48 Obligationenrecht. N° 8.

8. Arx-St da la I Section civile da 26 février 1923

dans la cause Banque de Genève contre Ville de Genève.

Assignatfon. Ordre donné à une banque de tenir une certaine somme à la
disposition d'un tiers, aceeptation signifiée au tiers: impossibilité
pour 1a banque assignée d'opposer au tiers assignataire des exceptions
tirées des relations entre l'assignant et l'assignée ou entre l'assignant
et l'assignataire.

A. Le 6 aoùt 1920 la Ville de Genève a confié l'exploitation du Theatre
de Genève pendant la saison 1920-1921 à une Société anonyme dite Société
d'exploitation du Theatre de Genève . L'art. 14 du cahier des charges
dispose:

En signant la convention, la Direction (soit la Société d'exploitation)
versera à la Ville de Genève un cautionnement de 20 000 fr., en espèces
ou en valeurs, ou fournira un cautionnement personnel accepté par le
Conseil administratif.

Si le cautionnement est versé en espèces, l'intérèt en sera payé à la
direction à raison de 5 % l'an.

L'art. 8 du meme cahier des charges dispose que ia convention pourra etre
rèsiliée si la Société fournit la preuve qu'elle a perdu le montant du
cantionnement prévu à l'art. 14 .

Le cautionnement stipulé a l'art. 14 n'a pas été fourni en espèces. La
Société d'exploitation qui avait un compte à la Banque de Genève a charge
celle-ci de réserver sur ce compte en faveur de la Ville la somme de 20
000 fr. prévue. La Banque a accepté et par lettre du 2 juin 1920 elle
aécrît à la Ville de Genève: Nous avons l'honneur de vous informer
que nous réservons une somme de 20 000 fr. sur le compte de la Société
d'exploitation du Theatre de Genève pour garantie prévue par le cahier
des charges de la Direction du Theatre de Genève.

Le Ville de Genève a répondu le 9 juin 1920 à la Banque
:Obligationenrecht. N° 8. _ 49

Nous avons l'avantage de vous accuser réception de votre lettre du 2
cts. dans laquelle vous nous infor-

mez que vous réservez une somme de 20 000 fr. sur le

compte de la Société d'exploitation du Theatre pour la garantie prévue
par le cahier des charges de la Direction.

Nous vous avisons que nous sommes d'accord d'accepter cette garantie à la
condition que la dite somme reste à-la disposition de la Ville de Genève
qui pourra, au moment qui lui conviendra, en demander le versement et
que la Banque n'en puisse remettre le montant à la Société que sur un
avis écrit du Conseil administratif.

Le 18 mars 1912 après declaration de faillite de la Société d'exploitation
du Theatre la Ville de Genève a invite la Banque de Genève a lui verser
le montant du cautionnement, soit 20 000 fr. La Banque a communiqué
cette demande à la Société qui l'a priée d'y répondre négativement, vu
que la Société n'est pas debitrice de la Ville de Genève. D'autre part,
l'Office des faillites a prie la Ville de Genève d'insister auprès de la
Banque pour qu'elle execute son engagement qui, s'il avait été execute
avant la faillite, aurait eu pour effet de mettre à la disposition de
la masse un act-if important. Le 14 avril 1921 la Ville de Genève a donc
confirmé sa réclamation precedente, en ajoutant qu'elle est créancière de
la Société d'exploitation d'une somme de 5300 fr. environ représentant le
montant d'une facture du service électrique et le bénéfice perdu d'une
représentation que la Société devait à la Ville d'après le cahier des
charges. La Banque de Genève a répondu par une fin de non-recevoir.

La Ville de Genève a produit dans la faillite de la Société d'exploitation
pour le montant de sa créance indiquée ci-dessus de 5280 fr. 50 cts. Le
17 octobre 1921 l'administration de la faillite l'a intermec que sa
production était écartée attendu que la Ville n'a pu faire

AS 49 II 1923 4

50 Obligationenrecht. N' 8.

verser à l'office le cautionnement sur lequel elle réclame un droit de
gage et que, d'autre part, la masse n'est pas responsable de la kaute
commise par la Ville . Par lettre du 21 octobre, l'Office a précisé
que, si la Ville récupère le montani; du cautionnement de la Société
d'exploitation du Theatre, elle pourra avant tous autres eréanciers
retenir ce qui lui est légalement du par la dite Société, le solde devant
revenir à la masse de la faillite. ss

B. Le 16 juin 1921 Ia Ville de Genève a ouvert action à la Banque de
Genève en paiement de 20 000 fr. avec intérèts de droit. Elle expose
que la Banque a pris l'engagement formel et personnel de lui verser le
montani: du cautionnement Helle demande l'exécution de cet engagement. Peu
importe à cet égard que la Banque, au lieu de lui réserver les 20 000
fr., les ait versés à la Société d'exploitation. En ce faisant, elle
a commis une faute qui engage sa responsabilité. Elle ne peut exciper
des relations entre-la Ville de Genève et la Société d'exploitation ni
du prétendu enrichissement illégitime que consaererait le versement de
20 000 fr. qui est réclamé. La Ville de Genève versera à l'Office des
faillites cette somme sous déduction de ce qui lui est légitimement dü. A
cet égard la Ville se réfère à sa production et ajoute qu'elle & avance
une somme de 15 000 fr. pour le personnel dont les traitements ont été
laissés en souffrance et qu'elle a versé le Sme mois de la subvention,
seit 5000 fr., sans que le personnel ait été payé.

La Banque de Genève a conclu à liberation pour les motifs suivants :

Le cautionnement, ainsi que cela résulte de l'art. 8 du cahier des
charges, est destiné à assurer la Ville de Genève que la Société
supportera les pei-tes d'exploitation à concurrence de 20 000 fr. Or la
Société a rempli et au dela cette obligation, puisqu'elle a absorbé plus
de 100 000 fr. ; le cautionnement est donc devenu sans

Obiigationenrechb Ile sc , 51.

objet. D'ailleurssi la Banque a versè les 20 000 fr. à la Société
d'exploitation; si elle devait les verser une seoonde fois il y aurait
enrichissement illégitime. Au surplus la Ville de Genève ne justifie
d'aucune créance ' et, comme elle devrait restituer à l'Office ce qu'elle
cherche à obtenir de la défenderesse, on peut lui opposer l'adage :
mala fide agi! qui petit quod redditurus est.

C. Le Tribunal de première instance a allouè à la demanderesse ses
conclusions, en se fondant sur l'existence d'un cautionnement souscrit
par la défenderesse et dans tous les cas d'une obligation de faire,
d'un engagement personnel dont elle doit l'exécution.

Par arrètssdu 28 novembre 1922, la Cour de Justice civile a confirmé ce
jugement, mais en partant de l'idée qu'il est intervenu entre les parties
un contrat de dépòt et que la Banque dépositaire doit dono restituer à
la Ville déposante une somme égale à celle qu'elle a ree-ue.

La dèienderesse a recouru en reforme contre cet arrèt, en reprenant ses
conclusions libératoires.

Conside'rani en droit :

Il importe de préciser la nature juridique de l'obligation assumée par
la Banque de Genève envers la Ville de Genève. Il ne s'agissait pas
d'un cautionnement, comme l'a admis le Tribunal de première instance:
la Banque n'a pas garanti l'exécution d'une obligation principale qui
aurait été contractée par la Société d'exploitation du Theatre et qui
aurait subsisté à cöté de l'engagement souscrit par la défenderesse ;
celui-ci prenait au contraire la place de l'obligation de la Société,
il en constituait un mode d'exécution et il est evident que la Ville de
Genève n'aurait pas eu le droit d'exiger de la Société le versement de 20
000 fr. sans avoir au préalable essayé de l'obtenir de la Banque ce qui
montre bien que cette dernière n'était pas une simple caution. D'autre
part, bien qu'au point de vue économique la Situation soit fort analogue
à celle qui

52 Obflgationenreeht; N° 8.

ssrésulterait d'un dépöt, l'existence d'un dépòt, qu'a eru pouvoir
admettre la Cour de Justice civile, n'est

. pas prouvée. A aucun moment, la Banque n'a payé

à la Ville de Genève une somme que celle-ci aurait ensuite déposée en
sesmains ; il n'y a pas eu non plus virement de compte, c'est-à dire
inscription au compte de la Ville d'une somme dont le compte de la
Société aurait été debite. La Ville n'ayant rien touché, n'a rien pu
déposer. Les choses se sont passées différemment. Alors que, d'après
l'art. 14 du cahier des charges, la Société devait ou verser 20 000 fr. à
la Ville ou lui fournir un cautionnement à concurrence de cette somme,
les parties ont adopté un troisième systeme. La Société qui avait un
compte à la Banque de Genève a charge cet étahlissement de réserver 20
000 fr. en faveur de la Ville de Genève; la Banque a accepté ce mandat
et en a informe la Ville qui, à son tour, s'est déclarée d'accord en
spécifiant que la somme fixée devrait demeurer à sa disposition et
qu'elle pourrait en tout temps en exiger le versement. Ces conditions
posées de la facon la plus catégorique dans la lettre du 9 juin 1920
ont été acceptées tacitement par la Banque qui, si elle n'avait pas
été d'accord, aurait été tenue d'en informer la Ville de Genève. Dès
lors on se trouve dans la Situation juridique prévue aux art. 466
SR 220 Erste Abteilung: Allgemeine Bestimmungen Erster Titel: Die Entstehung der Obligationen Erster Abschnitt: Die Entstehung durch Vertrag
OR Art. 466 - Durch die Anweisung wird der Angewiesene ermächtigt, Geld, Wertpapiere oder andere vertretbare Sachen auf Rechnung des Anweisenden an den Anweisungsempfänger zu leisten, und dieser, die Leistung von jenem in eigenem Namen zu erheben.
et
suiv. CO, c'est-à dire en présence d'une assignation donnée par ,la
Société d'exploitation du Théätre (assignante) à la Banque de Genève
(assignèe) et acceptée par cette dernière en faveur de la Ville de Genève
(assignataire). Or l'aceeptation de l'assignation par l'assigné a pour
effet de créer à sa charge une dette abstraite envers l'assignataire,
dette semblable à celle de l'accepteur d'une lettre de change envers le
porteur. C'est ee qu'exprime l'art. 468 GO en disant que l'assigné qui
a accepté sans réserves est tenu de payer l'assignataire et ne peut lui
opposer que les exceptions résultant de leurs rapport personnels ou du
contenu de l'assi-Obligationenrecht. N° 8.1 _ 53

gnation, à l'exclusion de celles qui dèrivent de ses relations avec
l'assignant . On doit [d'ailleurs observer que l'assignant n'a jamais
révoqué l'assignation et que sa faillite n'en a pas emporté révocation
puisqu'elle estintervenu après l'acceptation de l'assignation (art-170
al. 3 CO).

Il rèsulte de ce qui precede que la Ville de Genève est en droit
d'exiger le paiement de la somme de 20 000 fr. et que la Banque ne peut
lui opposer ni le fait qu'elle a déjà payé cette somme à la Société et
qu'elle est donc exposée à payer deux fois, ni le fait que la Ville n'est
pas créaneière de la Société et devra donc restituer à la faillite ce
qu'elle reclame aujourd'hui à la defenderesse.' Le premier de ces faits
concerne les relations entre l'assignant et l'assigné, le second concerne
les relations entre l'assignant et l'assignatsiaire ils sont ainsi l'un
et l'autre étrangers aux relations entre l'assigné et l'assignataire et
ne sauraient les affecter d'après la régle formelle de l'art. 468
SR 220 Erste Abteilung: Allgemeine Bestimmungen Erster Titel: Die Entstehung der Obligationen Erster Abschnitt: Die Entstehung durch Vertrag
OR Art. 468 - 1 Der Angewiesene, der dem Anweisungsempfänger die Annahme ohne Vorbehalt erklärt, wird ihm zur Zahlung verpflichtet und kann ihm nur solche Einreden entgegensetzen, die sich aus ihrem persönlichen Verhältnisse oder aus dem Inhalte der Anweisung selbst ergeben, nicht aber solche aus seinem Verhältnisse zum Anweisenden.
1    Der Angewiesene, der dem Anweisungsempfänger die Annahme ohne Vorbehalt erklärt, wird ihm zur Zahlung verpflichtet und kann ihm nur solche Einreden entgegensetzen, die sich aus ihrem persönlichen Verhältnisse oder aus dem Inhalte der Anweisung selbst ergeben, nicht aber solche aus seinem Verhältnisse zum Anweisenden.
2    Soweit der Angewiesene Schuldner des Anweisenden ist und seine Lage dadurch, dass er an den Anweisungsempfänger Zahlung leisten soll, in keiner Weise verschlimmert wird, ist er zur Zahlung an diesen verpflichtet.
3    Vor der Zahlung die Annahme zu erklären, ist der Angewiesene selbst in diesem Falle nicht verpflichtet, es sei denn, dass er es mit dem Anweisenden vereinbart hätte.
CO.

En résumé, liée par l'engagement sans réserves qu'elle a pris envers
la Ville de Genève, la Banque doit lui verser le montant de la garantie
stipulée à l'art. 14 du cahier des charges. Mais cela ne prèjuge en rien
la question de savoir quel est l'objet de cette garantie, quel doit en
etre le sort, si et dans quelle mesure la Ville de Genève peut l'affecter
au réglement de créances qu'elle posséderait contre la Société. Toutes
ces quesh'ons demeurent intactes et ne pourront etre débattues qu'entre la
Ville de Genève et la Société d'exploitation du Theatre, soit sa faillite,
contre laquelle demeurent également réservés les droits que la Banque de'
Genève pourra faire valoir à raison du paiement de 20 000 fr. qu'elle
est appelée à effectuer.

Le Tribunal fede?-al pronunce : Le recours est rejeté et l'arrèt attaqué
est confirmé.
Entscheidinformationen   •   DEFRITEN
Dokument : 49 II 48
Datum : 26. Februar 1923
Publiziert : 31. Dezember 1924
Quelle : Bundesgericht
Status : 49 II 48
Sachgebiet : BGE - Zivilrecht
Gegenstand : 48 Obligationenrecht. N° 8. 8. Arx-St da la I Section civile da 26 février 1923


Gesetzesregister
OR: 466 
SR 220 Erste Abteilung: Allgemeine Bestimmungen Erster Titel: Die Entstehung der Obligationen Erster Abschnitt: Die Entstehung durch Vertrag
OR Art. 466 - Durch die Anweisung wird der Angewiesene ermächtigt, Geld, Wertpapiere oder andere vertretbare Sachen auf Rechnung des Anweisenden an den Anweisungsempfänger zu leisten, und dieser, die Leistung von jenem in eigenem Namen zu erheben.
468
SR 220 Erste Abteilung: Allgemeine Bestimmungen Erster Titel: Die Entstehung der Obligationen Erster Abschnitt: Die Entstehung durch Vertrag
OR Art. 468 - 1 Der Angewiesene, der dem Anweisungsempfänger die Annahme ohne Vorbehalt erklärt, wird ihm zur Zahlung verpflichtet und kann ihm nur solche Einreden entgegensetzen, die sich aus ihrem persönlichen Verhältnisse oder aus dem Inhalte der Anweisung selbst ergeben, nicht aber solche aus seinem Verhältnisse zum Anweisenden.
1    Der Angewiesene, der dem Anweisungsempfänger die Annahme ohne Vorbehalt erklärt, wird ihm zur Zahlung verpflichtet und kann ihm nur solche Einreden entgegensetzen, die sich aus ihrem persönlichen Verhältnisse oder aus dem Inhalte der Anweisung selbst ergeben, nicht aber solche aus seinem Verhältnisse zum Anweisenden.
2    Soweit der Angewiesene Schuldner des Anweisenden ist und seine Lage dadurch, dass er an den Anweisungsempfänger Zahlung leisten soll, in keiner Weise verschlimmert wird, ist er zur Zahlung an diesen verpflichtet.
3    Vor der Zahlung die Annahme zu erklären, ist der Angewiesene selbst in diesem Falle nicht verpflichtet, es sei denn, dass er es mit dem Anweisenden vereinbart hätte.
Stichwortregister
Sortiert nach Häufigkeit oder Alphabet
betriebsgesellschaft • pflichtenheft • anweisungsempfänger • erste instanz • konkursamt • ungerechtfertigte bereicherung • eu • aktiengesellschaft • promissar • hinterlegungsvertrag • abrechnung • entscheid • vorladung • eröffnung des verfahrens • lohn • monat • depotbank • schuldübernehmer • rechtsnatur • gezogener wechsel
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