BGE 62 II 20
7. Arrêt de la IIe Section civile du 13 février 1936 dans la cause Dame Rado
contre Dame Biro.
Regeste:
Succession d'un étranger ouverte à l'étranger mais comprenant des biens situés
en Suisse.
Le conflit international de compétence qui peut s'élever au sujet des actions
successorales relatives auxdits biens échappe à l'application de l'art. 538
SR 210 Codice civile svizzero del 10 dicembre 1907 CC Art. 538 - 1 La successione si apre per l'intiero patrimonio nel luogo di ultimo domicilio del defunto. |
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1 | La successione si apre per l'intiero patrimonio nel luogo di ultimo domicilio del defunto. |
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CC, qui n'a qu'une portée interne. Il n'est régi par la loi fédérale de 1891
sur les rapports de droit civil des citoyens établis ou en séjour (art. 2, 23,
28 et 32) que si le de cujus était domicilié en Suisse. Hors ce cas-là et sous
réserve des traités internationaux, la détermination du for des actions
successorales relève uniquement du droit cantonal (consid. 2).
Exception de litispendance tirée de la Convention italo-suisse du 3 janvier
1933 sur la reconnaissance et l'exécution des décisions judiciaires (art. 2 et
8) (consid. 1).
A. - Dame Adèle Deutsch, de nationalité roumaine, est décédée à Rome le 3
janvier 1933. Par testament du 31 décembre 1932, elle avait institué comme
héritière Demoiselle Ella Biro-Lazar, à Szeged (Hongrie) et avait fait divers
legs, notamment un legs de 100000 lires à sa soeur Dame Ileana Rado,
domiciliée à Arad en Roumanie.
Dame Rado a ouvert devant les tribunaux italiens une action en nullité de ce
testament. Dame Biro-Lazar prétend dans sa réponse au présent recours que
cette action a été définitivement rejetée.
Le 13 avril 1933, Dame Rado a obtenu du Président du Tribunal de la Sarine une
ordonnance de séquestre judiciaire des biens dépendant de la succession
Deutsch
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déposés à la Banque de l'Etat de Fribourg, et, deux jours plus tard, elle a
ouvert action contre Dame Biro-Lazar, en concluant à ce qu'il plaise au
Tribunal prononcer la nullité du testament de Dame Deutsch et la reconnaître
elle-même comme seule et unique héritière de cette dernière.
Dame Biro-Lazar a contesté la compétence des tribunaux fribourgeois et conclu
à ce que la demanderesse fût renvoyée à mieux agir.
Par jugement du 14 février 1935, le Tribunal civil du district de la Sarine a
admis l'exception d'incompétence par le motif qu'une cause en nullité du
testament était déjà pendante devant les tribunaux italiens et que dans ces
conditions les tribunaux suisses devaient se dessaisir en vertu de l'art. 8 de
la convention italo-suisse du 3 janvier 1933.
Sur appel de la demanderesse, la Cour d'appel du Canton de Fribourg a jugé
également que le Tribunal de la Sarine n'était pas compétent pour connaître de
l'action, mais par d'autres motifs, à savoir que Dame Deutsch était domiciliée
à l'étranger et qu'il y avait lieu de suivre le principe de l'unité de la
succession proclamé par les art. 538 Cc, 23 de la loi fédérale du 25 juin 1891
sur les rapports de droit civil des citoyens établis ou en séjour et 23 du
code de procédure civile fribourgeois.
B. - Dame Rado a formé un recours de droit civil contre cet arrêt en concluant
au rejet de l'exception d'incompétence, subsidiairement, au renvoi de la cause
à la Cour d'appel.
Dame Biro-Lazar a conclu au rejet du recours.
Considérant en droit:
1.- L'intimée a renoncé avec raison à invoquer l'art. 8 de la Convention
italo-suisse du 3 janvier 1933 sur la reconnaissance et l'exécution de
décisions judiciaires. Comme l'a justement relevé la Cour d'appel, les
conditions d'application de cette disposition ne sont pas réalisées en
l'espèce. Elle ne consacre, en effet, l'exception de
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litispendance que dans le cas où les tribunaux saisis en premier lieu sont
compétents «selon les règles de la Convention». Or la compétence des tribunaux
italiens dans l'action en nullité du testament de Dame Deutsch ne résulte pas
de la Convention. Celle-ci à son art. 2 ch. 6 institue la compétence des
tribunaux de l'Etat dont le de cujus était ressortissant, et il est constant
que Dame Deutsch était Roumaine et non Italienne.
2.- C'est à tort que la Cour d'appel a argumenté des art. 538
SR 210 Codice civile svizzero del 10 dicembre 1907 CC Art. 538 - 1 La successione si apre per l'intiero patrimonio nel luogo di ultimo domicilio del defunto. |
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loi fédérale de 1891 pour soutenir que les actions successorales ne peuvent
être portées que devant le juge du dernier domicile du défunt. L'art. 538
SR 210 Codice civile svizzero del 10 dicembre 1907 CC Art. 538 - 1 La successione si apre per l'intiero patrimonio nel luogo di ultimo domicilio del defunto. |
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1 | La successione si apre per l'intiero patrimonio nel luogo di ultimo domicilio del defunto. |
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n'a qu'une portée interne; il ne vise que les successions qui se sont ouvertes
en Suisse et ne tranche pas le conflit international de compétence qui peut
s'élever lorsque la succession s'est ouverte à l'étranger, mais comprend des
biens situés en Suisse. Et quant à la loi de 1891, si elle règle bien les
conflits de cette nature (dans le sens de la compétence du juge du dernier
domicile: art. 2, 23 et 32, et, éventuellement, du juge du lieu d'origine:
art. 28 ch. 1), c'est uniquement dans les deux hypothèses auxquelles elle se
rapporte, c'est-à-dire celle d'un étranger domicilié en Suisse et celle d'un
Suisse domicilié à l'étranger, et il est constant qu'elles ne se trouvent
réalisées ni l'une ni l'autre en l'espèce.
S'agissant d'un étranger domicilié à l'étranger, on ne trouve en réalité ni
dans la loi de 1891, ni dans d'autres lois fédérales aucune disposition
instituant ou, au contraire, excluant la compétence des tribunaux suisses, et
l'on doit en conclure que, sous réserve des traités internationaux - et il n'y
en a aucun quant à la succession d'un ressortissant roumain - il appartient en
cette matière aux cantons de déterminer souverainement le for compétent. Ils
ne violeront donc le droit fédéral, ni s'ils déclarent leurs tribunaux
incompétents à raison du domicile du de cujus à l'étranger et du principe de
l'unité de la succession, ni si, au contraire, ils les déclarent compétents à
raison par
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exemple de ce qu'il existerait dans le canton des biens compris dans la
succession ou de ce que le défendeur à l'action aurait son domicile dans le
canton.
L'admission du recours se justifierait par conséquent si la Cour d'appel avait
tranché la question de compétence en application exclusive du droit fédéral,
car l'art. 87 ch. 1 OJF est applicable non seulement lorsque le droit cantonal
a été appliqué en lieu et place du droit fédéral, mais aussi lorsque c'est le
droit fédéral qui l'a été au lieu du droit cantonal (RO 48 I p. 233 et sv., 50
II p. 412-413, 60 II p. 25 in fine), et la loi de 1891 est violée au sens de
l'art. 87 ch. 2 OJF lorsqu'elle a été appliquée à une cause à laquelle elle
n'était pas applicable (RO 60 I p. 62). Mais tel n'est pas le cas. Il ressort
en effet de l'arrêt attaqué que la Cour n'a invoqué les art. 538
SR 210 Codice civile svizzero del 10 dicembre 1907 CC Art. 538 - 1 La successione si apre per l'intiero patrimonio nel luogo di ultimo domicilio del defunto. |
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1 | La successione si apre per l'intiero patrimonio nel luogo di ultimo domicilio del defunto. |
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la loi de 1891 qu'à titre subsidiaire et après avoir constaté que
l'incompétence résulte aussi de l'art. 23 du code de procédure civile
fribourgeois qui consacre également le principe de l'unité de la succession,
et dans cette mesure-là, comme on vient de le dire, l'arrêt ne viole aucune
règle de droit fédéral. Renvoyer la cause devant les premiers juges à raison
de l'erreur qui a consisté à appliquer concurremment les dispositions de
l'art. 538
SR 210 Codice civile svizzero del 10 dicembre 1907 CC Art. 538 - 1 La successione si apre per l'intiero patrimonio nel luogo di ultimo domicilio del defunto. |
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décision n'en serait pas moins maintenue en application exclusive cette
fois-ci de l'art. 23 du code de procédure civile fribourgeois. Quant à savoir
si la Cour a bien ou mal interprété cette dernière disposition, c'est une
question qui échappe à la compétence du Tribunal fédéral.
Le Tribunal fédéral prononce:
Le recours est rejeté.