Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
1B 512/2011

Arrêt du 23 novembre 2011
Ire Cour de droit public

Composition
MM. les Juges Fonjallaz, Président, Aemisegger et Reeb.
Greffier: M. Kurz.

Participants à la procédure
A.________, représentée par Freddy Rumo, avocat, recourante,

contre

1. B.________,
2. Caisse cantonale neuchâteloise d'assurance-chômage, case postale 6085, 2306 La Chaux-de-Fonds,
tous deux représentées par Marc-André Nardin, avocat,
intimées,

Ministère public du canton de Neuchâtel, Parquet régional de La Chaux-de-Fonds, passage de la Bonne-Fontaine 36, 2300 La Chaux-de-Fonds.

Objet
séquestre pénal,

recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton de Neuchâtel, Autorité de recours en matière pénale, du 25 août 2011.

Faits:

A.
Dans le cadre d'une enquête pénale ouverte contre les administrateurs de la société C.________ (ci-après: la société, déclarée en faillite en 2009) notamment pour des délits dans la faillite, l'autorité d'instruction a ordonné, le 23 avril 2010, le séquestre d'un bien immobilier appartenant à A.________. Cet immeuble avait été acheté à la société en janvier 2002 pour 2,1 millions de francs, alors qu'il valait entre 4 et 5,6 millions de francs. Le transfert avait donc pu léser la société, ou ses créanciers.
Le 7 juillet 2011, le Parquet régional de La Chaux-de-Fonds a autorisé la levée partielle du séquestre de l'immeuble, afin de permettre sa vente à la ville de La Chaux-de-Fonds pour un montant de 3,2 millions de francs. Le produit net de la vente, après déduction de la dette hypothécaire, des créances fiscales liées à la vente et d'une dette de 36'343 fr. de A.________, devait en revanche demeurer séquestré.
A.________ a recouru contre cette ordonnance en faisant valoir que la décision de séquestre du 23 avril 2010 ne lui avait pas été notifiée et que les conditions d'un séquestre n'étaient pas réunies, l'immeuble ayant été acquis à un prix justifié. L'opération avait favorisé la société.

B.
Par arrêt du 25 août 2011, l'Autorité de recours en matière pénale du Tribunal cantonal neuchâtelois a rejeté le recours. Même si la première décision n'avait pas été régulièrement notifiée, la validité formelle de la seconde décision permettait de guérir ce vice. Compte tenu des diverses estimations figurant au dossier, l'immeuble avait été acquis à un prix largement sous-estimé, même si la banque créancière hypothécaire avait abandonné une partie de sa créance pour 1,2 millions de francs. L'immeuble avait été acheté par une société apparentée (administrations et actionnariats communs) qui avait ensuite loué les locaux à la venderesse. La vente à des conditions défavorables avait pu accentuer les difficultés financières que la société connaissait déjà en 2002. La libération de 36'343 fr., en faveur d'un créancier de A.________ ayant requis la faillite de cette dernière, n'affectait pas la légalité du séquestre dans son principe.

C.
Par acte du 21 septembre 2011, A.________ forme un recours en matière pénale et un recours constitutionnel subsidiaire par lesquels il demande l'annulation de l'arrêt cantonal et la levée du séquestre, subsidiairement le renvoi de la cause au Ministère public pour nouvelle décision.
La cour cantonale se réfère à son arrêt. Le Ministère public persiste dans sa décision. Les plaignants B.________ et Caisse cantonale neuchâteloise d'assurance-chômage concluent au rejet du recours en matière pénale et à l'irrecevabilité du recours constitutionnel.

Considérant en droit:

1.
Le recours en matière pénale, au sens de l'art. 78 al. 1
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 78 Principe - 1 Le Tribunal fédéral connaît des recours contre les décisions rendues en matière pénale.
1    Le Tribunal fédéral connaît des recours contre les décisions rendues en matière pénale.
2    Sont également sujettes au recours en matière pénale:
a  les décisions sur les prétentions civiles qui doivent être jugées en même temps que la cause pénale;
b  les décisions sur l'exécution de peines et de mesures.
LTF, est ouvert contre une décision de séquestre prise au cours de la procédure pénale, et confirmée en dernière instance cantonale (art. 80
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 80 Autorités précédentes - 1 Le recours est recevable contre les décisions prises par les autorités cantonales de dernière instance ou par la Cour des plaintes et la Cour d'appel du Tribunal pénal fédéral.49
1    Le recours est recevable contre les décisions prises par les autorités cantonales de dernière instance ou par la Cour des plaintes et la Cour d'appel du Tribunal pénal fédéral.49
2    Les cantons instituent des tribunaux supérieurs comme autorités cantonales de dernière instance. Ces tribunaux statuent sur recours. Sont exceptés les cas dans lesquels le code de procédure pénale du 5 octobre 2007 (CPP)50 prévoit un tribunal des mesures de contrainte ou un autre tribunal comme instance cantonale unique.51
LTF).

1.1 La décision par laquelle le juge ordonne ou maintient un séquestre pénal constitue une décision incidente (ATF 128 I 129 consid. 1 p. 131; 126 I 97 consid. 1b p. 100 et les références). Selon la jurisprudence (ATF 133 IV 139 consid. 4 p. 141 et les références), le séquestre de valeurs patrimoniales cause en principe un dommage irréparable au sens de l'art. 93 al. 1 let. a
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 93 Autres décisions préjudicielles et incidentes - 1 Les autres décisions préjudicielles et incidentes notifiées séparément peuvent faire l'objet d'un recours:
1    Les autres décisions préjudicielles et incidentes notifiées séparément peuvent faire l'objet d'un recours:
a  si elles peuvent causer un préjudice irréparable, ou
b  si l'admission du recours peut conduire immédiatement à une décision finale qui permet d'éviter une procédure probatoire longue et coûteuse.
2    En matière d'entraide pénale internationale et en matière d'asile, les décisions préjudicielles et incidentes ne peuvent pas faire l'objet d'un recours.88 Le recours contre les décisions relatives à la détention extraditionnelle ou à la saisie d'objets et de valeurs est réservé si les conditions de l'al. 1 sont remplies.
3    Si le recours n'est pas recevable en vertu des al. 1 et 2 ou qu'il n'a pas été utilisé, les décisions préjudicielles et incidentes peuvent être attaquées par un recours contre la décision finale dans la mesure où elles influent sur le contenu de celle-ci.
LTF, car le détenteur se trouve privé temporairement de la libre disposition des valeurs saisies (ATF 126 I 97 consid. 1b p. 101; voir également ATF 128 I 129 consid. 1 p. 131; 89 I 185 consid. 4 p. 187 et les références).

1.2 La société recourante, propriétaire d'un l'immeuble séquestré, a qualité au sens de l'art. 81 al. 1
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 81 Qualité pour recourir - 1 A qualité pour former un recours en matière pénale quiconque:
1    A qualité pour former un recours en matière pénale quiconque:
a  a pris part à la procédure devant l'autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire, et
b  a un intérêt juridique à l'annulation ou à la modification de la décision attaquée, soit en particulier:
b1  l'accusé,
b2  le représentant légal de l'accusé,
b3  le ministère public, sauf pour les décisions relatives à la mise en détention provisoire ou pour des motifs de sûreté, à la prolongation de la détention ou à sa levée,
b4  ...
b5  la partie plaignante, si la décision attaquée peut avoir des effets sur le jugement de ses prétentions civiles,
b6  le plaignant, pour autant que la contestation porte sur le droit de porter plainte,
b7  le Ministère public de la Confédération et les autorités administratives participant à la poursuite et au jugement des affaires pénales administratives selon la loi fédérale du 22 mars 1974 sur le droit pénal administratif56.
2    Une autorité fédérale a qualité pour recourir si le droit fédéral prévoit que la décision doit lui être communiquée.57
3    La qualité pour recourir contre les décisions visées à l'art. 78, al. 2, let. b, appartient également à la Chancellerie fédérale, aux départements fédéraux ou, pour autant que le droit fédéral le prévoie, aux unités qui leur sont subordonnées, si l'acte attaqué est susceptible de violer la législation fédérale dans leur domaine d'attributions.
LTF pour recourir contre le maintien du séquestre sur le prix de vente.

1.3 Le Tribunal fédéral examine librement l'interprétation et l'application des conditions posées par le droit fédéral pour les atteintes aux droits fondamentaux (art. 95 let. a
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 95 Droit suisse - Le recours peut être formé pour violation:
a  du droit fédéral;
b  du droit international;
c  de droits constitutionnels cantonaux;
d  de dispositions cantonales sur le droit de vote des citoyens ainsi que sur les élections et votations populaires;
e  du droit intercantonal.
LTF; cf. ATF 128 II 259 consid. 3.3 p. 269). La décision relative aux mesures de contrainte règle de manière définitive l'atteinte aux droits fondamentaux. Il ne s'agit dès lors pas d'une décision sur mesures provisionnelles au sens de l'art. 98
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 98 Motifs de recours limités - Dans le cas des recours formés contre des décisions portant sur des mesures provisionnelles, seule peut être invoquée la violation des droits constitutionnels.
LTF. La limitation des griefs prévue par cette disposition, de même que le principe d'allégation au sens de l'art. 106 al. 2
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 106 Application du droit - 1 Le Tribunal fédéral applique le droit d'office.
1    Le Tribunal fédéral applique le droit d'office.
2    Il n'examine la violation de droits fondamentaux ainsi que celle de dispositions de droit cantonal et intercantonal que si ce grief a été invoqué et motivé par le recourant.
LTF (qui va au-delà de l'obligation de motiver posée à l'art. 42 al. 2
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 42 Mémoires - 1 Les mémoires doivent être rédigés dans une langue officielle, indiquer les conclusions, les motifs et les moyens de preuve, et être signés.
1    Les mémoires doivent être rédigés dans une langue officielle, indiquer les conclusions, les motifs et les moyens de preuve, et être signés.
2    Les motifs doivent exposer succinctement en quoi l'acte attaqué viole le droit. Si le recours n'est recevable que lorsqu'il soulève une question juridique de principe ou qu'il porte sur un cas particulièrement important pour d'autres motifs, il faut exposer en quoi l'affaire remplit la condition exigée.15 16
3    Les pièces invoquées comme moyens de preuve doivent être jointes au mémoire, pour autant qu'elles soient en mains de la partie; il en va de même de la décision attaquée si le mémoire est dirigé contre une décision.
4    En cas de transmission électronique, le mémoire doit être muni de la signature électronique qualifiée de la partie ou de son mandataire au sens de la loi du 18 mars 2016 sur la signature électronique17. Le Tribunal fédéral détermine dans un règlement:
a  le format du mémoire et des pièces jointes;
b  les modalités de la transmission;
c  les conditions auxquelles il peut exiger, en cas de problème technique, que des documents lui soient adressés ultérieurement sur papier.18
5    Si la signature de la partie ou de son mandataire, la procuration ou les annexes prescrites font défaut, ou si le mandataire n'est pas autorisé, le Tribunal fédéral impartit un délai approprié à la partie pour remédier à l'irrégularité et l'avertit qu'à défaut le mémoire ne sera pas pris en considération.
6    Si le mémoire est illisible, inconvenant, incompréhensible ou prolixe ou qu'il n'est pas rédigé dans une langue officielle, le Tribunal fédéral peut le renvoyer à son auteur; il impartit à celui-ci un délai approprié pour remédier à l'irrégularité et l'avertit qu'à défaut le mémoire ne sera pas pris en considération.
7    Le mémoire de recours introduit de manière procédurière ou à tout autre égard abusif est irrecevable.
LTF), ne s'appliquent donc pas. Cela vaut également pour le séquestre d'objets ou de valeurs patrimoniales (ATF 129 I 103 consid. 2 p. 105 ss). Dès lors que le sort des biens saisis n'est décidé définitivement qu'à l'issue de la procédure pénale, et dans la mesure où les conditions de l'art. 93 al. 1
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 93 Autres décisions préjudicielles et incidentes - 1 Les autres décisions préjudicielles et incidentes notifiées séparément peuvent faire l'objet d'un recours:
1    Les autres décisions préjudicielles et incidentes notifiées séparément peuvent faire l'objet d'un recours:
a  si elles peuvent causer un préjudice irréparable, ou
b  si l'admission du recours peut conduire immédiatement à une décision finale qui permet d'éviter une procédure probatoire longue et coûteuse.
2    En matière d'entraide pénale internationale et en matière d'asile, les décisions préjudicielles et incidentes ne peuvent pas faire l'objet d'un recours.88 Le recours contre les décisions relatives à la détention extraditionnelle ou à la saisie d'objets et de valeurs est réservé si les conditions de l'al. 1 sont remplies.
3    Si le recours n'est pas recevable en vertu des al. 1 et 2 ou qu'il n'a pas été utilisé, les décisions préjudicielles et incidentes peuvent être attaquées par un recours contre la décision finale dans la mesure où elles influent sur le contenu de celle-ci.
LTF sont réunies pour statuer à propos d'une décision incidente, le Tribunal fédéral examine librement l'admissibilité de la mesure malgré son caractère provisoire compte tenu de la gravité de l'atteinte et afin d'assurer le respect des garanties de la CEDH (art. 36
SR 101 Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999
Cst. Art. 36 Restriction des droits fondamentaux - 1 Toute restriction d'un droit fondamental doit être fondée sur une base légale. Les restrictions graves doivent être prévues par une loi. Les cas de danger sérieux, direct et imminent sont réservés.
1    Toute restriction d'un droit fondamental doit être fondée sur une base légale. Les restrictions graves doivent être prévues par une loi. Les cas de danger sérieux, direct et imminent sont réservés.
2    Toute restriction d'un droit fondamental doit être justifiée par un intérêt public ou par la protection d'un droit fondamental d'autrui.
3    Toute restriction d'un droit fondamental doit être proportionnée au but visé.
4    L'essence des droits fondamentaux est inviolable.
et 190
SR 101 Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999
Cst. Art. 190 Droit applicable - Le Tribunal fédéral et les autres autorités sont tenus d'appliquer les lois fédérales et le droit international.135
Cst.; cf. ATF 131 I 333 consid. 4 p. 339; 425 consid.
6.1 p. 434 et les références). S'agissant en revanche de l'application de notions juridiques indéterminées, le Tribunal fédéral respecte la marge d'appréciation qui appartient aux autorités compétentes (cf. ATF 136 IV 97 consid. 4 p. 100 et les références).

1.4 La recevabilité du recours en matière pénale, y compris pour les griefs d'ordre constitutionnel (art. 95 let. a
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 95 Droit suisse - Le recours peut être formé pour violation:
a  du droit fédéral;
b  du droit international;
c  de droits constitutionnels cantonaux;
d  de dispositions cantonales sur le droit de vote des citoyens ainsi que sur les élections et votations populaires;
e  du droit intercantonal.
LTF), entraîne l'irrecevabilité du recours constitutionnel subsidiaire (art. 113
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 113 Principe - Le Tribunal fédéral connaît des recours constitutionnels contre les décisions des autorités cantonales de dernière instance qui ne peuvent faire l'objet d'aucun recours selon les art. 72 à 89.
LTF).

2.
La recourante conteste que les conditions d'une confiscation au sens de l'art. 70 al. 2
SR 311.0 Code pénal suisse du 21 décembre 1937
CP Art. 70 - 1 Le juge prononce la confiscation des valeurs patrimoniales qui sont le résultat d'une infraction ou qui étaient destinées à décider ou à récompenser l'auteur d'une infraction, si elles ne doivent pas être restituées au lésé en rétablissement de ses droits.
1    Le juge prononce la confiscation des valeurs patrimoniales qui sont le résultat d'une infraction ou qui étaient destinées à décider ou à récompenser l'auteur d'une infraction, si elles ne doivent pas être restituées au lésé en rétablissement de ses droits.
2    La confiscation n'est pas prononcée lorsqu'un tiers a acquis les valeurs dans l'ignorance des faits qui l'auraient justifiée, et cela dans la mesure où il a fourni une contre-prestation adéquate ou si la confiscation se révèle d'une rigueur excessive.
3    Le droit d'ordonner la confiscation de valeurs se prescrit par sept ans, à moins que la poursuite de l'infraction en cause ne soit soumise à une prescription d'une durée plus longue; celle-ci est alors applicable.
4    La décision de confiscation fait l'objet d'un avis officiel. Les prétentions de lésés ou de tiers s'éteignent cinq ans après cet avis.
5    Si le montant des valeurs soumises à la confiscation ne peut être déterminé avec précision ou si cette détermination requiert des moyens disproportionnés, le juge peut procéder à une estimation.
CP soient réunies. Elle estime avoir acheté l'immeuble, en janvier 2002, à sa valeur réelle. La société en aurait même retiré un avantage puisque la banque, créancière hypothécaire, avait abandonné une créance de 1,2 millions de francs. Aucun créancier n'avait été lésé et la société avait poursuivi ses activités longtemps après la vente. Il n'y aurait par ailleurs aucun indice de gestion fautive (l'opération n'avait causé aucun surendettement) ou de diminution de l'actif au préjudice des créanciers (la société était incapable de financer les travaux urgents sur l'immeuble et la banque avait exigé le remboursement de la dette hypothécaire). Sous l'angle de la proportionnalité, il n'y aurait pas de lien suffisant entre le préjudice des plaignants - qui ont notamment obtenu un ajournement de faillite en 2008 - et le produit d'une vente intervenue en 2002. La recourante se plaint enfin d'une constatation inexacte de certains faits.

2.1 Le séquestre pénal ordonné par une autorité d'instruction est une mesure conservatoire provisoire destinée à préserver les objets ou valeurs que le juge du fond pourrait être amené à confisquer ou qui pourraient servir à l'exécution d'une créance compensatrice. En l'espèce, le séquestre est fondé sur l'art. 263
SR 312.0 Code de procédure pénale suisse du 5 octobre 2007 (Code de procédure pénale, CPP) - Code de procédure pénale
CPP Art. 263 Principe - 1 Des objets et des valeurs patrimoniales appartenant au prévenu ou à des tiers peuvent être mis sous séquestre, lorsqu'il est probable:
1    Des objets et des valeurs patrimoniales appartenant au prévenu ou à des tiers peuvent être mis sous séquestre, lorsqu'il est probable:
a  qu'ils seront utilisés comme moyens de preuves;
b  qu'ils seront utilisés pour garantir le paiement des frais de procédure, des peines pécuniaires, des amendes et des indemnités;
c  qu'ils devront être restitués au lésé;
d  qu'ils devront être confisqués;
e  qu'ils seront utilisés pour couvrir les créances compensatrices de l'État selon l'art. 71 CP149.
2    Le séquestre est ordonné par voie d'ordonnance écrite, brièvement motivée. En cas d'urgence, il peut être ordonné oralement; toutefois, par la suite, l'ordre doit être confirmé par écrit.
3    Lorsqu'il y a péril en la demeure, la police ou des particuliers peuvent provisoirement mettre en sûreté des objets et des valeurs patrimoniales à l'intention du ministère public ou du tribunal.
CPP, disposition selon laquelle les objets et les valeurs patrimoniales appartenant au prévenu ou à des tiers peuvent être séquestrés notamment lorsqu'il est probable qu'ils devront être confisqués (let. d). Une telle mesure est fondée sur la vraisemblance; elle porte sur des objets dont on peut admettre, prima facie, qu'ils pourront être confisqués en application du droit pénal fédéral (ATF 126 I 97 consid. 3d/aa p. 107 et les références citées). Tant que l'instruction n'est pas achevée, une simple probabilité suffit car, à l'instar de toute mesure provisionnelle, la saisie se rapporte à des prétentions encore incertaines. L'autorité doit pouvoir décider rapidement du séquestre provisoire (cf. art. 263 al. 2
SR 312.0 Code de procédure pénale suisse du 5 octobre 2007 (Code de procédure pénale, CPP) - Code de procédure pénale
CPP Art. 263 Principe - 1 Des objets et des valeurs patrimoniales appartenant au prévenu ou à des tiers peuvent être mis sous séquestre, lorsqu'il est probable:
1    Des objets et des valeurs patrimoniales appartenant au prévenu ou à des tiers peuvent être mis sous séquestre, lorsqu'il est probable:
a  qu'ils seront utilisés comme moyens de preuves;
b  qu'ils seront utilisés pour garantir le paiement des frais de procédure, des peines pécuniaires, des amendes et des indemnités;
c  qu'ils devront être restitués au lésé;
d  qu'ils devront être confisqués;
e  qu'ils seront utilisés pour couvrir les créances compensatrices de l'État selon l'art. 71 CP149.
2    Le séquestre est ordonné par voie d'ordonnance écrite, brièvement motivée. En cas d'urgence, il peut être ordonné oralement; toutefois, par la suite, l'ordre doit être confirmé par écrit.
3    Lorsqu'il y a péril en la demeure, la police ou des particuliers peuvent provisoirement mettre en sûreté des objets et des valeurs patrimoniales à l'intention du ministère public ou du tribunal.
CPP), ce qui exclut qu'il résolve des questions juridiques complexes ou qu'il attende d'être renseigné de manière exacte et complète sur les faits avant d'agir (ATF 116 Ib 96 consid. 3a p. 99). Le séquestre pénal
se justifie aussi longtemps que subsiste une probabilité de confiscation (SJ 1994 p. 90 et 102).

2.2 La valeur de l'immeuble au moment de sa vente en 2002 a fait l'objet de plusieurs évaluations. D'après l'expertise d'un architecte en 2001, elle serait de 5,6 millions de francs. Selon un document interne de la société, elle serait de 4 à 4,5 millions de francs. Rien ne permet de penser que ces évaluations (notamment la seconde, élaborée à des fins internes) aient été exagérées. L'estimation cadastrale de l'immeuble (2'853'000 fr.) dépasse elle aussi largement le prix de vente. Un abandon de créance a certes été consenti au moment de la vente par la banque en faveur de la société; toutefois, il était indépendant du prix convenu entre les parties, et ne paraissait pas lié à la vente elle-même. La modicité du prix de vente, le fait que les parties étaient apparentées (dans leur actionnariat et leur administration) et que la venderesse a ensuite loué les locaux à l'acheteuse, permettent de soupçonner un transfert de patrimoine à des conditions défavorables pour la société. Selon l'arrêt cantonal, cette dernière connaissait déjà des difficultés en 2002, qui ont abouti à une faillite prononcée en 2009. Ces éléments suffisent pour rendre vraisemblable la commission d'une infraction visée aux art. 164 ss
SR 311.0 Code pénal suisse du 21 décembre 1937
CP Art. 164 - 1. Le débiteur qui, de manière à causer un dommage à ses créanciers, diminue son actif
1    Le débiteur qui, de manière à causer un dommage à ses créanciers, diminue son actif
2    Le tiers qui, dans les mêmes conditions, se livre à ces agissements de manière à causer un dommage aux créanciers est puni d'une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d'une peine pécuniaire.
CP et, par conséquent, une
confiscation fondée sur l'art. 70 al. 2
SR 311.0 Code pénal suisse du 21 décembre 1937
CP Art. 70 - 1 Le juge prononce la confiscation des valeurs patrimoniales qui sont le résultat d'une infraction ou qui étaient destinées à décider ou à récompenser l'auteur d'une infraction, si elles ne doivent pas être restituées au lésé en rétablissement de ses droits.
1    Le juge prononce la confiscation des valeurs patrimoniales qui sont le résultat d'une infraction ou qui étaient destinées à décider ou à récompenser l'auteur d'une infraction, si elles ne doivent pas être restituées au lésé en rétablissement de ses droits.
2    La confiscation n'est pas prononcée lorsqu'un tiers a acquis les valeurs dans l'ignorance des faits qui l'auraient justifiée, et cela dans la mesure où il a fourni une contre-prestation adéquate ou si la confiscation se révèle d'une rigueur excessive.
3    Le droit d'ordonner la confiscation de valeurs se prescrit par sept ans, à moins que la poursuite de l'infraction en cause ne soit soumise à une prescription d'une durée plus longue; celle-ci est alors applicable.
4    La décision de confiscation fait l'objet d'un avis officiel. Les prétentions de lésés ou de tiers s'éteignent cinq ans après cet avis.
5    Si le montant des valeurs soumises à la confiscation ne peut être déterminé avec précision ou si cette détermination requiert des moyens disproportionnés, le juge peut procéder à une estimation.
CP.
La recourante tente de démontrer que la société n'était pas en état de surendettement (art. 165
SR 311.0 Code pénal suisse du 21 décembre 1937
CP Art. 165 - 1. Le débiteur qui, de manières autres que celles visées à l'art. 164, par des fautes de gestion, notamment par une dotation insuffisante en capital, par des dépenses exagérées, par des spéculations hasardeuses, par l'octroi ou l'utilisation à la légère de crédits, par le bradage de valeurs patrimoniales ou par une négligence coupable dans l'exercice de sa profession ou dans l'administration de ses biens,
1    Le débiteur qui, de manières autres que celles visées à l'art. 164, par des fautes de gestion, notamment par une dotation insuffisante en capital, par des dépenses exagérées, par des spéculations hasardeuses, par l'octroi ou l'utilisation à la légère de crédits, par le bradage de valeurs patrimoniales ou par une négligence coupable dans l'exercice de sa profession ou dans l'administration de ses biens,
2    Le débiteur soumis à la poursuite par voie de saisie n'est poursuivi pénalement que sur plainte d'un créancier ayant obtenu contre lui un acte de défaut de biens.
CP) au moment de la vente et qu'il n'y avait pas volonté de causer un dommage aux créanciers de la société au sens de l'art. 164
SR 311.0 Code pénal suisse du 21 décembre 1937
CP Art. 164 - 1. Le débiteur qui, de manière à causer un dommage à ses créanciers, diminue son actif
1    Le débiteur qui, de manière à causer un dommage à ses créanciers, diminue son actif
2    Le tiers qui, dans les mêmes conditions, se livre à ces agissements de manière à causer un dommage aux créanciers est puni d'une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d'une peine pécuniaire.
CP. Il s'agit là de questions qui ne peuvent encore être tranchées à ce stade de l'enquête et que le juge du séquestre n'a dès lors pas à résoudre de manière définitive. Comme le relève la cour cantonale, le fait que l'immeuble a pu être revendu pour 3,3 millions de francs (ce qui correspondrait au prix d'achat, plus 1,2 million de francs de travaux) ne permet pas non plus de conclure que le prix payé en 2002 était justifié. En définitive, le séquestre de l'immeuble est fondé sur une vraisemblance suffisante et la saisie du produit de la vente l'est par conséquent également (cf. art. 266 al. 5
SR 312.0 Code de procédure pénale suisse du 5 octobre 2007 (Code de procédure pénale, CPP) - Code de procédure pénale
CPP Art. 266 Exécution - 1 L'autorité pénale atteste dans l'ordonnance de séquestre ou dans un accusé de réception séparé la remise des objets et valeurs patrimoniales séquestrés.
1    L'autorité pénale atteste dans l'ordonnance de séquestre ou dans un accusé de réception séparé la remise des objets et valeurs patrimoniales séquestrés.
2    Elle établit un inventaire des objets et valeurs séquestrés et les conserve de manière appropriée.
3    Si des immeubles sont séquestrés, une restriction au droit de les aliéner est ordonnée et mentionnée au registre foncier.
4    Le séquestre d'une créance est notifié aux débiteurs, qui sont informés du fait que le paiement en mains du créancier n'éteint pas la dette.
5    Les objets sujets à une dépréciation rapide ou à un entretien dispendieux ainsi que les papiers-valeurs et autres valeurs cotées en bourse ou sur le marché peuvent être réalisés immédiatement selon les dispositions de la loi fédérale du 11 avril 1889 sur la poursuite pour dettes et la faillite156. Le produit est frappé de séquestre.
6    Le Conseil fédéral règle le placement des valeurs patrimoniales séquestrées.
CPP).

2.3 Sous l'angle du principe de la proportionnalité il y a lieu de relever que la vente de l'immeuble a été autorisée conformément à la volonté de la recourante. Celle-ci ne prétend pas que, faute de pouvoir disposer du produit de la vente, elle se trouverait dans l'impossibilité de faire face à des dépenses obligatoires ou empêchée de poursuivre son activité, le Ministère public ayant d'ailleurs autorisé le paiement d'un créancier. La durée du séquestre n'apparaît pas non plus disproportionnée compte tenu de la nature de l'enquête et des investigations nécessaires.

3.
Sur le vu de ce qui précède, le recours constitutionnel subsidiaire est irrecevable et le recours en matière pénale doit être rejeté. Conformément à l'art. 66 al. 1
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 66 Recouvrement des frais judiciaires - 1 En règle générale, les frais judiciaires sont mis à la charge de la partie qui succombe. Si les circonstances le justifient, le Tribunal fédéral peut les répartir autrement ou renoncer à les mettre à la charge des parties.
1    En règle générale, les frais judiciaires sont mis à la charge de la partie qui succombe. Si les circonstances le justifient, le Tribunal fédéral peut les répartir autrement ou renoncer à les mettre à la charge des parties.
2    Si une affaire est liquidée par un désistement ou une transaction, les frais judiciaires peuvent être réduits ou remis.
3    Les frais causés inutilement sont supportés par celui qui les a engendrés.
4    En règle générale, la Confédération, les cantons, les communes et les organisations chargées de tâches de droit public ne peuvent se voir imposer de frais judiciaires s'ils s'adressent au Tribunal fédéral dans l'exercice de leurs attributions officielles sans que leur intérêt patrimonial soit en cause ou si leurs décisions font l'objet d'un recours.
5    Sauf disposition contraire, les frais judiciaires mis conjointement à la charge de plusieurs personnes sont supportés par elles à parts égales et solidairement.
LTF, les frais judiciaires sont mis à la charge de la recourante. Une indemnité de dépens est allouée aux intimées qui obtiennent gain de cause avec l'assistance d'un avocat (art. 68 al. 1
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 68 Dépens - 1 Le Tribunal fédéral décide, dans son arrêt, si et dans quelle mesure les frais de la partie qui obtient gain de cause sont supportés par celle qui succombe.
1    Le Tribunal fédéral décide, dans son arrêt, si et dans quelle mesure les frais de la partie qui obtient gain de cause sont supportés par celle qui succombe.
2    En règle générale, la partie qui succombe est tenue de rembourser à la partie qui a obtenu gain de cause, selon le tarif du Tribunal fédéral, tous les frais nécessaires causés par le litige.
3    En règle générale, aucuns dépens ne sont alloués à la Confédération, aux cantons, aux communes ou aux organisations chargées de tâches de droit public lorsqu'ils obtiennent gain de cause dans l'exercice de leurs attributions officielles.
4    L'art. 66, al. 3 et 5, est applicable par analogie.
5    Le Tribunal fédéral confirme, annule ou modifie, selon le sort de la cause, la décision de l'autorité précédente sur les dépens. Il peut fixer lui-même les dépens d'après le tarif fédéral ou cantonal applicable ou laisser à l'autorité précédente le soin de les fixer.
LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours constitutionnel subsidiaire est irrecevable.

2.
Le recours en matière pénale est rejeté.

3.
Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr., sont mis à la charge de la recourante.

4.
Une indemnité de dépens de 2'000 fr. est allouée aux intimées, à la charge de la recourante.

5.
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires des parties, au Ministère public de la République et canton de Neuchâtel, Parquet régional de la Chaux-de-Fonds, et au Tribunal cantonal du canton de Neuchâtel, Autorité de recours en matière pénale.

Lausanne, le 23 novembre 2011
Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse

Le Président: Fonjallaz

Le Greffier: Kurz