Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}

2C 939/2013

Arrêt du 31 mars 2014

IIe Cour de droit public

Composition
MM. les Juges fédéraux Seiler, Juge présidant, Donzallaz et Kneubühler.
Greffier: M. Tissot-Daguette.

Participants à la procédure
A.________,
recourant,

contre

Service de la population de la République et canton du Jura, rue du 24-Septembre 1, 2800 Delémont.

Objet
Autorisation de séjour,

recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal de la République et canton du Jura, Cour administrative, du 4 septembre 2013.

Considérant en fait et en droit:

1.
A.________, ressortissant algérien né en 1974, a obtenu un visa en 2011 pour entrer en Suisse. Il s'est marié à X.________ en 2011 avec une ressortissante helvétique née en 1973 et a par la suite obtenu une autorisation de séjour, le 5 mai 2011. Le couple s'est séparé en septembre 2011. Après avoir pris des renseignements auprès de l'intéressé et de l'épouse de celui-ci, le Service de la population de la République et canton du Jura, par décision du 6 juillet 2012, a refusé de renouveler l'autorisation de séjour précitée et imparti un délai à l'intéressé pour quitter le territoire suisse. Ce service a confirmé cette décision par décision sur opposition du 8 mai 2013. Le 11 juin 2013, l'intéressé, alors représenté par un mandataire professionnel, a interjeté recours contre ce prononcé sur opposition auprès de la Cour administrative du Tribunal cantonal de la République et canton du Jura. Dans une prise de position du 16 août 2013, le Service de la population a notamment conclu au rejet du recours. Par ordonnance du 26 août 2013, le Tribunal cantonal a communiqué cette prise de position au mandataire de l'intéressé.

2.
Par arrêt du 4 septembre 2013, le Tribunal cantonal a rejeté le recours de A.________ et lui a imparti un délai de deux mois dès l'entrée en force du jugement pour quitter le territoire suisse.

3.
Agissant par la voie du recours en matière de droit public, A.________, outre l'octroi de l'effet suspensif, requiert en substance du Tribunal fédéral, sous suite de frais et dépens, de réformer l'arrêt du 4 septembre 2013 en ce sens que la validité de son autorisation de séjour doit être prolongée et, subsidiairement, d'annuler l'arrêt entrepris et renvoyer la cause à l'instance précédente pour nouvelle décision.

Par ordonnance du 17 octobre 2013, le Tribunal fédéral a déclaré la requête d'effet suspensif sans objet.

Le Tribunal cantonal et le Service de la population concluent tous deux au rejet du recours.

4.
Invoquant en particulier l'art. 29
SR 101 Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999
Cst. Art. 29 Garanties générales de procédure - 1 Toute personne a droit, dans une procédure judiciaire ou administrative, à ce que sa cause soit traitée équitablement et jugée dans un délai raisonnable.
1    Toute personne a droit, dans une procédure judiciaire ou administrative, à ce que sa cause soit traitée équitablement et jugée dans un délai raisonnable.
2    Les parties ont le droit d'être entendues.
3    Toute personne qui ne dispose pas de ressources suffisantes a droit, à moins que sa cause paraisse dépourvue de toute chance de succès, à l'assistance judiciaire gratuite. Elle a en outre droit à l'assistance gratuite d'un défenseur, dans la mesure où la sauvegarde de ses droits le requiert.
Cst., le recourant se plaint d'une violation de son droit d'être entendu. Il reproche au Tribunal cantonal de ne pas lui avoir laissé un délai approprié pour se déterminer sur la prise de position du Service de la population du 16 août 2013.

4.1. Conformément aux art. 29 al. 2
SR 101 Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999
Cst. Art. 29 Garanties générales de procédure - 1 Toute personne a droit, dans une procédure judiciaire ou administrative, à ce que sa cause soit traitée équitablement et jugée dans un délai raisonnable.
1    Toute personne a droit, dans une procédure judiciaire ou administrative, à ce que sa cause soit traitée équitablement et jugée dans un délai raisonnable.
2    Les parties ont le droit d'être entendues.
3    Toute personne qui ne dispose pas de ressources suffisantes a droit, à moins que sa cause paraisse dépourvue de toute chance de succès, à l'assistance judiciaire gratuite. Elle a en outre droit à l'assistance gratuite d'un défenseur, dans la mesure où la sauvegarde de ses droits le requiert.
Cst. et 6 CEDH, les parties ont le droit d'être entendues. Compris comme l'un des aspects de la notion générale de procès équitable, le droit d'être entendu comprend en particulier le droit, pour une partie à un procès, de prendre connaissance de toute argumentation présentée au tribunal et de se déterminer à son propos, que celle-ci contienne ou non de nouveaux éléments de fait ou de droit, et qu'elle soit ou non concrètement susceptible d'influer sur le jugement à rendre. Il appartient en effet aux parties, et non au juge, de décider si une prise de position ou une pièce nouvellement versée au dossier contient des éléments déterminants qui appellent des observations de leur part. Toute prise de position ou pièce nouvelle versée au dossier doit dès lors être communiquée aux parties pour leur permettre de décider si elles veulent ou non faire usage de leur faculté de se déterminer (ATF 138 I 484 consid. 2.1 p. 485; 137 I 195 consid. 2 p. 197; 133 I 100 consid. 4.3 p. 102; 132 I 42 consid. 3.3.2 p. 46; arrêt 1C 458/2011 du 29 février 2012 consid. 3.1 et les arrêts cités).

Pour garantir à la partie un droit effectif à la réplique, il peut suffire à l'autorité judiciaire de communiquer une prise de position (sans imposer de délai pour d'éventuelles observations), si l'on peut attendre de la partie - notamment lorsqu'elle est représentée par un avocat ou par une personne qui a de bonnes connaissances en droit - qu'elle dépose des observations immédiatement sans y avoir été invitée ou qu'elle requière la possibilité de le faire (ATF 138 I 484 consid. 2.4 p. 487). Pour que le droit à la réplique soit garanti, il faut toutefois que le tribunal laisse un laps de temps suffisant à la partie concernée, entre la remise des documents et le prononcé de sa décision, pour qu'elle ait la possibilité de déposer des observations si elle l'estime nécessaire à la défense de ses intérêts. Cette pratique peut certes engendrer une certaine incertitude, dès lors que la partie ignore de combien de temps elle dispose pour formuler une éventuelle prise de position. La Cour européenne des droits de l'homme a toutefois admis la conformité du procédé avec l'art. 6
IR 0.101 Convention du 4 novembre 1950 de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (CEDH)
CEDH Art. 6 Droit à un procès équitable - 1. Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle. Le jugement doit être rendu publiquement, mais l'accès de la salle d'audience peut être interdit à la presse et au public pendant la totalité ou une partie du procès dans l'intérêt de la moralité, de l'ordre public ou de la sécurité nationale dans une société démocratique, lorsque les intérêts des mineurs ou la protection de la vie privée des parties au procès l'exigent, ou dans la mesure jugée strictement nécessaire par le tribunal, lorsque dans des circonstances spéciales la publicité serait de nature à porter atteinte aux intérêts de la justice.
1    Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle. Le jugement doit être rendu publiquement, mais l'accès de la salle d'audience peut être interdit à la presse et au public pendant la totalité ou une partie du procès dans l'intérêt de la moralité, de l'ordre public ou de la sécurité nationale dans une société démocratique, lorsque les intérêts des mineurs ou la protection de la vie privée des parties au procès l'exigent, ou dans la mesure jugée strictement nécessaire par le tribunal, lorsque dans des circonstances spéciales la publicité serait de nature à porter atteinte aux intérêts de la justice.
2    Toute personne accusée d'une infraction est présumée innocente jusqu'à ce que sa culpabilité ait été légalement établie.
3    Tout accusé a droit notamment à:
a  être informé, dans le plus court délai, dans une langue qu'il comprend et d'une manière détaillée, de la nature et de la cause de l'accusation portée contre lui;
b  disposer du temps et des facilités nécessaires à la préparation de sa défense;
c  se défendre lui-même ou avoir l'assistance d'un défenseur de son choix et, s'il n'a pas les moyens de rémunérer un défenseur, pouvoir être assisté gratuitement par un avocat d'office, lorsque les intérêts de la justice l'exigent;
d  interroger ou faire interroger les témoins à charge et obtenir la convocation et l'interrogation des témoins à décharge dans les mêmes conditions que les témoins à charge;
e  se faire assister gratuitement d'un interprète, s'il ne comprend pas ou ne parle pas la langue employée à l'audience.
par. 1 CEDH, dès lors qu'il suffit à la partie de demander à l'autorité de pouvoir prendre position et de requérir la fixation d'un délai (arrêt de la CourEDH Joos
contre Suisse du 15 novembre 2012 §§ 27 ss, en particulier §§ 30-32). Pour résumer de manière plus générale la pratique, le Tribunal fédéral considère qu'un délai inférieur à dix jours ne suffit pas à garantir l'exercice du droit de répliquer, tandis qu'un délai supérieur à vingt jours permet, en l'absence de réaction, d'inférer qu'il a été renoncé au droit de répliquer (arrêts du Tribunal fédéral 8C 1032/2012 du 17 décembre 2013 consid. 3.2; 9C 193/2013 du 22 juillet 2013 consid. 2.1.2; 5A 155/2013 du 17 avril 2013 consid. 1.4; 1B 407/2012 du 21 septembre 2012 consid. 2.2).

4.2. En l'espèce, le 26 août 2013, le Tribunal cantonal a notifié au recourant, par son avocat, la prise de position du Service de la population du 16 août 2013 concluant notamment au rejet du recours. L'arrêt entrepris a été rendu le 4 septembre 2013, soit seulement neuf jours à compter de la notification de ladite prise de position. Au vu de la jurisprudence précitée, un tel délai n'était pas suffisant pour permettre au Tribunal cantonal de conclure à ce que le recourant avait renoncé à se déterminer sur la prise de position du Service de la population. En procédant de la sorte, la juridiction cantonale a violé le droit d'être entendu du recourant. Cette violation du droit d'être entendu ne saurait être réparée devant le Tribunal fédéral (ATF 133 I 100 consid. 4.9 p. 105).

5.
Les considérants qui précèdent conduisent à l'admission du recours, à l'annulation de l'arrêt attaqué et au renvoi de la cause à l'instance précédente pour nouvelle décision.

Il n'y a pas lieu de percevoir de frais judiciaires (art. 66 al. 4
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 66 Recouvrement des frais judiciaires - 1 En règle générale, les frais judiciaires sont mis à la charge de la partie qui succombe. Si les circonstances le justifient, le Tribunal fédéral peut les répartir autrement ou renoncer à les mettre à la charge des parties.
1    En règle générale, les frais judiciaires sont mis à la charge de la partie qui succombe. Si les circonstances le justifient, le Tribunal fédéral peut les répartir autrement ou renoncer à les mettre à la charge des parties.
2    Si une affaire est liquidée par un désistement ou une transaction, les frais judiciaires peuvent être réduits ou remis.
3    Les frais causés inutilement sont supportés par celui qui les a engendrés.
4    En règle générale, la Confédération, les cantons, les communes et les organisations chargées de tâches de droit public ne peuvent se voir imposer de frais judiciaires s'ils s'adressent au Tribunal fédéral dans l'exercice de leurs attributions officielles sans que leur intérêt patrimonial soit en cause ou si leurs décisions font l'objet d'un recours.
5    Sauf disposition contraire, les frais judiciaires mis conjointement à la charge de plusieurs personnes sont supportés par elles à parts égales et solidairement.
LTF). Ayant agi seul devant le Tribunal fédéral, le recourant n'a pas droit à des dépens (art. 68
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 68 Dépens - 1 Le Tribunal fédéral décide, dans son arrêt, si et dans quelle mesure les frais de la partie qui obtient gain de cause sont supportés par celle qui succombe.
1    Le Tribunal fédéral décide, dans son arrêt, si et dans quelle mesure les frais de la partie qui obtient gain de cause sont supportés par celle qui succombe.
2    En règle générale, la partie qui succombe est tenue de rembourser à la partie qui a obtenu gain de cause, selon le tarif du Tribunal fédéral, tous les frais nécessaires causés par le litige.
3    En règle générale, aucuns dépens ne sont alloués à la Confédération, aux cantons, aux communes ou aux organisations chargées de tâches de droit public lorsqu'ils obtiennent gain de cause dans l'exercice de leurs attributions officielles.
4    L'art. 66, al. 3 et 5, est applicable par analogie.
5    Le Tribunal fédéral confirme, annule ou modifie, selon le sort de la cause, la décision de l'autorité précédente sur les dépens. Il peut fixer lui-même les dépens d'après le tarif fédéral ou cantonal applicable ou laisser à l'autorité précédente le soin de les fixer.
LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est admis. L'arrêt attaqué est annulé et la cause renvoyée au Tribunal cantonal de la République et canton du Jura pour nouvelle décision.

2.
Il n'est pas perçu de frais judiciaires.

3.
Le présent arrêt est communiqué au recourant, au Service de la population, au Tribunal cantonal de la République et canton du Jura, Cour administrative, et à l'Office fédéral des migrations.

Lausanne, le 31 mars 2014

Au nom de la IIe Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse

Le Juge présidant: Seiler

Le Greffier: Tissot-Daguette