Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
1B 580/2011

Arrêt du 10 janvier 2012
Ire Cour de droit public

Composition
MM. les Juges Raselli, Juge présidant,
Merkli et Chaix.
Greffier: M. Kurz.

Participants à la procédure
X.________,
représenté par Me Alain Dubuis, avocat,
recourant,

contre

Ministère public central du canton de Vaud, avenue de Longemalle 1, 1020 Renens VD.

Objet
séquestre pénal,

recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal
du canton de Vaud, Chambre des recours pénale,
du 8 septembre 2011.

Faits:

A.
X.________ a fait l'objet de plusieurs condamnations pour des délits contre l'honneur, en raison de diverses publications sur des sites Internet. Le 6 octobre 2010, une transaction est intervenue avec le plaignant Y.________, X.________ s'étant engagé à retirer des sites concernés les références à cette personne. Le 16 juin 2011, Y.________ a déposé une nouvelle plainte pénale en raison d'actes de dénigrement commis sur divers sites, dont l'un créé en mai 2009 dont l'administrateur serait X.________ et dont le contrat d'hébergement aurait été renouvelé jusqu'au mois de mars 2013.
Le 4 août 2011, la police a saisi, au domicile de l'épouse de X.________, un ordinateur portable appartenant au prévenu. Par ordonnance du 19 août 2011, le Ministère public central du canton de Vaud a décidé de séquestrer l'ordinateur à titre conservatoire et probatoire.

B.
Par arrêt du 8 septembre 2011, la Chambre des recours pénale du Tribunal cantonal vaudois a rejeté le recours formé par X.________ et confirmé la décision de séquestre. Les modifications apportées au site et la création d'un "site miroir" constituaient de nouvelles infractions. L'ordinateur saisi avait pu servir à visiter le site litigieux et à renouveler le contrat d'hébergement, de sorte qu'une confiscation était envisageable.

C.
Par acte du 13 octobre 2011, X.________ forme un recours en matière pénale par lequel il reprend ses conclusions en restitution de l'ordinateur séquestré. Il demande l'assistance judiciaire.
La Chambre des recours pénale se réfère à son arrêt, sans observations. Le Ministère public s'est prononcé dans le sens du rejet du recours.
Le recourant a déposé de nouvelles déterminations le 16 décembre 2011, persistant dans ses griefs et ses conclusions.

Considérant en droit:

1.
Le recours en matière pénale, au sens de l'art. 78 al. 1
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 78 Principe - 1 Le Tribunal fédéral connaît des recours contre les décisions rendues en matière pénale.
1    Le Tribunal fédéral connaît des recours contre les décisions rendues en matière pénale.
2    Sont également sujettes au recours en matière pénale:
a  les décisions sur les prétentions civiles qui doivent être jugées en même temps que la cause pénale;
b  les décisions sur l'exécution de peines et de mesures.
LTF, est ouvert contre une décision de séquestre prise au cours de la procédure pénale et confirmée en dernière instance cantonale (art. 80
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 80 Autorités précédentes - 1 Le recours est recevable contre les décisions prises par les autorités cantonales de dernière instance ou par la Cour des plaintes et la Cour d'appel du Tribunal pénal fédéral.49
1    Le recours est recevable contre les décisions prises par les autorités cantonales de dernière instance ou par la Cour des plaintes et la Cour d'appel du Tribunal pénal fédéral.49
2    Les cantons instituent des tribunaux supérieurs comme autorités cantonales de dernière instance. Ces tribunaux statuent sur recours. Sont exceptés les cas dans lesquels le code de procédure pénale du 5 octobre 2007 (CPP)50 prévoit un tribunal des mesures de contrainte ou un autre tribunal comme instance cantonale unique.51
LTF).

1.1 La décision par laquelle le juge ordonne ou maintient un séquestre pénal constitue une décision incidente (ATF 128 I 129 consid. 1 p. 131; 126 I 97 consid. 1b p. 100 et les références). Le recours n'est dès lors recevable qu'aux conditions de l'art. 93 al. 1
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 93 Autres décisions préjudicielles et incidentes - 1 Les autres décisions préjudicielles et incidentes notifiées séparément peuvent faire l'objet d'un recours:
1    Les autres décisions préjudicielles et incidentes notifiées séparément peuvent faire l'objet d'un recours:
a  si elles peuvent causer un préjudice irréparable, ou
b  si l'admission du recours peut conduire immédiatement à une décision finale qui permet d'éviter une procédure probatoire longue et coûteuse.
2    En matière d'entraide pénale internationale et en matière d'asile, les décisions préjudicielles et incidentes ne peuvent pas faire l'objet d'un recours.88 Le recours contre les décisions relatives à la détention extraditionnelle ou à la saisie d'objets et de valeurs est réservé si les conditions de l'al. 1 sont remplies.
3    Si le recours n'est pas recevable en vertu des al. 1 et 2 ou qu'il n'a pas été utilisé, les décisions préjudicielles et incidentes peuvent être attaquées par un recours contre la décision finale dans la mesure où elles influent sur le contenu de celle-ci.
LTF, soit notamment en présence d'un préjudice irréparable (art. 93 al. 1 let. a
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 93 Autres décisions préjudicielles et incidentes - 1 Les autres décisions préjudicielles et incidentes notifiées séparément peuvent faire l'objet d'un recours:
1    Les autres décisions préjudicielles et incidentes notifiées séparément peuvent faire l'objet d'un recours:
a  si elles peuvent causer un préjudice irréparable, ou
b  si l'admission du recours peut conduire immédiatement à une décision finale qui permet d'éviter une procédure probatoire longue et coûteuse.
2    En matière d'entraide pénale internationale et en matière d'asile, les décisions préjudicielles et incidentes ne peuvent pas faire l'objet d'un recours.88 Le recours contre les décisions relatives à la détention extraditionnelle ou à la saisie d'objets et de valeurs est réservé si les conditions de l'al. 1 sont remplies.
3    Si le recours n'est pas recevable en vertu des al. 1 et 2 ou qu'il n'a pas été utilisé, les décisions préjudicielles et incidentes peuvent être attaquées par un recours contre la décision finale dans la mesure où elles influent sur le contenu de celle-ci.
LTF; l'hypothèse prévue à l'art. 93 al. 1 let. b
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 93 Autres décisions préjudicielles et incidentes - 1 Les autres décisions préjudicielles et incidentes notifiées séparément peuvent faire l'objet d'un recours:
1    Les autres décisions préjudicielles et incidentes notifiées séparément peuvent faire l'objet d'un recours:
a  si elles peuvent causer un préjudice irréparable, ou
b  si l'admission du recours peut conduire immédiatement à une décision finale qui permet d'éviter une procédure probatoire longue et coûteuse.
2    En matière d'entraide pénale internationale et en matière d'asile, les décisions préjudicielles et incidentes ne peuvent pas faire l'objet d'un recours.88 Le recours contre les décisions relatives à la détention extraditionnelle ou à la saisie d'objets et de valeurs est réservé si les conditions de l'al. 1 sont remplies.
3    Si le recours n'est pas recevable en vertu des al. 1 et 2 ou qu'il n'a pas été utilisé, les décisions préjudicielles et incidentes peuvent être attaquées par un recours contre la décision finale dans la mesure où elles influent sur le contenu de celle-ci.
LTF est manifestement inapplicable). Le préjudice est irréparable lorsqu'il n'est pas susceptible d'être supprimé par une décision ultérieure favorable au recourant. Un dommage de pur fait n'est pas considéré comme tel (ATF 126 IV 92 consid. 4 p. 95). Il appartient à la partie recourante d'alléguer et d'établir la possibilité que la décision incidente lui cause un dommage irréparable, à moins que celui-ci ne fasse d'emblée aucun doute (ATF 137 III 324 consid. 1.1, 136 IV 92 consid. 4.2).

1.2 Selon la jurisprudence (ATF 133 IV 139 consid. 4 p. 141 et les références), le séquestre de valeurs patrimoniales cause en principe un dommage irréparable au sens de l'art. 93 al. 1 let. a
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 93 Autres décisions préjudicielles et incidentes - 1 Les autres décisions préjudicielles et incidentes notifiées séparément peuvent faire l'objet d'un recours:
1    Les autres décisions préjudicielles et incidentes notifiées séparément peuvent faire l'objet d'un recours:
a  si elles peuvent causer un préjudice irréparable, ou
b  si l'admission du recours peut conduire immédiatement à une décision finale qui permet d'éviter une procédure probatoire longue et coûteuse.
2    En matière d'entraide pénale internationale et en matière d'asile, les décisions préjudicielles et incidentes ne peuvent pas faire l'objet d'un recours.88 Le recours contre les décisions relatives à la détention extraditionnelle ou à la saisie d'objets et de valeurs est réservé si les conditions de l'al. 1 sont remplies.
3    Si le recours n'est pas recevable en vertu des al. 1 et 2 ou qu'il n'a pas été utilisé, les décisions préjudicielles et incidentes peuvent être attaquées par un recours contre la décision finale dans la mesure où elles influent sur le contenu de celle-ci.
LTF, car le détenteur se trouve privé temporairement de la libre disposition des valeurs saisies (ATF 126 I 97 consid. 1b p. 101; voir également ATF 128 I 129 consid. 1 p. 131; 89 I 185 consid. 4 p. 187 et les références). En revanche, lorsque le séquestre concerne d'autres objets ou documents, il n'y a en principe pas (sauf démonstration contraire du recourant) de préjudice irréparable (ATF 136 IV 92 concernant la saisie de documents bancaires; en dernier lieu 5A 509/2011 du 18 octobre 2011 destiné à la publication, consid. 1.2.3 s'agissant de l'inscription provisoire d'une hypothèque légale).

1.3 Le recourant ne donne aucune indication à ce sujet. Il ne dit pas avoir un quelconque besoin de l'ordinateur séquestré, soit en tant qu'outil de travail, soit parce qu'il s'y trouverait des fichiers ou des programmes dont il aurait absolument besoin. Le simple fait que l'ordinateur puisse servir de moyen de preuve ou qu'il puisse être ultérieurement confisqué est évidemment insuffisant. Faute de toute démonstration sur l'existence d'un préjudice irréparable, le recours apparaît irrecevable.

2.
A supposer qu'il faille entrer en matière, le recours serait de toute façon mal fondé.

2.1 Le séquestre contesté est fondé sur l'art. 263
SR 312.0 Code de procédure pénale suisse du 5 octobre 2007 (Code de procédure pénale, CPP) - Code de procédure pénale
CPP Art. 263 Principe - 1 Des objets et des valeurs patrimoniales appartenant au prévenu ou à des tiers peuvent être mis sous séquestre, lorsqu'il est probable:
1    Des objets et des valeurs patrimoniales appartenant au prévenu ou à des tiers peuvent être mis sous séquestre, lorsqu'il est probable:
a  qu'ils seront utilisés comme moyens de preuves;
b  qu'ils seront utilisés pour garantir le paiement des frais de procédure, des peines pécuniaires, des amendes et des indemnités;
c  qu'ils devront être restitués au lésé;
d  qu'ils devront être confisqués;
e  qu'ils seront utilisés pour couvrir les créances compensatrices de l'État selon l'art. 71 CP149.
2    Le séquestre est ordonné par voie d'ordonnance écrite, brièvement motivée. En cas d'urgence, il peut être ordonné oralement; toutefois, par la suite, l'ordre doit être confirmé par écrit.
3    Lorsqu'il y a péril en la demeure, la police ou des particuliers peuvent provisoirement mettre en sûreté des objets et des valeurs patrimoniales à l'intention du ministère public ou du tribunal.
CPP, disposition selon laquelle les objets et les valeurs patrimoniales appartenant au prévenu ou à des tiers peuvent être séquestrés notamment lorsqu'il est probable qu'ils seront utilisés comme moyens de preuve (let. a) ou qu'ils devront être confisqués (let. d). Une telle mesure est fondée sur la vraisemblance (ATF 126 I 97 consid. 3d/aa p. 107 et les références citées); tant que l'instruction n'est pas achevée, une simple probabilité suffit car, à l'instar de toute mesure provisionnelle, la saisie se rapporte à des prétentions encore incertaines. L'autorité doit pouvoir décider rapidement du séquestre provisoire (cf. art. 263 al. 2
SR 312.0 Code de procédure pénale suisse du 5 octobre 2007 (Code de procédure pénale, CPP) - Code de procédure pénale
CPP Art. 263 Principe - 1 Des objets et des valeurs patrimoniales appartenant au prévenu ou à des tiers peuvent être mis sous séquestre, lorsqu'il est probable:
1    Des objets et des valeurs patrimoniales appartenant au prévenu ou à des tiers peuvent être mis sous séquestre, lorsqu'il est probable:
a  qu'ils seront utilisés comme moyens de preuves;
b  qu'ils seront utilisés pour garantir le paiement des frais de procédure, des peines pécuniaires, des amendes et des indemnités;
c  qu'ils devront être restitués au lésé;
d  qu'ils devront être confisqués;
e  qu'ils seront utilisés pour couvrir les créances compensatrices de l'État selon l'art. 71 CP149.
2    Le séquestre est ordonné par voie d'ordonnance écrite, brièvement motivée. En cas d'urgence, il peut être ordonné oralement; toutefois, par la suite, l'ordre doit être confirmé par écrit.
3    Lorsqu'il y a péril en la demeure, la police ou des particuliers peuvent provisoirement mettre en sûreté des objets et des valeurs patrimoniales à l'intention du ministère public ou du tribunal.
CPP), ce qui exclut qu'elle résolve des questions juridiques complexes ou qu'elle attende d'être renseignée de manière exacte et complète sur les faits avant d'agir (ATF 116 Ib 96 consid. 3a p. 99).

2.2 En l'occurrence, l'autorité de poursuite estime que l'ordinateur saisi aurait pu servir à commettre des infractions, car le recourant aurait créé un "site miroir", aurait apporté des modifications au site litigieux et en aurait prolongé l'hébergement. Les questions de savoir dans quelle mesure l'ordinateur a réellement été utilisé dans ce but, si la création d'un "site miroir" constitue un nouvel acte punissable et si l'identité du plaignant y est encore reconnaissable malgré l'emploi de pseudonymes, devront encore être résolues dans le cours ultérieur de l'instruction. En l'état, l'ordinateur du recourant constitue à tout le moins un moyen de preuve et peut être séquestré à ce titre.

3.
Sur le vu de ce qui précède, le recours doit être rejeté, en tant qu'il est recevable. Le recourant a demandé l'assistance judiciaire, et celle-ci peut lui être accordée. Me Alain Dubuis est désigné comme défenseur d'office, rétribué par la caisse du Tribunal fédéral. Il n'est pas perçu de frais judiciaires.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté, en tant qu'il est recevable.

2.
La demande d'assistance judiciaire est admise; Me Alain Dubuis est désigné comme défenseur d'office du recourant et une indemnité de 1'500 fr. lui est allouée à titre d'honoraires, à verser par la caisse du Tribunal fédéral; il n'est pas perçu de frais judiciaires.

3.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et au Tribunal cantonal du canton de Vaud, Chambre des recours pénale.

Lausanne, le 10 janvier 2012

Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse

Le Juge présidant: Raselli

Le Greffier: Kurz