S. 149 / Nr. 25 Obligationenrecht (f)

BGE 75 II 149

25. Arrêt de la Ire Cour civile du 17 mai 1949 dans la cause Girod contre
Etablissements Barberot S. A.


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Regeste:
Société anonyme. Droit aux tantièmes.
1. Valeur litigieuse de l'action en annulation d'une décision de l'assemblée
générale (art. 706
SR 220 Première partie: Dispositions générales Titre premier: De la formation des obligations Chapitre I: Des obligations résultant d'un contrat
CO Art. 706 - 1 Le conseil d'administration et chaque actionnaire peuvent attaquer en justice les décisions de l'assemblée générale qui violent la loi ou les statuts; l'action est dirigée contre la société.
1    Le conseil d'administration et chaque actionnaire peuvent attaquer en justice les décisions de l'assemblée générale qui violent la loi ou les statuts; l'action est dirigée contre la société.
2    Sont en particulier annulables les décisions qui:
1  suppriment ou limitent les droits des actionnaires en violation de la loi ou des statuts;
2  suppriment ou limitent les droits des actionnaires d'une manière non fondée;
3  entraînent pour les actionnaires une inégalité de traitement ou un préjudice non justifiés par le but de la société;
4  suppriment le but lucratif de la société sans l'accord de tous les actionnaires.564
3    et 4 ...565
5    Le jugement qui annule une décision de l'assemblée générale est opposable à tous les actionnaires, et chacun d'eux peut s'en prévaloir.
CO).
2. L'administrateur d'une société anonyme n'a pas besoin, pour faire valoir
son droit à des tantièmes, d'attaquer, en tant qu'actionnaire, la décision de
l'assemblée générale qui les lui refuse.
Qualité de l'administrateur-actionnaire pour intenter une telle action.
Conclusions qu'il peut prendre.
3. Interprétation d'une disposition statutaire qui subordonne la distribution
de tantièmes au versement aux actionnaires d'un dividende « jusqu'à
concurrence du 6 % du montant de leurs actions ». Art. 630
SR 220 Première partie: Dispositions générales Titre premier: De la formation des obligations Chapitre I: Des obligations résultant d'un contrat
CO Art. 630 - Pour être valable, la souscription requiert:
1  l'indication du nombre, de la valeur nominale, de l'espèce, de la catégorie et du prix d'émission des actions;
2  l'engagement inconditionnel d'effectuer un apport correspondant au prix d'émission.
ancien CO et 677 CO
revisé.
Aktiengesellschaft. Anspruch auf Tantièmen.
1. Streitwert der Klage auf Anfechtung eines Generalversammlungsbeschlusses
(Art. 706).
2. Das Verwaltungsratsmitglied einer A.-G. braucht zur Geltendmachung seines
Anspruchs auf Tantièmen nicht in seiner Eigenschaft als Aktionär den
Generalversammlungsbeschluss anzufechten, durch den ihm die Ausrichtung der
Tantième verweigert wird.
Legitimation des dem Verwaltungsrat angehörenden Aktionärs zur Erhebung einer
Anfechtungsklage; zulässige Rechtsbegehren.
3. Auslegung einer Statutenbestimmung, welche die Ausrichtung einer Tantième
von der Auszahlung einer Dividende « bis zu 6 % » abhängig macht (Art. 630
aOR, 677 revOR).
Società anonima. Diritto ai « tantièmes ».
1. Valore litigioso dell'azione di annullamento d'una deliberazione
dell'assemblea generale (art. 706
SR 220 Première partie: Dispositions générales Titre premier: De la formation des obligations Chapitre I: Des obligations résultant d'un contrat
CO Art. 706 - 1 Le conseil d'administration et chaque actionnaire peuvent attaquer en justice les décisions de l'assemblée générale qui violent la loi ou les statuts; l'action est dirigée contre la société.
1    Le conseil d'administration et chaque actionnaire peuvent attaquer en justice les décisions de l'assemblée générale qui violent la loi ou les statuts; l'action est dirigée contre la société.
2    Sont en particulier annulables les décisions qui:
1  suppriment ou limitent les droits des actionnaires en violation de la loi ou des statuts;
2  suppriment ou limitent les droits des actionnaires d'une manière non fondée;
3  entraînent pour les actionnaires une inégalité de traitement ou un préjudice non justifiés par le but de la société;
4  suppriment le but lucratif de la société sans l'accord de tous les actionnaires.564
3    et 4 ...565
5    Le jugement qui annule une décision de l'assemblée générale est opposable à tous les actionnaires, et chacun d'eux peut s'en prévaloir.
CO).
2. Per far valere il suo diritto a dei « tantièmes », l'amministratore d'una
società anonima non è tenuto a contestare, quale azionista, la decisione
dell'assemblea generale che glieli nega.
Veste dell'amministratore-azionista per proporre una siffatta azione,
conclusioni ammissibili.
3. Interpretazione d'una disposizione statutaria che fa dipendere il pagamento
d'un « tantième » dalla distribuzione d'un dividendo agli azionisti « fino a
concorrenza del 6 % dell'ammontare delle loro azioni ». Art. 630
SR 220 Première partie: Dispositions générales Titre premier: De la formation des obligations Chapitre I: Des obligations résultant d'un contrat
CO Art. 630 - Pour être valable, la souscription requiert:
1  l'indication du nombre, de la valeur nominale, de l'espèce, de la catégorie et du prix d'émission des actions;
2  l'engagement inconditionnel d'effectuer un apport correspondant au prix d'émission.

dell'anteriore CO e 677 del l'attuale CO.

A. ­ La Société anonyme Les Etablissements R. Barberot, dont le siège est à
Genève, a été fondée sous l'empire des anciennes dispositions du Code des
obligations sur les sociétés anonymes. Ses statuts ont subi une révision
partielle le 27 octobre 1936. Le capital social est actuellement

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de 200 000 fr., divisé en 400 actions nominatives de 500 fr. chacune. Au 30
septembre 1946, date de la clôture de l'exercice 1945-1946, la réserve avait
atteint le maximum prévu à l'art. 27 des statuts, soit 100 000 fr.
Henri Girod est propriétaire de 80 actions. Jusqu'à la clôture de l'exercice
au 30 septembre 1946, il était, avec Denis Mesritz, administrateur délégué de
la société. Le conseil d'administration compte en outre trois administrateurs
ordinaires.
A la suite de divergences de vues avec les autres administrateurs, Henri Girod
renonça à son mandat pour la fin de l'exercice 1945-1946.
Le bénéfice de cet exercice se monte, selon le compte de pertes et profits, à
39 867 fr. 15. Le conseil d'administration proposa à l'assemblée générale
d'utiliser ce bénéfice comme suit:
amortissement du compte matériel Fr. 1599.55
amortissement du compte auto Fr. 1036.80
dividende 5 % au capital-actions Fr. 10000.--
allocation au personnel Fr. 2150.--
report à nouveau du solde Fr. 25080.80
Somme égale au bénéfice Fr. 39867.15
L'assemblée générale eut lieu le 16 décembre 1946. Girod protesta contre la
répartition proposée, qu'il déclara être en violation flagrante de l'art. 28
des statuts dont la teneur est la suivante:
« Sur les bénéfices nets dûment constatés, il sera tout d'abord prélevé le 10
% pour constituer la réserve statutaire. Ce prélèvement cessera lorsque le 50
% du capital social aura été atteint, quitte à être repris au cas où la
réserve aurait été entamée ensuite de pertes ultérieures. ­ Il sera ensuite
servi aux actionnaires un dividende jusqu'à concurrence de 6 % du montant de
leurs actions. ­ Le surplus des bénéfices sera réparti de la manière suivante
30 % aux administrateurs à titre de tantièmes et 70 % à la disposition de
l'assemblée générale, pour être utilisé selon qu'elle avisera.
L'opposition de Girod fut rejetée et l'assemblée générale vota les
propositions du conseil d'administration, sans attri

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buer aux administrateurs le 30 % du surplus du bénéfice après le versement du
5 % au capital-actions.
Par lettre du 18 décembre, Me S., au nom de Girod, demanda la convocation
d'une assemblée générale extraordinaire pour annuler la décision de
l'assemblée du 16 décembre 1946 et décider une répartition du bénéfice
conformément aux statuts.
Cette assemblée extraordinaire eut lieu le 6 février 1947. Elle décida par 20
voix contre 5 (celles de Girod) de maintenir purement et simplement la
décision votée le 16 décembre 1946.
B. ­ Par exploit du 27 février 1947, Henri Girod a intenté action aux
Etablissements R. Barberot. Ses conclusions, modifiées en cours d'instance,
étaient en définitive les suivantes:
« Déclarer nulles et de nul effet les décisions prises par les assemblées
générales, ordinaire, du 16 décembre 1946 et extraordinaire du 6 février 1947,
relatives à l'utilisation du bénéfice net de l'exercice du 1er octobre 1946 au
30 septembre 1946;
Prescrire à la S.A., soit à son assemblée générale, d'attribuer aux
administrateurs les tantièmes qui leur sont dus sur les bénéfices nets de
l'exercice du 1er octobre 1945 au 30 septembre 1946 et ce conformément aux
statuts et à la loi, soit une somme globale de 8169 fr. 25 à répartir entre
les membres du conseil d'administration conformément aux règles utilisées par
ce dernier pour cette répartition. En conséquence: Condamner la S.A. à payer à
Girod la somme de 2723 fr. 10 avec intérêts 6 % dès le 16 décembre 1946 à
titre de tantièmes qui lui sont dus pour les fonctions d'administrateur
délégué de ladite société qu'il a exercées pendant l'exercice en question, le
tout avec suite de dépens. »
D'après le demandeur, le bénéfice de 39 867 fr. 15 devrait, selon l'art. 28
des statuts, être réparti comme suit:
amortissement sur matériel Fr. 1 599.56
amortissement sur auto Fr. 1 036.80
dividende 5 % aux actions Fr. 10 000.-
30 % du surplus au conseil d'administration Fr. 8 169.25
allocations au personnel Fr. 2 150.-
somme reportée à nouveau Fr. 16 911.55

somme égale au bénéfice Fr. 39 867.15
Quant aux 8169 fr. 25 attribués au conseil d'administration, ils devraient,
selon des règles fixées par le conseil,

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se répartir ainsi: 5446 fr. 10 aux deux administrateurs délégués, soit 2723
fr. 05 à chacun d'eux, et 2723 fr. 15 aux trois autres administrateurs.
Le demandeur fonde son action sur l'art. 28
SR 220 Première partie: Dispositions générales Titre premier: De la formation des obligations Chapitre I: Des obligations résultant d'un contrat
CO Art. 28 - 1 La partie induite à contracter par le dol de l'autre n'est pas obligée, même si son erreur n'est pas essentielle.
1    La partie induite à contracter par le dol de l'autre n'est pas obligée, même si son erreur n'est pas essentielle.
2    La partie qui est victime du dol d'un tiers demeure obligée, à moins que l'autre partie n'ait connu ou dû connaître le dol lors de la conclusion du contrat.
des statuts, ainsi que sur les
art. 706
SR 220 Première partie: Dispositions générales Titre premier: De la formation des obligations Chapitre I: Des obligations résultant d'un contrat
CO Art. 706 - 1 Le conseil d'administration et chaque actionnaire peuvent attaquer en justice les décisions de l'assemblée générale qui violent la loi ou les statuts; l'action est dirigée contre la société.
1    Le conseil d'administration et chaque actionnaire peuvent attaquer en justice les décisions de l'assemblée générale qui violent la loi ou les statuts; l'action est dirigée contre la société.
2    Sont en particulier annulables les décisions qui:
1  suppriment ou limitent les droits des actionnaires en violation de la loi ou des statuts;
2  suppriment ou limitent les droits des actionnaires d'une manière non fondée;
3  entraînent pour les actionnaires une inégalité de traitement ou un préjudice non justifiés par le but de la société;
4  suppriment le but lucratif de la société sans l'accord de tous les actionnaires.564
3    et 4 ...565
5    Le jugement qui annule une décision de l'assemblée générale est opposable à tous les actionnaires, et chacun d'eux peut s'en prévaloir.
,660
SR 220 Première partie: Dispositions générales Titre premier: De la formation des obligations Chapitre I: Des obligations résultant d'un contrat
CO Art. 660 - 1 Tout actionnaire a droit à une part proportionnelle du bénéfice résultant du bilan, pour autant que la loi ou les statuts prévoient sa répartition entre les actionnaires.
1    Tout actionnaire a droit à une part proportionnelle du bénéfice résultant du bilan, pour autant que la loi ou les statuts prévoient sa répartition entre les actionnaires.
2    Il a droit, lors de la dissolution de la société, à une part proportionnelle du produit de la liquidation, à moins que les statuts ne règlent autrement l'emploi de l'actif de la société dissoute.
3    Les privilèges que les statuts confèrent à certaines catégories d'actions sont réservés.
,671 al. 1
SR 220 Première partie: Dispositions générales Titre premier: De la formation des obligations Chapitre I: Des obligations résultant d'un contrat
CO Art. 671 - 1 Sont affectés à la réserve légale issue du capital:
1    Sont affectés à la réserve légale issue du capital:
1  le produit réalisé lors de l'émission d'actions au-dessus de leur valeur nominale, sous déduction des frais d'émission;
2  les paiements libératoires retenus sur les actions annulées (art. 681, al. 2), pour autant qu'aucune moins-value n'ait été réalisée sur les nouvelles actions émises;
3  les autres apports et versements supplémentaires libérés par les titulaires de titres de participation.
2    La réserve légale issue du capital peut être remboursée aux actionnaires si les réserves légales issues du capital et du bénéfice après déduction du montant des pertes éventuelles dépassent la moitié du capital-actions inscrit au registre du commerce.
3    Lorsque le but principal de la société est la prise de participations dans d'autres entreprises (société holding), la réserve légale ne peut être remboursée aux actionnaires que si les réserves légales issues du capital et du bénéfice dépassent 20 % du capital-actions inscrit au registre du commerce.
4    La réserve légale pour actions propres dans le groupe (art. 659b) et la réserve légale issue du bénéfice résultant de réévaluations (art. 725c) ne sont pas prises en considération dans le calcul des seuils visés aux al. 2 et 3.
, 674
SR 220 Première partie: Dispositions générales Titre premier: De la formation des obligations Chapitre I: Des obligations résultant d'un contrat
CO Art. 674 - 1 Les pertes doivent être compensées avec, dans l'ordre suivant:
1    Les pertes doivent être compensées avec, dans l'ordre suivant:
1  le bénéfice reporté;
2  les réserves facultatives issues du bénéfice;
3  la réserve légale issue du bénéfice;
4  la réserve légale issue du capital.
2    Les pertes résiduelles peuvent être reportées partiellement ou intégralement dans les nouveaux comptes annuels au lieu d'être compensées avec la réserve légale issue du bénéfice ou avec la réserve légale issue du capital.
et 677
SR 220 Première partie: Dispositions générales Titre premier: De la formation des obligations Chapitre I: Des obligations résultant d'un contrat
CO Art. 677 - Des parts de bénéfice ne peuvent être attribuées aux membres du conseil d'administration que si elles sont prélevées sur le bénéfice résultant du bilan, après les affectations à la réserve légale et la répartition d'un dividende de 5 % ou d'un taux supérieur prévu par les statuts.
CO.
La défenderesse a conclu à libération. D'après elle, le surplus du bénéfice
dont il est question à l'art. 28 et dont 30 % reviennent au conseil
d'administration ne s'entend qu'une fois qu'un dividende de 6 % a été
distribué aux actionnaires. Or le dividende voté par l'assemblée générale a
été de 5 % et non de 6 %, de telle sorte qu'il n'y a aucuns tantièmes pour le
conseil d'administration et que la totalité du bénéfice restant, par 25 080
fr. 80, peut être reportée à nouveau, comme l'a décidé l'assemblée générale.
Le Tribunal de première instance de Genève a rejeté la demande.
Sur appel, la Cour de justice, statuant le 10 décembre 1948, a confirmé ce
jugement.
C. ­ Contre l'arrêt de la Cour, Girod recourt en réforme au Tribunal fédéral
en reprenant les conclusions de sa demande.
L'intimée demande au Tribunal fédéral, principalement de déclarer le recours
irrecevable, faute de la valeur litigieuse requise, subsidiairement de le
rejeter.
Considérant en droit:
1. ­ Le demandeur déclare exercer l'action de l'art. 706
SR 220 Première partie: Dispositions générales Titre premier: De la formation des obligations Chapitre I: Des obligations résultant d'un contrat
CO Art. 706 - 1 Le conseil d'administration et chaque actionnaire peuvent attaquer en justice les décisions de l'assemblée générale qui violent la loi ou les statuts; l'action est dirigée contre la société.
1    Le conseil d'administration et chaque actionnaire peuvent attaquer en justice les décisions de l'assemblée générale qui violent la loi ou les statuts; l'action est dirigée contre la société.
2    Sont en particulier annulables les décisions qui:
1  suppriment ou limitent les droits des actionnaires en violation de la loi ou des statuts;
2  suppriment ou limitent les droits des actionnaires d'une manière non fondée;
3  entraînent pour les actionnaires une inégalité de traitement ou un préjudice non justifiés par le but de la société;
4  suppriment le but lucratif de la société sans l'accord de tous les actionnaires.564
3    et 4 ...565
5    Le jugement qui annule une décision de l'assemblée générale est opposable à tous les actionnaires, et chacun d'eux peut s'en prévaloir.
CO en annulation des
décisions des assemblées générales du 16 décembre 1946 et du 6 février 1947.
Pour déterminer la valeur litigieuse d'une telle action, on doit tenir compte,
d'après la jurisprudence (RO 66 II 48, 54 II 19), de l'intérêt de la société,
et non de l'intérêt personnel de l'actionnaire à l'issue du procès. Les
décisions dont il s'agit en l'espèce ont trait à la répartition d'une part de
bénéfice de 8169 fr. 25. La valeur litigieuse est donc atteinte et le recours
est recevable, sous réserve du droit de

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l'administrateur Girod d'attaquer ces décisions comme telles en sa qualité
d'actionnaire (consid. 2 ci-dessous).
2. ­ Le demandeur est manifestement parti de l'idée qu'il ne pouvait faire
valoir son droit à des tantièmes sans obtenir au préalable l'annulation des
décisions des assemblées générales, refusant de les accorder. Cette manière de
voir est erronée.
a) Le membre du conseil d'administration d'une société anonyme se trouve
généralement lié à elle par un contrat de travail ou en tout cas par un
contrat de mandat. Les tantièmes représentent la rémunération ou une partie de
la rémunération qui est due à l'administrateur. Ils peuvent faire l'objet
d'une convention expresse. Mais même lorsque, comme en l'espèce, les tantièmes
sont déterminés par les statuts, ils sont dus ex contractu; dans ce cas, les
dispositions statutaires sont de plein droit partie intégrante du contrat qui
lie l'administrateur à la société anonyme. Si donc celle-ci ne satisfait pas à
son obligation inscrite dans les statuts de verser des tantièmes déterminés,
chaque administrateur peut pour sa part en demander le paiement, et à cet
égard il se trouve par rapport à la société dans la situation d'un créancier,
c'est-à-dire d'un tiers quelconque. Or un tiers peut naturellement faire
valoir ses droits contre la société anonyme quoi qu'il en soit de la décision
par laquelle l'assemblée générale exprime la volonté interne de la société. Il
en va de même pour l'administrateur qui réclame la délivrance de tantièmes. En
ce qui le concerne aussi, c'est au juge seul et non à l'assemblée générale de
décider s'il lui est dû quelque chose.
Il était par conséquent inutile que Girod attaquât les décisions des
assemblées générales pour se faire payer ce qu'il estimait devoir lui revenir
à titre de tantièmes.
b) On doit même se demander s'il est recevable à intenter cette action. En
tant que membre du conseil d'administration, il n'a pas ce droit (cf. art. 706
SR 220 Première partie: Dispositions générales Titre premier: De la formation des obligations Chapitre I: Des obligations résultant d'un contrat
CO Art. 706 - 1 Le conseil d'administration et chaque actionnaire peuvent attaquer en justice les décisions de l'assemblée générale qui violent la loi ou les statuts; l'action est dirigée contre la société.
1    Le conseil d'administration et chaque actionnaire peuvent attaquer en justice les décisions de l'assemblée générale qui violent la loi ou les statuts; l'action est dirigée contre la société.
2    Sont en particulier annulables les décisions qui:
1  suppriment ou limitent les droits des actionnaires en violation de la loi ou des statuts;
2  suppriment ou limitent les droits des actionnaires d'une manière non fondée;
3  entraînent pour les actionnaires une inégalité de traitement ou un préjudice non justifiés par le but de la société;
4  suppriment le but lucratif de la société sans l'accord de tous les actionnaires.564
3    et 4 ...565
5    Le jugement qui annule une décision de l'assemblée générale est opposable à tous les actionnaires, et chacun d'eux peut s'en prévaloir.

CO). Il ne l'a qu'en tant qu'actionnaire. Mais en cette qualité, il

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ne peut défendre que des intérêts de membre de la société anonyme, non des
intérêts d'administrateur.
Cependant, pour qu'un actionnaire soit habilité à attaquer une décision
d'assemblée générale, il n'est pas nécessaire que ses intérêts personnels
soient directement en jeu. Comme détenteur d'une part du capital social, il
est en droit de sauvegarder l'intérêt général de la société anonyme à la
marche régulière de l'entreprise. Et, à cet égard, on doit lui reconnaître la
faculté de s'opposer à toute décision qui viole la loi ou les statuts. Certes,
lorsqu'un actionnaire attaque le refus par l'assemblée générale de verser des
tantièmes aux administrateurs, il ne paraît pas agir dans l'intérêt de la
société. Pourtant il importe, pour le bon ordre des affaires, que des
questions douteuses puissent être élucidées par la voie de l'action en
annulation d'une décision de l'assemblée générale.
A ce titre, le demandeur Girod a par conséquent, en tant qu'actionnaire, un
intérêt à attaquer les décisions par lesquelles l'assemblée générale a refusé
de verser des tantièmes aux administrateurs. Mais son action ne peut tendre
qu'à faire annuler ces décisions, soit à faire constater que l'assemblée
générale a mal interprété la disposition des statuts relative aux tantièmes.
Il n'a pas un intérêt à ce que l'assemblée générale soit invitée à verser les
tantièmes qui seraient dus. En ce qui le concerne, il peut, comme créancier de
la société, la rechercher en vertu de son contrat. En ce qui concerne les
autres administrateurs, il n'est évidemment pas intéressé à ce qu'ils
reçoivent leurs tantièmes. Au contraire; ces autres administrateurs sont ses
antagonistes, et s'ils ont des prétentions contre la société, il leur est
loisible de les faire valoir eux-mêmes.
Cela étant, il est superflu d'examiner si, d'une manière générale, le jugement
qui statue sur l'action de l'art. 706
SR 220 Première partie: Dispositions générales Titre premier: De la formation des obligations Chapitre I: Des obligations résultant d'un contrat
CO Art. 706 - 1 Le conseil d'administration et chaque actionnaire peuvent attaquer en justice les décisions de l'assemblée générale qui violent la loi ou les statuts; l'action est dirigée contre la société.
1    Le conseil d'administration et chaque actionnaire peuvent attaquer en justice les décisions de l'assemblée générale qui violent la loi ou les statuts; l'action est dirigée contre la société.
2    Sont en particulier annulables les décisions qui:
1  suppriment ou limitent les droits des actionnaires en violation de la loi ou des statuts;
2  suppriment ou limitent les droits des actionnaires d'une manière non fondée;
3  entraînent pour les actionnaires une inégalité de traitement ou un préjudice non justifiés par le but de la société;
4  suppriment le but lucratif de la société sans l'accord de tous les actionnaires.564
3    et 4 ...565
5    Le jugement qui annule une décision de l'assemblée générale est opposable à tous les actionnaires, et chacun d'eux peut s'en prévaloir.
CO peut, outre l'annulation de la
décision attaquée, prescrire positivement l'attitude que la société doit
adopter ou les paiements qu'elle a à faire (en ce sens, RO 26 II 469).
3. ­ D'après l'art. 28 des statuts relatif à l'utilisation

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du bénéfice net annuel, la distribution de tantièmes aux administrateurs
suppose ­ abstraction faite du versement à la réserve statutaire, qui n'avait
pas à être opéré en l'espèce, le fonds ayant déjà atteint son maximum ­ qu'il
ait été « servi aux actionnaires un dividende jusqu'à concurrence du six pour
cent du montant de leurs actions » (al. 2).
a) A l'époque où les statuts ont été rédigés, aucune disposition légale ne
protégeait le droit de l'actionnaire à un dividende contre le prélèvement de
tantièmes par les administrateurs. L'art. 630
SR 220 Première partie: Dispositions générales Titre premier: De la formation des obligations Chapitre I: Des obligations résultant d'un contrat
CO Art. 630 - Pour être valable, la souscription requiert:
1  l'indication du nombre, de la valeur nominale, de l'espèce, de la catégorie et du prix d'émission des actions;
2  l'engagement inconditionnel d'effectuer un apport correspondant au prix d'émission.
ancien CO disposait seulement
que «les dividendes et tantièmes ne peuvent être payés que sur le bénéfice net
établi par le bilan annuel ». L'art. 28 al. 2 des statuts garantit en principe
le paiement d'un dividende aux actionnaires, avant toute distribution de
tantièmes aux administrateurs.
Toutefois la clause ne fixe pas le taux de ce dividende. Elle ne dit pas qu'il
sera servi un dividende de 6 %, mais un dividende « jusqu'à concurrence de 6 %
». Interprété logiquement, ce texte veut dire que les administrateurs ne
peuvent se voir imposer la perception par les actionnaires d'un dividende
supérieur avant de toucher eux-mêmes leurs parts aux bénéfices; en revanche,
si les actionnaires reçoivent un dividende inférieur à 6 %, ils ne peuvent pas
s'opposer pour autant au versement de tantièmes aux administrateurs. Il est
vrai que, d'après cette interprétation, l'assemblée générale aurait pu, sous
l'empire de l'ancien droit, décider de servir aux actionnaires un dividende
insignifiant qui aurait tout de même légitimé la distribution de tantièmes aux
administrateurs. On peut douter que ce résultat ait été conforme à l'esprit de
la disposition statutaire. Mais il n'y a pas lieu de se prononcer à ce sujet,
car il faut se placer, pour interpréter l'art. 28 des statuts, sous l'empire
du nouveau droit des sociétés anonymes, et à cet égard le sens de la règle
statutaire n'est pas douteux.
b) L'art. 677 du Code des obligations revisé a assuré la protection des
actionnaires en disposant que « des parts

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de bénéfice ne peuvent être attribuées aux administrateurs que si elles sont
prélevées sur le bénéfice net après l'exécution des versements au fonds de
réserve légal et la répartition, sur ledit bénéfice, d'un dividende de quatre
pour cent ou d'un taux supérieur prévu par les statuts ». La société
défenderesse, qui a revisé, le 27 octobre 1936, diverses dispositions de ses
statuts, n'a pas modifié l'art. 28. Cette modification n'était pas nécessaire
si l'on admet que cet article ne subordonnait pas la distribution de tantièmes
au versement d'un dividende de 6 %; il suffisait que la loi fixât elle-même le
minimum à 4 %, la société demeurant libre de porter ce taux jusqu'à 6 %,
maximum prévu par les statuts. Il y avait lieu en revanche de modifier l'art.
28 si l'on admet que jusqu'alors, celui-ci signifiait que le taux de 6 %
devait être atteint avant toute distribution de tantièmes. La loi fixant
désormais un minimum, l'expression « jusqu'à concurrence du six pour cent » ne
pouvait servir à désigner le « taux supérieur prévu par les statuts » au sens
de l'art. 677
SR 220 Première partie: Dispositions générales Titre premier: De la formation des obligations Chapitre I: Des obligations résultant d'un contrat
CO Art. 677 - Des parts de bénéfice ne peuvent être attribuées aux membres du conseil d'administration que si elles sont prélevées sur le bénéfice résultant du bilan, après les affectations à la réserve légale et la répartition d'un dividende de 5 % ou d'un taux supérieur prévu par les statuts.
in fine CO. Rapproché de cette disposition, l'art. 28 des
statuts veut tout naturellement dire que l'assemblée générale a la faculté de
fixer le dividende entre le minimum légal de 4 % et le maximum statutaire de 6
% avant que les administrateurs puissent prétendre à des tantièmes pour leur
activité. De la sorte, les actionnaires sont protégés par la loi contre les
prétentions des administrateurs, mais ceux-ci se voient protégés par les
statuts à l'égard des actionnaires, lesquels, s'ils peuvent se faire octroyer
un dividende supérieur à 4 %, sont limités par le 6 % et ne peuvent ainsi
priver de leur part au bénéfice ceux qui ont la charge et la responsabilité
d'administrer la société. Pour écarter cette interprétation naturelle, il
fallait prescrire formellement, par une revision des statuts, qu'aucuns
tantièmes ne seraient distribués aux administrateurs tant qu'il ne serait pas
servi aux actionnaires un dividende de 6 %.
En l'espèce, l'assemblée des actionnaires a décidé de répartir un dividende de
5 °/n. Dès lors' la loi permet et

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l'art. 28 al. 3 des statuts prescrit la distribution aux administrateurs du 30
% sur le surplus du bénéfice.
c) C'est en vain que la Cour de justice invoque, en faveur de la thèse de la
défenderesse, les travaux préparatoires. Si le législateur a voulu, en
édictant l'art. 677
SR 220 Première partie: Dispositions générales Titre premier: De la formation des obligations Chapitre I: Des obligations résultant d'un contrat
CO Art. 677 - Des parts de bénéfice ne peuvent être attribuées aux membres du conseil d'administration que si elles sont prélevées sur le bénéfice résultant du bilan, après les affectations à la réserve légale et la répartition d'un dividende de 5 % ou d'un taux supérieur prévu par les statuts.
CO, protéger les créanciers et les actionnaires de la
société, il n'a nullement entendu supprimer ou restreindre plus qu'il n'est
nécessaire le droit des administrateurs à une participation aux bénéfices, qui
apparaît comme la contrepartie de l'activité qu'ils déploient et de la
responsabilité qu'ils encourent en acceptant un mandat. Dès le moment où les
règles de protection édictées par la loi sont observées ­ et elles l'ont été
dans le cas particulier ­ on ne saurait faire appel à la volonté du
législateur pour interpréter contre les administrateurs une disposition
statutaire telle que l'art. 28 des statuts de la défenderesse.
Par ailleurs, puisque le dividende de 6 % n'est qu'un maximum qui n'a pas
besoin d'être atteint avant que les administrateurs puissent prétendre à des
tantièmes, on ne peut pas dire, avec la Cour de justice, que les actionnaires,
en votant un dividende de 5 %, aient fait un sacrifice auquel devait
correspondre un sacrifice des administrateurs. Encore moins peut-on
considérer, avec le Tribunal de première instance, que Girod aurait accepté la
suppression des tantièmes par le fait qu'il avait donné son accord pour la
distribution d'un dividende de 5 %.
d) En conséquence, les assemblées générales des 16 décembre 1946 et 6 février
1947 ont violé l'art. 28 des statuts en décidant qu'aucuns tantièmes ne
seraient attribués aux membres du conseil d'administration. ()es décisions
doivent, dès lors, être annulées.
D'autre part, l'art. 28 des statuts fonde un droit contractuel du demandeur
Girod à une part des 8169 fr. 25 représentant le 30 % du surplus du bénéfice
après déduction des amortissements et du dividende de 5 % aux actions. La
défenderesse n'a pas contesté que cette part fût du tiers de la somme
ci-dessus, soit de 2723 fr. 10.

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Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
Le recours est admis, l'arrêt attaqué est annulé et la demande admise en ce
sens que
a) les décisions des assemblées générales des Etablissements R. Barberot S.A.,
du 16 décembre 1946 et du 6 février 1947 sont annulées dans la mesure où elles
n'attribuent aucuns tantièmes au conseil d'administration;
b) la défenderesse est condamnée à payer au demandeur la somme de 2723 fr. 10
avec intérêt à 6 % dés le 16 décembre 1946.
Vgl. auch Nr. 22, 27. ­ Voir aussi nos 22, 27.