I 4 O ' Staatsrecht.
sungen, zu wachen und es kann gegen ihre Verfügungen an den Regierungsrat
reknrriert werden. Im vorliegenden Falle durfte die Sanitàtsdirektion
umsoeher einschreiten, als der Rekurrent durch die Führung des
Doktortitels beim Publikum offenbar den Eindruck zu erwecken suchte,
dass er zur selbständigen Ausübung der Zahnheilkunde befähigt sei, und
mit diesem Titel Kunden zu gewinnen beabsichtigte, die sich sonst einem
ungeprüften Zahnarztgehülfen nicht anvertraut hätten.
Eine Verletzung der Art. 4 und 58 BV liegt somit nicht vor. -
Desrmach erkennt das Bundesgericht : Der Rekurs wird im Sinne der
Erwägungen abgewiesen.
Vgl. auch Nr. 26. Voir aussi no 26.
Baudelaund :Gewerbefreiheit. N° 21. 141
n. HANDELS 'UND GEWERBEFREIHEIT
LIBERTÉ DU COMMERCE ET DE. L'INDUSTRIE
21. Arrèt du 23 mars 1921 si dans la cause Engel et Schiffmann contre
Canton de Vaud-
Art. 178 OJF. Recevabilité d'un recours fonde sur l'art. 31
Const. féd. malgré le caractère irrévocable de la mesure attaquée, iorsque
l'admission du recours est susceptible d'exercer une influence sur le
sort d'un procès en dommagesintérèts basé sur l'inconstitutionnalité de
la mesure en question.
Art. 31 Const. féd. Ne saurait se justifier par des motifs de police
sanitaire et apparaît dès lors comme contraire au principe de la liberté
du commerce une décision d'une autorité cantonale subordonnant l'exercice
du métier de forain à la possession à telle date donnée d'un domicile
régulier dans le canton.
A. Par lettres du 24 novembre 1920, la Direction de Police de Lausanne
a accordé aux reccurants Engel et Schiffmann, forains de leur état,
l'autorisation de venir installer leurs baraques dans la ville de Lausanne
pendant la durée des fètes de l'Au 1920-1921 ; elle leur indiquait en
méme temps le prix de location du terrain et leur rappelait certaines
preseriptions de police relatives au mode d'exploitation de leur industrie
et l'heure d'ouverture de leurs établissements. Une communica-tion
identique fut adressée au reconrant Heuscher le 3 décembre suiva nt.
Munis de ce document, les recourants ont fait expédier leur materiel,
Engel, de Bàle, Heuscher, de Berne et Schiffmann de Flawyl.
Le 15 décembre 1920, la Direction de Police avisa Schiffmann et Heuscher
qu'ensuite d'une décision prise la veille par le Conseil d'Etat du canton
de Vaud,
142 Stantsrechtd'interdire a tout forain n'étant pas régulièrement
domicilié dans le canton d'exercer sa profession sur territoire vaudois ,
elle se voyait dans l'obligation de retirer l'autorisation accordée.
Dès leur arrivée à Lausanne, les trois recourants s'étaient également
adressés à la Préfecture en vue de l'obtention de la patente qui, de toute
felgen, leur était indispensable pour exercer leur industrie. Le Préfet a
refusé de faire. droit à leur demande, en invoquant un arr-été du Conseil
d'Etat en date du 29 septembre 1920, interdisant notamment l'exercice de
leur industrie à tout forain ou colporteur non régulièrement domicilié
dans le canton avant le 1°! novembre 1919. Il leur conseilla toutefois
de s'adresser directement au Département de Justice et Police.
Ayant, prétend il, constaté que plusieurs des forains qui étaient en train
de s'installer sur la place de féte arrivaient également d'une localité
située hors du canton el; que certains d'entre eux avaient réussi à
obtenir leur patente grace à une vente fictive de leur établissement
à une personne réguliérement domiciliée dans le canton, le recouraut
Schiffmann essaya d'user du méme procédé. L'opération ne donna toutefois
aucun résultat.
Le 31 décembre, les recourants ont alors tente une dernière démarche
auprès du Préfet qui les renvoya de nouveau au Département de Justice
et Police. A 6 heures du soir, le Chef du service de Police, sur l'ordre
du Chef du Département, leur a définitivement intime l'ordre de laisser
leurs établissements fermés.
Le méme jour, le Département adressait à la Direction de Police de
Lausanne, par l'intermédiaire du Préfet, la communication suivante :
Nous vous informous que le Conseil d'Etat, dans sa séance du 30 décembre
1920, a décidé le maintien du statu quo en ce qui conserne sa décision
prise dans sa séance du 24 décembre 1920 et se refuse à apporter
une dérogation quelconque aux dispositions de l'arrétéHandelsund
Gewerbef'reihen. N° 21. 143
du 29 septembre 1920, concernant diverses mesures à prendre pour combattre
la fièvre aphteuse.
Par Lettre du 21 janvier 1921, le Préfet de Lausanne a avisé le mandataire
des recourants, qui lui avait demandé des renseignements sur les motifs
de sa décision, que s'il avait refusé la patente, c'était premièrement
en application de l'arrété du 29 septembre 1920 concernant diverses
mesures à prendre pour combattre la fièvre aphteuse et, deuxièmement,
pour nous conformer à la décision du Conseil d'Etat du 30 décembre 1920...
B. Les recourants ont, en temps utile, forme contre la décision du
Préfet, ainsi que contre les deux décisions du Conseil d'Etat des 14
et 30 décembre 1920 un recours de droit public au Tribunal fédéral. Ils
soutiennent que ces décisions sont contraires au principe de la liberté du
commerce et de l'i-ndustrie (art. 31 Const. fed.) et qu'elles constituent
également un déni de justice, c'està dire une violation du principe de
l'égalité des citoyens devant la loi (art. 4 Ccnst. ted.).
Le Conseil d'Etat a conclu au rejet du recours.
Conside'rant en droit :
, 1. Le recours, en partie du moins, apparait à première vue comme
dépourvu d'ohjet. Ce dont les recourants se plaignent, en effet, c'est que
les autorités vaudoises leur ont refusé une patente dont la possession
devait leur permettre d'exercer leur industrie à Lausanne pendant les
fétes de l'An. Comme la validità de la patente eùt été dans tous les cas
limitée au délai d'un mois, l'admission du reeours ne saurait ainsi, de
toute sacon, entrainer aucune conséquence quant aux décisions attaquées
et tout au plus pourrait-elle ètre invoquée à titre de précédent, si
les recourants devaient se retrouver dans une situation semhlable et à
supposer d'ailleurs que la disposition legale dont il s'agit soit encore
en vigueur à ce moment-là.
I 44 Stats:-echt ,
Aussi bien les recourants ne prétendent pas amener le Conseil d'Etat
à revenir sur sa decision, ni à leur accorder actuellement la patente
qui leur a été refusée. S'ils recourent, déclarent ils, c'est qu'ils se
proposent d'ouvrir action contre les autorités eantonales en cause ,
pour obtenir réparation du préjudice qu'ils disent avoir souffez't du
fait de l'arrét de leur industrie, et que leur action ne peut avoir
de chances sérieuses d'aboutir que si le Tribunal fédéral, statuant
comme Cour de droit public, prononce au préalable l'annulation des
décisions attaquées, comme contraires aux dispositions des art. 4 et
31 Const. féd. Le Conseil d'Etat répond qu'il y a lieu de voir dans
cet aveu méme une cause de rejet, attendu, dit il, qu'il ne faut pas
préjuger une action civile éventuelle. 'n
L'opinion du Conseil d'Etat ne saurait étre admisv. La question
que soulève le présent recours est uniquement celle de savoir si les
décisions attaquées doivent ou non étre envisagées comme contraires
aux dispesitions constitutionnelles invoquées. Elle ne se confond done
nullement avec celle qu'aura éveutuellement à trancher le juge civil et
ne pourrait étre examinée per lui qu'à titre de question préjudicielle,
en tant qu'il _v aura lieu de rechercher si l'acte prétenduernent
dommageable revét ou non le caractère d'un acte illicite. Or, en l'espèce,
la recevabilité du recours dépend précisément de la question de savoir si
le juge civil qui sera saisi dc l'action en dommages-intéréts s'estimera
ou non fonde à examiner la constitutionnalité des décisions attaquées.
Il n'est pas douteux que si l'action était portée directement devant
le Tribunal fédéral, ce dernier ne manquerait pas de se prononcer tout
d'abord sur ce point. Mais les recourants ont incontestablement aussi le
droit de faire valoir leur prétention devant une juridiction can-tonale.
Or, si l'on en juge par certains précédents (cf. notamment le jugement
rendu le 26 octobre 1920 par la Cour civile du canton de Vaud en la
cause KappelerHandelsund Gewerbetreiheit. N° 21. 145
contre Commune de Lausanne), il n'est nullement certain que le juge
vaudois s'estime qualifié pour apprécier la constitutionnalîté' d'une
decision de l'autorité exécutive supérieure du canton. On comprendrait
d'ailleurs, à la rigueur, que le juge cantonal se refusàt par principe à
aborder l'examen du glief d'inconstitutionnalité, alors que l'intéressé
aurait négligé de faire valoir Ses moyens devant l'instance fédérale,
précisement qualifiée pour cela.
Dans W conditions, et si l'on tient compte, d'autre part, du fait que,
quelle que soit la décision du Tribunal fédéral, le juge cantonali devra
se considérer comme lié par elle, on ne saurait prétendre que le recours
soit absolument dépourvu d'objet. L'intérét qu'il présente pour les
recourants réside précisément dans le fait que l'arrét de la Cour de droit
public peut exercer, le cas échéant, une certaine influence sur le sort
du preces civil ; cette circonstance à elle seule suffit pour conférer
au recours un intérét légitime et digne d'ètre pris en considération.
Le recours est également recevable en ce qui concerne les décisions
attaquées. Bien que deux décisions du Conseil d'Etat des 14 et 30
décembre se bornent dans la forme à énoncer un principe déjà formulé dans
l'arrèté d'u 29 septembre ou à s'y référer, il est incontesté qu'elles
se rapportaient à la requète des recourants. Elles apparaissent donc
en l'espèce comme susceptibies de former l'objet du recours an meine
titre que le refus de la patente, soit la décision du Préfet. Et s'il
est vrai que la decision du Préfet aurait pu donner lieu à un reconrs
auprès du Conseil d'Etat, on comprend qu'après les explications données
par ce magistrat, les recourants n'aient pas jugé utile d'engager cette
nouvelle procédure. Aucun grief ne saurait donc leur ètre fait de ce chef.
2. Sur le fond, l'effet des décisions attaquées a été de priver les
recourants du bénéfice d'une patente dont
A5 47 l _ 1921 19
1 46 Skatlmht
l'obtention leur était indispensable pour exercer leur activité dans
le canton (Art. 34 de la loi vaudoise du 5 mai 1899 sur la police du
commerce). Le refus de la patente constituait donc en fait une entrave
à l'exercice de leur industrie et la première question qui se pose au
regard des moyens présentés en recours est celle de savoir si cette mesure
était ou non compatible avec le principe inscrit à l'art. 31 Const. féd.
Le Tribunal fédéral a juge à maintes reprises que l'art.
69 Const. féd. qui confère à la Confédération le droit de prendre par
voie législative des mesures destinées à lutter contre les èpidémies
et les èpizooties n'avait pas pour effet de priver les cantons de
la faculté de légiférer également dans ce domaine ni meme d'ordonner
des mesures de protection plus rigoureuses que celles prévues par la
législation fédérale (cf. RO 40 I p. 164), ainsi que les arréts rendus
en les causes Zuberbühler du 28 novembre 1920 et Wirteverein des Kantons
Bern du 17 décembre 1920). De ce que le canton de Vaud se trouvait donc
incontestablement en droit de prendre certaines précautions contre
l'extension de la fièvre aphteuse, il ne s'ensuit pas toutefois que
le Tribunal federal n'ait pas qualité pour rechercher si les mesures
ordonnées sont ou non compatibles avec le principe de la liberté du
commerce et de l'industrie, car s'il est vrai que des considérations
d'hYgiène et de salubrité publique peuvent parfois l'emporter sur
l'application stricte de ce principe, il a été également jugé (cf. en
particulier RO 40 I p. 164) qu'il fallait dans tous les cas que la mesure
en question put se justifier par des motifs de police sanitaire. Si tel
n'est pas le cas, c'est à juste titre que l'intéressé peut se plaindre
d'une violation de l'art. 31 Const. féd. et les cantons ne sauraient à
ce propos se prévaloir de la réserve prévue sous la lettre d de cette
disposition.
Ainsi posé, le problème se ramène donc, en l'espèce, à rechercher si la
mesure dont on a fait application àHandelsund Gewerbefreiheit. N° 21. un
l'sségard des reeourants présentait' réellement quelque intérét au point
de vue sanitaire, autrement dit, s'il est possible _de l'envisager
sérieusement comme un moyen de lutte propre à prévenir l'extension
de l'epizootie.
Le seul motif invoqué à l'appui du refus de la patente consistait dans
le fait que les recourants n'étaient pas régulièrement domiciliés dans
le. canton. Il s'agissait, autrement dit, uniquement de l'application
d'une mesure prévue par l'art. 5 lettre c de l'arrété du Conseil d'Etat
du canton de Vaud du 29 septembre 1920, aux termes duquel le colportage
et l'exercice d'une profession ambulante sont interdits notamment aux
personnes qui n'étaient pas réguliérement domiciliées dans le canton
avant le 191 novembre 1920. Quelles que soient les raisons qui ,ont
dicté le choix de cette date, le but d'une disposition de cette nature
ne pouvait ètre, logiquement, que d'empécher le transport des baciiles
ou des germes de la maladie d'un endroit contaminé à un endroit non
eontaminé. Que les autorités cantonales se soient à cet égard spécialement
préoccupées du danger que pouvaient présenter les colporteurs ou les
forains, dont le métier comporte des déplacements frequente, on le
concoit aisément. Ce que l'on n'arrive pas a com-
,prendre, par contre, c'est l'importance que le Conseil
d'Etat a attribué à la notion de domicile. Le fait, en effet, qu'un
individu possède son domicile dans une eertaine localité du canton,
ne constitue en soi mème aucune garantie qu'il ne se rendra pas dans
une localité ou un endroit contaminés, sinon dans l'intérieur du canton,
puisque le cas est spécialement prévu par une autre méme à l'étranger. Il
est assez rare, en effet, qu'un forain Dorne son activité aux limites
du canton. Où que se trouve son domicile, son métier l'entraîne le plus
souvent sur tout le territoire de la Confédération et parfois méme au
dela des frontières du pays, au hasard des
148 Steam echt.
foires et des festivités. Du point de vue sanitaire, par conséquent,
ce qui importe, ce n'est pas l'endroit'où il a son domicile, mais
celui d'où il vient. A s'en tenir au cas particulier, on constate,
par exemple, que Engel, qui a son domicile à Zurich, venait de Bäle,
ainsi que son materie], que Heuscher, qui est domicilié à Saint-Gall,
venait de Berne et que Schiffmann arrivait de Flawyl. bien qu'il eùt son
domicile a La Chaux de Fonds. D'après la réglementation instituée par
l'arrété du 29 septembre 1920, on arrive au contraire à ce résultat,
que de deux forains, venant de la meine lecalité d'un canton voisin,
l'un pourra sess voir refuser la patente, parce qu'il n'avait pas son
domicile régulier dans le canton avant le ist novembre 1919, tandis que
l'autre, simplement parce qu'il remplit cette condition, pourra venir
s'installer librement dans le canton de Vaud avec tout son personnel et
son bagage. Il est evident qu'une telle différence de traitement ne peut
se justisier'par de seuls motifs de police sanitaire.
Le Conseil d'Etat a tente, il est vrai, d'étayer sa decision en faisant
valoir qu'il n'était exactement renseigné sur l'étendue de la fièvre
aphtcuse que dans les limites du territoire cantònal et que s'il lui
était facile de régler la question ,pour les personnes domiciliées
dans le canton, il n'en était pas de méme de celles qui avaient leur
domicilesi ailleurs. Cette observation peut étre fondée en fait, mais,
comme il résulte de l'exemple ci dessus, ne justifie en aucune facon
le choix du critère adopté. Tout au plus aurait elle pu conduire à
une distinction suivant que le colporteur ou le forain viennent d'une
commune du canton ou d'un endroit situé hors du canton. On ohjectera
peut-etre qu'il est difficile d'exercer un contròle efficace sur les
allées et venues de ces personnes. En ce qui concerne le colporteur,
l'objection paraît, il est vrai, fondée, mais aussi bien le Tribunal
fédéral a t il également jugé que les autorités cantonales pouvaient,
pour des motifs de policeHandelsund Gewerbefrelhelt. N° 21. 149
sanitaire, interdire meme complètement l'exercice de ce genre de
commerce. Pour ce qui a trait aux forains, la question est plus délicate,
car il ne semble pas, à première vue du moins, qu'il soit absolument
impossible de les soumettre à un contròle, c'est à-dire de s'enquérir
de l'endroit d'où ils viennent et de rechercher si cet endroit se trouve
en territoire contaminé. De toute facon, la question ne présente pas un
intérét décisif en l'espéce, puisque aussi bien les décisions dont est
recours reposent sur de tout autres motifs, c'est à-dire uniquement le
fait de l'absence d'un domicile dans le canton. ll ne semble, d'ailleurs,
nullement qu'en ce qui concerne les forains qui ont obtenu la patente, les
autorités cantonales se soient préoccupées de savoir de quelle Iocalité
ils arrivaient et l'on peut tenir pour constant que les recourants
n'étaient pas les seuls à avoir franchi les frontières du canton.
A s'en tenir exclusivement au motif invoqué, il résnlte donc bien de ce
qui précéde que la mesure prise à l'égard des recourants ne présentait
aucun intérét pour la lutte contre l'épizootie. Les décisions attaquées
apparaissent donc bien ainsi comme contraires au principe inscrit à
l'art. 31 Const. féd. et le recours doit par conséquent ètre déclaré
fondé.
. Dans ces conditions, il serait évidemment superflu de rechercher si ces
mémes décisions impliquent également, comme les recourants l'ont prétendu,
une violation du principe de l'égalité des citoyens devant la loi.
Le Tribunal fédéral pronome :
Le recours est admis. En conséquence, les décisions du Conseil d'Etat
du canton de Vaud des 14 ct 30 dé--
' cembre 1920, de meine que la decision rendue par le
Préfet de Lausanne au sujet des trois demandes de patente, sont annulées.