H Obligationenrecht. N° 9

droit de nature successorale (cf. RO 45 II p. 3 et suiv.) qui ne prend
naissance qu'après le dsiécès des parents, tandis qu'en l'espèce le
défendeur entend faire décou'er sa prétention d'un aete juridique entre
vifs. La solution de la question dépend, en réalité, uniquement de la
maniére dont on considère l'acte du 30 mai 1914. Si l'on veut y voir un
acte juridique formant un tout inséparable et engendrant une obligation
indivisible, il s'ensuivra que la nullité d'une de ses parties entraînera
nécessairement la nullité du tout. Mais si, ainsi qu'il convient de
le faire en l'espèce, on l'envisage au contraire comme un'acte mixte,
recouvrant deux Operations juridiquement et économiquement distinetes,
il n'est aucune raison, en l'absence d'une disposition contraire de la
loi, d'étendre la nullite 'a celle des operations dont la validità n'est
suhordonnée à l'observatîon d'aucuue forme Speciale, à moins toutefois',
par analogie avec le cas prevu à l'art. 20 al. 2
SR 220 Première partie: Dispositions générales Titre premier: De la formation des obligations Chapitre I: Des obligations résultant d'un contrat
CO Art. 20 - 1 Le contrat est nul s'il a pour objet une chose impossible, illicite ou contraire aux moeurs.
1    Le contrat est nul s'il a pour objet une chose impossible, illicite ou contraire aux moeurs.
2    Si le contrat n'est vicié que dans certaines de ses clauses, ces clauses sont seules frappées de nullité, à moins qu'il n'y ait lieu d'admettre que le contrat n'aurait pas été conclu sans elles.
CO, que les circonstanees
du cas ne soient telles qu'il y ait lieu de supposer que les parties,
connaissant la nullité de l'une des operations, eussent vraisemblablement
renoncé a l'autre. Tel n'est assurément pas le cas en l'espèce. Il n'est
pas douteux, au contraire, que si O. Zimmerli père avait pu savoir que
la reeonnaissance était nulle dans la mesure où elle consacrait une
libèralité, il n'en aurait pas moins souserit l'engagement pour la part
qui representait la rémunératîon reelle'des services de son fils.

3. Il ne serait pas possible, en l'espèce, étant donnée la saeon dont la
comptabilité était tenue, de fixer exactement en chiffre la part de la
créance qui correspondait à la valeur de ces services. Cependant, si l'on
tient compte (les circonstances de la cause, des elements que kournissent
les expertises et des avantages aussi que le défendeur à retirés de sa
situation privilégiée d'employé travaillant au service de son pere, il
est equitable d'arréter à 7500 fr. le montant de la somme a laquelle lui
donne droit la reconnaissance du 30 mai 1914. Il s'ensuit que l'action,-

Obligationenrecht. N ° 10. 4.)

des demandeurs n'était recevable que jusqu'à coneurrence de ce chiffre.

Le Tribunal fédéral pronome :

Le jugement cantoual est reforme en ce sens que l'action en liberation
de dette n'est reconnue fondée que jusqu'à concurrence de 7500 fr.,
la reconnaissance de dette signée par Otto Zimmerli pere en faveur de
son fils le 30 mai 1914 étant déclarée valable pour le surplus.

10. Amt de la. nme section du 12 février 1920 dans la cause Faillite
Cheri: contre Banque populäre genevoise. La cession d'un contrat de
vente avec réserve de propriété implique cession non seulement des droits
personnels du

vendeur contre l'acheteur, mais encore du droit reel qu'il s'est réservé
sur la. chose vendue.

Le 11 mai 1914 Jules Cherix avendu à Bertilliot & Cie un chàssis de camion
automobile pour le prix de 10 000 fr. payable 4000 fr. comptant et pour
le solde par 3 traites acceptées. cherix se reservait la propriété du
camion jusqu'à complet paiement de toutes les traites ; en cas de non
paiement aux dates fixées, il avait la faculte d'exiger la résiliation
avec restitution de la chose vendue, l'acheteur lui devant dans ce
cas un loyer équitable et une indemnité pour détérioratiou, usure et
dépréeiation.

Cherix a escompté auprès de la Banque populaire genevoise les traites
aeceptées par Bertilliot & Cie, suivant lettre du 23 juin 1914 il a remis
à la Banque le contrat Bertilliot & Cie en garantie des dites traites .

Le 20 avril 1915 Jules Cherix est tombe en faillite ; quelques jours
après, le 24 avril, la faillite de Bertilliot a été également declarée. La
Banque populaire genevoise

46 Obligationenrecht. N° 10.

a produit dans la faillite Cherix pour une créance de 77 815 fr. 85
(qui comprenait notamment le montant des traites acceptées) ; cette
production a été admise.

Le camion automobile a été trouve chez MM. Perrot, Duval & Cie et
inventorié tout d'abord dans la faillite Bertilliot & Cie. A la suite
d'une entente entre l'Office des faillites et la Banque populaire
genevoise qui en revencliquait la propriété, il a été vendu pour le prix
de 7500 fr. Cette somme a été versée d'abord dans la fajllite Bertilliot &
Cje puis, avec l'assentiment de cette dernière, elle a été transiérée dans
la faillite Cherix à la demande de la Banque populaire genevoise. Celle
ci a revendiqué, dans la iaillite CheriX,-la propriété du camion, soit
de 7500 fr. produit de sa réalisation, en se basant sur la cession du
23 juin 1914. La revendication ayant été écartée, elle a ouvert action
à l'administration de la faillite Cherix.

La défenderesse a conclu à iibération. Elle c_onteste en premier lieu
qu'il s'agisse d'une cession, le contrat Bertilliot & Cie n'ayant été
donné qu'en nantissement. Elle ajoute que les droits résultant d'un
pacte de réserve de propriété sont incessihles et que, dans tous les
cas, ils n'ont pas été valablement cédés en l'espèce, puisque le tiers,
soit Bertilliot & Cie, n'a pas été avisé de la cession par l'alienateur.

La Cour de Justice civile a adinis la validité (le la cession intervenne
et a prononcé que le prix du camion, 7500 fr., doit donc ètre remis à
la demanderesse (sous déduction des frais avances par l'office pour la
construction d'un pont).

La défenderesse a recouru en reforme contre cet arrét, en reprenant ses
conclusions liberatoires.

Siaiuani sur ces faiis et considérant en droit :

A s'en tenir uniquement aux termes de la lettre du 23 juin 1914,
on pourrait avoir des doutes sur la nature juridique de l'opération
intervenne entre Cherix et la Banque populaire genevoise. En effet,
dans cette lettre CherixObligationenrecht. N° 30. ; î

déclarait simplement remettre en garantie à la Banque le contrat
Bertilliot & Cie et le terme de garantie peut s'appliquer aussi bien
à un nantissement qu'à une cession fiduciaire. Mais on doit Observer
que l'opération du 23 juin 1914 n'est pas isolée; elle faisait suite
à toute une série d'opérations analogues par lesquelles Cherix avait
expressément cédé à la Banque les droits résultant pour lui de contrats
cle vente avec réserve de propriété (voir à ce sujet l'arrét rendu par
le Tribunal fédéral le 16 mai 1917 entre les mémes parties) et rien ne
permet de présumer que cette fois-ci il ait entendu remplacer par une
constitution de gage la cession ainsi devenue le mode usuel de garantie
de ses obligations envers la Banque.

Quant à l'objet de cette cession, il est hors cle deute que, dans
l'intention des parties, elle n'était pas restreinte à la creance du
vendeur contre son acheteur, mais qu'elle s'étendait au droit reel
qui garantissait cette créance, c'està-dire à la réserve de propriété
stipulée en faveur du vendeur. En effet, il est bien evident que la
Banque qui avait déjà en mains les traites acceptées par Bertilliot &
Cie n'aurait eu aucun motif de se faire céder par surcroit la créance en
paiement du prix de vente independannnent du pacte de réserve de propriété
qui seul était de nature a lui fournir une garantie nouvelle. Aussi bien,
le pacte fait partie integrante de la vente, il en constitue un accessoire
inséparable, il en commande les diverses modalités, les droits du vendeur
en cas de réalisation et les obligations de l'acheteur pendente condicione
étant déterminés les uns et les autres en considération de la réserve
de propriété (voir notamment, droit du vendeur à un loyer, art. 6 et,
art. 9, obligation de l'acheteur de ne pas changer le domieile des objets
vendus etc.). C'est dire que la cession des droits personnels engendrés
par la vente entraîne forcément la cession des droits résultant de la
réserve de propriété (art. 170 al. 1 C. O ; cf. BECKER, Note 2 sur cet
art.). La dissociation que la recourante voudrait étahlir entre ces deux
categories de droits créerait une situation

41% Obligationenrecht. N° 10.

impossible à la fois pour le vendeurdemeuré théoriquement propriétaire,
mais qui ne pourrait pins agis contre son acheteur et notifier la
résiliation à laquelle la revendication de propriété est subordonnée
et pour le cessionnaire de la créance dont, en cas de résiliation,
les droits seraient illusoires, puisque la chose vendue retournerait
au vendeur. Au contraire, la cession de l'ensemble du contrat de
vente avec réserve de propriété, d'une part, ne modifie en rien la
situation de l'acheteur et, d'autre part, est conforme aux intéréts
soit du cessionaire, soit du cédant lui-méme qui, par ce moyen, peut se
procurer un credit que la cession de ses droits personnels seuls ne lui
permettrait pas ssd'obtenir (cf. Schweiz. Juristen-Zeitung 13 No. 297
p. 365). Cest à tort que la recourante soutient que le droit réservé
en faveur du vendeur est incessihle. Il n'est nullement inséparable
de la personne du cédant (art. 170 C0). D'après la construction
juridique généralement admis'e (v. LEEMANN, Note III sur art. 715 CCS)
et qui, en l'espèce, correspond exactement aux termes employés par les
contractants, la réserve de propriété aifecte d'une condition suspensive
la tradition de la chose à l'acheteur, lequel n'acquiert la propriété
que lorsque la condition s'est réalisée, c'est à dire lorsqu'il a payé
intégralement ie prix. Jusque-là le vendeur reste propriétaire sous la
condition résolutoire du paiement du prix par l'acheteur. Céder les
droits résultant du pacte de réserve de propriété c'est donc céder
le droit de propriété lui-meme et la seule question qui se pose est
eelle de savoir si la cession d'une chosc possédée par un tiers est
possible. Or, cette question est résolue par l'art. 924 CCS, d'après
lequel la possession peut s'acquérir' sans tradition lorsqu'un tiers
demeure en possession de la chose à un titre Spécial. lei le tiers c'est
l'acheteur qui déticnt la chose en vertu du rapport juridique Spécial
créé par le pacte de réserve de propriété. Le vendeur qui n'en a pas
moins conservé la possession médiate (cf. STAUDINGER, Note III 2 h sur §
868 BGB ; cf. BGE 54Obligationenrecht. N° is:). 49

p. 397 et 69 p. 197) peut donc, d'après l'art. 924, trans-

férer sans tradition la propriété de la chose, tout comme il le pourrait
à l'égard d'une chose détenue par exemple par un locataire. Ce transfert
n'est soumis à aucune forme particulière par l'art. 924 CCS ; à la
difference de ce que disposait l'art. 201
SR 220 Première partie: Dispositions générales Titre premier: De la formation des obligations Chapitre I: Des obligations résultant d'un contrat
CO Art. 201 - 1 L'acheteur a l'obligation de vérifier l'état de la chose reçue aussitôt qu'il le peut d'après la marche habituelle des affaires; s'il découvre des défauts dont le vendeur est garant, il doit l'en aviser sans délai.
1    L'acheteur a l'obligation de vérifier l'état de la chose reçue aussitôt qu'il le peut d'après la marche habituelle des affaires; s'il découvre des défauts dont le vendeur est garant, il doit l'en aviser sans délai.
2    Lorsqu'il néglige de le faire, la chose est tenue pour acceptée, à moins qu'il ne s'agisse de défauts que l'acheteur ne pouvait découvrir à l'aide des vérifications usuelles.
3    Si des défauts de ce genre se révèlent plus tard, ils doivent être signalés immédiatement; sinon, la chose est tenue pour acceptée, même avec ces défauts.
CO ancien (cf. OSTERTAG, Note
III et WIELAND, Note 2 sur art. 924) il est valable méme en l'absence de
la notification d'un avis au tiers détenteur, la seule conséquence de
l'omission de cet avis étant (art. 924 al. 2) que le transfert n'est
pas opposable au tiers lequel pourrait donc se libérer valablement
en, mains de l'ancicn possesseur. Or en l'espéce il ne s'agit pas des
relations avec le tiers, soit la Société Bertilliot & Cie, qui n'a élevé
aucune prétention sur le camion dont elle a fait abandon,n'ayant pu en
payer le prix ; la propriété de ce, camion n'est litigieuse qu'entre la
masse du cédant et le eessionnaire ; la recourante invoque dès lors en
vain l'art. 924 al. 2, puisque, à l'égard de tous autres que le tiers
détenteur, la possession de la chose oédée a été transférée par le seul
fait de la convention de cession.

En résumé done, la revendication de la Banque, hasée sur une cession
valable de la' propriété du camion, doit étre admise, c'est à dire que
la demanderesse a droit au produit de la réalisation opérée d'entente
entre parties. ll y a lieu d'observer que la somme qu'elle touchera
de ce chef Viendra naturellement en dédussction de celle pour laquelle
elle a été colloquée dans la faillite Cherix. En effet, la cession dont
_elle bénéficie n'a été faite qu'à titre de garantie et par conséquent ce
qu'elle en a tiré doit etre imputé sur le montant de sa créance. C'est
ce qu'elle a d'ailleurssi expressément reconnu elle-meme en procédure
(v. écriture du 2 avril 1919 p. 9).

Le Tribuna! fédéral prononce : Le recours est écarté et l'arrét cantoria]
est confirmé.

AS 46 Il 1920 4