Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
4A 542/2011

Arrêt du 30 novembre 2011
Ire Cour de droit civil

Composition
Mmes et MM. les Juges Klett, Présidente, Corboz, Rottenberg Liatowitsch, Kolly et Kiss.
Greffière: Mme Godat Zimmermann.

Participants à la procédure
République du Chili, par sa Mission permanente auprès de l'Organisation Mondiale du Commerce,
représentée par Me Antoine Kohler,
recourante,

contre

X.________,
intimé.

Objet
contrat de travail; immunité de juridiction,

recours contre l'arrêt de la Chambre des prud'hommes de la Cour de justice du canton de Genève du 7 juillet 2011.

Faits:

A.
X.________, ressortissant chilien, a été recruté au Chili par la Mission permanente de la République du Chili auprès de l'Organisation Mondiale du Commerce (OMC) à Genève (ci-après: la Mission permanente). Arrivé en Suisse à la fin septembre 2003, il a signé un contrat de travail avec la Mission permanente le 3 octobre 2003, à Genève. Selon ce document, X.________ était engagé en qualité de chauffeur de l'Ambassadeur; en outre, il avait une résidence temporaire en Suisse et le contrat était régi par la législation du travail chilienne.

X.________ a obtenu une carte de légitimation du Département fédéral des affaires étrangères (DFAE) de type "E", destinée aux membres du personnel administratif des Missions permanentes à Genève. Du 3 octobre 2003 au 11 avril 2005, il a travaillé comme chauffeur à la Mission permanente. Son épouse et ses enfants l'ont rejoint fin 2003. La famille se trouve toujours en Suisse où ses membres ont déposé une demande de naturalisation.

B.
Le 4 juin 2008, X.________ a ouvert action devant le Tribunal des prud'hommes du canton de Genève, concluant à ce que la République du Chili soit condamnée à lui payer 25'058 fr.45, plus intérêts; le capital réclamé se composait de 13'861 fr.95 à titre de différence entre le salaire reçu et le salaire dû en vertu du contrat-type de travail pour les travailleurs de l'économie domestique du canton de Genève et de 11'196 fr.50 en indemnisation d'heures supplémentaires.

La République du Chili a soulevé l'exception d'immunité de juridiction et a conclu à l'irrecevabilité de la demande. A titre subsidiaire et éventuel, elle a conclu au rejet de l'action, considérant avoir accordé des conditions de travail conformes au droit chilien auquel les parties avaient soumis le contrat de travail.

Par ordonnance préparatoire du 18 décembre 2008, le Tribunal des prud'hommes a implicitement rejeté l'exception d'immunité de juridiction et invité les parties à se déterminer sur le droit chilien applicable. Dans son jugement du 17 juillet 2009, il a motivé le rejet de l'exception, puis, au fond, il a débouté le demandeur de ses conclusions au motif que les créances invoquées étaient prescrites selon le droit chilien.

X.________ a interjeté appel, reprenant ses conclusions en paiement d'un montant de 25'058 fr.45, plus intérêts. Dans sa réponse, la République du Chili a déclaré maintenir l'exception d'immunité de juridiction. Par arrêt du 7 juillet 2011, la Chambre des prud'hommes de la Cour de justice du canton de Genève a annulé le jugement de première instance, admis sa compétence à raison du lieu, rejeté l'exception d'immunité de juridiction et réservé la question du droit applicable au fond jusqu'à l'entrée en force de l'arrêt partiel sur la question de l'immunité.

C.
La République du Chili interjette un recours en matière civile. Elle conclut à l'irrecevabilité de la demande en raison de l'immunité de juridiction dont l'État défendeur bénéficie.

X.________, auquel le recours a été communiqué, n'a pas déposé de réponse.

Considérant en droit:

1.
La recourante s'en prend uniquement au rejet de l'exception d'immunité de juridiction. Elle ne conteste plus la compétence des autorités judiciaires suisses pour le cas où l'immunité de juridiction devrait être définitivement niée.

En tant qu'elle a rejeté l'exception d'immunité de juridiction, la cour cantonale a rendu une décision incidente sur la compétence, susceptible d'un recours immédiat au Tribunal fédéral (art. 92
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 92 Décisions préjudicielles et incidentes concernant la compétence et les demandes de récusation - 1 Les décisions préjudicielles et incidentes qui sont notifiées séparément et qui portent sur la compétence ou sur une demande de récusation peuvent faire l'objet d'un recours.
1    Les décisions préjudicielles et incidentes qui sont notifiées séparément et qui portent sur la compétence ou sur une demande de récusation peuvent faire l'objet d'un recours.
2    Ces décisions ne peuvent plus être attaquées ultérieurement.
LTF; arrêt 4A 541/2009 du 8 juin 2010 consid. 1; cf. ATF 124 III 382 consid. 2a p. 385 s.).

Lorsque le recours a pour objet une décision incidente, la valeur litigieuse est déterminée par les conclusions restées litigieuses devant l'autorité compétente sur le fond (art. 51 al. 1 let. c
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 51 Calcul - 1 La valeur litigieuse est déterminée:
1    La valeur litigieuse est déterminée:
a  en cas de recours contre une décision finale, par les conclusions restées litigieuses devant l'autorité précédente;
b  en cas de recours contre une décision partielle, par l'ensemble des conclusions qui étaient litigieuses devant l'autorité qui a rendu cette décision;
c  en cas de recours contre une décision préjudicielle ou incidente, par les conclusions restées litigieuses devant l'autorité compétente sur le fond;
d  en cas d'action, par les conclusions de la demande.
2    Si les conclusions ne tendent pas au paiement d'une somme d'argent déterminée, le Tribunal fédéral fixe la valeur litigieuse selon son appréciation.
3    Les intérêts, les fruits, les frais judiciaires et les dépens qui sont réclamés comme droits accessoires, les droits réservés et les frais de publication du jugement n'entrent pas en ligne de compte dans la détermination de la valeur litigieuse.
4    Les revenus et les prestations périodiques ont la valeur du capital qu'ils représentent. Si leur durée est indéterminée ou illimitée, le capital est formé par le montant annuel du revenu ou de la prestation, multiplié par vingt, ou, s'il s'agit de rentes viagères, par la valeur actuelle du capital correspondant à la rente.
LTF). En l'espèce, le seuil de 15'000 fr. fixé pour les litiges en matière de droit du travail est atteint de sorte que le recours en matière civile est ouvert (art. 74 al. 1 let. a
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 74 Valeur litigieuse minimale - 1 Dans les affaires pécuniaires, le recours n'est recevable que si la valeur litigieuse s'élève au moins à:
1    Dans les affaires pécuniaires, le recours n'est recevable que si la valeur litigieuse s'élève au moins à:
a  15 000 francs en matière de droit du travail et de droit du bail à loyer;
b  30 000 francs dans les autres cas.
2    Même lorsque la valeur litigieuse minimale n'est pas atteinte, le recours est recevable:
a  si la contestation soulève une question juridique de principe;
b  si une loi fédérale prévoit une instance cantonale unique;
c  s'il porte sur une décision prise par une autorité cantonale de surveillance en matière de poursuite pour dettes et de faillite;
d  s'il porte sur une décision prise par le juge de la faillite ou du concordat;
e  s'il porte sur une décision du Tribunal fédéral des brevets.
LTF).
Au surplus, l'arrêt attaqué, rendu sur recours, émane d'une autorité judiciaire cantonale supérieure statuant en dernière instance (art. 75 al. 1
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 75 Autorités précédentes - 1 Le recours est recevable contre les décisions prises par les autorités cantonales de dernière instance, par le Tribunal administratif fédéral ou par le Tribunal fédéral des brevets.37
1    Le recours est recevable contre les décisions prises par les autorités cantonales de dernière instance, par le Tribunal administratif fédéral ou par le Tribunal fédéral des brevets.37
2    Les cantons instituent des tribunaux supérieurs comme autorités cantonales de dernière instance. Ces tribunaux statuent sur recours, sauf si:
a  une loi fédérale prévoit une instance cantonale unique;
b  un tribunal spécialisé dans les litiges de droit commercial statue en instance cantonale unique;
c  une action ayant une valeur litigieuse d'au moins 100 000 francs est déposée directement devant le tribunal supérieur avec l'accord de toutes les parties.
et 2
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 75 Autorités précédentes - 1 Le recours est recevable contre les décisions prises par les autorités cantonales de dernière instance, par le Tribunal administratif fédéral ou par le Tribunal fédéral des brevets.37
1    Le recours est recevable contre les décisions prises par les autorités cantonales de dernière instance, par le Tribunal administratif fédéral ou par le Tribunal fédéral des brevets.37
2    Les cantons instituent des tribunaux supérieurs comme autorités cantonales de dernière instance. Ces tribunaux statuent sur recours, sauf si:
a  une loi fédérale prévoit une instance cantonale unique;
b  un tribunal spécialisé dans les litiges de droit commercial statue en instance cantonale unique;
c  une action ayant une valeur litigieuse d'au moins 100 000 francs est déposée directement devant le tribunal supérieur avec l'accord de toutes les parties.
LTF). Interjeté par la partie dont l'exception a été rejetée (art. 76 al. 1
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 76 Qualité pour recourir - 1 A qualité pour former un recours en matière civile quiconque:
1    A qualité pour former un recours en matière civile quiconque:
a  a pris part à la procédure devant l'autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire, et
b  est particulièrement touché par la décision attaquée et a un intérêt digne de protection à son annulation ou sa modification.
2    Ont également qualité pour recourir contre les décisions visées à l'art. 72, al. 2, la Chancellerie fédérale, les départements fédéraux et, pour autant que le droit fédéral le prévoie, les unités qui leur sont subordonnées, si l'acte attaqué est susceptible de violer la législation fédérale dans leur domaine d'attributions.41
LTF), le recours est en principe recevable, puisqu'il a été déposé dans le délai (art. 46 al. 1 let. b
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 46 Suspension - 1 Les délais fixés en jours par la loi ou par le juge ne courent pas:
1    Les délais fixés en jours par la loi ou par le juge ne courent pas:
a  du septième jour avant Pâques au septième jour après Pâques inclus;
b  du 15 juillet au 15 août inclus;
c  du 18 décembre au 2 janvier inclus.
2    L'al. 1 ne s'applique pas:
a  aux procédures concernant l'octroi de l'effet suspensif ou d'autres mesures provisionnelles;
b  à la poursuite pour effets de change;
c  aux questions relatives aux droits politiques (art. 82, let. c);
d  à l'entraide pénale internationale ni à l'assistance administrative internationale en matière fiscale;
e  aux marchés publics.19
et art. 100 al. 1
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 100 Recours contre une décision - 1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l'expédition complète.
1    Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l'expédition complète.
2    Le délai de recours est de dix jours contre:
a  les décisions d'une autorité cantonale de surveillance en matière de poursuite pour dettes et de faillite;
b  les décisions en matière d'entraide pénale internationale et d'assistance administrative internationale en matière fiscale;
c  les décisions portant sur le retour d'un enfant fondées sur la Convention européenne du 20 mai 1980 sur la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière de garde des enfants et le rétablissement de la garde des enfants92 ou sur la Convention du 25 octobre 1980 sur les aspects civils de l'enlèvement international d'enfants93.
d  les décisions du Tribunal fédéral des brevets concernant l'octroi d'une licence visée à l'art. 40d de la loi du 25 juin 1954 sur les brevets95.
3    Le délai de recours est de cinq jours contre:
a  les décisions d'une autorité cantonale de surveillance en matière de poursuite pour effets de change;
b  les décisions d'un gouvernement cantonal sur recours concernant des votations fédérales.
4    Le délai de recours est de trois jours contre les décisions d'un gouvernement cantonal sur recours touchant aux élections au Conseil national.
5    En matière de recours pour conflit de compétence entre deux cantons, le délai de recours commence à courir au plus tard le jour où chaque canton a pris une décision pouvant faire l'objet d'un recours devant le Tribunal fédéral.
6    ...96
7    Le recours pour déni de justice ou retard injustifié peut être formé en tout temps.
LTF) et la forme (art. 42
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 42 Mémoires - 1 Les mémoires doivent être rédigés dans une langue officielle, indiquer les conclusions, les motifs et les moyens de preuve, et être signés.
1    Les mémoires doivent être rédigés dans une langue officielle, indiquer les conclusions, les motifs et les moyens de preuve, et être signés.
2    Les motifs doivent exposer succinctement en quoi l'acte attaqué viole le droit. Si le recours n'est recevable que lorsqu'il soulève une question juridique de principe ou qu'il porte sur un cas particulièrement important pour d'autres motifs, il faut exposer en quoi l'affaire remplit la condition exigée.15 16
3    Les pièces invoquées comme moyens de preuve doivent être jointes au mémoire, pour autant qu'elles soient en mains de la partie; il en va de même de la décision attaquée si le mémoire est dirigé contre une décision.
4    En cas de transmission électronique, le mémoire doit être muni de la signature électronique qualifiée de la partie ou de son mandataire au sens de la loi du 18 mars 2016 sur la signature électronique17. Le Tribunal fédéral détermine dans un règlement:
a  le format du mémoire et des pièces jointes;
b  les modalités de la transmission;
c  les conditions auxquelles il peut exiger, en cas de problème technique, que des documents lui soient adressés ultérieurement sur papier.18
5    Si la signature de la partie ou de son mandataire, la procuration ou les annexes prescrites font défaut, ou si le mandataire n'est pas autorisé, le Tribunal fédéral impartit un délai approprié à la partie pour remédier à l'irrégularité et l'avertit qu'à défaut le mémoire ne sera pas pris en considération.
6    Si le mémoire est illisible, inconvenant, incompréhensible ou prolixe ou qu'il n'est pas rédigé dans une langue officielle, le Tribunal fédéral peut le renvoyer à son auteur; il impartit à celui-ci un délai approprié pour remédier à l'irrégularité et l'avertit qu'à défaut le mémoire ne sera pas pris en considération.
7    Le mémoire de recours introduit de manière procédurière ou à tout autre égard abusif est irrecevable.
LTF) prévus par la loi.

2.
En premier lieu, la recourante se plaint de la violation de la Convention des Nations Unies sur les immunités juridictionnelles des États et de leurs biens du 2 décembre 2004 (CNUIJE; publiée in FF 2009 1481 ss), en particulier de l'art. 11 CNUIJE sur lequel la Chambre des prud'hommes s'est fondée pour rejeter l'exception d'immunité de juridiction soulevée par l'État défendeur.

2.1 La Suisse a ratifié la CNUIJE le 16 avril 2010 (cf. www.eda.admin.ch [Thèmes > Droit international public > Traités internationaux]; arrêté fédéral portant approbation et mise en oeuvre de la CNUIJE du 11 décembre 2009, FF 2009 7969; Message du 25 février 2009 concernant l'approbation et la mise en oeuvre de la CNUIJE, FF 2009 1443). Cette convention n'est pas encore entrée en vigueur, faute de ratification par un nombre suffisant d'États. La Chambre des prud'hommes a néanmoins examiné le bien-fondé de l'exception d'immunité de juridiction à la lumière de l'art. 11 CNUIJE, au motif que ladite convention codifie le droit international coutumier en matière d'immunité de juridiction (dans ce sens: ATF 134 III 122 consid. 5.1 p. 128; arrêt précité du 8 juin 2010 consid. 5.5, in SJ 2010 I p. 556) - notamment à l'art. 11 consacré au contrat du travail - et qu'elle reprend pour l'essentiel les principes appliqués par le Tribunal fédéral depuis 1918 (cf. FF 2009 1444). Cette manière de procéder ne prête pas le flanc à la critique. Dès lors que la Suisse a ratifié la CNUIJE, il est justifié de s'en inspirer lorsqu'il s'agit de rendre une décision fondée sur les règles générales du droit international public relatives à l'immunité de
juridiction (cf. ATF 134 III 570 consid. 2.1 p. 572).

Sous le titre marginal «Contrats de travail», l'art. 11 CNUIJE a la teneur suivante:

1. A moins que les États concernés n'en conviennent autrement, un État ne peut invoquer l'immunité de juridiction devant un tribunal d'un autre État, compétent en l'espèce, dans une procédure se rapportant à un contrat de travail entre l'État et une personne physique pour un travail accompli ou devant être accompli, en totalité ou en partie, sur le territoire de cet autre État.
2. Le paragraphe 1 ne s'applique pas:
a) Si l'employé a été engagé pour s'acquitter de fonctions particulières dans l'exercice de la puissance publique;
b) Si l'employé est:
i) Agent diplomatique, tel que défini dans la Convention de Vienne sur les relations diplomatiques de 1961;
ii) Fonctionnaire consulaire, tel que défini dans la Convention de Vienne sur les relations consulaires de 1963;
iii) Membre du personnel diplomatique d'une mission permanente auprès d'une organisation internationale, ou d'une mission spéciale, ou s'il est engagé pour représenter un État lors d'une conférence internationale; ou
iv) S'il s'agit de toute autre personne jouissant de l'immunité diplomatique;
c) Si l'action a pour objet l'engagement, le renouvellement de l'engagement ou la réintégration d'un candidat;
d) Si l'action a pour objet le licenciement ou la résiliation du contrat d'un employé et si, de l'avis du chef de l'État, du chef du gouvernement ou du Ministre des affaires étrangères de l'État employeur, cette action risque d'interférer avec les intérêts de l'État en matière de sécurité;
e) Si l'employé est ressortissant de l'État employeur au moment où l'action est engagée, à moins qu'il n'ait sa résidence permanente dans l'État du for; ou
f) Si l'employé et l'État employeur en sont convenus autrement par écrit, sous réserve de considérations d'ordre public conférant aux tribunaux de l'État du for juridiction exclusive en raison de l'objet de l'action.

2.2 Tout d'abord, la recourante soutient qu'elle bénéficie de l'immunité de juridiction en vertu de l'art. 11 al. 2 let. b/iv CNUIJE. Elle fait valoir à cet égard que l'intimé jouissait de l'immunité diplomatique sur la base de l'art. 11 al. 3
SR 192.121 Ordonnance du 7 décembre 2007 relative à la loi fédérale sur les privilèges, les immunités et les facilités, ainsi que sur les aides financières accordés par la Suisse en tant qu'Etat hôte (Ordonnance sur l'Etat hôte, OLEH) - Ordonnance sur l'Etat hôte
OLEH Art. 11 Catégories de personnes bénéficiaires - 1 Pour les organisations intergouvernementales, les institutions internationales, les conférences internationales, les secrétariats ou autres organes créés par un traité international, les commissions indépendantes et les autres organismes internationaux, les catégories de personnes bénéficiaires sont notamment les suivantes:
1    Pour les organisations intergouvernementales, les institutions internationales, les conférences internationales, les secrétariats ou autres organes créés par un traité international, les commissions indépendantes et les autres organismes internationaux, les catégories de personnes bénéficiaires sont notamment les suivantes:
a  les membres de la haute direction;
b  les hauts fonctionnaires;
c  les autres fonctionnaires;
d  les représentants des membres de l'organisation;
e  les experts et toute autre personne appelée en qualité officielle auprès de ces bénéficiaires institutionnels;
f  les personnes autorisées à accompagner les personnes mentionnées aux let. a à e.
2    Pour les tribunaux internationaux et les tribunaux arbitraux, les catégories de personnes bénéficiaires sont notamment les suivantes, en plus des catégories mentionnées à l'al. 1:
a  les juges;
b  les procureurs, les procureurs adjoints et le personnel du Bureau du Procureur;
c  les greffiers, les greffiers adjoints et les membres du personnel du greffe;
d  les conseils de la défense (avocats), les témoins et les victimes;
e  les arbitres;
f  les personnes autorisées à accompagner les personnes mentionnées aux let. a à e.
3    Pour les missions diplomatiques, les postes consulaires, les missions permanentes ou autres représentations auprès des organisations intergouvernementales et les missions spéciales, les catégories de personnes bénéficiaires sont notamment les suivantes:
a  les membres du personnel diplomatique;
b  les membres du personnel administratif et technique;
c  les membres du personnel de service;
d  les fonctionnaires consulaires;
e  les employés consulaires;
f  les membres du personnel local;
g  les personnes autorisées à accompagner les personnes mentionnées aux let. a à f.
de l'ordonnance sur l'État hôte du 7 décembre 2007 (OLEH; RS 192.121).
2.2.1 La Confédération peut accorder des immunités et privilèges à diverses institutions qu'elle accueille sur son territoire, dont les missions permanentes auprès des organisations intergouvernementales (art. 2 al. 1 let. f
SR 192.12 Loi fédérale du 22 juin 2007 sur les privilèges, les immunités et les facilités, ainsi que sur les aides financières accordés par la Suisse en tant qu'Etat hôte (Loi sur l'Etat hôte, LEH) - Loi sur l'Etat hôte
LEH Art. 2 - 1 La Confédération peut accorder des privilèges, des immunités et des facilités aux bénéficiaires institutionnels suivants:
1    La Confédération peut accorder des privilèges, des immunités et des facilités aux bénéficiaires institutionnels suivants:
a  les organisations intergouvernementales;
b  les institutions internationales;
c  les organisations internationales quasi gouvernementales;
d  les missions diplomatiques;
e  les postes consulaires;
f  les missions permanentes ou autres représentations auprès des organisations intergouvernementales;
g  les missions spéciales;
h  les conférences internationales;
i  les secrétariats ou autres organes créés par un traité international;
j  les commissions indépendantes;
k  les tribunaux internationaux;
l  les tribunaux arbitraux;
m  les autres organismes internationaux.
2    La Confédération peut accorder des privilèges, des immunités et des facilités aux personnes physiques (personnes bénéficiaires) suivantes:
a  les personnes appelées, à titre permanent ou non, en qualité officielle auprès de l'un des bénéficiaires institutionnels mentionnés à l'al. 1;
b  les personnalités exerçant un mandat international;
c  les personnes autorisées à accompagner les personnes bénéficiaires mentionnées aux let. a et b, y compris les domestiques privés.
de la loi sur l'État hôte du 22 juin 2007 [LEH; RS 192.12]; cf. Message relatif à la LEH du 13 septembre 2006, FF 2006 7603). Ces immunités et privilèges peuvent également être accordés aux personnes physiques appelées en qualité officielle auprès de ces institutions, ainsi qu'aux personnes autorisées à les accompagner, y compris les domestiques privés (art. 2 al. 2 let. a
SR 192.12 Loi fédérale du 22 juin 2007 sur les privilèges, les immunités et les facilités, ainsi que sur les aides financières accordés par la Suisse en tant qu'Etat hôte (Loi sur l'Etat hôte, LEH) - Loi sur l'Etat hôte
LEH Art. 2 - 1 La Confédération peut accorder des privilèges, des immunités et des facilités aux bénéficiaires institutionnels suivants:
1    La Confédération peut accorder des privilèges, des immunités et des facilités aux bénéficiaires institutionnels suivants:
a  les organisations intergouvernementales;
b  les institutions internationales;
c  les organisations internationales quasi gouvernementales;
d  les missions diplomatiques;
e  les postes consulaires;
f  les missions permanentes ou autres représentations auprès des organisations intergouvernementales;
g  les missions spéciales;
h  les conférences internationales;
i  les secrétariats ou autres organes créés par un traité international;
j  les commissions indépendantes;
k  les tribunaux internationaux;
l  les tribunaux arbitraux;
m  les autres organismes internationaux.
2    La Confédération peut accorder des privilèges, des immunités et des facilités aux personnes physiques (personnes bénéficiaires) suivantes:
a  les personnes appelées, à titre permanent ou non, en qualité officielle auprès de l'un des bénéficiaires institutionnels mentionnés à l'al. 1;
b  les personnalités exerçant un mandat international;
c  les personnes autorisées à accompagner les personnes bénéficiaires mentionnées aux let. a et b, y compris les domestiques privés.
et c LEH). Pour les missions permanentes, les personnes pouvant bénéficier d'immunités et de privilèges sont notamment les membres du personnel administratif et technique, les membres du personnel de service, les membres du personnel local et les personnes autorisées à accompagner une personne bénéficiant de l'immunité (art. 11 al. 3 let. b
SR 192.121 Ordonnance du 7 décembre 2007 relative à la loi fédérale sur les privilèges, les immunités et les facilités, ainsi que sur les aides financières accordés par la Suisse en tant qu'Etat hôte (Ordonnance sur l'Etat hôte, OLEH) - Ordonnance sur l'Etat hôte
OLEH Art. 11 Catégories de personnes bénéficiaires - 1 Pour les organisations intergouvernementales, les institutions internationales, les conférences internationales, les secrétariats ou autres organes créés par un traité international, les commissions indépendantes et les autres organismes internationaux, les catégories de personnes bénéficiaires sont notamment les suivantes:
1    Pour les organisations intergouvernementales, les institutions internationales, les conférences internationales, les secrétariats ou autres organes créés par un traité international, les commissions indépendantes et les autres organismes internationaux, les catégories de personnes bénéficiaires sont notamment les suivantes:
a  les membres de la haute direction;
b  les hauts fonctionnaires;
c  les autres fonctionnaires;
d  les représentants des membres de l'organisation;
e  les experts et toute autre personne appelée en qualité officielle auprès de ces bénéficiaires institutionnels;
f  les personnes autorisées à accompagner les personnes mentionnées aux let. a à e.
2    Pour les tribunaux internationaux et les tribunaux arbitraux, les catégories de personnes bénéficiaires sont notamment les suivantes, en plus des catégories mentionnées à l'al. 1:
a  les juges;
b  les procureurs, les procureurs adjoints et le personnel du Bureau du Procureur;
c  les greffiers, les greffiers adjoints et les membres du personnel du greffe;
d  les conseils de la défense (avocats), les témoins et les victimes;
e  les arbitres;
f  les personnes autorisées à accompagner les personnes mentionnées aux let. a à e.
3    Pour les missions diplomatiques, les postes consulaires, les missions permanentes ou autres représentations auprès des organisations intergouvernementales et les missions spéciales, les catégories de personnes bénéficiaires sont notamment les suivantes:
a  les membres du personnel diplomatique;
b  les membres du personnel administratif et technique;
c  les membres du personnel de service;
d  les fonctionnaires consulaires;
e  les employés consulaires;
f  les membres du personnel local;
g  les personnes autorisées à accompagner les personnes mentionnées aux let. a à f.
, c, f et g OLEH). L'étendue personnelle et matérielle des immunités et privilèges est fixée cas par cas (art. 4 al. 1
SR 192.12 Loi fédérale du 22 juin 2007 sur les privilèges, les immunités et les facilités, ainsi que sur les aides financières accordés par la Suisse en tant qu'Etat hôte (Loi sur l'Etat hôte, LEH) - Loi sur l'Etat hôte
LEH Art. 4 Etendue - 1 L'étendue personnelle et matérielle des privilèges, des immunités et des facilités est fixée cas par cas en fonction:
1    L'étendue personnelle et matérielle des privilèges, des immunités et des facilités est fixée cas par cas en fonction:
a  du droit international, des engagements internationaux de la Suisse et des usages internationaux;
b  du statut juridique du bénéficiaire et de l'importance des fonctions que ce dernier assume dans les relations internationales.
2    L'exemption des impôts directs peut être accordée à tous les bénéficiaires visés à l'art. 2. L'exonération n'est toutefois accordée aux personnes bénéficiaires visées à l'art. 2, al. 2, de nationalité suisse qu'à condition que le bénéficiaire institutionnel auprès duquel elles sont appelées ait introduit un système d'imposition interne, dans la mesure où le droit international permet de poser une telle condition.
3    L'exemption des impôts indirects peut être accordée à tous les bénéficiaires visés à l'art. 2. L'exonération de la taxe sur la valeur ajoutée et de l'impôt sur les huiles minérales n'est toutefois accordée aux personnes bénéficiaires visées à l'art. 2, al. 2, que si elles jouissent du statut diplomatique.
4    L'exemption des droits de douane et autres redevances peut être accordée à l'importation à tous les bénéficiaires visés à l'art. 2.
5    Le Conseil fédéral arrête les conditions d'entrée sur le territoire suisse, de séjour et de travail des personnes bénéficiaires visées à l'art. 2, al. 2, dans la mesure où le droit international le permet.
LEH; art. 23
SR 192.121 Ordonnance du 7 décembre 2007 relative à la loi fédérale sur les privilèges, les immunités et les facilités, ainsi que sur les aides financières accordés par la Suisse en tant qu'Etat hôte (Ordonnance sur l'Etat hôte, OLEH) - Ordonnance sur l'Etat hôte
OLEH Art. 23 Octroi - 1 Sous réserve des privilèges, des immunités et des facilités qui découlent directement du droit international, le Conseil fédéral détermine dans chaque cas particulier les privilèges, les immunités et les facilités qui sont octroyés au bénéficiaire institutionnel et aux personnes appelées en qualité officielle auprès de lui, aux personnalités exerçant un mandat international et aux personnes visées à l'art. 20.
1    Sous réserve des privilèges, des immunités et des facilités qui découlent directement du droit international, le Conseil fédéral détermine dans chaque cas particulier les privilèges, les immunités et les facilités qui sont octroyés au bénéficiaire institutionnel et aux personnes appelées en qualité officielle auprès de lui, aux personnalités exerçant un mandat international et aux personnes visées à l'art. 20.
2    Le DFAE est compétent pour accorder des privilèges, des immunités et des facilités, et conclure à cet effet des accords internationaux, lorsque l'activité du bénéficiaire institutionnel est prévue pour une durée maximale d'un an:
a  aux missions spéciales, aux personnes appelées en qualité officielle auprès d'elles et aux personnes autorisées à accompagner ces dernières;
b  aux conférences internationales, aux personnes appelées en qualité officielle auprès d'elles et aux personnes autorisées à accompagner ces dernières.
OLEH). Le DFAE détermine dans chaque cas particulier si une personne physique entre dans la catégorie de «personne bénéficiaire» au sens de l'art. 2 al. 2 let. a
SR 192.12 Loi fédérale du 22 juin 2007 sur les privilèges, les immunités et les facilités, ainsi que sur les aides financières accordés par la Suisse en tant qu'Etat hôte (Loi sur l'Etat hôte, LEH) - Loi sur l'Etat hôte
LEH Art. 2 - 1 La Confédération peut accorder des privilèges, des immunités et des facilités aux bénéficiaires institutionnels suivants:
1    La Confédération peut accorder des privilèges, des immunités et des facilités aux bénéficiaires institutionnels suivants:
a  les organisations intergouvernementales;
b  les institutions internationales;
c  les organisations internationales quasi gouvernementales;
d  les missions diplomatiques;
e  les postes consulaires;
f  les missions permanentes ou autres représentations auprès des organisations intergouvernementales;
g  les missions spéciales;
h  les conférences internationales;
i  les secrétariats ou autres organes créés par un traité international;
j  les commissions indépendantes;
k  les tribunaux internationaux;
l  les tribunaux arbitraux;
m  les autres organismes internationaux.
2    La Confédération peut accorder des privilèges, des immunités et des facilités aux personnes physiques (personnes bénéficiaires) suivantes:
a  les personnes appelées, à titre permanent ou non, en qualité officielle auprès de l'un des bénéficiaires institutionnels mentionnés à l'al. 1;
b  les personnalités exerçant un mandat international;
c  les personnes autorisées à accompagner les personnes bénéficiaires mentionnées aux let. a et b, y compris les domestiques privés.
et c LEH et
lui attribue la carte de légitimation correspondant à sa fonction (art. 30 al. 1 let. e
SR 192.121 Ordonnance du 7 décembre 2007 relative à la loi fédérale sur les privilèges, les immunités et les facilités, ainsi que sur les aides financières accordés par la Suisse en tant qu'Etat hôte (Ordonnance sur l'Etat hôte, OLEH) - Ordonnance sur l'Etat hôte
OLEH Art. 30 - 1 En plus des compétences particulières dont il dispose en vertu de la présente ordonnance, le DFAE:
1    En plus des compétences particulières dont il dispose en vertu de la présente ordonnance, le DFAE:
a  négocie les accords à conclure en application de la LEH ou de la présente ordonnance, en consultation avec les offices concernés;
b  est l'autorité chargée de l'exécution des accords portant sur les privilèges, les immunités et les facilités, ainsi que sur les aides financières et les autres mesures de soutien; les compétences particulières des autres offices fédéraux sont réservées;
c  règle les modalités de détail pour la mise en oeuvre de la présente ordonnance; les compétences particulières des autres offices fédéraux sont réservées;
d  veille au respect des privilèges, des immunités et des facilités; il prend à cet effet toutes les mesures utiles conformément aux usages internationaux; il peut retirer les privilèges, les immunités et les facilités à une personne physique lorsqu'il en constate un usage abusif et que cette mesure est proportionnée au but poursuivi;
e  détermine dans chaque cas particulier si une personne tombe sous la catégorie de «personne bénéficiaire» au sens de l'art. 2, al. 2, let. a et c, LEH, conformément au droit international, et lui attribue la carte de légitimation correspondant à sa fonction;
f  détermine dans chaque cas particulier le délai de courtoisie qui peut être accordé à une personne bénéficiaire à la fin de ses fonctions officielles;
g  charge le Service fédéral de sécurité de mandater les autorités de police compétentes de mettre en place des mesures de sécurité complémentaires conformément à l'art. 20, let. f, LEH;
h  conclut les accords bilatéraux qui sont nécessaires pour permettre aux membres des missions diplomatiques, des missions permanentes ou autres représentations auprès des organisations intergouvernementales et des postes consulaires suisses à l'étranger de bénéficier des mêmes privilèges, immunités et facilités que ceux qui sont consentis aux représentations étrangères de même catégorie en Suisse.
2    Le DFAE règle la répartition interne des compétences.
OLEH).

Avant l'entrée en vigueur de la LEH et de son ordonnance d'exécution le 1er janvier 2008, le Conseil fédéral se fondait sur différents instruments, en premier lieu sur des conventions et traités internationaux, en particulier la Convention de Vienne du 18 avril 1961 sur les relations diplomatiques (CVRD; RS 0.191.01), sur des lois et arrêtés fédéraux, en particulier l'arrêté fédéral du 30 septembre 1955 sur la conclusion ou la modification d'accords avec des organisations internationales en vue de déterminer leur statut juridique en Suisse (RO 1956 1216), ainsi que sur ses compétences constitutionnelles en matière de politique étrangère (FF 2006 7604).

En l'espèce, il est possible que l'intimé, titulaire d'une carte de légitimation de type "E", ait bénéficié de certaines immunités ou de privilèges en qualité de membre du personnel administratif d'une mission permanente. Cette question souffre toutefois de rester indécise, car elle est dénuée de pertinence pour les raisons suivantes.
2.2.2 L'art. 11 CNUIJE a fait l'objet de longues négociations relatives au groupe de personnes dont les contrats de travail étaient soustraits à la juridiction d'un autre État, ainsi qu'au rapport de ces personnes à la puissance publique. Les exceptions proposées ont été critiquées parce qu'elles étaient trop nombreuses et faisaient de l'immunité de l'État la règle. Il ressort des discussions au sein de l'ONU que la lettre b de l'art. 11 al. 2 CNUIJE, qui n'était pas prévue à l'origine, a été introduite en cours de procédure afin de clarifier la portée de la lettre a du même alinéa; les lettres a et b de l'art. 11 al. 2 CNUIJE se rapportent ainsi au même groupe de personnes (Report of the Working Group on jurisdictional immunities of States and their property, in Yearbook of the International Law Commission, 1999, vol. II/2, p. 165 ch. 84 ss, spécialement ch. 105; cf. Gehrard Hafner/Leonor Lange, La convention des Nations Unies sur les immunités juridictionnelles des États et de leurs biens, in Annuaire français de droit international, 2004, vol. 50, p. 64 s.).

Par conséquent, la personne jouissant de l'immunité diplomatique au sens de l'art. 11 al. 2 let. b/iv CNUIJE est nécessairement une personne s'acquittant de fonctions particulières dans l'exercice de la puissance publique, ce qui exclut les personnes s'occupant uniquement de tâches subalternes comme celles de chauffeur. Admettre l'inverse reviendrait d'ailleurs à étendre très fortement l'immunité de juridiction et irait manifestement à l'encontre du principe fixé à l'art. 11 al. 1 CNUIJE et du but poursuivi par les Nations Unies, à savoir de limiter l'immunité de juridiction en matière de contestations liées à des contrats de travail.

Il s'ensuit que l'intimé, employé comme chauffeur à la Mission permanente, ne saurait être qualifié de personne jouissant de l'immunité diplomatique au sens de l'art. 11 al. 2 let. b/iv CNUIJE.

2.3 La recourante prétend également qu'elle bénéficie de l'immunité de juridiction en vertu de l'art. 11 al. 2 let. e CNUIJE. Elle fait valoir que l'intimé était ressortissant chilien et qu'il n'aurait pas eu une résidence permanente en Suisse au moment où il a engagé l'action.
2.3.1 La recourante invoque tout d'abord le contrat de travail liant les parties, dans lequel il est précisé que l'intimé a une résidence temporaire en Suisse.

Comme toute notion d'une convention internationale, la résidence permanente au sens de l'art. 11 al. 2 let. e CNUIJE s'interprète de manière autonome, et non pas selon l'accord des parties au contrat, et cela même dans l'hypothèse où l'employé a compris le sens et la portée de la clause contractuelle et l'a librement acceptée. Permettre à l'État employeur d'exclure la constitution d'une résidence permanente de l'employé par une clause contractuelle et d'étendre par ce biais son immunité de juridiction irait à l'encontre du but de la convention rappelé ci-dessus; l'art. 11 al. 2 let. f CNUIJE limite d'ailleurs expressément la faculté des parties d'étendre l'immunité de juridiction en matière de contrat de travail.
2.3.2 Pour contester une résidence permanente de l'intimé en Suisse, la recourante relève ensuite que le chauffeur a été recruté au Chili, qu'il y était affilié à la sécurité sociale et que sa famille «réside et résidait à l'époque» au Chili.

Pour cerner la notion de résidence permanente au sens de l'art. 11 al. 2 let. e CNUIJE, on peut s'inspirer de celle de résidence habituelle (cf. FF 2009 1459 ch. 3.4), que l'on trouve notamment dans les conventions internationales de La Haye élaborées depuis 1951 (cf. ATF 120 Ib 299 consid. 2a p. 302) et qui a été reprise à l'art. 20 al. 1 let. b
SR 291 Loi fédérale du 18 décembre 1987 sur le droit international privé (LDIP)
LDIP Art. 20 - 1 Au sens de la présente loi, une personne physique:
1    Au sens de la présente loi, une personne physique:
a  a son domicile dans l'État dans lequel elle réside avec l'intention de s'y établir;
b  a sa résidence habituelle dans l'État dans lequel elle vit pendant une certaine durée, même si cette durée est de prime abord limitée;
c  a son établissement dans l'État dans lequel se trouve le centre de ses activités professionnelles ou commerciales.
2    Nul ne peut avoir en même temps plusieurs domiciles. Si une personne n'a nulle part de domicile, la résidence habituelle est déterminante. Les dispositions du code civil suisse19 relatives au domicile et à la résidence ne sont pas applicables.
LDIP. La résidence habituelle implique la présence physique dans un lieu précis, l'impression objective donnée aux tiers d'y résider normalement étant plus importante que l'intention subjective de la personne concernée d'y créer le centre de sa vie (Message concernant une loi fédérale sur le droit international privé du 10 novembre 1982, FF 1983 I 309 ch. 215.3; cf. ATF 120 Ib 299 consid. 2a p. 302). La résidence habituelle est généralement créée dans un but déterminé, notamment pour exercer une activité professionnelle; elle peut d'emblée être limitée dans le temps. A titre d'exemple, le Message précité évoquait le cas du travailleur saisonnier qui vivait en Suisse durant neuf mois dans l'année et s'y créait une résidence habituelle, tout en gardant le centre de ses intérêts et donc son domicile dans son État national d'origine où vivait sa famille, où se trouvait son foyer et où il
rentrait régulièrement (FF 1983 I 309 ch. 215.3).

En l'espèce, les éléments avancés par la recourante pour nier la résidence permanente de l'intimé en Suisse ne sont pas pertinents. En 2003, le chauffeur est venu en Suisse, loin de son pays d'origine, pour y prendre un emploi de durée non limitée, qu'il a occupé pendant une année et demie avant de trouver un autre poste de chauffeur après d'une mission à Genève. En outre, fin 2003, il a fait venir sa famille en Suisse; depuis lors, il a déposé une requête en naturalisation. Cela suffit amplement pour admettre qu'il s'est créé en Suisse une résidence permanente.

Il en découle que l'une des conditions de l'exception prévue à l'art. 11 al. 2 let. e CNUIJE n'est pas réalisée dans le cas particulier.

2.4 En conclusion, la recourante ne bénéficie pas en l'espèce de l'immunité de juridiction au regard des principes posés à l'art. 11 CNUIJE, comme la cour cantonale l'a admis à juste titre. Sur ce point, le recours est mal fondé.

3.
3.1 Dans un deuxième volet de son argumentation, la recourante reproche à la cour cantonale d'avoir violé le droit fédéral et les principes développés par le Tribunal fédéral en matière d'immunité de juridiction.

3.2 Selon la jurisprudence, l'État étranger ne peut se prévaloir de l'immunité de juridiction lorsqu'il a agi comme titulaire d'un droit privé ou au même titre qu'un particulier (jure gestionis). Pour distinguer les actes accomplis jure imperii des actes accomplis jure gestionis, il convient de déterminer si l'acte en cause relève de la puissance publique ou s'il s'agit d'un rapport juridique qui pourrait, dans une forme identique ou similaire, être conclu entre deux particuliers. En matière de rapports de travail, l'État employeur n'est pas touché dans l'exercice de ses tâches relevant de la puissance publique lorsqu'il conclut un contrat avec un employé subalterne; il ne pourra donc bénéficier de l'immunité de juridiction si un litige survient avec cet employé. Les fonctions subalternes relèvent essentiellement de la logistique, de l'intendance et du soutien, sans influence décisionnelle sur l'activité spécifique de la mission dans la représentation du pays; il s'agit par exemple du poste de chauffeur (ATF 134 III 570 consid. 2.2 p. 572 ss et les arrêts cités).

En l'espèce, il n'est pas contestable que l'intimé exerçait une fonction subalterne au sens de la jurisprudence précitée.

La recourante insiste sur le fait que l'intimé est un ressortissant chilien et qu'il a été engagé alors qu'il se trouvait au Chili. Certes, la jurisprudence a retenu qu'en tout cas, lorsque l'employé n'est pas un ressortissant de l'État employeur et qu'il a été recruté au for de l'ambassade, la juridiction du for peut être reconnue en règle générale (ATF 110 II 255 consid. 4 p. 261; 120 II 400 consid. 4a p. 406; 134 III 570 consid. 2.2 p. 573). La recourante veut en déduire, a contrario, que la juridiction du for n'est pas admise si l'employé est un ressortissant de l'État employeur et qu'il ne résidait pas au for de l'ambassade lorsqu'il a été engagé. Elle ne saurait être suivie. En précisant que l'immunité de juridiction n'est, dans la règle, pas reconnue «en tout cas» lorsque l'employé n'est pas un ressortissant de l'État employeur et n'a pas été recruté au for de l'ambassade, le Tribunal fédéral a clairement laissé entendre que l'immunité de juridiction peut également être niée dans d'autres hypothèses. Par ailleurs, la CNUIJE, dont il y a lieu de s'inspirer dorénavant, ne prévoit pas l'immunité de juridiction au motif qu'un employé subalterne est ressortissant de l'État employeur; au contraire, elle exclut expressément
l'immunité lorsqu'un employé ayant la nationalité de l'État employeur a sa résidence permanente dans l'État du for (art. 11 al. 2 let. e CNUIJE).

Le grief tiré d'une violation du droit fédéral ne peut ainsi être qu'écarté.

4.
4.1 En dernier lieu, la recourante est d'avis que les juges genevois ont violé la CVRD et la LEH. Elle cite pêle-mêle diverses dispositions dont il ressortirait que la Mission jouirait en l'espèce de l'immunité de juridiction et que les rapports de travail avec l'intimé seraient régis par la loi chilienne.

4.2 Conformément à l'art. 42 al. 1
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 42 Mémoires - 1 Les mémoires doivent être rédigés dans une langue officielle, indiquer les conclusions, les motifs et les moyens de preuve, et être signés.
1    Les mémoires doivent être rédigés dans une langue officielle, indiquer les conclusions, les motifs et les moyens de preuve, et être signés.
2    Les motifs doivent exposer succinctement en quoi l'acte attaqué viole le droit. Si le recours n'est recevable que lorsqu'il soulève une question juridique de principe ou qu'il porte sur un cas particulièrement important pour d'autres motifs, il faut exposer en quoi l'affaire remplit la condition exigée.15 16
3    Les pièces invoquées comme moyens de preuve doivent être jointes au mémoire, pour autant qu'elles soient en mains de la partie; il en va de même de la décision attaquée si le mémoire est dirigé contre une décision.
4    En cas de transmission électronique, le mémoire doit être muni de la signature électronique qualifiée de la partie ou de son mandataire au sens de la loi du 18 mars 2016 sur la signature électronique17. Le Tribunal fédéral détermine dans un règlement:
a  le format du mémoire et des pièces jointes;
b  les modalités de la transmission;
c  les conditions auxquelles il peut exiger, en cas de problème technique, que des documents lui soient adressés ultérieurement sur papier.18
5    Si la signature de la partie ou de son mandataire, la procuration ou les annexes prescrites font défaut, ou si le mandataire n'est pas autorisé, le Tribunal fédéral impartit un délai approprié à la partie pour remédier à l'irrégularité et l'avertit qu'à défaut le mémoire ne sera pas pris en considération.
6    Si le mémoire est illisible, inconvenant, incompréhensible ou prolixe ou qu'il n'est pas rédigé dans une langue officielle, le Tribunal fédéral peut le renvoyer à son auteur; il impartit à celui-ci un délai approprié pour remédier à l'irrégularité et l'avertit qu'à défaut le mémoire ne sera pas pris en considération.
7    Le mémoire de recours introduit de manière procédurière ou à tout autre égard abusif est irrecevable.
et 2
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 42 Mémoires - 1 Les mémoires doivent être rédigés dans une langue officielle, indiquer les conclusions, les motifs et les moyens de preuve, et être signés.
1    Les mémoires doivent être rédigés dans une langue officielle, indiquer les conclusions, les motifs et les moyens de preuve, et être signés.
2    Les motifs doivent exposer succinctement en quoi l'acte attaqué viole le droit. Si le recours n'est recevable que lorsqu'il soulève une question juridique de principe ou qu'il porte sur un cas particulièrement important pour d'autres motifs, il faut exposer en quoi l'affaire remplit la condition exigée.15 16
3    Les pièces invoquées comme moyens de preuve doivent être jointes au mémoire, pour autant qu'elles soient en mains de la partie; il en va de même de la décision attaquée si le mémoire est dirigé contre une décision.
4    En cas de transmission électronique, le mémoire doit être muni de la signature électronique qualifiée de la partie ou de son mandataire au sens de la loi du 18 mars 2016 sur la signature électronique17. Le Tribunal fédéral détermine dans un règlement:
a  le format du mémoire et des pièces jointes;
b  les modalités de la transmission;
c  les conditions auxquelles il peut exiger, en cas de problème technique, que des documents lui soient adressés ultérieurement sur papier.18
5    Si la signature de la partie ou de son mandataire, la procuration ou les annexes prescrites font défaut, ou si le mandataire n'est pas autorisé, le Tribunal fédéral impartit un délai approprié à la partie pour remédier à l'irrégularité et l'avertit qu'à défaut le mémoire ne sera pas pris en considération.
6    Si le mémoire est illisible, inconvenant, incompréhensible ou prolixe ou qu'il n'est pas rédigé dans une langue officielle, le Tribunal fédéral peut le renvoyer à son auteur; il impartit à celui-ci un délai approprié pour remédier à l'irrégularité et l'avertit qu'à défaut le mémoire ne sera pas pris en considération.
7    Le mémoire de recours introduit de manière procédurière ou à tout autre égard abusif est irrecevable.
LTF, les motifs contenus dans un mémoire de recours doivent exposer succinctement en quoi l'arrêt attaqué viole le droit fédéral. Le recourant ne satisfait pas à l'obligation de motiver si son recours ne contient que des développements juridiques abstraits, sans lien manifeste avec des motifs déterminés de la décision déférée (arrêt 4A 72/2007 du 22 août 2007 consid. 4.1.1; cf. ATF 116 II 745 consid. 3 p. 749). En l'espèce, la recourante discute en grande partie du droit applicable au fond du litige, alors que l'arrêt attaqué n'aborde pas ce point et se limite essentiellement à la question de l'immunité de juridiction. Dans cette mesure, le recours est irrecevable.

Pour le surplus, les arguments de la recourante sont difficilement compréhensibles lorsqu'elle prétend bénéficier de l'immunité de juridiction en vertu de la CVRD, de la LEH et de l'OLEH. En tout cas, elle n'explique pas en quoi les dispositions qu'elle invoque contiendraient d'autres principes en matière d'immunité de juridiction dans les litiges liés à un contrat de travail que ceux rappelés aux considérants 2 et 3 ci-dessus et lui assureraient une immunité de juridiction plus large. En tant qu'il est recevable, le moyen est manifestement mal fondé.

5.
Sur le vu de ce qui précède, le recours sera rejeté dans la mesure où il est recevable.

6.
Comme elle succombe, la recourante prendra à sa charge les frais judiciaires (art. 66
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 66 Recouvrement des frais judiciaires - 1 En règle générale, les frais judiciaires sont mis à la charge de la partie qui succombe. Si les circonstances le justifient, le Tribunal fédéral peut les répartir autrement ou renoncer à les mettre à la charge des parties.
1    En règle générale, les frais judiciaires sont mis à la charge de la partie qui succombe. Si les circonstances le justifient, le Tribunal fédéral peut les répartir autrement ou renoncer à les mettre à la charge des parties.
2    Si une affaire est liquidée par un désistement ou une transaction, les frais judiciaires peuvent être réduits ou remis.
3    Les frais causés inutilement sont supportés par celui qui les a engendrés.
4    En règle générale, la Confédération, les cantons, les communes et les organisations chargées de tâches de droit public ne peuvent se voir imposer de frais judiciaires s'ils s'adressent au Tribunal fédéral dans l'exercice de leurs attributions officielles sans que leur intérêt patrimonial soit en cause ou si leurs décisions font l'objet d'un recours.
5    Sauf disposition contraire, les frais judiciaires mis conjointement à la charge de plusieurs personnes sont supportés par elles à parts égales et solidairement.
LTF).

L'intimé n'ayant pas déposé de réponse, il ne lui sera pas alloué de dépens.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 1'000 fr., sont mis à la charge de la recourante.

3.
Il n'est pas alloué de dépens.

4.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Chambre des prud'hommes de la Cour de justice du canton de Genève.

Lausanne, le 30 novembre 2011

Au nom de la Ire Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse

La Présidente: Klett

La Greffière: Godat Zimmermann