BGE 79 IV 145
36. Extrait de l'arrêt de la Cour de cassation pénale du 18 décembre 1953 dans
la cause Veillon et consorts contre Cornu.
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Regeste:
Art. 25
SR 311.0 Codice penale svizzero del 21 dicembre 1937 CP Art. 25 - Chiunque aiuta intenzionalmente altri a commettere un crimine o un delitto è punito con pena attenuata. |
émission improprement dite suppose que l'auteur ait eu l'obligation juridique
d'agir; un devoir moral ne suffit pas.
Art. 25 StGB. wie jede durch Unterlassung begangene strafbare Handlung, setzt
auch die Gehülfenschaft durch unechte Unterlassung eine Rechtspflicht zum
Handeln voraus; eine bloss sittliche Pflicht genügt nicht.
Art. 25
SR 311.0 Codice penale svizzero del 21 dicembre 1937 CP Art. 25 - Chiunque aiuta intenzionalmente altri a commettere un crimine o un delitto è punito con pena attenuata. |
omissione impropriamente detta presuppone l'esistenza d'un obbligo giuridico
di agire; un semplice dovere morale non basta.
A. - Les époux Jean et Ida Veillon achetèrent en 1946 la propriété «La
Pelouse», sise à Bex. Ils la constituèrent en société anonyme et nommèrent
administrateur Henri Cornu, agent de la Banque cantonale vaudoise à Bex. Dès
le printemps 1951, ils habitèrent la Pelouse avec leurs fils Adrien, né en
1930, et François. Ils hébergeaient également un étudiant lithuanien, nommé
Narakas. En outre, ils recevaient fréquemment la visite de Franz Meli.
En été 1951, Jean Veillon quitta sa famille à la suite de difficultés avec son
épouse. Cornu prit parti pour lui et entra ainsi en conflit avec Ida Veillon,
qui lui reprochait notamment de léser les intérêts qu'elle avait dans le
domaine. En revanche, Adrien Veillon, Meli et Narakas prirent fait et cause
pour dame Veillon.
En septembre, l'animosité des occupants de la Pelouse contre Cornu devint si
grande qu'ils envisagèrent de l'obliger à donner sa démission d'agent de la
Banque cantonale vaudoise, voire à quitter Bex. Le 29 septembre, Adrien
Veillon et Meli conçurent l'idée de répandre un tract
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dirigé contre lui. Narakas se rallia à ce projet et tous trois élaborèrent un
libelle attaquant Cornu de façon violente et grossière.
Puis Franz Meli apporta une machine à multigraphier et les trois jeunes gens
tirèrent le tract à plusieurs centaines d'exemplaires. Dame Veillon eut
connaissance du texte et était présente pendant qu'on le reproduisait.
Dans la nuit suivante, Veillon et Meli répandirent les libelles dans les rues
de Bex.
B. - Sur plainte de Cornu, le Tribunal du district d'Aigle a infligé à Ida
Veillon un mois d'emprisonnement avec sursis, pour complicité aux délits de
calomnie et d'injures.
La Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal vaudois a maintenu ce
jugement, par arrêt du 26 janvier 1953.
C. - Ida Veillon a formé un pourvoi en nullité à la Cour de cassation pénale
du Tribunal fédéral, en concluant à son acquittement.
Considérant en droit:
La juridiction cantonale a considéré qu'Ida Veillon était au courant du
projet, formé par les trois autres inculpés, de diffuser un libelle attaquant
Cornu, qu'elle a eu connaissance du texte rédigé par eux et qu'elle a assisté
au tirage du tract sans s'y opposer. Par son comportement et sa passivité
ajoute la Cour vaudoise elle a certainement contribué à renforcer les trois
jeunes gens dans leur décision et à les encourager, alors qu'elle avait
l'obligation morale, en tant que mère d'Adrien Veillon et de maîtresse de
maison, de s'opposer à la commission de l'infraction; elle s'est donc rendue
coupable de complicité intellectuelle.
Ainsi, la juridiction cantonale ne retient pas d'acte d'assistance matérielle
à la charge d'Ida Veillon. Cornu prétend donc en vain, dans sa réponse, que la
recourante a mis des locaux propices à la disposition des auteurs du libelle,
pour qu'ils puissent «travailler» en toute sécurité. Sur ce point, l'arrêt
attaqué ne contient aucune constatation
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et rien n'indique que les juges cantonaux aient retenu les faits allégués par
le plaignant pour admettre la complicité d'Ida Veillon.
Mais l'assistance peut aussi être intellectuelle. C'est le cas lorsque le
tiers, par son comportement, encourage l'auteur, entretient ou fortifie sa
décision de commettre l'infraction (RO 70 IV 19, 72 IV 100). En l'espèce,
cependant, la Cour vaudoise ne reproche aucun comportement actif à la
recourante. Sans doute est-il établi que cette dernière a instruit les jeunes
gens de ses difficultés conjugales et qu'elle a discuté avec eux les moyens
d'éloigner le plaignant de Bex. Mais les juges cantonaux n'en déduisent pas
qu'elle ait voulu ainsi inciter ou encourager son fils, Meli et Narakas à
s'attaquer à l'honneur de Cornu. Ils lui reprochent simplement d'avoir été
passive, de ne pas s'être opposée à l'infraction qui se préparait en sa
présence. Ils la considèrent donc comme coupable de complicité par omission
improprement dite. Une telle forme de complicité est concevable (cf.
THORMANN/VON OVERBECK, Schweizerisches Strafgesetzbuch, ad art. 25 rem. 4;
LOGOZ, Commentaire du code pénal suisse, ad art. 25 rem. 3). Mais comme toute
infraction commise par omission, elle suppose que l'auteur ait eu l'obligation
juridique d'agir (RO 53 I 356). Cette condition n'est pas remplie en l'espèce.
Comme mère d'Adrien Veillon, la recourante n'avait pas le devoir juridique de
s'opposer aux actes qu'il projetait; Veillon était majeur et n'était plus sous
la puissance paternelle de ses parents. De même, sa qualité de maîtresse de
maison n'imposait pas à la recourante l'obligation juridique de désapprouver
les actes des trois jeunes gens: Adrien Veillon se trouvait chez lui et ses
amis Narakas et Meli étaient ses hôtes autant que ceux de sa mère. Cette
dernière n'avait donc, comme le constate la juridiction cantonale, que le
devoir moral de s'opposer à l'infraction préparée en sa présence. Mais la
violation d'une telle obligation ne saurait constituer une infraction. Ida
Veillon doit dès lors être libérée.