Extrait de l'arrêt de la Cour V
dans la cause A. contre Office fédéral des migrations
E 5256/2006 du 13 juillet 2010
Asile. Qualité de réfugié. Irak. Exclusion de la qualité de réfugié pour agissements contraires aux buts et principes fondamentaux des Nations Unies. Profil spécifique d'un diplomate ayant occupé une fonction de haut niveau. Indignité de l'asile.
Art. 3

SR 142.31 Loi du 26 juin 1998 sur l'asile (LAsi) LAsi Art. 3 Définition du terme de réfugié - 1 Sont des réfugiés les personnes qui, dans leur État d'origine ou dans le pays de leur dernière résidence, sont exposées à de sérieux préjudices ou craignent à juste titre de l'être en raison de leur race, de leur religion, de leur nationalité, de leur appartenance à un groupe social déterminé ou de leurs opinions politiques. |

SR 142.31 Loi du 26 juin 1998 sur l'asile (LAsi) LAsi Art. 7 Preuve de la qualité de réfugié - 1 Quiconque demande l'asile (requérant) doit prouver ou du moins rendre vraisemblable qu'il est un réfugié. |

SR 142.31 Loi du 26 juin 1998 sur l'asile (LAsi) LAsi Art. 53 Indignité - L'asile n'est pas accordé au réfugié qui: |

SR 142.31 Loi du 26 juin 1998 sur l'asile (LAsi) LAsi Art. 54 Motifs subjectifs survenus après la fuite - L'asile n'est pas accordé à la personne qui n'est devenue un réfugié au sens de l'art. 3 qu'en quittant son État d'origine ou de provenance ou en raison de son comportement ultérieur. |
1. Reconnaissance de la qualité de réfugié s'agissant d'un diplomate irakien, membre du parti Baas, ayant exercé des fonctions de haut niveau et représenté les intérêts de son pays à l'étranger. Notoriété et visibilité internationales (consid. 2-4).
2. Application restrictive des clauses d'exclusion de la qualité de réfugié pour agissements contraires aux buts et principes des Nations Unies, au sens de l'art. 1 F let. c de la Conv. réfugiés (consid. 5.1-5.2). Fardeau de la preuve (consid. 5.2). Des activités diplomatiques de représentation pour un régime dictatorial ayant violé les principes fondamentaux des Nations Unies sont insuffisantes faute d'un engagement personnel et d'une capacité réelle à influencer les activités de l'Etat de manière significative (consid. 5.3).
1. Indignité de l'asile. Indices concrets d'actes répréhensibles (consid. 6).
Asyl. Flüchtlingseigenschaft. Irak. Ausschluss von der Flüchtlingseigenschaft wegen Handlungen, die gegen die Ziele und fundamentalen Grundsätze der Vereinten Nationen verstossen. Spezielle Situation eines Diplomaten in hochrangiger Funktion. Asylunwürdigkeit.
Art. 3, Art. 7, Art. 53 und Art. 54 AsylG. Art. 1 F Bst. c FK.
1. Anerkennung der Flüchtlingseigenschaft eines irakischen Diplomaten, Mitglied der Baath-Partei, welcher in hochrangiger Funktion die Interessen seines Landes im Ausland vertreten hat. Offenkundigkeit und Erkennbarkeit der internationalen Aktivitäten (E. 2-4).
2. Restriktive Anwendung des Ausschlussgrundes von Art. 1 F Bst. c FK (E. 5.1 und 5.2). Beweislast (E. 5.2). Die Aktivitäten eines Diplomaten und Vertreters eines diktatorischen Regimes, welches die fundamentalen Grundsätze der Vereinten Nationen missachtet, führen für den Betroffenen erst bei einem persönlichen Engagement und der tatsächlichen Fähigkeit, die Staatsgeschäfte in erheblicher Weise zu beeinflussen, zum Ausschluss von der Flüchtlingseigenschaft (E. 5.3).
3. Asylunwürdigkeit. Konkrete Hinweise auf verwerfliche Handlungen (E. 6).
Asilo. Qualità di rifugiato. Iraq. Esclusione dalla qualità di rifugiato in caso di atti contrari agli scopi e ai principi delle Nazioni Unite. Profilo specifico di un diplomatico che ha svolto una funzione di alto livello. Indegnità in materia d'asilo.
Art. 3

SR 142.31 Loi du 26 juin 1998 sur l'asile (LAsi) LAsi Art. 3 Définition du terme de réfugié - 1 Sont des réfugiés les personnes qui, dans leur État d'origine ou dans le pays de leur dernière résidence, sont exposées à de sérieux préjudices ou craignent à juste titre de l'être en raison de leur race, de leur religion, de leur nationalité, de leur appartenance à un groupe social déterminé ou de leurs opinions politiques. |

SR 142.31 Loi du 26 juin 1998 sur l'asile (LAsi) LAsi Art. 7 Preuve de la qualité de réfugié - 1 Quiconque demande l'asile (requérant) doit prouver ou du moins rendre vraisemblable qu'il est un réfugié. |

SR 142.31 Loi du 26 juin 1998 sur l'asile (LAsi) LAsi Art. 7 Preuve de la qualité de réfugié - 1 Quiconque demande l'asile (requérant) doit prouver ou du moins rendre vraisemblable qu'il est un réfugié. |

SR 142.31 Loi du 26 juin 1998 sur l'asile (LAsi) LAsi Art. 54 Motifs subjectifs survenus après la fuite - L'asile n'est pas accordé à la personne qui n'est devenue un réfugié au sens de l'art. 3 qu'en quittant son État d'origine ou de provenance ou en raison de son comportement ultérieur. |
1. Riconoscimento della qualità di rifugiato nel caso di un diplomatico iracheno, membro del partito Baath, che ha svolto una funzione di alto livello e che ha rappresentato gli interessi del suo paese all'estero. Notorietà e visibilità internazionali (consid. 2-4).
2. Applicazione restrittiva delle clausole di esclusione dalla qualità di rifugiato in caso di atti contrari agli scopi e ai principi delle Nazioni Unite, ai sensi dell'art. 1 F lett. c della Conv. rifugiati (consid. 5.1-5.2). Onere della prova (consid. 5.2). Delle attività diplomatiche di rappresentanza per un regime dittatoriale che ha violato i principi fondamentali delle Nazioni Unite sono insufficienti in mancanza di un impegno personale e di una capacità effettiva di influenzare l'attività dello Stato in modo significativo (consid. 5.3).
3. Indegnità in materia d'asilo. Indizi concreti di atti riprensibili (consid. 6).
A., accompagné de son épouse et de leurs enfants, a déposé une demande d'asile en Suisse le 22 décembre 2003.
Par décision du 7 juillet 2006, l'Office fédéral des migrations (ODM) a, d'une part, considéré que A. remplissait les conditions de reconnaissance de la qualité de réfugié. De l'autre, le requérant a été exclu de ce statut en application de l'art. 1 F let. c de la Convention du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés (RS 0.142.30, ci-après: Conv. réfugiés), en considération du fait qu'il s'était rendu coupable d'agissements contraires aux buts et aux principes de l'Organisation des Nations Unies (ONU) au vu de ses activités, de ses fonctions et de l'évolution de sa carrière, établissant son allégeance totale au régime irakien déchu. Risquant d'être exposé à une peine ou à un traitement prohibé par l'art. 3

IR 0.101 Convention du 4 novembre 1950 de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (CEDH) CEDH Art. 3 Interdiction de la torture - Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. |

SR 142.31 Loi du 26 juin 1998 sur l'asile (LAsi) LAsi Art. 3 Définition du terme de réfugié - 1 Sont des réfugiés les personnes qui, dans leur État d'origine ou dans le pays de leur dernière résidence, sont exposées à de sérieux préjudices ou craignent à juste titre de l'être en raison de leur race, de leur religion, de leur nationalité, de leur appartenance à un groupe social déterminé ou de leurs opinions politiques. |

SR 142.31 Loi du 26 juin 1998 sur l'asile (LAsi) LAsi Art. 51 Asile accordé aux familles - 1 Le conjoint d'un réfugié et ses enfants mineurs sont reconnus comme réfugiés et obtiennent l'asile, pour autant qu'aucune circonstance particulière ne s'y oppose.153 |
Dans son recours interjeté le 3 août 2006, le requérant a conclu à la reconnaissance de la qualité de réfugié et à l'octroi de l'asile, estimant disproportionnée l'application de l'art. 1 F let. c Conv. réfugiés à son égard. Il a rappelé avoir défendu son pays, dans le cadre de ses fonctions au sein de ministères civils, d'un point de vue économique (en particulier eu égard à l'embargo) et juridique, et non les intérêts politiques du régime irakien en place. Il a ajouté que sa participation active à diverses Commissions des Nations Unies démontrait qu'il respectait le système de l'ONU. Il a précisé ne pas avoir occupé une place suffisamment élevée dans la hiérarchie administrative irakienne et n'avoir pas été impliqué directement dans les violations des droits de l'homme commises en Irak sous le régime de Saddam Hussein.
Invité à se déterminer, l'ODM a proposé le rejet du recours. Il a retenu que le profil et le parcours professionnel de A. permettaient d'établir qu'il avait occupé, en tant que haut fonctionnaire du régime irakien déchu, un poste à responsabilité et qu'il avait contribué, dans le cadre de ses diverses activités, à la défense d'une politique gouvernementale, condamnée à maintes reprises par la communauté internationale. Par réplique du 24 octobre 2006, le recourant a soutenu que l'ODM avait développé, pour justifier l'application de l'art. 1 F let. c Conv. réfugiés, une série d'hypothèses infondées qui ne correspondaient pas à la réalité. Il a également répété que son travail principal auprès de l'ONU consistait en la gestion de dossiers sans liens avec les droits de l'homme.
Par arrêt du 13 juillet 2010, le Tribunal administratif fédéral (TAF) a admis le recours et renvoyé la cause à l'ODM pour qu'il octroie l'asile à A.
Extrait des considérants:
1. (...)
2. En l'occurrence, l'ODM n'a pas remis en cause la réalité des faits décrits par le recourant et a admis que celui-ci courrait, en cas de retour, le risque de subir des traitements prohibés par l'art. 3

IR 0.101 Convention du 4 novembre 1950 de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (CEDH) CEDH Art. 3 Interdiction de la torture - Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. |
3.
3.1 Sont des réfugiés les personnes qui, dans leur Etat d'origine ou dans le pays de leur dernière résidence, sont exposées à de sérieux préjudices ou craignent à juste titre de l'être en raison de leur race, de leur religion, de leur nationalité, de leur appartenance à un groupe social déterminé ou de leurs opinions politiques. Sont notamment considérées comme de sérieux préjudices la mise en danger de la vie, de l'intégrité corporelle ou de la liberté, de même que les mesures qui entraînent une pression psychique insupportable (art. 3 al. 1

SR 142.31 Loi du 26 juin 1998 sur l'asile (LAsi) LAsi Art. 3 Définition du terme de réfugié - 1 Sont des réfugiés les personnes qui, dans leur État d'origine ou dans le pays de leur dernière résidence, sont exposées à de sérieux préjudices ou craignent à juste titre de l'être en raison de leur race, de leur religion, de leur nationalité, de leur appartenance à un groupe social déterminé ou de leurs opinions politiques. |

SR 142.31 Loi du 26 juin 1998 sur l'asile (LAsi) LAsi Art. 3 Définition du terme de réfugié - 1 Sont des réfugiés les personnes qui, dans leur État d'origine ou dans le pays de leur dernière résidence, sont exposées à de sérieux préjudices ou craignent à juste titre de l'être en raison de leur race, de leur religion, de leur nationalité, de leur appartenance à un groupe social déterminé ou de leurs opinions politiques. |
3.2 Quiconque demande l'asile (requérant) doit prouver ou du moins rendre vraisemblable qu'il est un réfugié. La qualité de réfugié est vraisemblable lorsque l'autorité estime que celle-ci est hautement probable. Ne sont pas vraisemblables notamment les allégations qui, sur des points essentiels, ne sont pas suffisamment fondées, qui sont contradictoires, qui ne correspondent pas aux faits ou qui reposent de manière déterminante sur des moyens de preuve faux ou falsifiés (art. 7

SR 142.31 Loi du 26 juin 1998 sur l'asile (LAsi) LAsi Art. 7 Preuve de la qualité de réfugié - 1 Quiconque demande l'asile (requérant) doit prouver ou du moins rendre vraisemblable qu'il est un réfugié. |
3.3 La crainte face à des persécutions à venir, telle que comprise à l'art. 3

SR 142.31 Loi du 26 juin 1998 sur l'asile (LAsi) LAsi Art. 3 Définition du terme de réfugié - 1 Sont des réfugiés les personnes qui, dans leur État d'origine ou dans le pays de leur dernière résidence, sont exposées à de sérieux préjudices ou craignent à juste titre de l'être en raison de leur race, de leur religion, de leur nationalité, de leur appartenance à un groupe social déterminé ou de leurs opinions politiques. |
p. 171ss et JICRA 1993 no 11 p. 67ss). Sur le plan objectif, cette crainte doit être fondée sur des indices concrets qui peuvent laisser présager l'avènement, dans un avenir peu éloigné et selon une haute probabilité, de mesures étatiques déterminantes selon l'art. 3

SR 142.31 Loi du 26 juin 1998 sur l'asile (LAsi) LAsi Art. 3 Définition du terme de réfugié - 1 Sont des réfugiés les personnes qui, dans leur État d'origine ou dans le pays de leur dernière résidence, sont exposées à de sérieux préjudices ou craignent à juste titre de l'être en raison de leur race, de leur religion, de leur nationalité, de leur appartenance à un groupe social déterminé ou de leurs opinions politiques. |
3.4 La crainte fondée de persécutions futures n'est, en outre, déterminante au sens de l'art. 3

SR 142.31 Loi du 26 juin 1998 sur l'asile (LAsi) LAsi Art. 3 Définition du terme de réfugié - 1 Sont des réfugiés les personnes qui, dans leur État d'origine ou dans le pays de leur dernière résidence, sont exposées à de sérieux préjudices ou craignent à juste titre de l'être en raison de leur race, de leur religion, de leur nationalité, de leur appartenance à un groupe social déterminé ou de leurs opinions politiques. |
3.5 Les motifs d'asile postérieurs à la fuite du pays (« Nachfluchtgründe ») sont ceux tirés d'une menace de persécution qui n'a surgi qu'au moment même où le requérant d'asile a quitté son pays d'origine ou qu'ultérieurement, lors de son séjour dans un autre pays; ils ne sont donc pas la cause du départ de celui-ci (cf. Achermann/Hausammann, Handbuch, p. 111s.; Achermann/Hausammann, Droit des réfugiés, p. 45; Kälin, op. cit., p. 130; Werenfels, op. cit., p. 352s.; Peter Koch/Bendicht Tellenbach, Die subjektiven Nachfluchtgründe, ASYL 1986/2, p. 2; Walter Stöckli, Asyl, in: Peter Uebersax/Beat Rudin/Thomas Hugi Yar/Thomas Geiser [éd.], Ausländerrecht, 2e éd, Bâle/Genève/Munich 2009, p. 532, n. marg. 11.19 et réf. cit.). Ils se divisent en motifs objectifs et motifs subjectifs. Les premiers sont dus à des circonstances de fait intervenant dans le pays d'origine indépendamment de la personne du requérant, ou mieux encore de sa volonté (cf. JICRA 1994 no 17 consid. 3b p. 135; Kay Hailbronner, Ausländerrecht Kommentar, Heidelberg 1992, vol. 1, p. 45), tandis que les seconds, au contraire, sont créés par le comportement même du requérant, par exemple par son départ («
Republikflucht »), par le dépôt de sa demande d'asile ou par ses activités politiques pendant son exil (cf. JICRA 2006 no 1 consid. 6.1 p. 10 et réf. cit.).
3.6 Le TAF tient compte de la situation dans l'Etat concerné et des éléments tels qu'ils se présentent au moment où il se prononce. Il prend en considération l'évolution de la situation intervenue depuis le dépôt de la demande d'asile (cf. notamment ATAF 2008/4 consid. 5.4 et jurisprudence citée).
4.
4.1 En l'espèce, le recourant n'a pas fait valoir de crainte d'être victime de persécutions lors de son départ d'Irak en (...), puisqu'il a invoqué des motifs d'asile postérieurs à ce départ. En effet, le recourant, membre de l'ancien parti Baas depuis le début de ses études en (...) et diplomate chargé principalement de (...) auprès de la Mission permanente irakienne auprès de l'ONU à Genève de (...) à (...), a allégué avoir été sommé de rentrer au pays après l'occupation de son pays par les forces de la coalition. Il aurait appris de son père, à ce moment-là, qu'il faisait l'objet de menaces de mort téléphoniques de la part d'inconnus, membres d'organisations d'opposition à l'ancien régime déchu.
4.2 Comme relevé au consid. 3.5, les motifs objectifs postérieurs au départ du pays sont pris en compte lorsque des faits touchant personnellement le requérant et justifiant l'application de l'art. 3

SR 142.31 Loi du 26 juin 1998 sur l'asile (LAsi) LAsi Art. 3 Définition du terme de réfugié - 1 Sont des réfugiés les personnes qui, dans leur État d'origine ou dans le pays de leur dernière résidence, sont exposées à de sérieux préjudices ou craignent à juste titre de l'être en raison de leur race, de leur religion, de leur nationalité, de leur appartenance à un groupe social déterminé ou de leurs opinions politiques. |
4.3 En l'espèce, le TAF retient, à l'instar de l'ODM, que les fonctions de A. au sein du Ministère des affaires étrangères de l'ancien régime de Saddam Hussein, exercées en Irak puis en Suisse, l'exposent à des préjudices en cas de retour en Irak. En effet, membre du parti Baas depuis (...), (...) au Ministère des affaires étrangères, puis (...) de la Mission permanente irakienne à Genève, il a occupé une fonction de haut niveau et représenté les intérêts de son pays, notamment à l'étranger dans un contexte diplomatique. De par sa participation à diverses Commissions de l'ONU et ses prises de position publiques (pour certaines disponibles sur Internet), il est indéniable qu'il a acquis une certaine notoriété. En outre, il a déclaré avoir fait face à des conflits avec des opposants alors qu'il exerçait ses fonctions à la Mission permanente irakienne, ces opposants faisant actuellement partie des forces de sécurité. Or, le régime de Saddam Hussein est tombé le 9 avril 2003, ce qui a provoqué une modification considérable de la situation régnant en Irak. Si la chute de l'ancien dictateur avait initialement laissé présager une amélioration de la situation, les espoirs ont pourtant été
déçus au cours des mois qui ont suivi l'intervention des Américains, où l'on a assisté à une dégradation marquée de la situation sécuritaire, plus particulièrement dans la capitale et la région dite du « triangle sunnite ». Depuis lors, des changements sont intervenus dans le gouvernement irakien. Les résultats des élections de février 2005, lesquelles ont consacré la victoire de la majorité chiite et de la coalition kurde, ont conduit à une modification notable des circonstances politiques. De plus, si une politique de « débaasification » avait bien été mise en place à la chute de Bagdad par les Etats-Unis qui voulaient extirper du « nouvel Irak » l'idéologie totalitaire incarnée par Saddam Hussein, celle-ci n'a pas rempli ses promesses. Opérée sur une société qui n'était plus encadrée par la loi, la « débaasification » a viré en une démarche de revanche extrajudiciaire, avec l'élimination physique des gens proches ou membres du parti Baas. Voulant tirer les leçons du passé et dans un but de réintégration dans la vie politique de la communauté sunnite, une nouvelle loi de « débaasification » a été adoptée par le Parlement irakien le 12 janvier 2008. Celle-ci permet aux anciens baasistes d'intégrer l'administration ou l'armée,
pour autant toutefois qu'ils n'aient pas appartenu aux rangs intermédiaires ou supérieurs du parti et qu'ils ne soient pas coupables de crimes. Néanmoins, même à supposer que l'application de cette loi se fasse de manière correcte et équitable, ce qui n'est pas avéré au vu de sa promulgation encore relativement récente, force est d'observer que le recourant ne pourrait en bénéficier étant donné sa position particulière et la notoriété de ses activités sur la scène internationale. Le recourant ne peut, en effet, être comparé à un simple membre de l'ancien parti Baas, ayant exercé quelques activités à un niveau régional, voire national. Il faut, en outre, relever que le nombre d'attaques ciblées, perpétrées principalement par des milices chiites, contre des collaborateurs du régime déchu ou d'ex-membres du parti Baas paraît avoir diminué dans une large mesure. Toutefois, si ceux-ci ne sont plus systématiquement visés, ils peuvent toujours être victimes d'actes de représailles en raison de motifs individuels liés à leur personne (cf. en particulier UNHCR Eligibility guidelines for assessing the International protection needs of iraqi asylum seekers, Genève, avril 2009 [ci-après: Guidelines Irak 2009], ch. VIII G, p. 170). Enfin,
malgré les progrès qui ont été faits, le TAF ne saurait pour autant admettre qu'il existe actuellement en Irak une infrastructure permettant une protection efficace, vu en particulier l'importante corruption qui y règne et les nombreux liens qui existent toujours entre les différentes milices et le gouvernement, l'administration et les forces de sécurité irakiennes, actuellement à prédominance chiite. De plus, en dépit du déroulement et des résultats, globalement encourageants, des récentes élections parlementaires du 7 mars 2010, il est aussi peu vraisemblable que la situation change de manière fondamentale à court ou moyen terme (cf. ATAF 2010/43 consid. 5.2), plusieurs candidats aux élections ayant d'ailleurs été évincés en raison de leurs prétendus liens avec l'ancien parti Baas (cf. en particulier Iraq's 2010 National Election, rapport de Human Rights du 25 février 2010; The Uncertain Politics behind Iraq's Election, Center for Strategic & International Studies, 12 avril 2010, p. 25-26; article du quotidien Le Monde du 15 janvier 2008 intitulé « L'Irak adopte une loi de réhabilitation des ex-baasistes »). On ne saurait donc affirmer qu'en l'état actuel les circonstances politiques se sont modifiées objectivement et de
manière durable au point d'exclure tout risque de préjudices pour l'intéressé (cf. en particulier ATAF 2008/12 consid. 5 p.154 s. et jurisprudence citée; ATAF 2010/43; Guidelines Irak 2009, op. cit., p. 170).
4.4 Compte tenu de ce qui précède, A. peut légitimement craindre, dans le contexte politique actuel, d'être exposé, tant sur le plan objectif que subjectif, à une persécution au sens de l'art. 3

SR 142.31 Loi du 26 juin 1998 sur l'asile (LAsi) LAsi Art. 3 Définition du terme de réfugié - 1 Sont des réfugiés les personnes qui, dans leur État d'origine ou dans le pays de leur dernière résidence, sont exposées à de sérieux préjudices ou craignent à juste titre de l'être en raison de leur race, de leur religion, de leur nationalité, de leur appartenance à un groupe social déterminé ou de leurs opinions politiques. |
5. Il convient ensuite d'examiner si, comme l'estime l'ODM, A. remplit les conditions d'exclusion de la qualité de réfugié au sens des dispositions de la Conv. réfugiés et de l'art. 53

SR 142.31 Loi du 26 juin 1998 sur l'asile (LAsi) LAsi Art. 53 Indignité - L'asile n'est pas accordé au réfugié qui: |
5.1 Aux termes de l'art. 1 F Conv. réfugiés, les dispositions de cette Convention ne sont pas applicables aux personnes dont on aura des raisons sérieuses de penser qu'elles ont commis un crime contre la paix, un crime de guerre ou un crime contre l'humanité (let. a), un crime grave de droit commun en dehors du pays d'accueil avant d'y être admises comme réfugiées (let. b), ou qu'elles se sont rendues coupables d'agissements contraires aux buts et aux principes des Nations Unies (let. c).
5.2 Selon les principes directeurs sur la protection internationale du Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) relatifs à l'application des clauses d'exclusion, le but premier de ces clauses est de « priver les personnes auteurs d'actes abominables et de crimes graves de droit commun de la protection internationale accordée aux réfugiés et de s'assurer que ces personnes n'abusent pas de l'institution de l'asile afin d'éviter d'être tenues juridiquement responsables de leurs actes. Etant donné les conséquences potentiellement graves de l'exclusion, il est important de les appliquer avec une très grande prudence. Les clauses d'exclusion doivent donc toujours être interprétées de manière restrictive et proportionnée » (cf. HCR, Principes directeurs sur la protection internationale: Application des clauses d'exclusion: article 1 F Conv. réfugiés, 4 septembre 2003, HCR/GIP/03/05, p. 2, ci-après: Principes directeurs du HCR). En d'autres termes, les garanties offertes par la Conv. réfugiés sont sans effet, si le demandeur d'asile ne mérite pas la protection en qualité de réfugié en raisons d'infractions graves commises (cf. Erika Feller/Volker Türk/Frances Nicholson,
in: La protection des réfugiés en droit international, Larcier et UNHCR [éd.], Bruxelles 2008, partie 7/II p. 483ss). L'art. 1 F Conv. réfugiés trouve application s'il existe des « raisons sérieuses » de penser qu'un acte visé par l'une des clauses de cette disposition (cf. à ce sujet notamment JICRA 2006 no 29, consid. 5.3 p. 316s. et réf. cit., JICRA 1999 no 12 consid. 5a p. 89s.) a été effectivement perpétré. Si l'exclusion de la qualité de réfugié n'exige pas une détermination de culpabilité au sens pénal, des indices clairs et crédibles sont néanmoins exigés pour constituer des « raisons sérieuses ». Bien qu'elles visent un degré de preuve moindre que celui de la « haute probabilité » requis par l'art. 7

SR 142.31 Loi du 26 juin 1998 sur l'asile (LAsi) LAsi Art. 7 Preuve de la qualité de réfugié - 1 Quiconque demande l'asile (requérant) doit prouver ou du moins rendre vraisemblable qu'il est un réfugié. |
lorsque les autorités veulent exclure la qualité de réfugié, elles ont la charge du fardeau de la preuve et « comme dans toute procédure de détermination du statut de réfugié, le demandeur doit se voir accorder le bénéfice du doute » (cf. Principes directeurs du HCR, op. cit., p. 9).
5.2.1 S'agissant de l'exclusion de la protection internationale selon l'art. 1 F let. a Conv. réfugiés, il y a lieu de préciser qu'elle est « applicable aux personnes dont on aura des raisons sérieuses de penser qu'elles ont commis un crime contre la paix, un crime de guerre ou un crime contre l'humanité ». Le renvoi que fait cette clause aux instruments internationaux comprend non seulement l'accord de Londres de 1945 et le statut du Tribunal militaire international de Nüremberg, mais également les diverses conventions postérieures élaborées dans le cadre des Nations Unies (pour la notion de crime contre l'humanité cf. JICRA 1997 no 14 consid. 4d/ee p. 115; Feller/Türk/Nicholson, op. cit., p. 488-495).
5.2.2 L'exclusion selon l'art. 1 F let. b Conv. réfugiés est applicable aux « personnes dont on aura des raisons sérieuses de penser qu'elles ont commis un crime grave de droit commun en dehors du pays d'accueil avant d'y être admises comme réfugiées ». Cette norme a comme objectif la protection de la population du pays d'accueil contre les criminels dangereux. Il doit donc s'agir de la commission d'un crime particulièrement grave pour des motifs spécifiques autres qu'un but politique (cf. Feller/Türk/Nicholson, op. cit., p. 495-512).
5.2.3 Quant à la let. c de l'art. 1 F Conv. réfugiés, la notion d'« agissements contraires aux buts et aux principes des Nations Unies » n'est pas expressément définie dans ladite convention. Selon les principes directeurs du HCR, l'art. 1 F let. c s'applique seulement dans des circonstances extrêmes, à des activités qui mettent en cause le fondement même de la coexistence de la communauté internationale (cf. Principes directeurs du HCR, op. cit., p. 6). Il y a lieu de se reporter à l'art. 1 et à l'art. 2 de la Charte des Nations Unies du 26 juin 1945, ainsi qu'à son préambule. Ces dispositions fixent les principes fondamentaux que doivent observer les Etats dans leurs rapports mutuels, ainsi que vis-à-vis de la communauté internationale dans son ensemble. Toutefois, tous les buts et principes de l'ONU ne donnent pas lieu à la responsabilité pénale individuelle en cas de violation, l'alinéa c) couvrant également les violations des droits de l'homme qui ne répondent pas à la définition des crimes contre l'humanité. Sont donc seules en position de porter atteinte à ces principes des personnes ayant participé à l'exercice du pouvoir, ou ayant été investies d'une responsabilité politique de
haut niveau, soit essentiellement les membres des gouvernements et les hauts fonctionnaires qui leur sont directement subordonnés, et dont la sphère de compétence inclut des attributions en rapport avec d'éventuelles violations des droits de l'homme. Il faut donc l'engagement d'une (co-)responsabilité personnelle pour une politique gouvernementale déterminée, directement liée à des violations claires des principes fondamentaux de l'ONU (cf. JICRA 1999 no 11 consid. 3d p. 80s. et les réf. cit.). Pour que la responsabilité individuelle soit établie, il est également nécessaire que la personne ait commis ou contribué, de manière substantielle, à la commission d'un acte criminel. Le fait qu'une personne ait été, à un certain moment, un membre important d'un gouvernement répressif n'entraîne pas à lui seul sa responsabilité individuelle. Il peut cependant exister une présomption de responsabilité individuelle lorsque la personne est demeurée membre d'un gouvernement clairement engagé dans les activités relevant du champ d'application de l'art. 1 F Conv. réfugiés. Dans le cas d'une telle présomption, la prudence est cependant requise et il faut prendre en considération des questions telles que la fonction de la personne, sa place
dans la hiérarchie et sa capacité réelle à influencer les activités de l'Etat de manière significative (cf. Principes directeurs du HCR, op. cit., p. 6; Feller/Türk/ Nicholson, op. cit., p. 513-515).
5.3
5.3.1 Dans le cas présent, force est de constater que rien ne permet de conclure que le recourant se soit rendu coupable d'un crime contre la paix, d'un crime de guerre, d'un crime contre l'humanité ou encore d'un crime grave de droit commun au sens des lettres a et b de l'art. 1 F Conv. réfugiés tels que définis ci-dessus. Ces deux clauses d'exclusion ne lui sont, par conséquent, pas applicables.
5.3.2 S'agissant de l'application de la let. c de l'art. 1 F Conv. réfugiés, le TAF retient que A. a occupé des fonctions importantes au sein du Ministère des affaires étrangères irakien, (...), et qu'il a ensuite été envoyé à la Mission permanente de la République d'Irak auprès de l'ONU à Genève de (...) à (...). Dans le cadre de ce mandat, il a été responsable principalement de (...). Selon ses déclarations, il a également participé à certaines sessions de la Commission des droits de l'homme où il a défendu la position de son pays. Ces activités ne suffisent toutefois pas à l'inclure dans la catégorie visée par l'art. 1 F let. c Conv. réfugiés.
5.3.3 Force est, tout d'abord, de constater que le recourant a effectivement exercé des responsabilités, d'un niveau que l'on peut qualifier de relativement élevé, au sein de l'administration irakienne, cela durant (...) ans et sous la dictature de Saddam Hussein. Or, les violations des droits de l'homme perpétrées à l'époque sont un fait établi, Saddam Hussein ayant incontestablement mené une politique violant les principes fondamentaux de l'ONU.
5.3.4 Toutefois, la responsabilité personnelle de l'intéressé dans ces violations ne peut être démontrée. En effet, rien n'indique qu'il aurait eu le pouvoir d'influencer, directement ou indirectement, la politique et la stratégie gouvernementales de Saddam Hussein. Le TAF considère que les activités du recourant, en tant que (...) au Ministère des affaires étrangères et en tant que diplomate à l'étranger, ne sont pas, en tant que telles, de nature à établir qu'il a pris part activement aux décisions du cercle des dirigeants ou qu'il a contribué, de près ou de loin, à les faciliter. Il ne figurait pas parmi les personnes qui déterminaient ou mettaient directement en application la politique du gouvernement irakien. Par ailleurs, aucun élément permet de conclure que le recourant entretenait des liens particuliers avec des membres de l'ancien régime et, plus particulièrement, avec le Ministère de la Défense ou les services secrets. Il n'était d'ailleurs subordonné à aucune de ces entités. Il apparaît plutôt que le recourant a suivi un cursus habituel dans la carrière diplomatique et que ses domaines d'activité se concentraient sur des questions juridiques, économiques ou commerciales. Si la
fonction de (...) auprès d'une représentation à l'étranger implique certes des connaissances politiques et la sauvegarde des intérêts de son pays, cela ne démontre pas encore une participation active à la direction même du pays. La thèse soutenue par l'ODM n'est donc fondée sur aucun élément concret et sérieux.
5.3.5 En outre, la collaboration exercée par le recourant avec différentes institutions de l'ONU, en particulier sa participation aux sessions de Commissions, tend plutôt à démontrer un respect des buts et principes de l'ONU. Le recourant a, en particulier, travaillé avec la Commission (...) sur le dossier (...). Or, il convient de rappeler que cette institution a été créée par (...). Le but était de (...). Certes, plusieurs critiques ont été émises à l'égard de la constitution et du fonctionnement de cette Commission, (...). Il n'en reste pas moins que (...) le but (...) voulu par l'ONU a été atteint. Dans ce contexte, il ne peut pas être reproché au recourant d'avoir pris certaines positions critiques (...).
5.3.6 Au demeurant, rien dans le dossier ne permet de retenir, avec un degré de probabilité suffisant, que le recourant a été personnellement mêlé à de graves violations des droits de l'homme, que ce soit de manière directe ou indirecte.
5.4 Partant, le TAF considère qu'il n'existe pas de motifs sérieux de considérer que le recourant a encouragé ou facilité d'une quelconque manière les actes répréhensibles de l'ancien régime irakien déchu. Il ne peut donc pas être admis que le recourant s'est rendu coupable d'agissements contraires aux buts et aux principes de l'ONU.
5.5 C'est par conséquent à tort que l'ODM a appliqué à l'intéressé l'art. 1 F let. c Conv. réfugiés. Aucune autre clause d'exclusion ne pouvant être imputée au recourant, la qualité de réfugié doit, dès lors, lui être reconnue.
6.
6.1 Reste à déterminer si l'asile peut être refusé à l'intéressé en raison de son indignité (art. 53

SR 142.31 Loi du 26 juin 1998 sur l'asile (LAsi) LAsi Art. 53 Indignité - L'asile n'est pas accordé au réfugié qui: |

SR 142.31 Loi du 26 juin 1998 sur l'asile (LAsi) LAsi Art. 53 Indignité - L'asile n'est pas accordé au réfugié qui: |
caractérisée par des violations des droits de l'homme (cf. JICRA 2004 no 21 consid. 5d-e p. 145, JICRA 1999 no 12 consid. 6b p. 92s., JICRA 1998 no 12 consid. 6c-6d p. 82s.) (...).
6.2 En l'occurrence, aucun indice solide ne permet de retenir que le recourant se soit rendu coupable de tels actes. L'intéressé n'avait déployé, en effet, de par ses fonctions, ni activité de répression ni compétence pour prendre des décisions ou ordonner des missions de ce type. Comme exposé ci-dessus (cf. consid. 5.4.2 ss), ses compétences se résumaient à assumer son rôle de diplomate. On ne peut que reprocher au recourant son attitude passive, durant de longues années, face à un régime de dictature condamné par la communauté internationale; cette seule attitude ne constitue toutefois pas un motif d'indignité.