S. 89 / Nr. 19 Organisation der Bundesrechtspflege (f)

BGE 69 I 89

19. Arrêt du 4 octobre 1943 dans la cause Germanier contre Lovev.

Regeste:
Qualité pour interjeter un recours de droit public (art. 178 ch. 2 OJ).
Celui qui est lésé dans ses intérêts personnels par un acte délictueux n'a
qualité, ni comme plaignant, ni même comme accusateur privé, pour interjeter
un recours de droit public contre une ordonnance de non-lieu ou un
acquittement. Il en est ainsi même en matière de plainte pour atteinte à
l'honneur.
Legitimation zur staatsrechtlichen Beschwerde (Art. 178 Ziff. 2 OG).
Wer in seinen persönlichen Interessen verletzt oder geschädigt wird durch eine
Handlung, die ein Strafverfahren zur Folge hatte, ist weder als
Strafantragsteller, noch als Privatstrafkläger legitimiert zur
staatsrechtlichen Beschwerde gegen die Einstellung des Strafverfahrens oder
ein freisprechendes Urteil. Das gilt auch bei Strafprozessen wegen
Ehrverletzung.
Qualità per interporre ricorso di diritto pubblico (art. 178 cifra 2 OGF).
Chi è leso nei suoi interessi personali da un atto delittuoso non ha qualità,
nè come denunciante, nè come accusatore privato, per interporre un ricorso di
diritto pubblico contro un decreto di abbandono od un'assoluzione. Ciò vale
anche in materia di denuncia per delitti contro l'onore.

A. ­ Le 12 mai 1942, Joseph Germanier, président de la Commune de Conthey, a
porté plainte contre Jules

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Lovey, gendarme au même lieu, «pour outrages, calomnies, diffamation et
injures». Il prétendait qu'en parlant de lui, Lovey l'avait traité de «Pilate»
en présence de tiers. Au cours de l'enquête, il a déclaré qu'il se portait
partie civile et indiquerait plus tard le montant de sa réclamation.
Lovey a conteste les faits qui lui étaient reprochés en soutenant que le mot
de Pilate ne s'adressait pas au plaignant.
Par jugement du 13 avril 1943, après avoir entendu une série de témoins et
contrairement aux conclusions déposées par le Ministère public, qui avait
proposé l'acquittement du prévenu, le Juge instructeur des districts d'Hérens
et de Conthey a reconnu Lovey coupable d'injure à l'égard du plaignant et l'a
condamné à 20 fr. d'amende et aux frais. Quant aux conclusions civiles, il les
a allouées à concurrence de 50 fr.
Sur appel de Lovey, le Tribunal cantonal du Valais, par arrêt du 11 juin 1943,
a réformé ce jugement en ce sens qu'il a acquitté le prévenu et condamné
Germanier aux frais de première instance et d'appel, le renvoyant au surplus à
faire valoir devant le juge civil sa prétention à des dommages-intérêts.
B. ­ Germanier a interjeté contre cet arrêt un recours de droit public pour
violation de l'art. 4 Const. féd. Son argumentation se ramène à soutenir que
le Tribunal cantonal a fait un exposé inexact des faits par suite d'une
interprétation arbitraire des témoignages. Il conclut en conséquence à
l'annulation de l'arrêt et à la condamnation de Lovey à tous les frais ainsi
qu'à une indemnité extrajudiciaire pour l'instance devant le Tribunal fédéral.
Lovey a conclu au rejet du recours et à l'allocation des dépens.
Considérant en droit:
Aux termes de l'art. 178 ch. 2 OJ, la qualité pour former un recours de droit
public appartient aux particuliers et

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collectivités lésés dans leurs droits par des décisions ou des arrêtés d'une
portée générale ou qui les concernent personnellement. Cependant, même celui
dont les intérêts personnels sont lésés n'a pas toujours qualité pour
recourir; il faut encore que ces intérêts soient directement protégés par la
disposition dont il invoque la violation. Tel n'est pas le cas, en matière
pénale, du plaignant qui interjette recours contre une ordonnance de non-lieu
ou un jugement d'acquittement. En effet, l'action pénale à laquelle ces
décisions mettent fin appartient exclusivement à l'Etat, c'est dans l'intérêt
public qu'elle a été instituée et ce n'est qu'indirectement qu'elle profite au
plaignant. La question de savoir s'il a une action en rétablissement de l'état
antérieur au fait incriminé, en dommages-intérêts ou en réparation morale, est
étrangère au droit pénal. C'est en se fondant sur ces considérations que le
Tribunal fédéral, modifiant sa jurisprudence antérieure, a jugé que celui qui
est lésé dans ses intérêts personnels par un acte délictueux n'a qualité, ni
comme plaignant, ni même comme accusateur privé, pour former, recours de droit
public contre une décision de non-lieu ou un acquittement (RO 69 I 17 et
suiv.).
Il n'y a pas de motif de s'écarter de ce principe ni d'y apporter une
exception en matière de plainte pour atteinte à l'honneur, en tant du moins
que la question est tranchée dans un procès pénal. (Le point de savoir s'il
faudrait en juger de même dans les cas où l'atteinte à l'honneur ferait
l'objet d'un procès civil peut demeurer indécise en l'espèce, car la loi
valaisanne la considère comme matière d'un procès pénal auquel il autorise du
reste le Ministère public à intervenir aux côtés du plaignant.)
Cette jurisprudence a certes en vue le cas où, comme en l'espèce, la partie
civile attaque le jugement pénal en son entier et non pas celui où elle se
plaindrait de la violation de droits spécifiquement attachés à sa qualité de
partie civile, en soutenant, par exemple, que tout en acquittant le prévenu,
le juge aurait pu ou dû néanmoins

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adjuger les conclusions civiles en vertu du droit de procédure cantonal, ou
que ce droit s'opposait à un renvoi de l'action civile au juge civil, ou
encore que si ce renvoi était possible, c'était uniquement à l'effet de faire
fixer le montant du dommage, la décision sur le principe même de
l'indemnisation étant du ressort du juge pénal. Mais aucune de ces hypothèses
n'est réalisée en l'espèce et il n'y a donc pas lieu de s'y arrêter.
C'est sur l'action de l'Etat, en l'espèce aussi, qu'ont porté le jugement et
l'arrêt attaqués et ce n'est que pour de, raisons d'économie qu'il a été
statué également sur des points étrangers au droit pénal. Il est sans intérêt
que l'acquittement ait été prononcé en seconde instance seulement, alors que
le premier juge avait condamné le prévenu. La décision a porté chaque fois sur
l'action publique. Le rejet de cette action par le Tribunal cantonal a sans
doute eu pour résultat d'entraîner l'annulation des conséquences que le
premier juge avait tirées de la condamnation, mais cela ne préjuge pas les
prétentions du plaignant au civil. Aussi bien le Tribunal cantonal l'a-t-il
renvoyé à les faire valoir devant le juge civil.
Le recourant n'a pas formulé de griefs spéciaux contre sa condamnation aux
frais de l'affaire et n'a donc pas attaqué cette décision pour elle-même. Il
n'est donc pas nécessaire de trancher la question de savoir si le défaut de
qualité pour recourir sur le fond n'entraîne pas de plein droit
l'irrecevabilité du recours quant à la décision relative aux frais, considérée
comme un point accessoire.
Le Tribunal fédéral prononce:
Le recours est irrecevable.