S. 342 / Nr. 52 Beamtenrecht (f)

BGE 73 I 342

52. Arrêt du 21 novembre 1947 dans la cause Bauer contre Confédération suisse.


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Regeste:
Indemnité de ménage séparé:
Situation des agents de la Confédération auxquels la loi n'attribue pas un
traitement déterminé.
Naissance du droit à une indemnité de ménage séparé Formation de règles
coutumières en droit public.
Beamtenrecht:
Anspruch auf eine Sonderzulage für getrennten Haushalt (vgl. Art. 60, Abs. 3
der eidg. Angestelltenordnung) hat der Angestellte nur, wenn und soweit ihm
eine solche Zulage ausdrücklich zugesprochen worden ist.
Indemnità per un'economia domestica fuori del luogo di lavoro.
Situazione dogli agenti della Confederazione ai quali la legge non accorda uno
stipendio determinato.
Quando sorge il diritto ad un'indennità per un'economia domestica fuori del
luogo di lavoro.
Norme consuetudinarie in diritto pubblico.

A. ­ En mai 1941, l'Office fédéral de guerre pour l'industrie et le travail a
engagé Alexandre Bauer comme employé auxiliaire de la Section du bois, à
Berne. La lettre qu'il lui a envoyée le 29 mai, pour confirmer l'engagement,
précise que son salaire se monte à 600 fr. par mois et ajoute: «es handelt
sich dabei um ein bereits abgebautes Gehalt, in dem alle Zulagen inbegriffen
sind». En août de la même année, Bauer fut transféré à la Section des produits
chimiques et pharmaceutiques, où il travailla jusqu'au 30 septembre 1946, date
à laquelle il quitta le service de la Confédération.
B. ­ Ayant appris, en juillet 1946, que des employés fédéraux, domiciliés hors
de Berne, où ils travaillaient, touchaient une indemnité de ménage séparé, il
demanda à en bénéficier, alléguant qu'il avait conservé son domicile

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et un appartement à Genève, où il se rendait chaque semaine. L'Office de
guerre pour l'industrie et le travail l'informa, le 29 juillet, qu'une
indemnité de 150 fr. par mois lui serait versée, avec effet rétroactif au 1er
janvier 1946. Bauer insista qu'elle lui fût accordée à partir de son entrée en
fonction, mais essuya un refus.
C. ­ Le 21 avril 1947, il a saisi le Tribunal fédéral d'une demande concluant
à ce que la Confédération fût condamnée à lui payer 8325 fr. avec intérêt à 5
% dès le 1er janvier 1946.
L'Office du personnel ayant objecté que le Département compétent n'avait pas
eu l'occasion de se prononcer conformément à l'art. 67 du règlement I,
l'instruction de la cause a été suspendue, à la requête du demandeur, pour lui
permettre de s'adresser au Département des finances et des douanes. Ce dernier
a repoussé ses prétentions, le 22 juillet 1947.
D. ­ Par mémoire du 24 septembre, Bauer a repris ses conclusions, tout en
renonçant à l'intérêt. Il soutient que l'indemnité pour ménage séparé est de
droit coutumier. L'administration devait appliquer d'office une règle qu'il
ignorait. Elle a du reste reconnu qu'il avait droit à l'indemnité, en la lui
octroyant dès le 1er janvier 1946. Le choix de cette date est arbitraire. Le
paiement de l'indemnité en question est du reste conforme à l'esprit des art.
44 StF, 45 et 46 du règlement I.
E. ­ La Confédération conclut au rejet de la demande. Elle argumente comme
suit: Aucune disposition écrite, aucune règle coutumière ne permet aux agents
fédéraux qui ne sont pas domiciliés au lieu où ils travaillent de réclamer une
indemnité spéciale. Il est vrai que, pendant la guerre, ils n'ont pas toujours
pu habiter la localité où ils accomplissaient leur service. Aussi
l'administration a-t-elle consenti, dans certains cas, à verser, sur demande
de l'intéressé, une indemnité destinée à compenser les frais supplémentaires
occasionnés par un ménage séparé. N'étant pas due légalement, cette indemnité
ne saurait faire l'objet

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d'une action judiciaire. Il n'incombait pas à l'administration de rechercher
d'office ceux de ses employés qui avaient quelque chance de l'obtenir. Au
surplus, le salaire du demandeur a été fixé globalement, eu égard à ses
conditions de famille et à son domicile. Bauer l'a accepté. Il n'a jamais été
attribué à une classe de traitement. C'est à titre bénévole qu'une indemnité
de 150 fr. lui a été allouée dès le 1er Janvier 1946.
Considérant en droit:
1. ­ Le demandeur prétend qu'une indemnité de ménage séparé lui est due, en sa
qualité d'agent de la Confédération, du jour de son entrée en fonction au 1er
janvier 1946. Comme il se prévaut de règles de droit public, son action a le
caractère d'une réclamation pécuniaire formée en vertu de ce droit. La
compétence du Tribunal fédéral résulte dès lors de l'art. 110 al. 1 OJ.
2. ­ Les traitements du personnel fédéral - allocations comprises - sont en
grande partie fixés directement par la loi au sens matériel du mot (art. 37
ss . StF, 42 ss. du règlement des employés). Il s'agit de dispositions
générales, liant l'administration. La somme à laquelle l'agent peut prétendre
ne dépend pas d'une décision du service auquel il appartient. Si, par suite
d'une erreur, il reçoit une rémunération ou une indemnité insuffisante, il lui
est loisible d'exiger le paiement intégral des prestations légales.
Il y a toutefois des agents, même parmi les fonctionnaires (cf. art. 37 al. 2 ,
38 al. 3 , 39 al. 2 StF), auxquels la loi n'attribue pas un traitement
déterminé. Le législateur s'en remet à l'administration du soin d'arrêter leur
rétribution, soit librement soit dans un cadre qu'il circonscrit. Ainsi,
l'autorité administrative est à même de tenir compte des particularités de
chaque cas. Les droits de l'employé procèdent alors d'une décision d'espèce.
IL n'en a point tant que l'Office compétent n'a pas statué à son sujet. S'il
estime mériter un salaire supérieur à celui qui lui est

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alloué, il a la faculté de solliciter une augmentation. Mais le sort de sa
requête est uniquement entre les mains de l'autorité administrative. Le droit
à une prestation supplémentaire ne naît que dans la mesure où l'administration
le confère. Telle était notamment la situation des auxiliaires de l'économie
de guerre. Les art. 37 ss . StF ne leur étant pas applicables (cf. ch. 7 des
conditions d'engagement du 28 décembre 1939), leur rémunération était arrêtée
de cas en cas par l'Office dont ils relevaient, d'entente avec l'Office du
personnel. C'est ainsi que le traitement du demandeur a été fixé, en mai 1941,
à 600 fr. par mois, tout compris.
3. ­ Il s'agit donc de rechercher quel serait le fondement de l'indemnité pour
ménage séparé que réclame Bauer.
a) Il reconnaît qu'aucune prescription légale n'astreint explicitement la
défenderesse à verser de telles indemnités. Mais il estime que les règles
concernant les indemnités de déplacement devraient s'appliquer par analogie.
L'art. 44 al 1 lit. a StF et les dispositions d'exécution (art. 45 et 46 du
règlement I) visent le fonctionnaire qui, dans l'exécution de son service, est
tenu de se rendre hors de sa résidence. Il est, en effet, normal que ses frais
lui soient remboursés. Le cas de l'agent qui, pour des raisons étrangères à
l'administration, prend ou maintient son domicile en dehors de la localité qui
lui est assignée pour son service ne ressemble pas à cette éventualité. Aussi
ne se justifierait-il pas d'appliquer par analogie l'art. 44 al. 1 lit. a StF.
b) C'est pourquoi le demandeur insiste sur le caractère coutumier de la règle
de droit qui obligerait la Confédération à l'indemniser.
Il est, en vérité, constant que plusieurs de ses collègues ont touché, dès
leur entrée en fonction, une indemnité pour ménage séparé. Cela ne signifie
cependant pas qu'une coutume ait pris naissance. Bien que la formation de
règles coutumières ne soit pas absolument exclue en droit public,

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une grande prudence s'impose. Chargée d'appliquer les lois, l'administration
n'a pas, en principe, le pouvoir d'ériger, par sa pratique, des normes venant
prendre place à côté de celles que le législateur établit selon une procédure
déterminée. Des dérogations ne sauraient être admises qu'à titre exceptionnel,
pour satisfaire, en présence d'une lacune de la loi, à une impérieuse exigence
de l'équité. Ainsi, les autorités administratives ordonnant le remboursement
de la taxe militaire que des hommes, recrutés tardivement, avaient acquittée
avant d'être déclarés aptes au service militaire, le Tribunal fédéral a
reconnu en 1930 que cette pratique, issue d'une circulaire de 1897, avait la
valeur d'une règle de droit coutumier (RO 66 I 42) Les motifs de cette
solution ne se retrouvent pas en l'occurrence. Outre que l'usage invoqué n'a
pas duré aussi longtemps, aucun principe d'équité ne commande à la
Confédération d'octroyer une allocation spéciale à ceux de ses agents qui,
n'habitant point le lieu de leur travail, ont de ce fait des dépenses
supplémentaires. Pareille allocation ne s'accompagne pas, actuellement, de
l'opinio necessitatis. D'autre part ­ et c'est le point décisif ­, il n'y a
pas de lacune à combler quand l'administration, comme ici (cf. cons. 2), a
toute latitude d'adapter le traitement aux circonstances. Enfin, en dépit des
précédents signalés par Bauer, il ne s'agit vraisemblablement pas d'un usage
uniforme et constant. La défenderesse déclare n'avoir consenti que «dans
certains cas» à verser une indemnité destinée à couvrir le surcroît de frais
dû à l'existence d'un ménage séparé. Quoi qu'il en soit, il ne saurait être
question d'une coutume.
c) A défaut de règles légales ou coutumières, le droit à une indemnité de
ménage séparé peut seulement découler d'une décision administrative. Il
n'appartient en conséquence qu'à l'employé à qui une telle décision le confère
et n'existe que dans les limites qu'elle lui assigne.
4. ­ Bauer n'a donc pas d'autres droits, s'agissant de l'indemnité pour ménage
séparé, que ceux que lui donne

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la décision du 29 juillet 1946. Comme elle porte effet dés le 1er janvier
1946, il demande en vain à être indemnisé pour les années précédentes,
d'autant plus que c'est un salaire global qui lui a été alloué et qu'il a
accepté en mai 1941. L'indemnité de ménage séparé n'a du reste jamais été
accordée qu'à la diligence de l'intéressé. Saisie d'une requête qui aurait pu
lui être soumise auparavant, la Confédération avait évidemment le droit de ne
pas faire rétroagir sa décision dans une mesure incompatible avec les règles
concernant l'établissement du budget et des comptes.
Par ces motifs, le Tribunal fédéral
Rejette la demande.
Entscheidinformationen   •   DEFRITEN
Dokument : 73 I 342
Datum : 01. Januar 1947
Publiziert : 21. November 1947
Quelle : Bundesgericht
Status : 73 I 342
Sachgebiet : BGE - Verwaltungsrecht und internationales öffentliches Recht
Gegenstand : Indemnité de ménage séparé:Situation des agents de la Confédération auxquels la loi n'attribue pas...


Gesetzesregister
BtG: 37  38  39  44
OG: 110
BGE Register
66-I-37 • 73-I-342
Stichwortregister
Sortiert nach Häufigkeit oder Alphabet
bundesgericht • verwaltungsbehörde • gewohnheitsrecht • monat • öffentliches recht • lohn • von amtes wegen • geburt • analogie • bewilligung oder genehmigung • berechnung • sorgfalt • entschädigung • leiter • erlass • abweisung • lücke • verwaltungsverordnung • entscheid • ertrag
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