S. 101 / Nr. 18 Familienrecht (f)

BGE 65 II 101

18. Arrêt de la IIe Section civile du 11 mai 1939 dans la cause dame Demont
contre Demont.


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Regeste:
Action en divorce ou en séparation fondée sur les art. 137 on 138 CC. Les
délais dans lesquels l'époux offensé doit intenter action sont des délais de
péremption.
L'époux offensé peut-il, le cas échéant, bénéficier d'un délai supplémentaire
par application analogique de l'art. 139 CO? Question réservée.
Scheidungs- oder Trennungsklage aus Art. 137 oder 138 ZGB. Die Fristen, mit
deren Ablauf diese Klage «verjährt», sind Verwirkungsfristen.
Vorbehalten bleibt die Frage, ob dem verletzten Ehegatten gegebenenfalls eine
Nachfrist entsprechend Art. 139 OR zuzubilligen sei.
Azione di divorzio o di separazione basata sugli art. 137 e 138 CC. I termini,
entro i quali il coniuge offeso deve intentare azione, sono termini di
perenzione.
Riservata resta la questione se il coniuge offeso possa beneficiare
eventualmente d'un termine supplementare in applicazione analogica dell'art.
139 CO.

En avril 1934, sieur Demont avait assigné sa femme en divorce devant les
tribunaux genevois, demandant en outre l'attribution de l'enfant issu du
mariage. Il reprochait à la défenderesse de l'injurier et de se livrer sur lui
à des sévices. Dame Demont avait conclu à libération. Par jugement du 25
novembre 1935, le Tribunal de 1 re instance avait admis l'action en vertu de
l'art. 138 CC, attribué la puissance paternelle à la mère et fixé la part
contributive du père aux frais d'entretien et d'éducation de l'enfant. Sieur
Demont fit appel sur ces deux derniers points. Cependant, comme il avait
négligé de signifier le jugement de divorce lui-même, ainsi que l'exige l'art.
439 de la loi de procédure civile genevoise, ledit jugement a été déclaré
caduc le 10 mars 1936 et le demandeur a dû retirer l'appel interjeté.

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Le 18 avril, Demont a formé une nouvelle demande en divorce, invoquant
derechef les injures et les sévices que le Tribunal avait retenus dans son
jugement du 25 novembre 1935. La défenderesse a opposé que les faits en
question étaient prescrits au regard de l'art. 138 CC, antérieurs qu'ils
étaient de plus de six mois à l'introduction de la nouvelle action. Le
Tribunal de 1 re instance a partagé cette manière de voir, mais a cependant
admis la demande en vertu de l'art. 142 CC. La Cour de Justice a prononcé le
divorce en application de l'art. 138 CC.
Dame Demont a recouru en réforme au Tribunal fédéral.
Sur la question de la nature de la «prescription» instituée par les art. 137
et 138, le Tribunal fédéral s'est exprimé comme il suit:
....Le Tribunal de 1 re instance a considéré les injures et sévices reprochés
à dame Demont comme prescrits en tant que griefs déterminés au sens de l'art.
138 CC, mais il les a retenus sous l'angle des causes indéterminées de l'art.
142. La Cour de Justice a estimé au contraire que le demandeur avait
interrompu la prescription de six mois de l'art. 138 en intentant action en
avril 1934 et que, si le jugement reconnaissant comme fondés les griefs
invoqués a été déclaré caduc le 10 mars 1936, un nouveau délai de six mois a
commencé à courir dès cette date, délai que Demont a observé en reprenant son
action le 28 avril suivant; il est donc recevable à invoquer les sévices et
injures. La recourante s'élève contre cette manière de voir en soutenant que
le délai de six mois prévu à l'art. 138 al. 2 CC n'est pas un délai de
prescription, mais un délai de péremption, et qu'il ne saurait dès lors être
prolongé. C'est ce qu'a jugé le Tribunal fédéral dans l'arrêt Benedetti (RO 38
II 29
); mais il n'a pas motivé son opinion, en sorte qu'il se justifie
d'examiner à nouveau la question. La loi déclare aux art. 137 et 138 que
l'action se prescrit (verjährt, si prescrive). Mais on ne peut s'en tenir sans
réserves aux termes employés par le législateur, car celui-ci ne se sert Das
en ce domaine d'une langue

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rigoureuse. Il néglige souvent de définir la nature d'un délai; c'est le cas
notamment pour le délai de l'action en paternité (art. 308 CC), pour celui de
l'action en désaveu (art. 253), pour celui de l'action en annulation d'une
légitimation (art. 362); le juge a dû souvent intervenir pour suppléer la loi
(cf. RO 42 II 101, paternité; 54 II 409, légitimation). D'autres fois, le code
parle de délais de prescription alors qu'il s'agit manifestement de délais de
déchéance. Ainsi, la note marginale de l'art. 251 CO emploie les termes de
«prescription... de l'action» alors que les art. 249 et 250 CO considèrent la
révocation de la donation comme un droit formateur à exercer dans un délai
péremptoire, droit qui donne alors naissance à une créance en restitution qui,
elle, est soumise à prescription. Dans ces conditions, c'est avant tout
d'après la raison d'être du délai des art. 137 et 138 qu'il faut déterminer sa
nature. On peut préalablement remarquer qu'en ce qui concerne l'adultère,
l'institution d'un délai est reprise de l'art. 46 de la loi fédérale de 1874
sur l'état civil et le mariage: «Le divorce peut être demandé: a) pour cause
d'adultère s'il ne s'est pas écoulé plus de six mois depuis que l'époux
offensé en a eu connaissance...» . Les termes employés parlent en faveur d'un
délai de déchéance; c'est ce que paraît avoir reconnu le Tribunal fédéral dans
l'arrêt RO 34 II 2 /3 où il relève le caractère absolu du délai. Rien dans les
travaux préparatoires ne permet d'affirmer que le législateur, tout en
adoptant le mot de prescription, soit parti d'une conception différente. D'une
manière générale, un délai sera réputé péremptoire lorsqu'il se justifie moins
encore par le souci de protéger le débiteur d'une obligation (au sens le plus
général), que par la préoccupation de sauvegarder l'ordre et la sécurité
publics. C'est ce qui explique que les délais de déchéance soient
proportionnellement le plus nombreux dans le droit de famille. Outre les cas
évoqués plus haut, on peut encore citer le délai pour l'opposition au mariage
(art. 112 ). La Cour suprême de Zurich a également qualifié de péremptoires

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les délais de l'art. 127 CC relatif à l'action en nullité de mariage, délais
qui correspondent dans leur durée à ceux des art. 137 et 138, bien que la loi
parle là comme ici de prescription (Blätter f. zürcher. Rechtsprechung 14 no
17). Capitaine (Des courtes prescriptions, des délais et actes de déchéance,
p. 87), pour qui les délais des art. 127137 et 138 sont des délais de
prescription, commence par reconnaître que les délais de déchéance ont cet
avantage de précipiter «la fixation et la stabilité des situations de famille
dans un but d'ordre et de sécurité publics» (op. cit., p. 87), tandis que les
prescriptions tendent, même dans le droit de famille, à la protection de
droits matériels (art. 95, 454,455 Cc) plutôt qu'à celle de droits personnels.
Ces considérations s'appliquent précisément aux délais de l'action en divorce.
Le législateur a voulu qu'on ne puisse plus invoquer comme cause déterminée un
fait qu'on n'a pas d'emblée ou dans un délai raisonnable jugé si grave pour la
vie commune qu'un divorce ou une séparation s'imposât. Il y a alors
présomption de pardon et, comme si le pardon avait été exprès, l'époux offensé
se trouve déchu de son action. Il faut en effet arriver le plus tôt possible à
une situation nette: ou rupture de l'union conjugale ou maintien de celle-ci.
L'interruption du délai par les actes prévus à l'art. 135 CO (qui visent
d'ailleurs surtout la sauvegarde d'intérêts matériels) et l'octroi d'un
nouveau délai de six mois conformément à l'art. 137 CO n'assureraient
nullement le résultat visé par le législateur. Ainsi, le droit de demander le
divorce en vertu des art. 137 et 138 est soumis à un délai forclusif qui
échappe à la volonté des parties et notamment à celle du conjoint offensé; en
ouvrant action dans les six mois ou les cinq ans prévus, le demandeur épuise
son droit. En l'espèce, la Cour de Justice ne pouvait donc en principe
appliquer l'art. 138 aux faits d'injures et de sévices remontant à 1934. Tout
ce qu'on pourrait se demander c'est si, par analogie avec l'art. 139 CO et
selon ce que le Tribunal fédéral a admis pour le délai péremptoire de l'action
en

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paternité (RO 61 II 148), sieur Demont peut obtenir restitution du délai perdu
par la caducité du jugement, et bénéficier d'un délai supplémentaire de
soixante jours qu'il aurait observé in casu en reprenant son action le mois
suivant. La question peut demeurer indécise, car les faits invoqués doivent en
tout cas être retenus sous l'angle de l'art. 142 CC et suffisent pour
justifier le prononcé du divorce.
Entscheidinformationen   •   DEFRITEN
Dokument : 65 II 101
Datum : 01. Januar 1938
Publiziert : 11. Mai 1939
Quelle : Bundesgericht
Status : 65 II 101
Sachgebiet : BGE - Zivilrecht
Gegenstand : Action en divorce ou en séparation fondée sur les art. 137 on 138 CC. Les délais dans lesquels...


Gesetzesregister
OR: 135  137  138  139  249  250  251
ZGB: 112  127  137  137e  138  142  308
BGE Register
34-II-1 • 38-II-26 • 42-II-98 • 54-II-409 • 61-II-148 • 65-II-101
Stichwortregister
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