Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
1C_497/2012

Arrêt du 9 janvier 2013
Ire Cour de droit public

Composition
MM. les Juges fédéraux Fonjallaz, Président, Aemisegger et Chaix.
Greffière: Mme Mabillard.

Participants à la procédure
A.________, représentée par Me Christophe A. Gal, avocat,
recourante,

contre

Asloca, Association genevoise de défense des locataires, rue du Lac 12, 1207 Genève, représentée par Me Romolo Molo, avocat,
intimée,

Département de l'urbanisme de la République et canton de Genève, Office de l'urbanisme, Service des affaires juridiques, case postale 224, 1211 Genève 8.

Objet
Aliénation d'appartement loué,

recours contre l'arrêt de la Cour de justice du canton de Genève, Chambre administrative, du 24 août 2012.

Faits:

A.
La société A.________ est propriétaire de différents biens immobiliers, dont un lot de trois appartements en propriété par étage (PPE), portant les nos 3.03, 3.04 et 3.05, situés dans un bâtiment à l'adresse rue Marignac 14 à Genève. Ces trois appartements sont mis en location.
Par arrêté du 15 février 2010, le département cantonal des constructions et des technologies de l'information, devenu depuis le département de l'urbanisme (ci-après: le département), a autorisé l'aliénation de l'appartement de trois pièces n° 3.04 à B.________.

B.
L'Association genevoise de défense des locataires (ci-après: l'Asloca) a recouru contre cette autorisation auprès de la commission cantonale de recours en matière administrative, devenue depuis le 1er janvier 2011 le Tribunal administratif de première instance (ci-après: le TAPI).
Après avoir procédé à l'audition des parties, le TAPI a admis le recours et annulé l'autorisation d'aliéner l'appartement n° 3.04 le 29 mars 2011.
Par arrêt du 24 août 2012, la Chambre administrative de la Cour de justice du canton de Genève (ci-après: la Cour de justice) a rejeté le recours de A.________ contre le jugement du TAPI du 29 mars 2011. Elle a considéré en substance que la société recourante ne justifiait pas d'avoir obtenu l'accord du 60 % des autres locataires de l'immeuble et que, de toute façon, vu la pénurie sévère de logements locatifs dans le canton de Genève, l'intérêt public au maintien du statu quo était indéniable.

C.
Agissant par la voie du recours en matière de droit public, A.________ demande au Tribunal fédéral d'annuler l'arrêt de la Cour de justice du 24 août 2012, de dire que le recours de l'Asloca devant le TAPI était infondé et de rétablir l'autorisation litigieuse. Subsidiairement, elle conclut au renvoi du dossier à la cour cantonale pour instruction complémentaire et nouvelle décision. La recourante se plaint pour l'essentiel d'un établissement inexact des faits, d'une violation de son droit d'être entendue et du principe de la séparation des pouvoirs ainsi que d'une application arbitraire du droit cantonal.
La Cour de justice s'en rapporte à justice quant à la recevabilité du recours et persiste dans les considérants et le dispositif de son arrêt. Le département propose l'admission du recours et l'Asloca conclut à son rejet.

Considérant en droit:

1.
1.1 Dirigé contre une décision rendue en dernière instance cantonale dans le domaine du droit public des constructions, le recours est en principe recevable comme recours en matière de droit public conformément aux art. 82 ss
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 82 Principe - Le Tribunal fédéral connaît des recours:
a  contre les décisions rendues dans des causes de droit public;
b  contre les actes normatifs cantonaux;
c  qui concernent le droit de vote des citoyens ainsi que les élections et votations populaires.
LTF, aucune des exceptions prévues à l'art. 83
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 83 Exceptions - Le recours est irrecevable contre:
a  les décisions concernant la sûreté intérieure ou extérieure du pays, la neutralité, la protection diplomatique et les autres affaires relevant des relations extérieures, à moins que le droit international ne confère un droit à ce que la cause soit58 jugée par un tribunal;
b  les décisions relatives à la naturalisation ordinaire;
c  les décisions en matière de droit des étrangers qui concernent:
c1  l'entrée en Suisse,
c2  une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit,
c3  l'admission provisoire,
c4  l'expulsion fondée sur l'art. 121, al. 2, de la Constitution ou le renvoi,
c5  les dérogations aux conditions d'admission,
c6  la prolongation d'une autorisation frontalière, le déplacement de la résidence dans un autre canton, le changement d'emploi du titulaire d'une autorisation frontalière et la délivrance de documents de voyage aux étrangers sans pièces de légitimation;
d  les décisions en matière d'asile qui ont été rendues:
d1  par le Tribunal administratif fédéral, sauf celles qui concernent des personnes visées par une demande d'extradition déposée par l'État dont ces personnes cherchent à se protéger,
d2  par une autorité cantonale précédente et dont l'objet porte sur une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit;
e  les décisions relatives au refus d'autoriser la poursuite pénale de membres d'autorités ou du personnel de la Confédération;
f  les décisions en matière de marchés publics:
fbis  les décisions du Tribunal administratif fédéral concernant les décisions visées à l'art. 32i de la loi fédérale du 20 mars 2009 sur le transport de voyageurs65;
f1  si elles ne soulèvent pas de question juridique de principe; sont réservés les recours concernant des marchés du Tribunal administratif fédéral, du Tribunal pénal fédéral, du Tribunal fédéral des brevets, du Ministère public de la Confédération et des autorités judiciaires supérieures des cantons, ou
f2  si la valeur estimée du marché à adjuger est inférieure à la valeur seuil déterminante visée à l'art. 52, al. 1, et fixée à l'annexe 4, ch. 2, de la loi fédérale du 21 juin 2019 sur les marchés publics63;
g  les décisions en matière de rapports de travail de droit public qui concernent une contestation non pécuniaire, sauf si elles touchent à la question de l'égalité des sexes;
h  les décisions en matière d'entraide administrative internationale, à l'exception de l'assistance administrative en matière fiscale;
i  les décisions en matière de service militaire, de service civil ou de service de protection civile;
j  les décisions en matière d'approvisionnement économique du pays qui sont prises en cas de pénurie grave;
k  les décisions en matière de subventions auxquelles la législation ne donne pas droit;
l  les décisions en matière de perception de droits de douane fondée sur le classement tarifaire ou le poids des marchandises;
m  les décisions sur l'octroi d'un sursis de paiement ou sur la remise de contributions; en dérogation à ce principe, le recours contre les décisions sur la remise de l'impôt fédéral direct ou de l'impôt cantonal ou communal sur le revenu et sur le bénéfice est recevable, lorsqu'une question juridique de principe se pose ou qu'il s'agit d'un cas particulièrement important pour d'autres motifs;
n  les décisions en matière d'énergie nucléaire qui concernent:
n1  l'exigence d'un permis d'exécution ou la modification d'une autorisation ou d'une décision,
n2  l'approbation d'un plan de provision pour les coûts d'évacuation encourus avant la désaffection d'une installation nucléaire,
n3  les permis d'exécution;
o  les décisions en matière de circulation routière qui concernent la réception par type de véhicules;
p  les décisions du Tribunal administratif fédéral en matière de télécommunications, de radio et de télévision et en matière postale qui concernent:70
p1  une concession ayant fait l'objet d'un appel d'offres public,
p2  un litige découlant de l'art. 11a de la loi du 30 avril 1997 sur les télécommunications71;
p3  un litige au sens de l'art. 8 de la loi du 17 décembre 2010 sur la poste73;
q  les décisions en matière de médecine de transplantation qui concernent:
q1  l'inscription sur la liste d'attente,
q2  l'attribution d'organes;
r  les décisions en matière d'assurance-maladie qui ont été rendues par le Tribunal administratif fédéral sur la base de l'art. 3474 de la loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal administratif fédéral (LTAF)75;
s  les décisions en matière d'agriculture qui concernent:
s1  ...
s2  la délimitation de zones dans le cadre du cadastre de production;
t  les décisions sur le résultat d'examens ou d'autres évaluations des capacités, notamment en matière de scolarité obligatoire, de formation ultérieure ou d'exercice d'une profession;
u  les décisions relatives aux offres publiques d'acquisition (art. 125 à 141 de la loi du 19 juin 2015 sur l'infrastructure des marchés financiers79);
v  les décisions du Tribunal administratif fédéral en cas de divergences d'opinion entre des autorités en matière d'entraide judiciaire ou d'assistance administrative au niveau national;
w  les décisions en matière de droit de l'électricité qui concernent l'approbation des plans des installations électriques à courant fort et à courant faible et l'expropriation de droits nécessaires à la construction ou à l'exploitation de telles installations, si elles ne soulèvent pas de question juridique de principe.
x  les décisions en matière d'octroi de contributions de solidarité au sens de la loi fédérale du 30 septembre 2016 sur les mesures de coercition à des fins d'assistance et les placements extrafamiliaux antérieurs à 198183, sauf si la contestation soulève une question juridique de principe ou qu'il s'agit d'un cas particulièrement important pour d'autres motifs;
y  les décisions prises par le Tribunal administratif fédéral dans des procédures amiables visant à éviter une imposition non conforme à une convention internationale applicable dans le domaine fiscal;
z  les décisions citées à l'art. 71c, al. 1, let. b, de la loi du 30 septembre 2016 sur l'énergie86 concernant les autorisations de construire et les autorisations relevant de la compétence des cantons destinées aux installations éoliennes d'intérêt national qui y sont nécessairement liées, sauf si la contestation soulève une question juridique de principe.
LTF n'étant réalisée. La recourante, qui a pris part à la procédure devant la Cour de justice, est particulièrement touchée par l'arrêt attaqué qui confirme l'annulation de l'autorisation d'aliéner qu'elle avait obtenue du département cantonal. Elle a donc la qualité pour agir au sens de l'art. 89 al. 1
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 89 Qualité pour recourir - 1 A qualité pour former un recours en matière de droit public quiconque:
1    A qualité pour former un recours en matière de droit public quiconque:
a  a pris part à la procédure devant l'autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire;
b  est particulièrement atteint par la décision ou l'acte normatif attaqué, et
c  a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification.
2    Ont aussi qualité pour recourir:
a  la Chancellerie fédérale, les départements fédéraux ou, pour autant que le droit fédéral le prévoie, les unités qui leur sont subordonnées, si l'acte attaqué est susceptible de violer la législation fédérale dans leur domaine d'attributions;
b  l'organe compétent de l'Assemblée fédérale en matière de rapports de travail du personnel de la Confédération;
c  les communes et les autres collectivités de droit public qui invoquent la violation de garanties qui leur sont reconnues par la constitution cantonale ou la Constitution fédérale;
d  les personnes, organisations et autorités auxquelles une autre loi fédérale accorde un droit de recours.
3    En matière de droits politiques (art. 82, let. c), quiconque a le droit de vote dans l'affaire en cause a qualité pour recourir.
LTF.

1.2 Dans la mesure où la recourante s'en prend aussi au jugement du TAPI, décision ayant précédé celle de la Cour de justice, son recours est irrecevable en raison de l'effet dévolutif complet des actes déposés auprès de la dernière instance cantonale (art. 67 de la loi cantonale du 12 septembre 1985 sur la procédure administrative [LPA/GE]; ATF 136 II 101 consid. 1.2 p. 104). Point n'est dès lors besoin d'examiner si le TAPI devait déclarer infondé le recours de l'Asloca, comme le soutient la recourante.

2.
La recourante se plaint d'une constatation inexacte des faits et d'une violation de son droit d'être entendue.

2.1 Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 105 Faits déterminants - 1 Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente.
1    Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente.
2    Il peut rectifier ou compléter d'office les constatations de l'autorité précédente si les faits ont été établis de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l'art. 95.
3    Lorsque la décision qui fait l'objet d'un recours concerne l'octroi ou le refus de prestations en espèces de l'assurance-accidents ou de l'assurance militaire, le Tribunal fédéral n'est pas lié par les faits établis par l'autorité précédente.99
LTF). Le recourant ne peut critiquer ceux-ci que s'ils ont été établis de façon manifestement inexacte - notion qui correspond à celle d'arbitraire au sens de l'art. 9
SR 101 Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999
Cst. Art. 9 Protection contre l'arbitraire et protection de la bonne foi - Toute personne a le droit d'être traitée par les organes de l'État sans arbitraire et conformément aux règles de la bonne foi.
Cst. (ATF 134 V 53 consid. 4.3 p. 62) - ou en violation du droit au sens de l'art. 95
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 95 Droit suisse - Le recours peut être formé pour violation:
a  du droit fédéral;
b  du droit international;
c  de droits constitutionnels cantonaux;
d  de dispositions cantonales sur le droit de vote des citoyens ainsi que sur les élections et votations populaires;
e  du droit intercantonal.
LTF (art. 97 al. 1
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 97 Établissement inexact des faits - 1 Le recours ne peut critiquer les constatations de fait que si les faits ont été établis de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l'art. 95, et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause.
1    Le recours ne peut critiquer les constatations de fait que si les faits ont été établis de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l'art. 95, et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause.
2    Si la décision qui fait l'objet d'un recours concerne l'octroi ou le refus de prestations en espèces de l'assurance-accidents ou de l'assurance militaire, le recours peut porter sur toute constatation incomplète ou erronée des faits.89
LTF), ce qu'il lui appartient d'exposer et de démontrer de manière claire et circonstanciée. La correction du vice soulevé doit en outre être susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 97 Établissement inexact des faits - 1 Le recours ne peut critiquer les constatations de fait que si les faits ont été établis de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l'art. 95, et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause.
1    Le recours ne peut critiquer les constatations de fait que si les faits ont été établis de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l'art. 95, et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause.
2    Si la décision qui fait l'objet d'un recours concerne l'octroi ou le refus de prestations en espèces de l'assurance-accidents ou de l'assurance militaire, le recours peut porter sur toute constatation incomplète ou erronée des faits.89
LTF).
Le droit d'être entendu implique pour l'autorité l'obligation de motiver sa décision, afin que l'intéressé puisse se rendre compte de la portée de celle-ci et l'attaquer en connaissance de cause. Selon la jurisprudence, la motivation d'une décision est suffisante lorsque l'autorité mentionne, au moins brièvement, les motifs qui l'ont guidée et sur lesquels elle a fondé son raisonnement. L'autorité ne doit toutefois pas se prononcer sur tous les moyens des parties; elle peut se limiter aux questions décisives (ATF 130 II 530 consid. 4.3 p. 540 et les arrêts cités).

2.2 En l'espèce, la recourante reproche à la Cour de justice d'avoir omis de mentionner qu'avant d'être soumis en 1984 au régime de la PPE, l'immeuble en cause était exploité sous la forme d'une société d'actionnaires-locataires. Ce fait serait à son avis déterminant pour l'octroi d'une autorisation de vente en application de l'art. 39 al. 4 de la loi genevoise du 25 janvier 1996 sur les démolitions, transformations et rénovations de maisons d'habitation (LDTR); en vertu de cette disposition, le département autorise l'aliénation d'un appartement si celui-ci a été dès sa construction soumis au régime de la propriété par étages ou à une forme de propriété analogue. En l'occurrence, le fait allégué par la recourante n'est pas apte à démontrer que l'appartement litigieux était, dès sa construction, soumis à une forme de propriété analogue au régime de la PPE. Cet élément n'était par conséquent pas pertinent pour trancher le litige et la Cour de justice, en l'omettant, n'a pas procédé à une constatation inexacte des faits. De même, les juges cantonaux n'étaient pas tenus de répondre au grief de la recourante fondé sur ce fait, dans la mesure où il était manifestement sans consistance. L'absence de motivation de l'arrêt à cet égard n'a
de toute façon pas empêché l'intéressée de recourir céans sur ce point.
Mal fondées, les critiques tirées d'une constatation incomplète des faits et d'une violation du droit d'être entendu doivent être rejetées.

3.
La recourante reproche à la Cour de justice d'avoir violé la garantie de la propriété et procédé à une application arbitraire de l'art. 39 al. 3 LDTR.

3.1 Une décision est arbitraire lorsqu'elle viole gravement une norme ou un principe juridique clair et indiscuté, ou lorsqu'elle contredit d'une manière choquante le sentiment de la justice et de l'équité; le Tribunal fédéral ne s'écarte ainsi de la solution retenue par l'autorité cantonale de dernière instance que si elle est insoutenable ou en contradiction manifeste avec la situation effective, ou si elle a été adoptée sans motifs objectifs et en violation d'un droit certain. En outre, il ne suffit pas que les motifs de la décision critiquée soient insoutenables, encore faut-il que cette dernière soit arbitraire dans son résultat (ATF 138 I 305 consid. 4.3 p. 319; 132 I 13 consid. 5.1 p. 17).

3.2 La LDTR a pour but la préservation de l'habitat et des conditions de vie existants, en prévoyant notamment des restrictions quant à l'aliénation des appartements destinés à la location (art. 1 al. 2 let. c LDTR). Ces mesures figurent à l'art. 39 de la loi, dont la teneur est la suivante:
Art. 39 Aliénation
1 L'aliénation, sous quelque forme que ce soit (notamment cession de droits de copropriété d'étages ou de parties d'étages, d'actions, de parts sociales), d'un appartement à usage d'habitation, jusqu'alors offert en location, est soumise à autorisation dans la mesure où l'appartement entre, à raison de son loyer ou de son type, dans une catégorie de logements où sévit la pénurie.
Motifs de refus
2 Le département refuse l'autorisation lorsqu'un motif prépondérant d'intérêt public ou d'intérêt général s'y oppose. L'intérêt public et l'intérêt général résident dans le maintien, en période de pénurie de logements, de l'affectation locative des appartements loués.
Exception
3 Afin de prévenir le changement d'affectation progressif d'un immeuble locatif, le désir d'un locataire, occupant effectivement son logement depuis trois ans au moins, d'acquérir ledit logement n'est présumé l'emporter sur l'intérêt public que si les conditions suivantes sont réunies:
- 60 % des locataires en place acceptent formellement cette acquisition; dans ce cas cependant, les locataires restants devront obtenir la garantie de ne pas être contraints d'acheter leur appartement ou de partir.
Motifs d'autorisation
4 [...]
Relogement du locataire
5 [...]

3.3 Le Tribunal fédéral a déjà eu l'occasion de considérer que l'intérêt public poursuivi par la LDTR, qui tend à préserver l'habitat et les conditions de vie existants, en restreignant notamment le changement d'affectation des maisons d'habitation (art. 1 al. 1 et 2 let. a LDTR), procède d'un intérêt public important (ATF 128 I 206 consid. 5.2.4 p. 211 s.; 113 Ia 126 consid. 7a p. 134; 111 Ia 23 consid. 3a p. 26 et les arrêts cités). Par ailleurs, la réglementation mise en place par la LDTR est en soi conforme au droit fédéral et à la garantie de la propriété, y compris dans la mesure où elle prévoit un contrôle des loyers après transformations (cf. ATF 116 Ia 401 consid. 9 p. 414); de même, le refus de l'autorisation de vendre un appartement loué lorsqu'un motif prépondérant d'intérêt public ou d'intérêt général s'y oppose n'est pas une atteinte disproportionnée à la garantie de la propriété, pourvu que l'autorité administrative effectue une pesée des intérêts en présence et évalue l'importance du motif de refus au regard des intérêts privés en jeu (ATF 113 Ia 126 consid. 7b/aa p. 137).

4.
Dans le cas particulier, la Cour de justice a expliqué que, lorsque l'art. 39 al. 3 LDTR se réfère à l'accord de 60 % des locataires en place, il s'agit de l'ensemble des locataires habitant le bâtiment à la date de la vente, et non pas des locataires des seuls appartements liés aux parts de PPE appartenant au requérant. Comme la recourante ne justifiait pas avoir l'accord du 60 % des autres locataires de l'immeuble, il était inutile d'examiner si les autres conditions de l'art. 39 al. 3 LDTR étaient satisfaites.
La recourante estime pour sa part que les conditions d'application de l'art. 39 al. 3 LDTR sont remplies puisque, à son avis, cette disposition ne concerne pas tous les locataires de l'immeuble, mais uniquement les locataires des appartements dont elle est propriétaire. Ce faisant, elle ne démontre nullement en quoi le raisonnement de la cour cantonale serait déraisonnable, se contentant, dans un style appellatoire, d'opposer son opinion à celle des juges cantonaux. Quoi qu'il en soit, l'arrêt attaqué n'apparaît pas insoutenable sur ce point si bien que le grief d'application arbitraire du droit cantonal doit être écarté.

5.
La recourante critique également la pesée des intérêts effectuée par les juges cantonaux, alléguant que celle-ci contreviendrait au principe de la proportionnalité et, par voie de conséquence, à la garantie de la propriété.
En l'occurrence, la Cour de justice a considéré que, vu la pénurie sévère de logements locatifs dans le canton de Genève, l'intérêt public à la préservation d'un parc immobilier de logements à louer était particulièrement important. La recourante, qui possédait un lot de trois appartements locatifs à la rue Marignac 14, avait déjà obtenu du département l'autorisation de céder l'un d'entre eux, laquelle était entrée en force. Si l'autorisation requise était accordée, cela reviendrait à individualiser non seulement l'appartement concerné par l'autorisation attaquée, mais également le troisième appartement, ce qui augmenterait le risque que celui-ci soit lui aussi soustrait à une affectation locative, en contradiction d'une application stricte de la LDTR. De son côté, la recourante n'avait pas établi la nécessité qu'elle avait de céder les parts de PPE liées à l'appartement. Elle avait certes invoqué un besoin d'assainissement qu'elle n'avait aucunement démontré précisément. Son intérêt n'allait donc pas au-delà d'un simple intérêt économique. Quant à l'acheteuse de l'appartement n° 3.04, si son intérêt était certain, il demeurait de pure convenance personnelle. Dans ces circonstances, l'intérêt public au maintien du statu quo était
indéniable.
En premier lieu, il apparaît que l'art. 39 al. 3 LDTR n'étant pas applicable, l'intérêt privé du locataire désirant acquérir son logement n'est pas présumé plus important que l'intérêt public. D'autre part, la recourante ne conteste pas que son intérêt à la vente de l'appartement litigieux, tout comme celui de la locataire à l'acquérir, est avant tout économique. Il ne s'agit ainsi de toute évidence pas d'un intérêt particulier qui apparaîtrait prépondérant face à l'intérêt public poursuivi par la LDTR, qui n'est du reste pas remis en cause par l'intéressée. Il apparaît ainsi que l'arrêt attaqué, en tant qu'il confirme l'annulation de l'autorisation litigieuse, procède d'une pesée des intérêts qui échappe à l'arbitraire et ne consacre par conséquent pas de violation du principe de la propriété. Mal fondé, le recours doit être rejeté sur ce point.

6.
Dans un grief confus, où sont invoqués les principes de la séparation des pouvoirs et de la légalité, la recourante fait valoir que la Cour de justice aurait complètement et arbitrairement ignoré la pesée des intérêts entreprise par le département et n'aurait aucunement démontré en quoi cette pondération était contraire au droit, voire constitutive d'un abus du pouvoir d'appréciation du département. En l'occurrence, en confirmant dans son principe la pesée des intérêts effectuée par le TAPI, la Cour de justice n'a pas pour autant contrevenu au principe de la séparation des pouvoirs ou méconnu le pouvoir d'appréciation du département, comme le soutient l'intéressée. Cette critique doit par conséquent être écartée.

7.
Il résulte de ce qui précède que le recours, entièrement mal fondé, doit être rejeté, aux frais de la recourante qui succombe (art. 65
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 65 Frais judiciaires - 1 Les frais judiciaires comprennent l'émolument judiciaire, l'émolument pour la copie de mémoires, les frais de traduction, sauf d'une langue officielle à une autre, et les indemnités versées aux experts et aux témoins.
1    Les frais judiciaires comprennent l'émolument judiciaire, l'émolument pour la copie de mémoires, les frais de traduction, sauf d'une langue officielle à une autre, et les indemnités versées aux experts et aux témoins.
2    L'émolument judiciaire est calculé en fonction de la valeur litigieuse, de l'ampleur et de la difficulté de la cause, de la façon de procéder des parties et de leur situation financière.
3    Son montant est fixé en règle générale:
a  entre 200 et 5000 francs dans les contestations non pécuniaires;
b  entre 200 et 100 000 francs dans les autres contestations.
4    Il est fixé entre 200 et 1000 francs, indépendamment de la valeur litigieuse, dans les affaires qui concernent:
a  des prestations d'assurance sociale;
b  des discriminations à raison du sexe;
c  des litiges résultant de rapports de travail, pour autant que la valeur litigieuse ne dépasse pas 30 000 francs;
d  des litiges concernant les art. 7 et 8 de la loi du 13 décembre 2002 sur l'égalité pour les handicapés24.
5    Si des motifs particuliers le justifient, le Tribunal fédéral peut majorer ces montants jusqu'au double dans les cas visés à l'al. 3 et jusqu'à 10 000 francs dans les cas visés à l'al. 4.
et 66
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 66 Recouvrement des frais judiciaires - 1 En règle générale, les frais judiciaires sont mis à la charge de la partie qui succombe. Si les circonstances le justifient, le Tribunal fédéral peut les répartir autrement ou renoncer à les mettre à la charge des parties.
1    En règle générale, les frais judiciaires sont mis à la charge de la partie qui succombe. Si les circonstances le justifient, le Tribunal fédéral peut les répartir autrement ou renoncer à les mettre à la charge des parties.
2    Si une affaire est liquidée par un désistement ou une transaction, les frais judiciaires peuvent être réduits ou remis.
3    Les frais causés inutilement sont supportés par celui qui les a engendrés.
4    En règle générale, la Confédération, les cantons, les communes et les organisations chargées de tâches de droit public ne peuvent se voir imposer de frais judiciaires s'ils s'adressent au Tribunal fédéral dans l'exercice de leurs attributions officielles sans que leur intérêt patrimonial soit en cause ou si leurs décisions font l'objet d'un recours.
5    Sauf disposition contraire, les frais judiciaires mis conjointement à la charge de plusieurs personnes sont supportés par elles à parts égales et solidairement.
LTF). Celle-ci versera en outre une indemnité de dépens à l'intimée qui obtient gain de cause avec l'assistance d'un avocat (art. 68 al. 1
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 68 Dépens - 1 Le Tribunal fédéral décide, dans son arrêt, si et dans quelle mesure les frais de la partie qui obtient gain de cause sont supportés par celle qui succombe.
1    Le Tribunal fédéral décide, dans son arrêt, si et dans quelle mesure les frais de la partie qui obtient gain de cause sont supportés par celle qui succombe.
2    En règle générale, la partie qui succombe est tenue de rembourser à la partie qui a obtenu gain de cause, selon le tarif du Tribunal fédéral, tous les frais nécessaires causés par le litige.
3    En règle générale, aucuns dépens ne sont alloués à la Confédération, aux cantons, aux communes ou aux organisations chargées de tâches de droit public lorsqu'ils obtiennent gain de cause dans l'exercice de leurs attributions officielles.
4    L'art. 66, al. 3 et 5, est applicable par analogie.
5    Le Tribunal fédéral confirme, annule ou modifie, selon le sort de la cause, la décision de l'autorité précédente sur les dépens. Il peut fixer lui-même les dépens d'après le tarif fédéral ou cantonal applicable ou laisser à l'autorité précédente le soin de les fixer.
et 2
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 68 Dépens - 1 Le Tribunal fédéral décide, dans son arrêt, si et dans quelle mesure les frais de la partie qui obtient gain de cause sont supportés par celle qui succombe.
1    Le Tribunal fédéral décide, dans son arrêt, si et dans quelle mesure les frais de la partie qui obtient gain de cause sont supportés par celle qui succombe.
2    En règle générale, la partie qui succombe est tenue de rembourser à la partie qui a obtenu gain de cause, selon le tarif du Tribunal fédéral, tous les frais nécessaires causés par le litige.
3    En règle générale, aucuns dépens ne sont alloués à la Confédération, aux cantons, aux communes ou aux organisations chargées de tâches de droit public lorsqu'ils obtiennent gain de cause dans l'exercice de leurs attributions officielles.
4    L'art. 66, al. 3 et 5, est applicable par analogie.
5    Le Tribunal fédéral confirme, annule ou modifie, selon le sort de la cause, la décision de l'autorité précédente sur les dépens. Il peut fixer lui-même les dépens d'après le tarif fédéral ou cantonal applicable ou laisser à l'autorité précédente le soin de les fixer.
LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2.
Les frais judiciaires, fixés à 3'000 fr., sont mis à la charge de la recourante.

3.
Une indemnité de 3'000 fr., à payer à l'intimée à titre de dépens, est mise à la charge de la recourante.

4.
Le présent arrêt est communiqué aux parties, au Département cantonal de l'urbanisme et à la Cour de justice du canton de Genève, Chambre administrative.

Lausanne, le 9 janvier 2013
Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse

Le Président: Fonjallaz

La Greffière: Mabillard