par le SIT, le versement d'un montant de Fr. 700.-- (TVA comprise) apparaît comme équitable en la présente cause (cf. art. 8ss
SR 173.320.2 Règlement du 21 février 2008 concernant les frais, dépens et indemnités fixés par le Tribunal administratif fédéral (FITAF)
FITAF Art. 7 Principe
1    La partie qui obtient gain de cause a droit aux dépens pour les frais nécessaires causés par le litige.
2    Lorsqu'une partie n'obtient que partiellement gain de cause, les dépens auxquels elle peut prétendre sont réduits en proportion.
3    Les autorités fédérales et, en règle générale, les autres autorités parties n'ont pas droit aux dépens.
4    Si les frais sont relativement peu élevés, le tribunal peut renoncer à allouer des dépens.
5    L'art. 6a s'applique par analogie.7
FITAF).

(dispositif page suivante)

Par ces motifs, le Tribunal administratif fédéral prononce :

1.
Le recours est admis, dans le sens des considérants.

2.
Il n'est pas perçu de frais de procédure. La Caisse du Tribunal restituera au recourant l'avance de frais de Fr. 1'200.-- versée le 8 juin 2009.

3.
L'autorité intimée versera au recourant un montant de Fr. 700.-- à titre de dépens.

4.
Le présent arrêt est adressé :
au recourant (Recommandé; annexe: formulaire de remboursement)
à l'autorité inférieure, avec dossiers SYMIC 6006079.0 et dossier cantonal en retour,
en copie pour information à l'Office cantonal de la population, Genève.

Le président du collège : Le greffier :

Bernard Vaudan Cédric Steffen

Expédition :
Information de décision   •   DEFRITEN
Document : C-3164/2009
Date : 03 février 2010
Publié : 17 février 2010
Source : Tribunal administratif fédéral
Statut : Non publié
Domaine : Droit de cité et droit des étrangers
Objet : exception aux mesures de limitation (réexamen)


Répertoire des lois
Cst: 8  29
FITAF: 7 
SR 173.320.2 Règlement du 21 février 2008 concernant les frais, dépens et indemnités fixés par le Tribunal administratif fédéral (FITAF)
FITAF Art. 7 Principe
1    La partie qui obtient gain de cause a droit aux dépens pour les frais nécessaires causés par le litige.
2    Lorsqu'une partie n'obtient que partiellement gain de cause, les dépens auxquels elle peut prétendre sont réduits en proportion.
3    Les autorités fédérales et, en règle générale, les autres autorités parties n'ont pas droit aux dépens.
4    Si les frais sont relativement peu élevés, le tribunal peut renoncer à allouer des dépens.
5    L'art. 6a s'applique par analogie.7
8__
LTAF: 1  31  32  33  37
LTF: 83
PA: 5  48  50  52  63  64  66
Répertoire ATF
135-II-38
Répertoire de mots-clés
Trié par fréquence ou alphabet
autorité parentale conjointe • tribunal administratif fédéral • vue • moyen de preuve • autorité inférieure • relations personnelles • autorité administrative • calcul • biens de l'enfant • doctrine • examinateur • greffier • décision • office fédéral des migrations • constitution fédérale • autorité tutélaire • rapport entre • objet du litige • première instance • nouvel examen
... Les montrer tous
BVGer
C-1645/2009 • C-3164/2009 • C-336/2006 • C-5375/2008