Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

4A 353/2019

Arrêt du 25 mars 2020

Ire Cour de droit civil

Composition
Mmes les juges Kiss, présidente, Hohl et May Canellas.
Greffier : M. Thélin.

Participants à la procédure
A.________,
représentée par Me Tuto Rossi, avocat,
demanderesse et recourante,

contre

Banque ________ SA,
représentée par Mes François Bohnet et
Luca Melcarne, avocats,
défenderesse et intimée.

Objet
mandat; reddition de compte

recours contre l'arrêt rendu le 6 juin 2019 par la Cour d'appel civile du Tribunal cantonal du canton de Neuchâtel
(CACIV.2019.23).

Faits :

A.
Le 27 octobre 1999, A.________ s'est fait ouvrir un compte par la banque ________ SA à V.________ et elle a simultanément attribué à cet établissement le mandat de gérer son avoir. Elle a stipulé une orientation « défensive » de la gestion confiée. Elle a néanmoins autorisé la banque « à investir dans une proportion indiquée par les circonstances pouvant aller jusqu'à 20% [de l'avoir] dans des véhicules de placement collectifs sortant du cadre des opérations bancaires ordinaires définies par les directives de l'Association suisse des banquiers sur le mandat de gestion de fortune ».
La cliente a fait clore son compte le 12 mai 2009.
Le 11 mars 2013, par l'entremise de son avocat, elle a reproché à la banque de n'avoir pas respecté l'orientation convenue et d'avoir « sans doute » provoqué un dommage évalué à 500'000 francs.

B.
Le 24 avril 2014, A.________ a ouvert action contre la banque ________ SA devant le Tribunal régional du Littoral et du Val-de-Travers. La défenderesse devait être condamnée à produire une ample documentation concernant l'exécution du mandat de gestion. Elle devait de plus être condamnée à payer une somme à chiffrer « selon le résultat de l'instruction », comprise entre 50'000 et 358'460 francs.
La défenderesse a conclu au rejet de l'action.
Le 22 janvier 2019, le tribunal a rendu un jugement séparé sur les conclusions tendant à la production de documents. Il a partiellement accueilli ces conclusions et il a condamné la défenderesse dans les termes ci-après:
Condamne la banque ________ SA à remettre à A.________ dans les trente jours les documents suivants relatifs au compte n° xxx: les extraits des opérations d'investissement effectuées depuis l'ouverture du compte, tous les comptes bancaires ouverts à la dépendance des opérations d'investissement ainsi que les opérations effectuées, toutes les évaluations patrimoniales effectuées lors des clôtures annuelles, ainsi que le courrier des deux années précédant la demande du 19 juin 2009, sous menace de la peine d'amende prévue par l'art. 292
SR 311.0 Code pénal suisse du 21 décembre 1937
CP Art. 292 - Quiconque ne se conforme pas à une décision à lui signifiée, sous la menace de la peine prévue au présent article, par une autorité ou un fonctionnaire compétents est puni d'une amende.
CP qui réprime l'insoumission à une décision de l'autorité.

La Cour d'appel civile du Tribunal cantonal a statué le 6 juin 2019 sur l'appel de la défenderesse. Elle a accueilli cet appel et rejeté les conclusions de la demanderesse tendant à la production de documents.

C.
Agissant par la voie du recours en matière civile, la demanderesse requiert le Tribunal fédéral, à titre principal, de déclarer irrecevable l'appel formé contre le jugement du 22 janvier 2019. A titre subsidiaire, la demanderesse réclame la confirmation de ce jugement.
La défenderesse conclut à l'irrecevabilité de ces conclusions principales et au rejet des conclusions subsidiaires.
La demanderesse a spontanément déposé une réplique; la défenderesse n'a plus procédé.

Considérant en droit :

1.
Le recours au Tribunal fédéral est notamment recevable contre les décisions finales selon l'art. 90
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 90 Décisions finales - Le recours est recevable contre les décisions qui mettent fin à la procédure.
LTF, les décisions partielles visées par l'art. 91
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 91 Décisions partielles - Le recours est recevable contre toute décision:
a  qui statue sur un objet dont le sort est indépendant de celui qui reste en cause;
b  qui met fin à la procédure à l'égard d'une partie des consorts.
LTF, et les décisions incidentes satisfaisant aux conditions de l'art. 93 al. 1
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 93 Autres décisions préjudicielles et incidentes - 1 Les autres décisions préjudicielles et incidentes notifiées séparément peuvent faire l'objet d'un recours:
1    Les autres décisions préjudicielles et incidentes notifiées séparément peuvent faire l'objet d'un recours:
a  si elles peuvent causer un préjudice irréparable, ou
b  si l'admission du recours peut conduire immédiatement à une décision finale qui permet d'éviter une procédure probatoire longue et coûteuse.
2    En matière d'entraide pénale internationale et en matière d'asile, les décisions préjudicielles et incidentes ne peuvent pas faire l'objet d'un recours.88 Le recours contre les décisions relatives à la détention extraditionnelle ou à la saisie d'objets et de valeurs est réservé si les conditions de l'al. 1 sont remplies.
3    Si le recours n'est pas recevable en vertu des al. 1 et 2 ou qu'il n'a pas été utilisé, les décisions préjudicielles et incidentes peuvent être attaquées par un recours contre la décision finale dans la mesure où elles influent sur le contenu de celle-ci.
LTF.
La demanderesse intente à la défenderesse une action échelonnée, comportant une action auxiliaire en reddition de compte et une action principale en dommages-intérêts. Cette action-là doit apporter les renseignements propres à permettre de chiffrer celle-ci. La jurisprudence n'a pas établi si le jugement de dernière instance cantonale rendu sur une action auxiliaire en reddition de compte est une décision finale selon l'art. 90
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 90 Décisions finales - Le recours est recevable contre les décisions qui mettent fin à la procédure.
LTF ou une décision partielle selon l'art. 91
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 91 Décisions partielles - Le recours est recevable contre toute décision:
a  qui statue sur un objet dont le sort est indépendant de celui qui reste en cause;
b  qui met fin à la procédure à l'égard d'une partie des consorts.
LTF; elle a en revanche établi qu'un recours au Tribunal fédéral, contre ce jugement, n'est de toute manière pas assujetti aux conditions restrictives de l'art. 93 al. 1
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 93 Autres décisions préjudicielles et incidentes - 1 Les autres décisions préjudicielles et incidentes notifiées séparément peuvent faire l'objet d'un recours:
1    Les autres décisions préjudicielles et incidentes notifiées séparément peuvent faire l'objet d'un recours:
a  si elles peuvent causer un préjudice irréparable, ou
b  si l'admission du recours peut conduire immédiatement à une décision finale qui permet d'éviter une procédure probatoire longue et coûteuse.
2    En matière d'entraide pénale internationale et en matière d'asile, les décisions préjudicielles et incidentes ne peuvent pas faire l'objet d'un recours.88 Le recours contre les décisions relatives à la détention extraditionnelle ou à la saisie d'objets et de valeurs est réservé si les conditions de l'al. 1 sont remplies.
3    Si le recours n'est pas recevable en vertu des al. 1 et 2 ou qu'il n'a pas été utilisé, les décisions préjudicielles et incidentes peuvent être attaquées par un recours contre la décision finale dans la mesure où elles influent sur le contenu de celle-ci.
LTF concernant les décisions incidentes (arrêt 4A 142/2014 du 2 octobre 2014, consid. 1, SJ 2015 I 68). Cette dernière disposition n'est donc pas en cause dans la présente contestation.
En tant que la valeur litigieuse de l'action auxiliaire en reddition de compte doit être appréciée en application de l'art. 51 al. 2
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 51 Calcul - 1 La valeur litigieuse est déterminée:
1    La valeur litigieuse est déterminée:
a  en cas de recours contre une décision finale, par les conclusions restées litigieuses devant l'autorité précédente;
b  en cas de recours contre une décision partielle, par l'ensemble des conclusions qui étaient litigieuses devant l'autorité qui a rendu cette décision;
c  en cas de recours contre une décision préjudicielle ou incidente, par les conclusions restées litigieuses devant l'autorité compétente sur le fond;
d  en cas d'action, par les conclusions de la demande.
2    Si les conclusions ne tendent pas au paiement d'une somme d'argent déterminée, le Tribunal fédéral fixe la valeur litigieuse selon son appréciation.
3    Les intérêts, les fruits, les frais judiciaires et les dépens qui sont réclamés comme droits accessoires, les droits réservés et les frais de publication du jugement n'entrent pas en ligne de compte dans la détermination de la valeur litigieuse.
4    Les revenus et les prestations périodiques ont la valeur du capital qu'ils représentent. Si leur durée est indéterminée ou illimitée, le capital est formé par le montant annuel du revenu ou de la prestation, multiplié par vingt, ou, s'il s'agit de rentes viagères, par la valeur actuelle du capital correspondant à la rente.
LTF, il convient de se référer aux conclusions de l'action principale en paiement. La valeur litigieuse excède donc, en l'espèce, le minimum de 30'000 fr. dont dépend la recevabilité du recours en matière civile selon l'art. 74 al. 1 let. b
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 74 Valeur litigieuse minimale - 1 Dans les affaires pécuniaires, le recours n'est recevable que si la valeur litigieuse s'élève au moins à:
1    Dans les affaires pécuniaires, le recours n'est recevable que si la valeur litigieuse s'élève au moins à:
a  15 000 francs en matière de droit du travail et de droit du bail à loyer;
b  30 000 francs dans les autres cas.
2    Même lorsque la valeur litigieuse minimale n'est pas atteinte, le recours est recevable:
a  si la contestation soulève une question juridique de principe;
b  si une loi fédérale prévoit une instance cantonale unique;
c  s'il porte sur une décision prise par une autorité cantonale de surveillance en matière de poursuite pour dettes et de faillite;
d  s'il porte sur une décision prise par le juge de la faillite ou du concordat;
e  s'il porte sur une décision du Tribunal fédéral des brevets.
LTF.
Contrairement à l'opinion de la défenderesse et en dépit d'un libellé inutilement complexe, les conclusions présentées répondent aux exigences légales.

2.
Dans les affaires patrimoniales, à teneur de l'art. 308 al. 2
SR 272 Code de procédure civile du 19 décembre 2008 (CPC) - Loi sur les fors
CPC Art. 308 Décisions attaquables - 1 L'appel est recevable contre:
1    L'appel est recevable contre:
a  les décisions finales et les décisions incidentes de première instance;
b  les décisions de première instance sur les mesures provisionnelles.
2    Dans les affaires patrimoniales, l'appel est recevable si la valeur litigieuse au dernier état des conclusions est de 10 000 francs au moins.
CPC, l'appel n'est recevable que si la valeur litigieuse « au dernier état des conclusions » atteint ou dépasse 10'000 francs. En l'espèce, cette règle appréhendait aussi les conclusions de l'action principale en paiement, de sorte que l'appel était recevable à raison de la valeur litigieuse. Les conclusions que la demanderesse articule à titre principal devant le Tribunal fédéral, tendant à l'irrecevabilité de l'appel, sont donc privées de fondement et doivent être rejetées.

3.
Il est constant que les parties se sont liées par un contrat de mandat et que ce contrat avait pour objet la gestion de l'avoir confié à la défenderesse. L'art. 400 al. 1
SR 220 Première partie: Dispositions générales Titre premier: De la formation des obligations Chapitre I: Des obligations résultant d'un contrat
CO Art. 400 - 1 Le mandataire est tenu, à la demande du mandant, de lui rendre en tout temps compte de sa gestion et de lui restituer tout ce qu'il a reçu de ce chef, à quelque titre que ce soit.
1    Le mandataire est tenu, à la demande du mandant, de lui rendre en tout temps compte de sa gestion et de lui restituer tout ce qu'il a reçu de ce chef, à quelque titre que ce soit.
2    Il doit l'intérêt des sommes pour le versement desquelles il est en retard.
CO oblige le mandataire à rendre compte de sa gestion, en tout temps et à la demande du mandant. L'action en reddition de compte est fondée sur cette disposition.
Les renseignements à fournir par le mandataire doivent couvrir l'ensemble des éléments propres à permettre au mandant de comprendre les opérations exécutées, de vérifier le respect des instructions qu'il a données et de découvrir les erreurs éventuellement commises (Pierre Tercier et al., Les contrats spéciaux, 5e éd., 2016, n° 4480 p. 639). Les renseignements doivent mettre le mandant en mesure de réclamer ce que le mandataire doit lui restituer, et, s'il y a lieu, de lui réclamer aussi des dommages-intérêts (ATF 144 IV 294 consid. 3.3 p. 297; 141 III 564 consid. 4.2.1 p. 567). Les renseignements relatifs à un mandat de gestion de fortune doivent au minimum révéler quelles valeurs ont été achetées puis revendues pour le compte du client, à quelles dates et à quels prix (cf. Nicolas Dommer, Die Auskunftspflichten der Bank gegenüber Vermögensverwaltungskunden, 2018, nos 251 et 252 p. 107).

4.
La demanderesse reconnaît avoir reçu de la défenderesse des « portfolio » révélant l'état du patrimoine sous gestion au 8 décembre 2000, au 22 septembre 2004, au 30 juin 2006, au 1er janvier 2007, au 1er janvier 2008 et au 8 mai 2009. Elle a produit ces documents à l'appui de sa demande en justice. Elle les tient pour insuffisants au regard de ce que l'art. 400 al. 1
SR 220 Première partie: Dispositions générales Titre premier: De la formation des obligations Chapitre I: Des obligations résultant d'un contrat
CO Art. 400 - 1 Le mandataire est tenu, à la demande du mandant, de lui rendre en tout temps compte de sa gestion et de lui restituer tout ce qu'il a reçu de ce chef, à quelque titre que ce soit.
1    Le mandataire est tenu, à la demande du mandant, de lui rendre en tout temps compte de sa gestion et de lui restituer tout ce qu'il a reçu de ce chef, à quelque titre que ce soit.
2    Il doit l'intérêt des sommes pour le versement desquelles il est en retard.
CO l'autorise à exiger. La défenderesse, dans son mémoire d'appel, a au contraire soutenu que « le dossier contient toutes les informations utiles et nécessaires à un examen complet de la gestion des avoirs de [la demanderesse] par la [défenderesse] ».
La Cour d'appel retient que cette affirmation de la défenderesse n'est pas contredite par la demanderesse et qu'elle suffit donc à entraîner le rejet de l'action en reddition de compte; il s'agit de la motivation développée à titre principal par la Cour :
[La demanderesse] n'objecte aucun argument à cette façon de voir les choses. Elle n'explique pas pour quelle (s) raison (s) les documents déjà transmis par la banque et figurant au dossier ne lui permettraient pas de comprendre les opérations effectuées (on pense ici aux investissements effectués, soit par exemple les achats et ventes de titres et les opérations de change), d'être éclairée sur les éventuelles erreurs du mandataire, de vérifier que la banque [ait] bien respecté les instructions qui lui ont été données ou encore de chiffrer son dommage.

Cette approche fondée sur une très stricte application de la maxime des débats dénote en l'espèce une lecture incomplète du mémoire de réponse à l'appel. La demanderesse s'y est en effet exprimée comme suit :
La demanderesse n'est pas en possession des documents requis permettant de juger le comportement de la banque mandataire; elle n'est en possession que de certains extraits de compte (portfolio management) qui ne font que photographier la situation à certains moments déterminés, sans rendre compte des opérations effectuées et des investissements clôturés.

Confrontée à ces argumentations fondamentalement opposées, la Cour d'appel ne pouvait pas se dispenser d'examiner les documents concernés pour vérifier si la défenderesse avait effectivement, ainsi qu'elle le prétendait, entièrement satisfait à son obligation de rendre compte. L'étude des documents n'incombe en principe pas au Tribunal fédéral et la cause devrait donc être renvoyée à la Cour d'appel en application de l'art. 107 al. 2
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 107 Arrêt - 1 Le Tribunal fédéral ne peut aller au-delà des conclusions des parties.
1    Le Tribunal fédéral ne peut aller au-delà des conclusions des parties.
2    Si le Tribunal fédéral admet le recours, il statue lui-même sur le fond ou renvoie l'affaire à l'autorité précédente pour qu'elle prenne une nouvelle décision. Il peut également renvoyer l'affaire à l'autorité qui a statué en première instance.
3    Si le Tribunal fédéral considère qu'un recours en matière d'entraide pénale internationale ou d'assistance administrative internationale en matière fiscale est irrecevable, il rend une décision de non-entrée en matière dans les quinze jours qui suivent la fin d'un éventuel échange d'écritures. Dans le domaine de l'entraide pénale internationale, le Tribunal fédéral n'est pas lié par ce délai lorsque la procédure d'extradition concerne une personne dont la demande d'asile n'a pas encore fait l'objet d'une décision finale entrée en force.100
4    Le Tribunal fédéral statue sur tout recours contre une décision du Tribunal fédéral des brevets portant sur l'octroi d'une licence visée à l'art. 40d de la loi du 25 juin 1954 sur les brevets101 dans le mois qui suit le dépôt du recours.102
LTF. Il convient cependant de renoncer à ce renvoi car les documents sont peu volumineux et on constate d'emblée que la thèse de la demanderesse est fondée. En effet, les documents ne rendent notamment pas compte des valeurs par hypothèse achetées et revendues dans un laps séparant deux « portfolio » successifs; ils ne permettent pas de savoir quand et à quel prix la défenderesse a vendu les valeurs énumérées dans les « portfolio », et ils n'indiquent pas non plus, sinon de manière seulement partielle, quand et à quel prix ces valeurs ont été achetées. Les analyses de la composition du patrimoine, certes présentes dans certains des documents, ne remédient pas à ces lacunes. Les affirmations et protestations que la défenderesse persiste à répéter dans sa réponse au recours n'y remédient pas davantage.
La défenderesse affirme notamment que l'action en reddition de compte ne répond à aucun intérêt légitime de son adverse partie. Elle perd de vue, ici, que le mandant est autorisé à exercer cette action sans avoir à justifier d'un intérêt légitime (ATF 139 III 49 consid. 4.5.2 p. 59). L'action ne saurait être jugée chicanière et contraire à la bonne foi, non plus, seulement parce que les renseignements demandés portent sur toute la durée du mandat, sans limitation dans le temps. La défenderesse n'a pas prétendu que l'action soit éventuellement atteinte par la prescription dans la mesure où les renseignements exigés portent sur des opérations anciennes de plus de dix ans. Elle n'offre pas non plus de fournir les renseignements sur une durée moins importante.

5.
La Cour d'appel rejette l'action aussi au motif que le jugement de première instance condamne la défenderesse à une prestation « dont la réelle portée n'est pas claire ». Il est vrai que les expressions « les extraits des opérations d'investissement effectuées depuis l'ouverture du compte, tous les comptes bancaires ouverts à la dépendance des opérations d'investissement ainsi que les opérations effectuées, toutes les évaluations patrimoniales effectuées lors des clôtures annuelles », utilisées dans le dispositif de ce jugement, manquent de précision et semblent excéder, aussi, ce que le mandant peut exiger sur la base de l'art. 400 al. 1
SR 220 Première partie: Dispositions générales Titre premier: De la formation des obligations Chapitre I: Des obligations résultant d'un contrat
CO Art. 400 - 1 Le mandataire est tenu, à la demande du mandant, de lui rendre en tout temps compte de sa gestion et de lui restituer tout ce qu'il a reçu de ce chef, à quelque titre que ce soit.
1    Le mandataire est tenu, à la demande du mandant, de lui rendre en tout temps compte de sa gestion et de lui restituer tout ce qu'il a reçu de ce chef, à quelque titre que ce soit.
2    Il doit l'intérêt des sommes pour le versement desquelles il est en retard.
CO. Cela ne justifie cependant pas un rejet intégral de l'action, mais seulement une réforme du dispositif. Celui-ci doit être recentré sur l'information qui est nécessaire à la demanderesse pour reconstituer et contrôler la gestion de la défenderesse. Le dispositif doit porter sur la liste des achats et des ventes de valeurs mobilières et de devises étrangères accomplis en exécution du mandat, avec la date et le prix de chaque achat et de chaque vente. En ce sens, les conclusions subsidiaires articulées par la demanderesse, devant le Tribunal fédéral, doivent être partiellement admises; elles
doivent être rejetées dans la mesure où elles tendent à la simple confirmation du jugement de première instance.

La Cour d'appel retient encore que le Tribunal régional a d'ores et déjà ordonné une expertise destinée à élucider, parmi d'autres faits, l'origine de pertes subies par la demanderesse, et que l'expert pourra au besoin exiger de la défenderesse des « documents bancaires supplémentaires ». Cette éventualité et la diligence ainsi attendue de l'expert ne justifient pas non plus que la demanderesse soit privée de l'action en reddition de compte que lui accorde l'art. 400 al. 1
SR 220 Première partie: Dispositions générales Titre premier: De la formation des obligations Chapitre I: Des obligations résultant d'un contrat
CO Art. 400 - 1 Le mandataire est tenu, à la demande du mandant, de lui rendre en tout temps compte de sa gestion et de lui restituer tout ce qu'il a reçu de ce chef, à quelque titre que ce soit.
1    Le mandataire est tenu, à la demande du mandant, de lui rendre en tout temps compte de sa gestion et de lui restituer tout ce qu'il a reçu de ce chef, à quelque titre que ce soit.
2    Il doit l'intérêt des sommes pour le versement desquelles il est en retard.
CO.

6.
Sur la base d'une convention spécifique que les parties ont conclue lors de l'ouverture du compte bancaire, le jugement de première instance a condamné la défenderesse à remettre le courrier qu'elle destinait à la demanderesse et qu'elle a conservé « banque restante » durant les deux ans qui ont précédé une requête de cette partie du 19 juin 2009. Sur ce point, le Tribunal régional n'accueillait pas l'action en reddition de compte mais une action en exécution du contrat. L'arrêt présentement attaqué invalide le jugement sur cette prestation aussi, cependant sans fournir même un commencement de motivation. Il s'impose donc de confirmer le jugement au sujet de ladite prestation.

7.
A titre de partie qui succombe sur l'objet essentiel de la contestation, la défenderesse doit acquitter l'émolument à percevoir par le Tribunal fédéral et les dépens auxquels l'autre partie peut prétendre.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :

1.
Le recours est partiellement admis et l'arrêt de la Cour d'appel est réformé en ce sens que la défenderesse est condamnée à remettre à la demanderesse, dans un délai de trente jours dès réception du présent dispositif et sous menace, en cas d'inexécution, de la peine d'amende prévue par l'art. 292
SR 311.0 Code pénal suisse du 21 décembre 1937
CP Art. 292 - Quiconque ne se conforme pas à une décision à lui signifiée, sous la menace de la peine prévue au présent article, par une autorité ou un fonctionnaire compétents est puni d'une amende.
CP réprimant l'insoumission à une décision de l'autorité :

- la liste des achats et des ventes de valeurs mobilières et de devises étrangères accomplis en exécution du mandat attribué par la demanderesse, avec la date et le prix de chaque achat et de chaque vente;
- le courrier conservé « banque restante » du 19 juin 2007 au 19 juin 2009.

2.
La défenderesse acquittera un émolument judiciaire de 2'000 francs.

3.
La défenderesse versera une indemnité de 2'500 fr. à la demanderesse, à titre de dépens.

4.
La cause est renvoyée à la Cour d'appel pour statuer à nouveau sur les frais et dépens des instances cantonales.

5.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et au Tribunal cantonal du canton de Neuchâtel.

Lausanne, le 25 mars 2020

Au nom de la Ire Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse

La présidente : Kiss

Le greffier : Thélin