Urteilskopf

91 II 63

8. Arrêt de la Ire Cour civile du 16 février 1965 dans la cause Banque Romande SA contre Krähenbühl.
Regeste (de):

Regeste (fr):

Regesto (it):


Sachverhalt ab Seite 64

BGE 91 II 63 S. 64

A.- Par exploit du 17 avril 1959, la Banque Romande SA, à Genève, a assigné son ancien employé Alfred Krähenbühl devant le Tribunal de première instance de cette ville en paiement de 120 000 fr. avec intérêt à 5% dès le 1er janvier 1959. Elle alléguait qu'en septembre et octobre 1957, le défendeur, qui était alors à son service, lui avait causé un préjudice de ce montant en faisant des opérations à terme pour son propre compte, mais en se couvrant du nom de la banque, sans en faire mention dans les livres de celle-ci. Elle fondait sa prétention sur les art. 41 ss
SR 220 Première partie: Dispositions générales Titre premier: De la formation des obligations Chapitre I: Des obligations résultant d'un contrat
CO Art. 41 - 1 Celui qui cause, d'une manière illicite, un dommage à autrui, soit intentionnellement, soit par négligence ou imprudence, est tenu de le réparer.
1    Celui qui cause, d'une manière illicite, un dommage à autrui, soit intentionnellement, soit par négligence ou imprudence, est tenu de le réparer.
2    Celui qui cause intentionnellement un dommage à autrui par des faits contraires aux moeurs est également tenu de le réparer.
. CO, d'une part, et sur l'art. 328
SR 220 Première partie: Dispositions générales Titre premier: De la formation des obligations Chapitre I: Des obligations résultant d'un contrat
CO Art. 328 - 1 L'employeur protège et respecte, dans les rapports de travail, la personnalité du travailleur; il manifeste les égards voulus pour sa santé et veille au maintien de la moralité. En particulier, il veille à ce que les travailleurs ne soient pas harcelés sexuellement et qu'ils ne soient pas, le cas échéant, désavantagés en raison de tels actes.124
1    L'employeur protège et respecte, dans les rapports de travail, la personnalité du travailleur; il manifeste les égards voulus pour sa santé et veille au maintien de la moralité. En particulier, il veille à ce que les travailleurs ne soient pas harcelés sexuellement et qu'ils ne soient pas, le cas échéant, désavantagés en raison de tels actes.124
2    Il prend, pour protéger la vie, la santé et l'intégrité personnelle du travailleur, les mesures commandées par l'expérience, applicables en l'état de la technique, et adaptées aux conditions de l'exploitation ou du ménage, dans la mesure où les rapports de travail et la nature du travail permettent équitablement de l'exiger de lui.125
CO, d'autre part. Krähenbühl a conclu à libération des fins de la demande. Il contestait le caractère illicite de ses actes. Il prétendait ignorer que son employeur lui interdisait de faire des opérations de bourse et qu'il devait les mentionner dans un registre. Il affirmait qu'il n'avait pas agi à l'insu de la direction de la banque.
B.- Statuant le 8 janvier 1964, le Tribunal de première instance de Genève se déclara incompétent pour connaître de la réclamation de la demanderesse pour autant qu'elle se fondait sur l'art. 328
SR 220 Première partie: Dispositions générales Titre premier: De la formation des obligations Chapitre I: Des obligations résultant d'un contrat
CO Art. 328 - 1 L'employeur protège et respecte, dans les rapports de travail, la personnalité du travailleur; il manifeste les égards voulus pour sa santé et veille au maintien de la moralité. En particulier, il veille à ce que les travailleurs ne soient pas harcelés sexuellement et qu'ils ne soient pas, le cas échéant, désavantagés en raison de tels actes.124
1    L'employeur protège et respecte, dans les rapports de travail, la personnalité du travailleur; il manifeste les égards voulus pour sa santé et veille au maintien de la moralité. En particulier, il veille à ce que les travailleurs ne soient pas harcelés sexuellement et qu'ils ne soient pas, le cas échéant, désavantagés en raison de tels actes.124
2    Il prend, pour protéger la vie, la santé et l'intégrité personnelle du travailleur, les mesures commandées par l'expérience, applicables en l'état de la technique, et adaptées aux conditions de l'exploitation ou du ménage, dans la mesure où les rapports de travail et la nature du travail permettent équitablement de l'exiger de lui.125
CO. Il rejeta la demande, comme prescrite, dans la mesure où elle était fondée sur les art. 41 ss
SR 220 Première partie: Dispositions générales Titre premier: De la formation des obligations Chapitre I: Des obligations résultant d'un contrat
CO Art. 41 - 1 Celui qui cause, d'une manière illicite, un dommage à autrui, soit intentionnellement, soit par négligence ou imprudence, est tenu de le réparer.
1    Celui qui cause, d'une manière illicite, un dommage à autrui, soit intentionnellement, soit par négligence ou imprudence, est tenu de le réparer.
2    Celui qui cause intentionnellement un dommage à autrui par des faits contraires aux moeurs est également tenu de le réparer.
. CO. Le 3 novembre 1964, la Deuxième Chambre de la Cour de justice de Genève confirma le jugement de première instance. Elle estima, en accord avec le premier juge, que l'action fondée sur l'art. 328
SR 220 Première partie: Dispositions générales Titre premier: De la formation des obligations Chapitre I: Des obligations résultant d'un contrat
CO Art. 328 - 1 L'employeur protège et respecte, dans les rapports de travail, la personnalité du travailleur; il manifeste les égards voulus pour sa santé et veille au maintien de la moralité. En particulier, il veille à ce que les travailleurs ne soient pas harcelés sexuellement et qu'ils ne soient pas, le cas échéant, désavantagés en raison de tels actes.124
1    L'employeur protège et respecte, dans les rapports de travail, la personnalité du travailleur; il manifeste les égards voulus pour sa santé et veille au maintien de la moralité. En particulier, il veille à ce que les travailleurs ne soient pas harcelés sexuellement et qu'ils ne soient pas, le cas échéant, désavantagés en raison de tels actes.124
2    Il prend, pour protéger la vie, la santé et l'intégrité personnelle du travailleur, les mesures commandées par l'expérience, applicables en l'état de la technique, et adaptées aux conditions de l'exploitation ou du ménage, dans la mesure où les rapports de travail et la nature du travail permettent équitablement de l'exiger de lui.125
CO était irrecevable, car elle relevait de la compétence exclusive du Tribunal des prud'hommes. Quant à l'action fondée sur les art. 41 ss
SR 220 Première partie: Dispositions générales Titre premier: De la formation des obligations Chapitre I: Des obligations résultant d'un contrat
CO Art. 41 - 1 Celui qui cause, d'une manière illicite, un dommage à autrui, soit intentionnellement, soit par négligence ou imprudence, est tenu de le réparer.
1    Celui qui cause, d'une manière illicite, un dommage à autrui, soit intentionnellement, soit par négligence ou imprudence, est tenu de le réparer.
2    Celui qui cause intentionnellement un dommage à autrui par des faits contraires aux moeurs est également tenu de le réparer.
. CO, elle était prescrite.
C.- La Banque Romande SA recourt en réforme au Tribunal fédéral. Elle invoque une fausse application des art. 60
SR 220 Première partie: Dispositions générales Titre premier: De la formation des obligations Chapitre I: Des obligations résultant d'un contrat
CO Art. 60 - 1 L'action en dommages-intérêts ou en paiement d'une somme d'argent à titre de réparation morale se prescrit par trois ans à compter du jour où la partie lésée a eu connaissance du dommage ainsi que de la personne tenue à réparation et, dans tous les cas, par dix ans à compter du jour où le fait dommageable s'est produit ou a cessé.35
1    L'action en dommages-intérêts ou en paiement d'une somme d'argent à titre de réparation morale se prescrit par trois ans à compter du jour où la partie lésée a eu connaissance du dommage ainsi que de la personne tenue à réparation et, dans tous les cas, par dix ans à compter du jour où le fait dommageable s'est produit ou a cessé.35
1bis    En cas de mort d'homme ou de lésions corporelles, elle se prescrit par trois ans à compter du jour où la partie lésée a eu connaissance du dommage ainsi que de la personne tenue à réparation et, dans tous les cas, par vingt ans à compter du jour où le fait dommageable s'est produit ou a cessé.36
2    Si le fait dommageable résulte d'un acte punissable de la personne tenue à réparation, elle se prescrit au plus tôt à l'échéance du délai de prescription de l'action pénale, nonobstant les alinéas précédents. Si la prescription de l'action pénale ne court plus parce qu'un jugement de première instance a été rendu, l'action civile se prescrit au plus tôt par trois ans à compter de la notification du jugement.37
3    Si l'acte illicite a donné naissance à une créance contre la partie lésée, celle-ci peut en refuser le paiement lors même que son droit d'exiger la réparation du dommage serait atteint par la prescription.
et 423
SR 220 Première partie: Dispositions générales Titre premier: De la formation des obligations Chapitre I: Des obligations résultant d'un contrat
CO Art. 423 - 1 Lorsque la gestion n'a pas été entreprise dans l'intérêt du maître, celui-ci n'en a pas moins le droit de s'approprier les profits qui en résultent.
1    Lorsque la gestion n'a pas été entreprise dans l'intérêt du maître, celui-ci n'en a pas moins le droit de s'approprier les profits qui en résultent.
2    Il n'est tenu d'indemniser le gérant ou de lui donner décharge que jusqu'à concurrence de son enrichissement.
CO concernant la prescription de sa réclamation. En revanche, elle ne reprend pas le moyen tiré de l'art. 328
SR 220 Première partie: Dispositions générales Titre premier: De la formation des obligations Chapitre I: Des obligations résultant d'un contrat
CO Art. 328 - 1 L'employeur protège et respecte, dans les rapports de travail, la personnalité du travailleur; il manifeste les égards voulus pour sa santé et veille au maintien de la moralité. En particulier, il veille à ce que les travailleurs ne soient pas harcelés sexuellement et qu'ils ne soient pas, le cas échéant, désavantagés en raison de tels actes.124
1    L'employeur protège et respecte, dans les rapports de travail, la personnalité du travailleur; il manifeste les égards voulus pour sa santé et veille au maintien de la moralité. En particulier, il veille à ce que les travailleurs ne soient pas harcelés sexuellement et qu'ils ne soient pas, le cas échéant, désavantagés en raison de tels actes.124
2    Il prend, pour protéger la vie, la santé et l'intégrité personnelle du travailleur, les mesures commandées par l'expérience, applicables en l'état de la technique, et adaptées aux conditions de l'exploitation ou du ménage, dans la mesure où les rapports de travail et la nature du travail permettent équitablement de l'exiger de lui.125
CO. L'intimé Krähenbühl conclut au rejet du recours.
BGE 91 II 63 S. 65

Erwägungen

Considérant en droit:

1. Selon l'art. 63 OJ, le Tribunal fédéral, saisi d'un recours en réforme, n'est pas lié par les motifs invoqués par les parties et il apprécie librement la portée juridique des faits. Ainsi, il applique d'office le droit (RO 89 II 339, 90 II 40, consid. 6 b). Lorsqu'il a pratiqué les opérations de bourse qui ont donné naissance au litige, l'intimé était l'employé de la recourante. Celle-ci lui reproche d'avoir agi de la sorte pour son propre compte, mais au nom de son employeur, en s'abstenant de porter les opérations dans les livres de la banque. Un pareil grief se qualifie au premier chef comme une violation de l'obligation de diligence que l'art. 328
SR 220 Première partie: Dispositions générales Titre premier: De la formation des obligations Chapitre I: Des obligations résultant d'un contrat
CO Art. 328 - 1 L'employeur protège et respecte, dans les rapports de travail, la personnalité du travailleur; il manifeste les égards voulus pour sa santé et veille au maintien de la moralité. En particulier, il veille à ce que les travailleurs ne soient pas harcelés sexuellement et qu'ils ne soient pas, le cas échéant, désavantagés en raison de tels actes.124
1    L'employeur protège et respecte, dans les rapports de travail, la personnalité du travailleur; il manifeste les égards voulus pour sa santé et veille au maintien de la moralité. En particulier, il veille à ce que les travailleurs ne soient pas harcelés sexuellement et qu'ils ne soient pas, le cas échéant, désavantagés en raison de tels actes.124
2    Il prend, pour protéger la vie, la santé et l'intégrité personnelle du travailleur, les mesures commandées par l'expérience, applicables en l'état de la technique, et adaptées aux conditions de l'exploitation ou du ménage, dans la mesure où les rapports de travail et la nature du travail permettent équitablement de l'exiger de lui.125
CO impose à l'employé. Aussi la prétention de la recourante doit-elle être examinée d'abord à la lumière des règles qui gouvernent les rapports contractuels noués entre les parties. Ce n'est que si les conditions d'une responsabilité contractuelle fondée notamment sur l'art. 328
SR 220 Première partie: Dispositions générales Titre premier: De la formation des obligations Chapitre I: Des obligations résultant d'un contrat
CO Art. 328 - 1 L'employeur protège et respecte, dans les rapports de travail, la personnalité du travailleur; il manifeste les égards voulus pour sa santé et veille au maintien de la moralité. En particulier, il veille à ce que les travailleurs ne soient pas harcelés sexuellement et qu'ils ne soient pas, le cas échéant, désavantagés en raison de tels actes.124
1    L'employeur protège et respecte, dans les rapports de travail, la personnalité du travailleur; il manifeste les égards voulus pour sa santé et veille au maintien de la moralité. En particulier, il veille à ce que les travailleurs ne soient pas harcelés sexuellement et qu'ils ne soient pas, le cas échéant, désavantagés en raison de tels actes.124
2    Il prend, pour protéger la vie, la santé et l'intégrité personnelle du travailleur, les mesures commandées par l'expérience, applicables en l'état de la technique, et adaptées aux conditions de l'exploitation ou du ménage, dans la mesure où les rapports de travail et la nature du travail permettent équitablement de l'exiger de lui.125
CO faisaient défaut qu'il conviendrait d'envisager la réparation du dommage allégué à la lumière des dispositions réglant la responsabilité dérivant d'un acte illicite (art. 41 ss
SR 220 Première partie: Dispositions générales Titre premier: De la formation des obligations Chapitre I: Des obligations résultant d'un contrat
CO Art. 41 - 1 Celui qui cause, d'une manière illicite, un dommage à autrui, soit intentionnellement, soit par négligence ou imprudence, est tenu de le réparer.
1    Celui qui cause, d'une manière illicite, un dommage à autrui, soit intentionnellement, soit par négligence ou imprudence, est tenu de le réparer.
2    Celui qui cause intentionnellement un dommage à autrui par des faits contraires aux moeurs est également tenu de le réparer.
. CO). Dans la mesure où la réclamation de la recourante serait fondée au regard des normes applicables à la responsabilité contractuelle, la prescription décennale de l'art. 127
SR 220 Première partie: Dispositions générales Titre premier: De la formation des obligations Chapitre I: Des obligations résultant d'un contrat
CO Art. 127 - Toutes les actions se prescrivent par dix ans, lorsque le droit civil fédéral n'en dispose pas autrement.
CO ne serait évidemment pas acquise.
2. La jurisprudence récente a posé le principe que l'autorité cantonale est tenue elle aussi d'appliquer le droit fédéral d'office, en vertu de la loi fédérale d'organisation judiciaire (arrêts précités). En effet, dans l'application du droit fédéral concernant le fond du litige, la cognition des tribunaux cantonaux ne saurait être plus étroite que celle de la cour fédérale de réforme. Les juridictions cantonale et fédérale doivent donner une juste appréciation juridique des faits articulés par les parties. Ni l'une ni l'autre ne sont liées par les motifs inexacts ou incomplets invoqués par les plaideurs. Elles ont le pouvoir et le devoir d'appliquer le droit fédéral dans sa plénitude. L'art. 63 OJ limite sur ce point la souveraineté cantonale en matière de procédure civile. Une loi cantonale de procédure qui serait en contradiction avec cette règle n'aurait donc aucune validité, vu l'art. 2
SR 220 Première partie: Dispositions générales Titre premier: De la formation des obligations Chapitre I: Des obligations résultant d'un contrat
CO Art. 127 - Toutes les actions se prescrivent par dix ans, lorsque le droit civil fédéral n'en dispose pas autrement.
Disp. trans. Cst.
3. La décision de la Cour de justice genevoise, qui déclare la demande irrecevable dans la mesure où elle est fondée
BGE 91 II 63 S. 66

sur l'art. 328
SR 220 Première partie: Dispositions générales Titre premier: De la formation des obligations Chapitre I: Des obligations résultant d'un contrat
CO Art. 328 - 1 L'employeur protège et respecte, dans les rapports de travail, la personnalité du travailleur; il manifeste les égards voulus pour sa santé et veille au maintien de la moralité. En particulier, il veille à ce que les travailleurs ne soient pas harcelés sexuellement et qu'ils ne soient pas, le cas échéant, désavantagés en raison de tels actes.124
1    L'employeur protège et respecte, dans les rapports de travail, la personnalité du travailleur; il manifeste les égards voulus pour sa santé et veille au maintien de la moralité. En particulier, il veille à ce que les travailleurs ne soient pas harcelés sexuellement et qu'ils ne soient pas, le cas échéant, désavantagés en raison de tels actes.124
2    Il prend, pour protéger la vie, la santé et l'intégrité personnelle du travailleur, les mesures commandées par l'expérience, applicables en l'état de la technique, et adaptées aux conditions de l'exploitation ou du ménage, dans la mesure où les rapports de travail et la nature du travail permettent équitablement de l'exiger de lui.125
CO et ne l'examine quant au fond que sous l'angle de la responsabilité aquilienne, est incompatible avec l'art. 63 OJ. Elle est en effet contraire au principe que la jurisprudence rappelée ci-dessus a déduit de cette disposition. En divisant l'examen de la prétention litigieuse en deux questions soumises à deux ordres de juridiction parallèles, elle empêche chacune des autorités cantonales d'appliquer d'office le droit fédéral dans toute son étendue aux faits établis par l'instruction, de manière à en donner une juste appréciation juridique. Assurément, le présent litige diffère de celui qui a donné lieu à l'arrêt Chesini c. Hagen (RO 89 II 337 ss.) en ceci que la Cour de justice ne s'est pas estimée liée par les motifs invoqués par les parties, mais qu'elle a déduit la limitation de sa cognition d'une disposition légale de la procédure cantonale. Toutefois, cette différence n'a aucune importance. Le point décisif est que les règles fédérales d'organisation judiciaire contraignent l'autorité cantonale d'appliquer d'office le droit fédéral dans sa totalité aux réclamations dont elle est saisie. Il est ainsi contraire au droit fédéral d'imposer à une partie, en cas de concours d'actions, la division d'une seule et même prétention en deux actions parallèles portées devant deux juridictions distinctes, chacune se bornant à examiner le mérite de l'une des actions. En pareille éventualité, l'organisation judiciaire fédérale exige qu'une seule autorité cantonale se saisisse de tout le litige et juge le mérite de la prétention contestée en appliquant d'office le droit matériel fédéral dans toute son étendue. Dès lors, la Cour de justice devait ou bien se saisir du litige en examinant tous ses aspects ou bien décliner entièrement sa compétence et renvoyer la partie demanderesse à se pourvoir devant le Tribunal des prud'hommes pour faire juger l'intégralité de sa réclamation.
4. Au demeurant, la solution commandée par le droit fédéral est conforme à la jurisprudence publiée des autorités genevoises. Dans un arrêt Schneebeli c. Girod, du 1er février 1955 (SJ 1956 p. 42), la Cour mixte des prud'hommes de Genève, chargée de statuer en dernier ressort sur les conflits de compétence entre les prud'hommes et la juridiction ordinaire (cf. art. 52 al. 2 de la loi organique sur les conseils de prud'hommes du 12 mai 1897, alors en vigueur, mais abrogée avec
BGE 91 II 63 S. 67

effet au 27 octobre 1963 par la loi sur la juridiction des prud'hommes du 30 mars 1963, dont les art. 64 à 68 renferment des dispositions analogues sur ce point), a posé le principe suivant: lorsqu'à l'occasion d'un accident de travail la faute reprochée à l'employeur consiste essentiellement dans une violation du devoir de diligence imposé par l'art. 339
SR 220 Première partie: Dispositions générales Titre premier: De la formation des obligations Chapitre I: Des obligations résultant d'un contrat
CO Art. 339 - 1 À la fin du contrat, toutes les créances qui en découlent deviennent exigibles.
1    À la fin du contrat, toutes les créances qui en découlent deviennent exigibles.
2    Lorsque le travailleur a droit à une provision pour des affaires dont l'exécution a lieu entièrement ou partiellement après la fin du contrat, l'exigibilité peut être différée par accord écrit, mais en général pour six mois au plus; l'exigibilité ne peut pas être différée de plus d'une année s'il s'agit d'affaires donnant lieu à des prestations successives, ni de plus de deux ans s'il s'agit de contrats d'assurance ou d'affaires dont l'exécution s'étend sur plus d'une demi-année.
3    Le droit à une participation au résultat de l'exploitation est exigible conformément à l'art. 323, al. 3.
CO, la prétention en dommages-intérêts de l'employé, basée au premier chef sur une violation des obligations découlant du contrat de travail, ressortit à la compétence exclusive du tribunal des prud'hommes; en revanche, si le dommage a sa cause principale dans un acte illicite ou s'il y a concours entre une obligation fondée sur le contrat de travail et une obligation fondée sur une autre cause, les tribunaux ordinaires sont compétents. La cour a précisé dans un considérant de sa décision qu'une seule juridiction a la compétence pour connaître du litige et qu'elle est désignée selon le caractère prédominant de l'action. La Cour de justice de Genève a appliqué le même principe et déclaré les prud'hommes compétents pour juger une demande d'indemnité formée par le propriétaire d'un taxi contre son employé qui avait endommagé le véhicule par une faute de conduite; le demandeur invoquait à la fois l'art. 328
SR 220 Première partie: Dispositions générales Titre premier: De la formation des obligations Chapitre I: Des obligations résultant d'un contrat
CO Art. 328 - 1 L'employeur protège et respecte, dans les rapports de travail, la personnalité du travailleur; il manifeste les égards voulus pour sa santé et veille au maintien de la moralité. En particulier, il veille à ce que les travailleurs ne soient pas harcelés sexuellement et qu'ils ne soient pas, le cas échéant, désavantagés en raison de tels actes.124
1    L'employeur protège et respecte, dans les rapports de travail, la personnalité du travailleur; il manifeste les égards voulus pour sa santé et veille au maintien de la moralité. En particulier, il veille à ce que les travailleurs ne soient pas harcelés sexuellement et qu'ils ne soient pas, le cas échéant, désavantagés en raison de tels actes.124
2    Il prend, pour protéger la vie, la santé et l'intégrité personnelle du travailleur, les mesures commandées par l'expérience, applicables en l'état de la technique, et adaptées aux conditions de l'exploitation ou du ménage, dans la mesure où les rapports de travail et la nature du travail permettent équitablement de l'exiger de lui.125
CO et la responsabilité délictuelle de sa partie adverse (arrêt du 12 février 1952 en la cause Estoppey c. Trinquier, SJ 1953 p. 273, qui est cité dans le prononcé précédent et se réfère lui-même à un autre arrêt du 12 mars 1948 en la cause Goy c. Boscono, SJ 1948 p. 545). Au surplus, l'art. 1er al. 2 litt. a de la loi sur la juridiction des prud'hommes du 30 mars 1963 soustrait à la compétence des prud'hommes les actions en responsabilité fondées sur l'art. 339
SR 220 Première partie: Dispositions générales Titre premier: De la formation des obligations Chapitre I: Des obligations résultant d'un contrat
CO Art. 339 - 1 À la fin du contrat, toutes les créances qui en découlent deviennent exigibles.
1    À la fin du contrat, toutes les créances qui en découlent deviennent exigibles.
2    Lorsque le travailleur a droit à une provision pour des affaires dont l'exécution a lieu entièrement ou partiellement après la fin du contrat, l'exigibilité peut être différée par accord écrit, mais en général pour six mois au plus; l'exigibilité ne peut pas être différée de plus d'une année s'il s'agit d'affaires donnant lieu à des prestations successives, ni de plus de deux ans s'il s'agit de contrats d'assurance ou d'affaires dont l'exécution s'étend sur plus d'une demi-année.
3    Le droit à une participation au résultat de l'exploitation est exigible conformément à l'art. 323, al. 3.
CO, qui doivent être portées devant les tribunaux ordinaires. Sans doute le législateur cantonal a-t-il voulu ainsi tenir compte de l'arrêt Schneebeli et de la difficulté de déterminer d'emblée le caractère prédominant - contractuel ou délictuel - d'une réclamation.
5. Sans être décisifs, les arguments tirés par surabondance de la jurisprudence cantonale confirment que la solution imposée par le droit fédéral, si elle empiète sur la souveraineté cantonale en matière de procédure, assure une meilleure administration de la justice. Le renvoi de la cause à l'autorité cantonale, qui devra

BGE 91 II 63 S. 68

admettre ou décliner sa compétence pour connaître de l'ensemble du litige et statuer, le cas échéant, quant au fond, rend superflu ou, du moins, prématuré, l'examen de la question de la prescription.
Dispositiv

Par ces motifs, le Tribunal fédéral:
Admet le recours, annule l'arrêt rendu le 3 novembre 1964 par la Deuxième Chambre de la Cour de justice du canton de Genève et renvoie la cause à la juridiction cantonale pour nouvelle décision dans le sens des motifs.