Urteilskopf

91 I 316

51. Extrait de l'arrêt du 15 septembre 1965 dans la cause Bender et Dorsaz contre Grand Conseil du canton du Valais.
Regeste (de):

Regeste (fr):

Regesto (it):


Sachverhalt ab Seite 317

BGE 91 I 316 S. 317

Les 6 et 7 mars 1965, le peuple valaisan procéda à l'élection des députés au Grand Conseil. Le scrutin avait lieu par district, selon le système de la représentation proportionnelle. Dans le district de Martigny, quatre partis présentaient des candidats: le parti socialiste, le parti radical, le mouvement social indépendant et le parti conservateur chrétien-social (en abrégé: parti conservateur). Ce dernier proposait aux suffrages des citoyens sept candidats députés. Six d'entre eux furent élus, dont Amédée Arlettaz, avocat à Fully. Le 17 mars 1965, Eloi Bender et Marcel Dorsaz, électeurs à Fully, saisirent le Grand Conseil d'un recours en lui demandant d'annuler les élections dans le district de Martigny. Ils se plaignaient d'une atteinte à la liberté et au secret du vote. Le 5 avril 1965, après avoir fait procéder à une enquête, le Conseil d'Etat proposa au Grand Conseil de rejeter le recours. Le 6 avril 1965, le Grand Conseil adopta cette proposition. Eloi Bender et Marcel Dorsaz ont formé un recours de droit public par lequel ils requièrent le Tribunal fédéral d'annuler la décision du Grand Conseil. Ils se fondent sur les art. 3
SR 101 Bundesverfassung der Schweizerischen Eidgenossenschaft vom 18. April 1999
BV Art. 5 Grundsätze rechtsstaatlichen Handelns - 1 Grundlage und Schranke staatlichen Handelns ist das Recht.
1    Grundlage und Schranke staatlichen Handelns ist das Recht.
2    Staatliches Handeln muss im öffentlichen Interesse liegen und verhältnismässig sein.
3    Staatliche Organe und Private handeln nach Treu und Glauben.
4    Bund und Kantone beachten das Völkerrecht.
Cst. val., 4 et 5 Cst., ainsi que sur les dispositions de la loi valaisanne du 1er juillet 1938 sur les élections et votations (LEV). Ils se plaignent d'arbitraire et d'un déni de justice. Le Grand Conseil propose le rejet du recours.

Erwägungen

Considérant en droit:

1. .....

2. L'art. 3
SR 101 Bundesverfassung der Schweizerischen Eidgenossenschaft vom 18. April 1999
BV Art. 5 Grundsätze rechtsstaatlichen Handelns - 1 Grundlage und Schranke staatlichen Handelns ist das Recht.
1    Grundlage und Schranke staatlichen Handelns ist das Recht.
2    Staatliches Handeln muss im öffentlichen Interesse liegen und verhältnismässig sein.
3    Staatliche Organe und Private handeln nach Treu und Glauben.
4    Bund und Kantone beachten das Völkerrecht.
Cst. val. et l'art. 4
SR 101 Bundesverfassung der Schweizerischen Eidgenossenschaft vom 18. April 1999
BV Art. 4 Landessprachen - Die Landessprachen sind Deutsch, Französisch, Italienisch und Rätoromanisch.
Cst. ont le même contenu. Ils confèrent au citoyen un droit constitutionnel. Les recourants sont titulaires de ce droit et peuvent donc s'en prévaloir devant le Tribunal fédéral. Ils invoquent également l'art. 5
SR 101 Bundesverfassung der Schweizerischen Eidgenossenschaft vom 18. April 1999
BV Art. 5 Grundsätze rechtsstaatlichen Handelns - 1 Grundlage und Schranke staatlichen Handelns ist das Recht.
1    Grundlage und Schranke staatlichen Handelns ist das Recht.
2    Staatliches Handeln muss im öffentlichen Interesse liegen und verhältnismässig sein.
3    Staatliche Organe und Private handeln nach Treu und Glauben.
4    Bund und Kantone beachten das Völkerrecht.
Cst. Ce texte place d'une façon générale les droits constitutionnels des citoyens sous la garantie de la Confédération. Et il accorde cette protection
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non pas aux cantons, mais aux individus (BURCKHARDT, Commentaire, p. 61; BRIDEL, Précis, vol. I p. 134). Il confère aux particuliers, dont les autorités cantonales ont violé les droits constitutionnels, le droit de se plaindre aux autorités fédérales et il oblige celles-ci à examiner de telles plaintes et à intervenir quand elles sont fondées. En revanche, d'une façon générale, il ne définit ni le contenu ni l'étendue des droits constitutionnels qu'il confie à la sauvegarde de la Confédération. A cet égard, il se réfère implicitement aux règles des constitutions fédérale et cantonales qui régissent spécialement ces droits Par rapport auxdites règles, il n'a donc pas de portée propre (RO IV, p. 332; VIII, p. 196 et 487; XII, p. 9; 47 II 511; 49 I 236; 88 I 270; BURCKHARDT, loc.cit.). Il ne confère de droit constitutionnel qu'au citoyen victime d'un canton qui excède sa souveraineté et dans la mesure seulement où le conflit n'est pas réglé par une disposition expresse du droit fédéral telle que l'art. 46 al. 2
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BV Art. 46 Umsetzung des Bundesrechts - 1 Die Kantone setzen das Bundesrecht nach Massgabe von Verfassung und Gesetz um.
1    Die Kantone setzen das Bundesrecht nach Massgabe von Verfassung und Gesetz um.
2    Bund und Kantone können miteinander vereinbaren, dass die Kantone bei der Umsetzung von Bundesrecht bestimmte Ziele erreichen und zu diesem Zweck Programme ausführen, die der Bund finanziell unterstützt.10
3    Der Bund belässt den Kantonen möglichst grosse Gestaltungsfreiheit und trägt den kantonalen Besonderheiten Rechnung.11
ou l'art. 59
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BV Art. 59 Militär- und Ersatzdienst - 1 Jeder Schweizer ist verpflichtet, Militärdienst zu leisten. Das Gesetz sieht einen zivilen Ersatzdienst vor.
1    Jeder Schweizer ist verpflichtet, Militärdienst zu leisten. Das Gesetz sieht einen zivilen Ersatzdienst vor.
2    Für Schweizerinnen ist der Militärdienst freiwillig.
3    Schweizer, die weder Militär- noch Ersatzdienst leisten, schulden eine Abgabe. Diese wird vom Bund erhoben und von den Kantonen veranlagt und eingezogen.
4    Der Bund erlässt Vorschriften über den angemessenen Ersatz des Erwerbsausfalls.
5    Personen, die Militär- oder Ersatzdienst leisten und dabei gesundheitlichen Schaden erleiden oder ihr Leben verlieren, haben für sich oder ihre Angehörigen Anspruch auf angemessene Unterstützung des Bundes.
Cst. (arrêt non publié Kundenkredit-Bank AG, du 3 février 1965).
3. En vertu d'un principe du droit constitutionnel fédéral, qui garantit le droit de vote en matière politique, le résultat d'un scrutin doit traduire fidèlement la volonté librement exprimée du corps électoral (RO 90 I 73, 91 I 9). Il s'ensuit que chaque citoyen pris individuellement a le droit de s'exprimer en pleine liberté, c'est-à-dire notamment de voter dans le secret et à l'abri de toute influence extérieure (RO 90 I 73). L'électeur ne saurait cependant formuler à cet égard des exigences excessives. Il ne saurait par exemple demander qu'il soit tenu compte de l'opinion subjective de tel citoyen déterminé. La liberté de vote est au contraire sauvegardée déjà lorsque, d'un point de vue objectif, on peut considérer que, dans le scrutin en cause, le citoyen de condition moyenne avait la faculté de s'exprimer librement. Pour savoir si cette condition est remplie, il importe de ne pas recourir seulement à des critères abstraits, mais de tenir largement compte de l'usage local et des circonstances. Si le Tribunal fédéral constate que la liberté de vote, telle qu'elle vient d'être définie, n'a pas été respectée et que le résultat du scrutin a pu en être influencé, il annule les opérations électorales (RO 91 I 10). A cet égard, il revoit les constatations de fait sous le seul angle de l'arbitraire (RO 75 I 238). Pour le surplus, la jurisprudence établit une distinction. Lorsque le droit de vote lui-même est en jeu, qu'il s'agit de définir son contenu ou son étendue, le Tribunal fédéral
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statue librement. En revanche, il n'intervient qu'en cas d'arbitraire lorsque le litige a pour objet l'interprétation de règles cantonales de procédure (RO 83 I 176; 89 I 77, 443, 453; 90 I 73; 91 I 10). A vrai dire, cette jurisprudence mérite d'être précisée. Il existe des règles de procédure qui sont étroitement liées au droit de vote lui-même, à son contenu et à son étendue. Ainsi en va-t-il des dispositions qui indiquent les mesures absolument indispensables pour assurer la liberté du vote: de telles règles ont un effet direct sur le droit de vote, car leur portée exacte permet seule de définir la réelle étendue de la liberté de vote. Dès lors et bien qu'il s'agisse de prescriptions de procédure, le Tribunal fédéral doit en définir la portée et en revoir l'interprétation ou l'application librement...
7. Les recourants exposent que de nombreux bulletins individualisés ont été retrouvés dans l'urne. Ils en infèrent que les électeurs n'ont pas voté librement et que, partant, le scrutin doit être annulé. a) Sur 42 listes conservatrices, le nom d'Amédée Arlettaz a été biffé et de nombreux candidats, généralement les mêmes, ont été ajoutés à la main. Préparés en série par quelques personnes, ces bulletins révèlent indiscutablement l'existence d'une manoeuvre concertée. Il faut rappeler cependant que le parti conservateur de Fully est divisé en deux groupes hostiles conduits l'un par Adrien Bender et Henri Dorsaz, l'autre par Amédée Arlettaz et Roger Lovey. Le premier s'est imposé aux élections communales de décembre 1964 et Amédée Arlettaz, qui était candidat, n'a pas été élu. Un recours, déposé d'ailleurs par un citoyen d'un autre parti, a avivé encore les inimitiés. Le Grand Conseil pouvait sans arbitraire déduire de ces faits que la manoeuvre révélée par les 42 listes précitées et dirigée contre Amédée Arlettaz avait été organisée par le groupe d'Adrien Bender et Henri Dorsaz. La lettre du 10 avril 1965 par laquelle E. Granges attribue à son entreprise la paternité de la manoeuvre ne conduit pas à une conclusion différente, car ce citoyen a manifesté, durant l'enquête relative aux élections communales, son adhésion au groupe Bender. Le Grand Conseil avait aussi de bonnes raisons de considérer que les recourants étaient étroitement liés à ce groupe. En effet, ils sont les frères l'un d'Adrien Bender, l'autre d'Henri Dorsaz. De plus, ils n'ont pas été appelés à participer aux pourparlers
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consacrés notamment à l'éventuel retrait de leur recours au Grand Conseil; ils y ont été remplacés par Henri Dorsaz, l'un des chefs du groupe Bender. Comme cela ressort des faits qui viennent d'être rappelés, les recourants ont été de connivence avec les auteurs de la manoeuvre révélée par les 42 listes litigieuses. En se prévalant aujourd'hui de ces listes pour faire annuler les élections, ils agissent contrairement au principe de la bonne foi. Ce principe tout à fait général s'applique en effet aux rapports entre l'administration et les administrés (RO 91 I 136 et les arrêts cités), et il doit être observé non seulement par celle-là mais aussi par ceux-ci (arrêts non publiés Geissmann du 7 septembre 1965, consid. 1, et Dietrich du 24 juin 1964, consid. 4 b). Or il a conduit le Tribunal fédéral à juger qu'un électeur ne saurait attendre l'issue d'un scrutin pour recourir contre une irrégularité qu'il aurait pu prévenir en agissant plus tôt (RO 89 I 86/87; cf. aussi RO 90 I 72, 89 I 400 et 442); il s'oppose a fortiori à ce qu'un citoyen invoque une informalité commise sinon par lui-même, du moins par des personnes avec lesquelles il a partie liée. Ce seul motif autorisait le Grand Conseil à ne pas tenir compte des vices éventuels des 42 listes conservatrices. Point n'est besoin dès lors de rechercher si, comme le soutient l'autorité cantonale, ces bulletins ont été préparés pour créer un motif d'attaquer les élections de mars 1965 et pour utiliser ensuite le recours ainsi déposé comme une "monnaie d'échange" permettant d'obtenir le retrait du pourvoi formé contre les élections de décembre 1964... h) Les motifs indiqués dans le présent considérant sous lettre a et b à g (autres cas de bulletins prétendument marqués) suffisent pour écarter le grief fondé sur l'individualisation de certaines listes. Le Grand Conseil a cru devoir ajouter que les irrégularités commises de part et d'autre se compensaient et, partant, étaient négligeables. Il s'est fondé à cet égard sur l'arrêt non publié rendu par le Tribunal fédéral le 17 octobre 1962 dans la cause Vouillamoz c. Conseil d'Etat du canton du Valais. Effectivement, la Chambre de céans a admis dans cet arrêt que les effets des informalités affectant les listes de l'un des partis en présence étaient compensés par les conséquences des irrégularités entachant les bulletins de l'autre. Cette opinion ne saurait être maintenue. Tout d'abord, elle encourage lesvictimesd'incorrections à en commettre à leur tour. En outre et surtout, pour
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déterminer si, dans une élection, les vices de certains bulletins ont pu avoir une influence sur l'issue du scrutin, il faut prendre en considération l'hypothèse la plus favorable au parti minoritaire. Cette hypothèse est celle où tous les électeurs qui ont déposé dans l'urne des bulletins irréguliers auraient accordé leur suffrage à ce parti. Celui-ci peut donc exiger que toutes les listes viciées soient portées à son crédit, y compris les siennes. Il ne saurait ainsi y avoir compensation des informalités.
Dispositiv

Par ces motifs, le Tribunal fédéral:
Rejette le recours.
Information de décision   •   DEFRITEN
Document : 91 I 316
Date : 15. September 1965
Publié : 31. Dezember 1965
Source : Bundesgericht
Statut : 91 I 316
Domaine : BGE - Verfassungsrecht
Objet : 1. Inwieweit gewährleistet Art. 5 BV ein verfassungsmässiges Recht, das mit staatsrechtlicher Beschwerde geltend gemacht
Classification : Änderung der Rechtsprechung


Répertoire des lois
Cst: 4 
SR 101 Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999
Cst. Art. 4 Langues nationales - Les langues nationales sont l'allemand, le français, l'italien et le romanche.
5 
SR 101 Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999
Cst. Art. 5 Principes de l'activité de l'État régi par le droit - 1 Le droit est la base et la limite de l'activité de l'État.
1    Le droit est la base et la limite de l'activité de l'État.
2    L'activité de l'État doit répondre à un intérêt public et être proportionnée au but visé.
3    Les organes de l'État et les particuliers doivent agir de manière conforme aux règles de la bonne foi.
4    La Confédération et les cantons respectent le droit international.
46 
SR 101 Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999
Cst. Art. 46 Mise en oeuvre du droit fédéral - 1 Les cantons mettent en oeuvre le droit fédéral conformément à la Constitution et à la loi.
1    Les cantons mettent en oeuvre le droit fédéral conformément à la Constitution et à la loi.
2    La Confédération et les cantons peuvent convenir d'objectifs que les cantons réalisent lors de la mise en oeuvre du droit fédéral; à cette fin, ils mettent en place des programmes soutenus financièrement par la Confédération.10
3    La Confédération laisse aux cantons une marge de manoeuvre aussi large que possible en tenant compte de leurs particularités.11
59
SR 101 Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999
Cst. Art. 59 Service militaire et service de remplacement - 1 Tout homme de nationalité suisse est astreint au service militaire. La loi prévoit un service civil de remplacement.
1    Tout homme de nationalité suisse est astreint au service militaire. La loi prévoit un service civil de remplacement.
2    Les Suissesses peuvent servir dans l'armée à titre volontaire.
3    Tout homme de nationalité suisse qui n'accomplit pas son service militaire ou son service de remplacement s'acquitte d'une taxe. Celle-ci est perçue par la Confédération et fixée et levée par les cantons.
4    La Confédération légifère sur l'octroi d'une juste compensation pour la perte de revenu.
5    Les personnes qui sont atteintes dans leur santé dans l'accomplissement de leur service militaire ou de leur service de remplacement ont droit, pour elles-mêmes ou pour leurs proches, à une aide appropriée de la Confédération; si elles perdent la vie, leurs proches ont droit à une aide analogue.
cst. val.: 3
Répertoire ATF
47-II-497 • 49-I-232 • 75-I-234 • 83-I-173 • 88-I-260 • 89-I-389 • 89-I-75 • 89-I-80 • 90-I-69 • 91-I-133 • 91-I-316 • 91-I-8
Weitere Urteile ab 2000
I_86/87
Répertoire de mots-clés
Trié par fréquence ou alphabet
tribunal fédéral • droit constitutionnel • droit de vote • candidat • votation • recours de droit public • autorité cantonale • principe de la bonne foi • tennis • conseil d'état • constitution fédérale • rapport entre • effet • membre d'une communauté religieuse • forme et contenu • interdiction de l'arbitraire • vote • décision • avis • condition • accès • examinateur • droit fédéral • usage local • part sociale • autorité fédérale • plaignant • pouvoir d'examen • viol • corps électoral • constatation des faits
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