S. 280 / Nr. 44 Bundesrechtliche Abgaben (f)

BGE 60 I 280

44. Arrêt du 4 octobre 1934 dans la cause Raemy contre Fribourg.

Regeste:
Cours militaires facultatifs de ski: les participants à ces cours, devenus
inaptes au service militaire par suite de leur participation au cours, ont
droit à l'exemption fiscale prévue à l'art. 2 b LTM si le cours en question
était organisé militairement (obligation de porter l'uniforme,
assujettissement des participants à la discipline et au Code pénal militaires)
et s'il comportait des risques analogues à ceux du service militaire
proprement dit.

A. - En janvier 1932, le soldat Raemy prit part à un cours facultatif de ski
organisé par la Br. I. mont. 5.
Il s'y fractura la jambe droite et dut être soigné pendant

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21 jours à l'hôpital d'Andermatt et ensuite à domicile. En septembre 1932, il
accomplit le cours de répétition avec son unité, mais l'autorité militaire
constata à cette occasion que les suites de la fracture le rendaient inapte au
service. En conséquence, elle décida, le 12 janvier 1933, de le transférer
dans le landsturm, en application du ch. 250/51 IAS (fractures mal guéries).
B. - Par requête du 26 juillet 1933, Raemy invita l'autorité fribourgeoise à
lui accorder le bénéfice de l'art. 2 b LTM. Il faisait valoir que son
transfert prématuré dans le landsturm était dû aux conséquences de l'accident
dont il avait été victime au cours de ski de 1932. Ce cours avait été inscrit
au livret de service.
C. - Par décision du 19 avril 1934, la Commission fribourgeoise de recours
pour la taxe militaire a rejeté la demande d'exemption. Elle constatait que
Raemy n'avait pas annoncé sa fracture à l'Assurance militaire. Il n'ignorait
donc pas que le cours de ski auquel il avait participé était volontaire et
qu'il en courait tous les risques. Certes il était regrettable que l'Assurance
militaire refusât de répondre des maladies et des accidents survenus aux cours
militaires de ski. Ces cours étaient en effet volontaires, mais les hommes
incorporés dans les troupes de montagne étaient invités à y participer. Tout
en relevant cette anomalie, la Commission était cependant obligée de s'en
tenir à la disposition fédérale qui n'assimile pas les cours de ski à un
service militaire obligatoire et de déclarer pour ce motif que l'art. 2 b LTM
n'était pas applicable.
D. - Victor Raemy a formé en temps utile un recours de droit administratif
contre cette décision.
La Direction militaire du Canton de Fribourg propose l'admission du recours.
Elle expose que la Commission de recours eût été disposée à faire droit à la
demande d'exemption, mais qu'elle l'a néanmoins rejetée:
«a) parce que, soit dans le livret de service, soit au dossier, il n'existait
aucune preuve d'un accident survenu au service militaire;

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«b) afin de laisser au Tribunal fédéral le soin de créer une jurisprudence
dans les cas de cette nature.»
L'Administration fédérale des contributions ne conteste pas que le recourant
se fractura la jambe droite à un cours militaire facultatif de ski. Elle
conclut au rejet du recours en invoquant une lettre du Département militaire
fédéral en date du 2 juin 1934, dans laquelle il est dit notamment ce qui suit
au sujet du caractère militaire des cours volontaires de ski:
«Wir teilen Ihnen mit, dass wir diese freiwilligen Militärskikurse nie als
Militärdienst betrachtet haben und auch nie als solchen betrachten konnten.
Die Militärorganisation vom 12. April 1907 schreibt in Art. 8 vor, dass die
Militärdienstpflicht sich auf den Instruktionsdienst und den aktiven Dienst
erstreckt. Die Ausbildung des Heeres ist im dritten Teil der M. O. in den Art.
102 u. ff. geregelt. Die freiwillige Skiausbildung der Wehrmänner ist darin
aber nirgends erwähnt. Das musste dazu führen, die freiwilligen
Militärskikurse als ausserdienstliche Kurse zu organisieren...
»Wenn das Tragen der Uniform für diese Kurse vorgeschrieben ist, so geschieht
dies einmal im Interesse der militärischen Organisation dieser Kurse und des
militärischen Ausbildungszweckes, gleichzeitig liegt darin aber auch ein
Entgegenkommen gegenüber den Kursteilnehmern, die dadurch ihre Zivilkleider
schonen können. Die Eintragung der Kurstage im Dienstbüchlein ist eine reine
Kontrollmassnahme. Sie soll den Einheitskommandanten darüber orientieren, wer
in seiner Einheit ausgebildeter Skifahrer ist und als solcher gegebenenfalle
im Militärdienst verwendet werden kann...»
E. - Aux termes des «prescriptions concernant les cours et concours militaires
facultatifs de ski», décidées le 23 décembre 1931 par le Département militaire
fédéral et approuvées le même jour par le Conseil fédéral (v. FOM 1931 p.
125), la Confédération subventionne, dans les limites fixées par les crédits,
les cours et concours militaires

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facultatifs de ski qui sont organisés par le commandant d'une unité d'armée ou
d'une brigade de montagne ainsi que les concours de ski de l'Association
suisse des clubs de ski (art. 1 al. 1). Les cours et concours militaires
facultatifs de ski relèvent du service de l'infanterie du Département
militaire fédéral. Ils sont organisés d'un commun accord entre les officiers
directeurs et ce service (art. 2), ont lieu en uniforme (art. 3 al. 1), et les
participants y sont soumis au code pénal militaire (art. 4 al. 1). Les
commandants exercent la compétence pénale de leur grade et les plaintes
portées contre les participants doivent être adressées aux commandants de
division ou de fortifications compétents (art. 4 al. 2 et 3). L'assurance
militaire ne s'étend pas à ces cours, mais la direction est tenue d'assurer
collectivement contre les accidents auprès d'une compagnie suisse les
participants qui ne sont pas assurés personnellement ou le sont insuffisamment
(art. 5
SR 414.110.12 Convention du 1er/31 mars 1909 entre le Conseil fédéral suisse et le Conseil d'Etat de Zurich au sujet du partage des pièces qui constituent le musée commun de paléontologie
Art. 5 - Aussi longtemps que les chaires d'histoire naturelle n'auront pas été séparées, le principe de répartition, tel qu'il ressort de la présente convention, devra être observé à l'occasion de toute pièce faisant l'objet d'un nouvel achat ou d'un don accepté.
). Pendant le cours, la franchise de port est accordée aux participants
«dans la même mesure qu'aux militaires qui sont en service» (art. 6 lit. b).
Les participants ont droit au remboursement des frais de voyage effectifs du
domicile au lieu du cours (art. 29). Quant aux frais de logement et de
subsistance, ils sont à la charge des crédits ouverts pour les cours. Les prix
de pension doivent être soumis à l'approbation du service de l'infanterie. Les
dépenses excédant ces prix sont à la charge des participants (art. 30). «Le
service accompli dans les cours est inscrit au livret de service. Ce service
ne remplace toutefois pas le service militaire réglementaire ni n'entre en
considération pour l'avancement» (art. 13). Les cours sont inspectés par
l'autorité militaire (art. 14, 34 et 35).
Considérant en droit:
1.- La réforme du recourant est due aux suites d'une fracture de la jambe
droite. En l'état, l'existence d'un lien causal entre cette fracture et le
cours facultatif de ski suivi par le recourant en 1932 n'est plus contestée.
Dès lors, la

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seule question qui se pose encore est de savoir si ce cours peut être
considéré comme un «service militaire» au sens de l'art. 2 b LTM.
L'Administration fédérale le conteste en faisant observer que les cours
facultatifs de ski organisés conformément aux prescriptions du 23 décembre
1931 ne sont pas prévus par la loi sur l'organisation militaire, qu'ils ne
constituent ni du service d'instruction, ni du service actif et ne rentrent
dès lors pas dans le cadre du service militaire tel qu'il est défini à l'art.
8
SR 414.110.12 Convention du 1er/31 mars 1909 entre le Conseil fédéral suisse et le Conseil d'Etat de Zurich au sujet du partage des pièces qui constituent le musée commun de paléontologie
Art. 5 - Aussi longtemps que les chaires d'histoire naturelle n'auront pas été séparées, le principe de répartition, tel qu'il ressort de la présente convention, devra être observé à l'occasion de toute pièce faisant l'objet d'un nouvel achat ou d'un don accepté.
OM. Ce dernier point de vue est incontestablement fondé, mais cette
constatation ne suffit pas pour trancher le litige.
Aux termes des art. 1
SR 661 Loi fédérale du 12 juin 1959 sur la taxe d'exemption de l'obligation de servir (LTEO)
LTEO Art. 1 - Les citoyens suisses qui n'accomplissent pas ou n'accomplissent qu'en partie leur obligation de servir6 sous forme de service personnel (service militaire ou service civil) doivent fournir une compensation pécuniaire.
LTM et 3 OM, l'impôt militaire est en effet dû par les
Suisses qui n'accomplissent pas le service personnel. Or, d'après l'art. 9
SR 661 Loi fédérale du 12 juin 1959 sur la taxe d'exemption de l'obligation de servir (LTEO)
LTEO Art. 1 - Les citoyens suisses qui n'accomplissent pas ou n'accomplissent qu'en partie leur obligation de servir6 sous forme de service personnel (service militaire ou service civil) doivent fournir une compensation pécuniaire.
OM,
le service personnel comprend non seulement le service d'instruction et le
service actif mentionnés à l'art. 8, mais en outre «l'observation des
prescriptions concernant les contrôles, l'entretien et les inspections de
l'habillement, de l'armement et de l'équipement personnel, les exercices
obligatoires de tir et, en général, l'obéissance aux obligations militaires en
dehors du service».
Il s'ensuit que la notion de «service personnel» au sens des art. 1
SR 661 Loi fédérale du 12 juin 1959 sur la taxe d'exemption de l'obligation de servir (LTEO)
LTEO Art. 1 - Les citoyens suisses qui n'accomplissent pas ou n'accomplissent qu'en partie leur obligation de servir6 sous forme de service personnel (service militaire ou service civil) doivent fournir une compensation pécuniaire.
LTM et 3
OM (ainsi que par voie de conséquence celle de l'art. 2 b LTM) ne comprend pas
uniquement le service d'instruction et le service actif ou service militaire
proprement dit, mais qu'elle a une portée moins limitée. C'est dans ce sens
plus large que la pratique et la jurisprudence l'ont constamment interprétée
en admettant par exemple que le fait de manquer l'inspection d'armes et les
tirs obligatoires entraîne l'assujettissement à la taxe, bien que ni l'une ni
l'autre de ces obligations ne puisse être considérée comme du service
d'instruction ou du service actif (v. le règlement d'exécution de la LTM, du
26 juin 1934, art. 13 et 21). De même le séjour fait dans un hôpital ensuite
du service est assimilé par ledit règlement (art. 18
SR 661 Loi fédérale du 12 juin 1959 sur la taxe d'exemption de l'obligation de servir (LTEO)
LTEO Art. 1 - Les citoyens suisses qui n'accomplissent pas ou n'accomplissent qu'en partie leur obligation de servir6 sous forme de service personnel (service militaire ou service civil) doivent fournir une compensation pécuniaire.
). au service, pour ce qui
concerne la taxe militaire, quoiqu'il ne rentre manifestement pas dans le
cadre de l'art. 8
SR 414.110.12 Convention du 1er/31 mars 1909 entre le Conseil fédéral suisse et le Conseil d'Etat de Zurich au sujet du partage des pièces qui constituent le musée commun de paléontologie
Art. 5 - Aussi longtemps que les chaires d'histoire naturelle n'auront pas été séparées, le principe de répartition, tel qu'il ressort de la présente convention, devra être observé à l'occasion de toute pièce faisant l'objet d'un nouvel achat ou d'un don accepté.
OM.

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C'est également en vertu de cette interprétation plus libérale du terme de
service militaire au sens de l'art. 2 b LTM que, le 15 août 1895, le Conseil
fédéral a posé en principe que les écuyers devenus impropres au service
militaire ensuite d'un accident arrivé dans le service de remonte, soit en
dehors du service militaire proprement dit, avaient droit au bénéfice de
l'art. 2 b LTM, ainsi que cela était le cas pour les officiers instructeurs
victimes d'un accident dans l'exercice de leurs fonctions (cf. v. SALIS III n.
1322; F. F. 1896 II 1023).
Dans l'ordonnance du 27 mai 1921 concernant le calcul de la taxe militaire en
fonction du service actif, le Conseil fédéral a en outre expressément assimilé
au service actif entrant en ligne de compte pour la réduction du montant de
l'impôt «le temps de maladie passé ensuite du service dans des établissements
sanitaires...» et «le service accompli dans les cours spéciaux organisés par
l'armée et non prévus par la loi militaire» (art. 2 lit. b
SR 661 Loi fédérale du 12 juin 1959 sur la taxe d'exemption de l'obligation de servir (LTEO)
LTEO Art. 2 Assujettis - 1 Sont assujettis à la taxe les hommes astreints au service qui sont domiciliés en Suisse ou à l'étranger et qui, au cours d'une année civile (année d'assujettissement):8
1    Sont assujettis à la taxe les hommes astreints au service qui sont domiciliés en Suisse ou à l'étranger et qui, au cours d'une année civile (année d'assujettissement):8
a  ne sont, pendant plus de six mois, ni incorporés dans une formation de l'armée ni astreints au service civil;
b  ...
c  n'effectuent pas le service militaire ou le service civil qui leur incombent en tant qu'hommes astreints au service.
1bis    Sont par ailleurs assujettis à la taxe les hommes astreints au service militaire ou au service civil qui sont libérés de l'obligation de servir sans avoir accompli la totalité des jours de service obligatoires.12
2    N'est pas assujetti à la taxe celui qui, au cours de l'année d'assujettissement, a accompli effectivement son service militaire13, bien qu'il n'ait pas été incorporé pendant l'année entière en tant qu'homme astreint au service.
et d).
Au vu de la jurisprudence et de la pratique susmentionnées, il n'est donc pas
douteux que le service militaire au sens de la LTM et, en particulier, de
l'article 2 b, ne comptent pas seulement le service d'instruction et le
service actif. La loi ne définit pas expressément cette notion plus large,
dont les limites doivent par conséquent être déterminées en recherchant quels
sont les éléments constitutifs essentiels du service militaire. Dans sa
décision de principe déjà mentionnée concernant les écuyers militaires, le
Conseil fédéral a estimé que ces éléments étaient l'organisation militaire du
cours ou du service en question, l'assujettissement des participants à la
discipline et au code pénal militaires, le fait de porter l'uniforme et d'être
exposé aux dangers de la vie militaire. Ces critères sont rationnels et il se
justifie de les appliquer aussi dans l'examen de l'espèce. Dès lors, il est
manifeste que les cours facultatifs de ski du genre de celui que le recourant
a accompli en 1932 doivent être considérés comme un service militaire au sens
de l'art. 2 b LTM. Organisés militairement, ils

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comportent en effet des risques semblables à ceux du service proprement dit.
Les participants y sont soumis à la discipline et au code pénal militaires,
ils portent l'uniforme, et le Département militaire fédéral reconnaît
explicitement que cette obligation leur est imposée non seulement pour leur
commodité, mais aussi en considération de l'organisation et des buts
militaires des cours.
Contrairement à l'opinion exprimée par l'autorité cantonale dans la décision
attaquée, le fait que les cours de ski organisés par l'armée sont facultatifs
est sans intérêt en l'espèce. L'art. 2 b LTM accorde en effet le bénéfice de
l'exemption fiscale à tous les «militaires devenus impropres au service
militaire par suite de ce service», sans établir, par conséquent, une
distinction entre le service obligatoire et le service facultatif.
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
Le recours est admis. Victor Raemy est dispensé de la taxe militaire en vertu
de l'art. 2b de la loi du 28 juin 1878.