Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
1B 209/2008/col

Arrêt du 30 juillet 2008
Ire Cour de droit public

Composition
MM. les Juges Reeb, Juge présidant, Müller et Eusebio.
Greffière: Mme Truttmann.

Parties
A.________,
recourant, représenté par Mes Pierre Schifferli et Reza Vafadar, avocats,

contre

République fédérative du Brésil,
intimée, représentée par Me Daniel Tunik, avocat,
Ministère public de la Confédération,
Taubenstrasse 16, 3003 Berne.

Objet
Procédure pénale, qualité de partie civile,

recours contre la décision de la Cour des affaires pénales du Tribunal pénal fédéral du 17 juillet 2008.

Faits:

A.
Par acte d'accusation du 7 décembre 2007 dressé par le Ministère public de la Confédération, A.________, B.________, C.________, D.________ et E.________ ont été renvoyés devant la Cour des affaires pénales du Tribunal pénal fédéral (ci-après: la Cour des affaires pénales) pour infraction de blanchiment de fonds provenant d'actes de corruption commis par des fonctionnaires fiscaux brésiliens.
Par fax du 14 juin 2008, Daniel Tunik, avocat, a indiqué être constitué pour la défense des intérêts de la République fédérative du Brésil.
Cette dernière s'est constituée partie civile à l'ouverture des débats préparatoires le 16 juin 2008. Elle a déposé des conclusions civiles le 25 juin 2008.
Dans ses observations du 11 juillet 2008, A.________ s'est opposé à l'admission de la qualité de partie civile de la République fédérative du Brésil.

B.
Par arrêt du 17 juillet 2008, la Cour des affaires pénales a admis la constitution de la République fédérative du Brésil en qualité de partie civile. Elle a également précisé qu'elle ne statuerait que sur le principe de l'action civile. Enfin, elle a fait interdiction au représentant de la République fédérative du Brésil de communiquer à sa mandante le contenu du dossier et à cette dernière d'utiliser tout élément de la procédure pénale dans toute procédure hors de Suisse, de quelque nature qu'elle soit.
Par courrier du 23 juillet 2008, la Cour des affaires pénales a indiqué que, l'examen du principe de l'action civile pouvant entraîner d'importants retards dans la procédure, avec le risque de prescription en découlant, elle ne statuerait en définitive que sur la question pénale dans un premier temps.

C.
Agissant par la voie du recours en matière pénale en date du 28 juillet 2008, A.________ demande au Tribunal fédéral d'annuler les décisions rendues les 17 et 23 juillet 2008 par la Cour des affaires pénales en ce sens qu'elles autorisent le mandataire de la République fédérative du Brésil à participer aux débats devant avoir lieu dès le 28 juillet 2008 et de faire interdiction à la Cour des affaires pénales de transmettre les pièces de la procédure à Me Daniel Tunik. Il estime que la décision attaquée souffre d'un défaut de motivation et que le droit à l'égalité des armes est violé. Il requiert en outre l'octroi de l'effet suspensif.
Il n'a pas été demandé de réponse au recours.

Considérant en droit:

1.
La décision de la Cour des affaires pénales du 17 juillet 2008 admettant la qualité de partie civile de la République fédérative du Brésil peut faire l'objet d'un recours en matière pénale au sens des art. 78
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 78 Principe - 1 Le Tribunal fédéral connaît des recours contre les décisions rendues en matière pénale.
1    Le Tribunal fédéral connaît des recours contre les décisions rendues en matière pénale.
2    Sont également sujettes au recours en matière pénale:
a  les décisions sur les prétentions civiles qui doivent être jugées en même temps que la cause pénale;
b  les décisions sur l'exécution de peines et de mesures.
et ss LTF.

2.
L'arrêt de la Cour des affaires pénales est une décision incidente, qui ne met pas fin à la procédure pénale. Il ne s'agit pas d'une décision séparée portant sur la compétence ou sur une demande de récusation; l'art. 92
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 92 Décisions préjudicielles et incidentes concernant la compétence et les demandes de récusation - 1 Les décisions préjudicielles et incidentes qui sont notifiées séparément et qui portent sur la compétence ou sur une demande de récusation peuvent faire l'objet d'un recours.
1    Les décisions préjudicielles et incidentes qui sont notifiées séparément et qui portent sur la compétence ou sur une demande de récusation peuvent faire l'objet d'un recours.
2    Ces décisions ne peuvent plus être attaquées ultérieurement.
LTF n'est donc pas applicable. Contre la présente décision incidente, le recours en matière pénale n'est recevable qu'aux conditions de l'art. 93 al. 1
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 93 Autres décisions préjudicielles et incidentes - 1 Les autres décisions préjudicielles et incidentes notifiées séparément peuvent faire l'objet d'un recours:
1    Les autres décisions préjudicielles et incidentes notifiées séparément peuvent faire l'objet d'un recours:
a  si elles peuvent causer un préjudice irréparable, ou
b  si l'admission du recours peut conduire immédiatement à une décision finale qui permet d'éviter une procédure probatoire longue et coûteuse.
2    En matière d'entraide pénale internationale et en matière d'asile, les décisions préjudicielles et incidentes ne peuvent pas faire l'objet d'un recours.88 Le recours contre les décisions relatives à la détention extraditionnelle ou à la saisie d'objets et de valeurs est réservé si les conditions de l'al. 1 sont remplies.
3    Si le recours n'est pas recevable en vertu des al. 1 et 2 ou qu'il n'a pas été utilisé, les décisions préjudicielles et incidentes peuvent être attaquées par un recours contre la décision finale dans la mesure où elles influent sur le contenu de celle-ci.
LTF. Il faut donc que celle-ci puisse causer un préjudice irréparable au recourant, conformément à l'art. 93 al. 1 let. a
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 93 Autres décisions préjudicielles et incidentes - 1 Les autres décisions préjudicielles et incidentes notifiées séparément peuvent faire l'objet d'un recours:
1    Les autres décisions préjudicielles et incidentes notifiées séparément peuvent faire l'objet d'un recours:
a  si elles peuvent causer un préjudice irréparable, ou
b  si l'admission du recours peut conduire immédiatement à une décision finale qui permet d'éviter une procédure probatoire longue et coûteuse.
2    En matière d'entraide pénale internationale et en matière d'asile, les décisions préjudicielles et incidentes ne peuvent pas faire l'objet d'un recours.88 Le recours contre les décisions relatives à la détention extraditionnelle ou à la saisie d'objets et de valeurs est réservé si les conditions de l'al. 1 sont remplies.
3    Si le recours n'est pas recevable en vertu des al. 1 et 2 ou qu'il n'a pas été utilisé, les décisions préjudicielles et incidentes peuvent être attaquées par un recours contre la décision finale dans la mesure où elles influent sur le contenu de celle-ci.
LTF; la seconde hypothèse, énoncée à l'art. 93 al. 1 let. b
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 93 Autres décisions préjudicielles et incidentes - 1 Les autres décisions préjudicielles et incidentes notifiées séparément peuvent faire l'objet d'un recours:
1    Les autres décisions préjudicielles et incidentes notifiées séparément peuvent faire l'objet d'un recours:
a  si elles peuvent causer un préjudice irréparable, ou
b  si l'admission du recours peut conduire immédiatement à une décision finale qui permet d'éviter une procédure probatoire longue et coûteuse.
2    En matière d'entraide pénale internationale et en matière d'asile, les décisions préjudicielles et incidentes ne peuvent pas faire l'objet d'un recours.88 Le recours contre les décisions relatives à la détention extraditionnelle ou à la saisie d'objets et de valeurs est réservé si les conditions de l'al. 1 sont remplies.
3    Si le recours n'est pas recevable en vertu des al. 1 et 2 ou qu'il n'a pas été utilisé, les décisions préjudicielles et incidentes peuvent être attaquées par un recours contre la décision finale dans la mesure où elles influent sur le contenu de celle-ci.
LTF, n'entre en effet manifestement pas en considération en l'espèce (cf. ATF 133 IV 288 consid. 3.2 p. 292). Dans la procédure de recours en matière pénale, la notion de préjudice irréparable se rapporte à un dommage de nature juridique, qui ne puisse pas être réparé ultérieurement par un jugement final ou une autre décision favorable au recourant (ATF 133 IV 139 consid. 4 p. 141). Cette réglementation est fondée sur des motifs d'économie de procédure: en tant que cour suprême, le Tribunal fédéral doit en principe ne s'occuper qu'une seule fois d'un procès, et cela seulement lorsqu'il est certain que le recourant subit effectivement un dommage définitif.

2.1 Le recourant estime que la décision entreprise lui cause un préjudice irréparable dès lors que la présence du mandataire de la République fédérative du Brésil aurait pour conséquence de porter à la connaissance de cette dernière des faits ressortissant à la procédure sans être contrainte de répondre aux questions légitimes des accusés, notamment sur le crime de base prétendument commis au Brésil.
Il précise que par fax du 22 juillet 2008, la Cour des affaires pénales a communiqué le calendrier des débats devant avoir lieu entre le 28 juillet et le 8 août. Par fax du 24 juillet suivant, le mandataire du recourant a requis auprès de celle-ci la présence aux fins d'audition des personnes et des autorités habilitées à représenter le Brésil en tant que partie civile. Le recourant indique avoir été informé par téléphone le 25 juillet 2008 qu'aucune disposition n'avait été prise pour interroger un représentant du Brésil.

2.2 Le refus d'audition d'un représentant de la République fédérative du Brésil ne peut pas être déduit de la décision entreprise et n'en constitue dès lors pas l'objet. Cette dernière ne saurait ainsi causer un préjudice irréparable au recourant pour le seul motif qu'il ne lui serait pas possible d'interroger des représentants du Brésil sur les prétendus crimes préalables commis dans ce pays. Le recourant n'indique au demeurant pas en quoi l'exclusion de la République fédérative du Brésil de la procédure serait susceptible d'y remédier.

2.3 Pour le surplus, l'admission d'un lésé en qualité de partie civile n'est en règle générale pas susceptible de causer de préjudice irréparable (cf. arrêts du Tribunal fédéral 1P.582/1994,1P.461/1994 et 1P.450/1994). En l'espèce, le recourant ne démontre pas en quoi l'admission aux débats de l'Etat brésilien en qualité de partie civile serait en soi susceptible de lui causer un tel préjudice, compte tenu en particulier des restrictions ordonnées par la Cour des affaires pénales quant à l'accès au dossier.

3.
Il s'ensuit que le recours doit être déclaré irrecevable. Compte tenu de cette issue, la requête d'effet suspensif n'a plus d'objet. Le recourant, qui succombe, doit supporter les frais judiciaires (art. 65
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 65 Frais judiciaires - 1 Les frais judiciaires comprennent l'émolument judiciaire, l'émolument pour la copie de mémoires, les frais de traduction, sauf d'une langue officielle à une autre, et les indemnités versées aux experts et aux témoins.
1    Les frais judiciaires comprennent l'émolument judiciaire, l'émolument pour la copie de mémoires, les frais de traduction, sauf d'une langue officielle à une autre, et les indemnités versées aux experts et aux témoins.
2    L'émolument judiciaire est calculé en fonction de la valeur litigieuse, de l'ampleur et de la difficulté de la cause, de la façon de procéder des parties et de leur situation financière.
3    Son montant est fixé en règle générale:
a  entre 200 et 5000 francs dans les contestations non pécuniaires;
b  entre 200 et 100 000 francs dans les autres contestations.
4    Il est fixé entre 200 et 1000 francs, indépendamment de la valeur litigieuse, dans les affaires qui concernent:
a  des prestations d'assurance sociale;
b  des discriminations à raison du sexe;
c  des litiges résultant de rapports de travail, pour autant que la valeur litigieuse ne dépasse pas 30 000 francs;
d  des litiges concernant les art. 7 et 8 de la loi du 13 décembre 2002 sur l'égalité pour les handicapés24.
5    Si des motifs particuliers le justifient, le Tribunal fédéral peut majorer ces montants jusqu'au double dans les cas visés à l'al. 3 et jusqu'à 10 000 francs dans les cas visés à l'al. 4.
et 66
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 66 Recouvrement des frais judiciaires - 1 En règle générale, les frais judiciaires sont mis à la charge de la partie qui succombe. Si les circonstances le justifient, le Tribunal fédéral peut les répartir autrement ou renoncer à les mettre à la charge des parties.
1    En règle générale, les frais judiciaires sont mis à la charge de la partie qui succombe. Si les circonstances le justifient, le Tribunal fédéral peut les répartir autrement ou renoncer à les mettre à la charge des parties.
2    Si une affaire est liquidée par un désistement ou une transaction, les frais judiciaires peuvent être réduits ou remis.
3    Les frais causés inutilement sont supportés par celui qui les a engendrés.
4    En règle générale, la Confédération, les cantons, les communes et les organisations chargées de tâches de droit public ne peuvent se voir imposer de frais judiciaires s'ils s'adressent au Tribunal fédéral dans l'exercice de leurs attributions officielles sans que leur intérêt patrimonial soit en cause ou si leurs décisions font l'objet d'un recours.
5    Sauf disposition contraire, les frais judiciaires mis conjointement à la charge de plusieurs personnes sont supportés par elles à parts égales et solidairement.
LTF). Il n'est pas alloué de dépens, la République fédérative du Brésil n'ayant pas été invitée à se déterminer.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est irrecevable.

2.
La requête d'effet suspensif est sans objet.

3.
Les frais judiciaires, arrêtés à 1'500 fr., sont mis à la charge du recourant.

4.
Il n'est pas alloué de dépens.

5.
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires des parties, à la Cour des affaires pénales du Tribunal pénal fédéral ainsi qu'au Ministère public de la Confédération.
Lausanne, le 30 juillet 2008
Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse
Le Juge présidant: La Greffière:

Reeb Truttmann