Urteilskopf

88 I 293

46. Extrait de l'arrêt du 19 décembre 1962 dans la cause Küchler et consorts contre Conseil d'Etat du canton du Valais.
Regeste (de):

Regeste (fr):

Regesto (it):


Sachverhalt ab Seite 294

BGE 88 I 293 S. 294

A.- Le 24 mars 1961, la Municipalité de Sion, se conformant à la loi valaisanne du 19 mai 1924 sur les constructions (LC), soumit à l'enquête publique "un plan d'alignement prévoyant des surfaces destinées au domaine public pour l'aménagement de places, jardins et promenades à l'Ancien Stand". Les hoirs Maurice Küchler et consorts, propriétaires de terrains dans ce quartier, firent opposition au plan qui frappait leurs parcelles d'une interdiction de bâtir. Le 13 mars 1962, le Conseil d'Etat du canton du Valais approuva néanmoins le projet qui lui était soumis et écarta les oppositions faites. Il considéra que la commune avait eu raison de se réserver, à l'Ancien Stand, "un large espace pour places de jeux, jardins publics, promenades et parcs à voitures, de tels aménagements étant indispensables au développement de la ville".
B.- Agissant par la voie du recours de droit public, les hoirs Küchler et consorts requièrent le Tribunal fédéral d'annuler la décision du Conseil d'Etat. Ils se plaignent d'une violation des art. 4
SR 101 Bundesverfassung der Schweizerischen Eidgenossenschaft vom 18. April 1999
BV Art. 4 Landessprachen - Die Landessprachen sind Deutsch, Französisch, Italienisch und Rätoromanisch.
Cst. féd. et 6 Cst. val. (garantie de la propriété).
Erwägungen

Considérant en droit:
Les recourants contestent l'utilité publique du plan adopté. Selon la jurisprudence (arrêt Dafflon du 14 novembre 1962, RO 88 I 252), le Tribunal fédéral revoit cette question sous l'angle de l'arbitraire lorsqu'elle se caractérise d'abord comme une question de fait, et avec plein pouvoir lorsqu'elle ressortit davantage au droit. Or le plan attaqué est principalement destiné à tenir compte des besoins futurs de la commune. Pour connaître ces besoins futurs, il faut non seulement constater certains faits actuels mais encore et surtout supputer l'évolution probable des circonstances. Cette seconde opération relève davantage du domaine du droit que de celui du fait. Le Tribunal fédéral peut donc statuer en l'espèce avec plein
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pouvoir. Il s'inspirera à cet égard de la règle selon laquelle les mesures prises par l'autorité ne doivent pas aller audelà de ce qui est nécessaire pour atteindre le but d'intérêt public qu'elle poursuit (RO 84 I 175/176). L'observation de ce principe doit faire l'objet d'un examen attentif tout spécialement lorsqu'une commune urbaine cherche à réaliser certains projets en vue de satisfaire ses besoins futurs. Certes, comme l'a jugé le Tribunal fédéral, une petite commune de banlieue doit, dans les projets qu'elle établit, tenir compte de ses besoins futurs, tels qu'on peut raisonnablement les prévoir au regard du développement de l'agglomération urbaine dans son ensemble (arrêt non publié du 18 décembre 1957 dans la cause S.I. route de Chêne 130 et consorts c. Grand Conseil du canton de Genève et consorts). Certes aussi, il en va de même des communes urbaines proprement dites. Ni les unes ni les autres ne sauraient cependant, sous prétexte d'assurer leurs besoins futurs, user de leur puissance publique pour se réserver des surfaces importantes de terrain, sans en préciser l'affectation et dans le seul but de se trouver, le moment venu, propriétaires d'une quantité suffisante de biens-fonds pour jouir d'une grande liberté de manoeuvre dans l'aménagement du territoire communal. Elles iraient alors au-delà du but d'intérêt public qu'elles sont en droit de poursuivre. Il faut au contraire qu'elles précisent d'emblée, dans toute la mesure possible, à quel but d'intérêt public sont destinés les immeubles appelés à passer au domaine public. En l'espèce, la vaste place que la commune entend créer est destinée aux grandes manifestations qui, aujourd'hui déjà, sont difficiles à organiser, faute d'espaces suffisants. Avec raison, les recourants ne contestent ni ces difficultés ni la nécessité où se trouve la commune de pouvoir offrir aux organisateurs de grandes manifestations des terrains adéquats. Il est conforme à l'intérêt public que le cheflieu d'un canton puisse être le siège de congrès ou fêtes intéressant l'ensemble de ce canton ou même des régions
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plus vastes et que, par conséquent, il dispose d'emplacements convenables. S'agissant de ce but, les surfaces visées par le plan ne sont pas excessives. Du point de vue des besoins actuels, le plan est donc conforme à l'intérêt public. Toutefois, ce plan a été élaboré surtout en fonction des besoins futurs de la commune. Celle-ci compte aujourd'hui 16 000 habitants. Il est raisonnable de penser, avec les autorités cantonales, qu'elle en comptera à peu près le double dans une trentaine d'années. Les recourants eux-mêmes ne le nient pas. Au regard de cette augmentation de la population, les terrains que le projet réserve au domaine public n'ont pas une surface excessive. Ils se trouvent dans une situation judicieusement choisie, à faible distance des gares postale et ferroviaire, à la périphérie de l'agglomération actuelle, entre celle-ci et le futur quartier de la Potence. Loin de constituer une simple réserve de terrains pour des besoins encore indéterminés, ils sont affectés à des buts que la commune a précisés autant qu'on pouvait l'exiger d'elle (places de jeux, promenade, parcs à voitures, place publique pour grandes manifestations). L'intérêt public de tels buts est incontestable. La commune avait d'autant plus de raisons d'agir maintenant déjà que les parcelles en cause sont des terrains à bâtir et que, si des constructions y étaient édifiées, la réalisation du projet serait rendue sinon impossible, du moins très onéreuse. Du point de vue des besoins futurs de la ville, le plan est donc aussi conforme à l'intérêt public.
Dispositiv

Par ces motifs, le Tribunal fédéral
Rejette le recours.