Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

1B 278/2018

Arrêt du 20 juin 2018

Ire Cour de droit public

Composition
MM. les Juges fédéraux Merkli, Président,
Karlen et Chaix.
Greffier : M. Kurz.

Participants à la procédure
A.________,
recourant,

contre

Ministère public central du canton de Vaud.

Objet
Procédure pénale; récusation d'experts,

recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal
du canton de Vaud, Chambre des recours pénale,
du 18 avril 2018 (291 - PE16.001968-EMM).

Faits :

A.
Dans le cadre d'une instruction pénale ouverte sur plainte de A.________ pour des actes d'abus de pouvoir reprochés à des membres du Ministère public et des forces de police, le Ministère public central du canton de Vaud a ordonné la mise en oeuvre d'une expertise afin de déterminer si les blessures constatées étaient compatibles avec la version du plaignant ou des policiers. Les deux expertes désignées le 20 octobre 2017 ont rendu leur rapport le 15 décembre 2017. Invité à se déterminer, A.________ a mis en doute l'impartialité des expertes et a requis la mise en oeuvre d'une contre-expertise. A la demande du Ministère public, il a précisé le 15 mars 2018 qu'il demandait la récusation des expertes.
Cette demande a été transmise à la Chambre des recours pénale du Tribunal cantonal vaudois qui, par décision du 18 avril 2018, l'a déclarée irrecevable. Le rapport d'expertise avait été communiqué le 29 décembre 2017 à A.________ et celui-ci n'avait réagi que le 15 février 2018 en demandant la récusation. La demande était donc manifestement tardive.

B.
A.________ déclare recourir contre la décision de la Chambre des recours pénale. Il en demande l'annulation y compris en ce qui concerne les frais et dépens et requiert un délai approprié si le Tribunal fédéral estime que le recours ne satisfait pas aux exigences de l'art. 42
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 42 Mémoires - 1 Les mémoires doivent être rédigés dans une langue officielle, indiquer les conclusions, les motifs et les moyens de preuve, et être signés.
1    Les mémoires doivent être rédigés dans une langue officielle, indiquer les conclusions, les motifs et les moyens de preuve, et être signés.
2    Les motifs doivent exposer succinctement en quoi l'acte attaqué viole le droit. Si le recours n'est recevable que lorsqu'il soulève une question juridique de principe ou qu'il porte sur un cas particulièrement important pour d'autres motifs, il faut exposer en quoi l'affaire remplit la condition exigée.15 16
3    Les pièces invoquées comme moyens de preuve doivent être jointes au mémoire, pour autant qu'elles soient en mains de la partie; il en va de même de la décision attaquée si le mémoire est dirigé contre une décision.
4    En cas de transmission électronique, le mémoire doit être muni de la signature électronique qualifiée de la partie ou de son mandataire au sens de la loi du 18 mars 2016 sur la signature électronique17. Le Tribunal fédéral détermine dans un règlement:
a  le format du mémoire et des pièces jointes;
b  les modalités de la transmission;
c  les conditions auxquelles il peut exiger, en cas de problème technique, que des documents lui soient adressés ultérieurement sur papier.18
5    Si la signature de la partie ou de son mandataire, la procuration ou les annexes prescrites font défaut, ou si le mandataire n'est pas autorisé, le Tribunal fédéral impartit un délai approprié à la partie pour remédier à l'irrégularité et l'avertit qu'à défaut le mémoire ne sera pas pris en considération.
6    Si le mémoire est illisible, inconvenant, incompréhensible ou prolixe ou qu'il n'est pas rédigé dans une langue officielle, le Tribunal fédéral peut le renvoyer à son auteur; il impartit à celui-ci un délai approprié pour remédier à l'irrégularité et l'avertit qu'à défaut le mémoire ne sera pas pris en considération.
7    Le mémoire de recours introduit de manière procédurière ou à tout autre égard abusif est irrecevable.
LTF. Il n'a pas été demandé de réponse.

Considérant en droit :

1.
Selon les art. 78
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 78 Principe - 1 Le Tribunal fédéral connaît des recours contre les décisions rendues en matière pénale.
1    Le Tribunal fédéral connaît des recours contre les décisions rendues en matière pénale.
2    Sont également sujettes au recours en matière pénale:
a  les décisions sur les prétentions civiles qui doivent être jugées en même temps que la cause pénale;
b  les décisions sur l'exécution de peines et de mesures.
, 80 al. 1
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 80 Autorités précédentes - 1 Le recours est recevable contre les décisions prises par les autorités cantonales de dernière instance ou par la Cour des plaintes et la Cour d'appel du Tribunal pénal fédéral.49
1    Le recours est recevable contre les décisions prises par les autorités cantonales de dernière instance ou par la Cour des plaintes et la Cour d'appel du Tribunal pénal fédéral.49
2    Les cantons instituent des tribunaux supérieurs comme autorités cantonales de dernière instance. Ces tribunaux statuent sur recours. Sont exceptés les cas dans lesquels le code de procédure pénale du 5 octobre 2007 (CPP)50 prévoit un tribunal des mesures de contrainte ou un autre tribunal comme instance cantonale unique.51
et 92 al. 1
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 92 Décisions préjudicielles et incidentes concernant la compétence et les demandes de récusation - 1 Les décisions préjudicielles et incidentes qui sont notifiées séparément et qui portent sur la compétence ou sur une demande de récusation peuvent faire l'objet d'un recours.
1    Les décisions préjudicielles et incidentes qui sont notifiées séparément et qui portent sur la compétence ou sur une demande de récusation peuvent faire l'objet d'un recours.
2    Ces décisions ne peuvent plus être attaquées ultérieurement.
LTF, une décision prise en dernière instance cantonale relative à la récusation d'experts peut faire immédiatement l'objet d'un recours en matière pénale nonobstant son caractère incident (ATF 144 IV 90 consid. 1). Le recourant, dont la demande de récusation a été déclarée irrecevable, a qualité pour agir en vertu de l'art. 81 al. 1
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 81 Qualité pour recourir - 1 A qualité pour former un recours en matière pénale quiconque:
1    A qualité pour former un recours en matière pénale quiconque:
a  a pris part à la procédure devant l'autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire, et
b  a un intérêt juridique à l'annulation ou à la modification de la décision attaquée, soit en particulier:
b1  l'accusé,
b2  le représentant légal de l'accusé,
b3  le ministère public, sauf pour les décisions relatives à la mise en détention provisoire ou pour des motifs de sûreté, à la prolongation de la détention ou à sa levée,
b4  ...
b5  la partie plaignante, si la décision attaquée peut avoir des effets sur le jugement de ses prétentions civiles,
b6  le plaignant, pour autant que la contestation porte sur le droit de porter plainte,
b7  le Ministère public de la Confédération et les autorités administratives participant à la poursuite et au jugement des affaires pénales administratives selon la loi fédérale du 22 mars 1974 sur le droit pénal administratif56.
2    Une autorité fédérale a qualité pour recourir si le droit fédéral prévoit que la décision doit lui être communiquée.57
3    La qualité pour recourir contre les décisions visées à l'art. 78, al. 2, let. b, appartient également à la Chancellerie fédérale, aux départements fédéraux ou, pour autant que le droit fédéral le prévoie, aux unités qui leur sont subordonnées, si l'acte attaqué est susceptible de violer la législation fédérale dans leur domaine d'attributions.
LTF. Le recours est aussi irrecevable dans la mesure où le recourant critique le refus d'ordonner une deuxième expertise, car cela n'est pas l'objet de la décision attaquée.

2.
Le recourant s'étonne que l'on n'ait pas fait appel à des experts lausannois spécialisés dans la prise en charge des personnes victimes de violences. Il se plaint aussi de ce que l'expertise soit basée sur le témoignage de policiers n'ayant pas participé à l'intervention litigieuse, et sans l'entendre. Il relève enfin qu'il a requis la récusation dans le délai que le procureur lui-même lui avait imparti. Les deux premiers griefs sont dénués de pertinence dans le cadre de la récusation des experts: le premier devait être soulevé au moment du choix des experts et le second concerne la valeur probante de l'expertise, qui peut être contestée par la suite.

2.1. Conformément à l'art. 58 al. 1
SR 312.0 Code de procédure pénale suisse du 5 octobre 2007 (Code de procédure pénale, CPP) - Code de procédure pénale
CPP Art. 58 Récusation demandée par une partie - 1 Lorsqu'une partie entend demander la récusation d'une personne qui exerce une fonction au sein d'une autorité pénale, elle doit présenter sans délai à la direction de la procédure une demande en ce sens, dès qu'elle a connaissance du motif de récusation; les faits sur lesquels elle fonde sa demande doivent être rendus plausibles.
1    Lorsqu'une partie entend demander la récusation d'une personne qui exerce une fonction au sein d'une autorité pénale, elle doit présenter sans délai à la direction de la procédure une demande en ce sens, dès qu'elle a connaissance du motif de récusation; les faits sur lesquels elle fonde sa demande doivent être rendus plausibles.
2    La personne concernée prend position sur la demande.
CPP - disposition également applicable lorsque la requête tend à la récusation d'un expert (arrêt 1B 754/2012 du 23 mai 2013 consid. 3.1) -, la récusation doit être demandée sans délai, dès que la partie a connaissance du motif de récusation, c'est-à-dire dans les jours qui suivent la connaissance de la cause de récusation (arrêt 1B 72/2015 du 27 avril 2015 consid. 2.1 et les arrêts cités), sous peine de déchéance (ATF 140 I 271 consid. 8.4.3 p. 275 et les arrêts cités). Il est en effet contraire aux règles de la bonne foi de garder ce moyen en réserve pour ne l'invoquer qu'en cas d'issue défavorable ou lorsque l'intéressé se serait rendu compte que l'instruction ne suivait pas le cours désiré (ATF 139 III 120 consid. 3.2.1 p. 124).

2.2. Selon la décision attaquée, le rapport d'expertise a été communiqué au recourant le 29 décembre 2017. Le recourant n'a réagi que le 15 février 2018, soit un mois et demi plus tard pour se plaindre de ce que le rapport en question ne corroborait pas entièrement sa version des faits. Au regard des exigences de célérité rappelées ci-dessus, une telle intervention apparaît manifestement tardive.
Certes, le Procureur a demandé au recourant, le 5 mars 2018, s'il entendait requérir la récusation des expertes, et le recourant a répondu dans le délai imparti à cet effet. Cela ne changeait toutefois rien à la tardiveté de la demande initiale et l'interpellation du Procureur ne pouvait avoir pour effet de faire partir un nouveau délai pour demander la récusation, sauf à contourner les exigences posées à l'art. 58 al. 1
SR 312.0 Code de procédure pénale suisse du 5 octobre 2007 (Code de procédure pénale, CPP) - Code de procédure pénale
CPP Art. 58 Récusation demandée par une partie - 1 Lorsqu'une partie entend demander la récusation d'une personne qui exerce une fonction au sein d'une autorité pénale, elle doit présenter sans délai à la direction de la procédure une demande en ce sens, dès qu'elle a connaissance du motif de récusation; les faits sur lesquels elle fonde sa demande doivent être rendus plausibles.
1    Lorsqu'une partie entend demander la récusation d'une personne qui exerce une fonction au sein d'une autorité pénale, elle doit présenter sans délai à la direction de la procédure une demande en ce sens, dès qu'elle a connaissance du motif de récusation; les faits sur lesquels elle fonde sa demande doivent être rendus plausibles.
2    La personne concernée prend position sur la demande.
CPP.

3.
Sur le vu de ce qui précède, le recours est rejeté, selon la procédure prévue à l'art. 109 al. 1 let. a
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 109 Cours statuant à trois juges - 1 Le refus d'entrer en matière sur les recours qui ne soulèvent pas de question juridique de principe ni ne portent sur un cas particulièrement important alors qu'ils ne sont recevables qu'à cette condition (art. 74 et 83 à 85) est prononcé par la cour statuant à trois juges. L'art. 58, al. 1, let. b, n'est pas applicable.
1    Le refus d'entrer en matière sur les recours qui ne soulèvent pas de question juridique de principe ni ne portent sur un cas particulièrement important alors qu'ils ne sont recevables qu'à cette condition (art. 74 et 83 à 85) est prononcé par la cour statuant à trois juges. L'art. 58, al. 1, let. b, n'est pas applicable.
2    La cour décide dans la même composition et à l'unanimité:
a  de rejeter un recours manifestement infondé;
b  d'admettre un recours manifestement fondé, en particulier si l'acte attaqué s'écarte de la jurisprudence du Tribunal fédéral et qu'il n'y a pas de raison de la réexaminer.
3    L'arrêt est motivé sommairement. Il peut renvoyer partiellement ou entièrement à la décision attaquée.
LTF. Compte tenu de la situation financière du recourant, qui bénéficie de l'assistance judiciaire au niveau cantonal, il peut être renoncé à la perception de frais judiciaires.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :

1.
Le recours est rejeté.

2.
Il n'est pas perçu de frais judiciaires.

3.
Le présent arrêt est communiqué au recourant, au Ministère public central du canton de Vaud et au Tribunal cantonal du canton de Vaud, Chambre des recours pénale.

Lausanne, le 20 juin 2018

Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse

Le Président : Merkli

Le Greffier : Kurz