Urteilskopf

111 Ib 287

52. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour de droit public du 17 décembre 1985 dans la cause Electricité Neuchâteloise S.A. (ENSA) contre Louis Jacot et consorts et Commission fédérale d'estimation du 5e arrondissement (recours de droit administratif)
Regeste (de):

Regeste (fr):

Regesto (it):


Sachverhalt ab Seite 287

BGE 111 Ib 287 S. 287

En vue d'acquérir les droits nécessaires à la construction d'une nouvelle ligne électrique de 150 kV entre sa station transformatrice de Planchamps et celle de Pierrabot, la société Electricité Neuchâteloise S.A. (ci-après: ENSA) a requis du Président de la Commission fédérale d'estimation du 5e arrondissement l'ouverture d'une procédure d'expropriation contre divers propriétaires fonciers des communes de Corcelles-Cormondrèche et de Rochefort.
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Selon les plans et tableaux d'expropriation, la demande de l'ENSA tendait à la constitution de simples servitudes de passage sur les parcelles de Louis Jacot (distance de survol de la ligne: 110 m), de Jean-Joël et Gabriel Staehli (distance survolée: 475 m), de Samuel Staehli (distance survolée: 80 m) et de Hans Schaer (distance survolée: 210 m). La création de droits de superficie était en outre envisagée sur les terrains de Louis Jacot et de Jean-Joël et Gabriel Staehli pour l'implantation de deux pylônes. Par décision du 14 mai 1982, le Département fédéral des transports, des communications et de l'énergie a accordé à l'ENSA, pour une durée de 50 ans, le droit d'expropriation requis. Le 25 octobre 1983, la Commission fédérale d'estimation a fixé les indemnités dues aux expropriés, en se fondant sur les "Normes d'indemnisation relatives aux lignes électriques aériennes", édition 1978, émises en commun par l'Union des Centrales Suisses d'Electricité (UCS) et l'Union Suisse des Paysans (USP). Elle a toutefois tenu compte du renchérissement (5% par année) en portant les indemnités prévues par ces normes de 4 à 5 francs par mètre courant pour le passage de la ligne et de 3'420 à 4'275 francs par pylône. Louis Jacot, Jean-Joël et Gabriel Staehli ont obtenu en outre l'allocation d'une indemnité pour dommages causés aux cultures lors de l'installation des pylônes, somme arrêtée à 100 francs pour le premier et à 500 francs pour les seconds. La Commission a enfin mis les frais à la charge de l'expropriante ENSA et condamné celle-ci à payer aux expropriés une somme de 11'395 francs à titre de dépens. Le Tribunal fédéral a admis partiellement le recours de droit administratif formé à l'encontre de cette décision par l'ENSA, en réduisant les indemnités d'expropriation (de 4'925 à 3'450 francs pour Jacot, de 7'150 à 5'542 francs pour J.-J. et G. Staehli, de 400 à 320 francs pour S. Staehli et de 1'050 à 840 francs pour Schaer) et en ramenant l'indemnité de dépens de 11'395 à 3'000 francs. Il a rejeté le recours pour le surplus et mis les frais à la charge de la recourante, sans allouer de dépens pour la procédure devant le Tribunal fédéral.
Erwägungen

Extrait des considérants:

1. En principe, c'est sur la base de l'art. 19
SR 711 Bundesgesetz vom 20. Juni 1930 über die Enteignung (EntG)
EntG Art. 19 - Bei der Festsetzung der Entschädigung sind alle Nachteile zu berücksichtigen, die dem Enteigneten aus der Entziehung oder Beschränkung seiner Rechte erwachsen. Demnach sind zu vergüten:
a  der volle Verkehrswert des enteigneten Rechtes;
bbis  wenn von einem Grundstück oder von mehreren wirtschaftlich zusammenhängenden Grundstücken nur ein Teil in Anspruch genommen wird, auch der Betrag, um den der Verkehrswert des verbleibenden Teils sich vermindert;
c  alle weitern dem Enteigneten verursachten Nachteile, die sich nach dem gewöhnlichen Lauf der Dinge als Folge der Enteignung voraussehen lassen.
lettre b LEx que doit être déterminée l'indemnité due pour la constitution, par voie d'expropriation, d'une servitude sur un bien-fonds, car cette
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dernière en tant que telle n'est pas objet de marché et n'a donc pas de valeur vénale. L'indemnité correspond alors à la différence entre la valeur vénale du fonds libre de servitude et la valeur vénale du fonds grevé de la servitude (ATF 102 Ib 176 consid. 2). Dans le cas d'une ligne électrique aérienne, l'application de ce mode de calcul s'impose généralement lorsque l'expropriant demande la constitution d'une servitude de non-bâtir sur des terrains constructibles. S'agissant en revanche, comme en l'espèce, d'une simple servitude de passage à travers des terrains agricoles, le recours à la méthode de la différence n'est pas envisageable, car il est difficile d'apprécier avec certitude les incidences réelles de la ligne sur la valeur vénale agricole du fonds. L'on se heurte à la même difficulté pour fixer l'indemnité résultant de la construction et de l'entretien de treillis ou de pylônes; l'estimation devrait se fonder ici plutôt sur la perte de revenu agricole (capitalisée) de la surface occupée et l'entrave supplémentaire qu'entraîne pour l'exploitation normale du bien-fonds la présence de telles installations, qui constituent des obstacles. C'est pour cette raison que l'Union Suisse des Paysans (USP) et l'Union des Centrales Suisses d'Electricité (UCS) sont convenues de poser, dans leurs normes 1978, les principes d'une indemnisation forfaitaire. Pour ce qui est des droits de superficie, ces normes distinguent d'une part la nature des biens-fonds (terres cultivées ou prairies) et l'intensité de la culture, d'autre part les types de pylônes et la durée de la servitude; en ce qui concerne le passage de la ligne, elles font une différenciation selon les types de lignes, la largeur de la bande de terrain survolée (égale à la distance entre les conducteurs extérieurs) et la durée du droit. L'accord USP/UCS repose manifestement sur l'idée que l'on ne peut pas déterminer les inconvénients causés aux biens-fonds avec suffisamment d'exactitude et à un coût raisonnable de cas en cas et que, de toute façon, il n'est pas aisé d'apporter la preuve, dans une espèce donnée, de l'existence d'un dommage économique supérieur à celui présumé dans les normes. Le Tribunal fédéral et la Commission fédérale d'estimation ne sont pas à proprement parler liés par de telles directives; ils n'ont cependant aucune raison de ne pas s'y référer, s'agissant de règles établies avec le concours de spécialistes et avec l'accord des associations intéressées. Leur applicabilité de principe n'est d'ailleurs pas contestée dans le cas particulier.