604 A. Oberste Zivilgerichtsinstauz. [. Materiellrechtliche
Entscheidungen.

Quant à la défense faite au défendeur d'employer à l'avenir le dit
emballage, elle doit uaturellement etre confirmée.

Par ces motifs, Le Tribunal fédéral prononce:

Le recours principal est partiellement admis. En conséquence, le jugement
rendu le 13 mai 1910 par le President suppléant du Tribunal correctionnel
du district de La, Chaux(le-Fonds est modifié comme suit :

1. Le défendeur est condamné à payer à la... partie demanderesse la
somme de mille francs (1000 fr.) avec iutérèt à 5 00 dès l'introduction
de la. demande, soit 19 mai 1906.

2. Les emballages incrimiués seront confisqués.

3. Défense est faite au defendeur d'employer à l'avenir le dit
emballage. ·

87. Arr-St du 18 novembre 1910, dans la came Hirsch, déf. et rec.,
contre Rueff, dem. et int.

Oontrefaeon d'une ma:-que de fabrique (art. 24,1it S et 25 LF du 26
sept. 1890).,Action reconventionnelle en nullité de la. marque déposée :
Prétendue usurpation de cette mal-que? Présomptien que le premier déposant
de le mai-que en est le véritable ayant-droit : art 5 LF Défaut d'usage
pendant trois ans (art. 9 LF)? La preuve que la marque a été employee et
au début, dès son enregistrement, et dans le dernier temps précédant le
proeès erée la présomption de son usage continu.Dénomînation de fantaisie
tombée dans le domaine public (art. 3 LF) ? Le prétendu fait qu'il serait
d'usage dans un pays (Etats-Unis) d'apposer sur les montres un prénom
féminin n'est pas de nature à reudre impropres à servir de marque de
fabrique pour montres un prénom féminin déterminé ( Cora ) qui n'a pas
encore été employé de cette fagon. La notion de l'imitat-ion implique
une question de droit pour la solution de laquelle le juge n'est pas lié
par l'appréciation des experts. Responsabilité civile du contrefacteur
coupable de simple négligence (art. 25 al. 3 in fine LF).Berufungsinstanz
: 5. Fabrikund Haudelsmarken. N° 87. 605

A. Le 25 avril 1891, la maison Rueff frères, à la Chaux-de-Fonds, a
déposé au bureau fédéral de la propriété intellectuelle une marque de
fabrique qui a été transmise le 26 février 1896 sous n° 8134 à Maurice
Rueff, successeur de la. dite maison. Cette marque est composee des mots
Lady Cora inscrits en gros caractères entre deux cercles con-centriques;
les deux mots sont séparés par deux petites croix; au centre du dessin se
trouve une petite étoile. La marque & été déposée pour boîtes, cuvettes,
cadrans,mouvements, étuis et emballages de montres . _

Ayant appris qu'un autre fabricant de la Chaux-de-Fonds, Achille Hirsch,
avait febriqué et vendu (à destination des Etats-Unis) des montres
port-ant sur le cadrau le mot Cora , Ruefi' lui & ouvert action en
conclusion à... ce qu'il plaise au tribuna]:

1. Prononcer que Hirsch a imité sans droit la marque n° 8134 et que
c'est sans droit qu'il & apposé sur ses montres le mot Gora;

2. Interdire à Hirsch l'emploi du mot Cora sur les montres, parties de
montres ou leurs embailages.

3. Le condamner à 4000 francs de dommages-intéréts à 5 % des
l'intreduction de la demande.

Hirsch & conclu avec dépens à ce qu'il piaise au tribunal:

1. Principalement, déclarer la demande mal fondée.

2. Donner acte au demandeur que par pur bon vouloir le défendeur
s'abstiendra à l'avenir d'apposer le nom Cora sur des mo tres et parties
de montres.

Recouventionnellement :

3. Ordonner lu radiation de la marque déposée sous n° 8134.

Subsidiairemeut à la conclusion 3 :

4. Ordonner Ia suppression des mots Lady Cora figurant dans la marque
déposée sous n° 8134 :

Par jugement des 8 mars et 7 mai 1910, le Tribunal cane tonal de
Neuchàtel a. alloué au demandeur ses conclusious 1 et 2 et a de plus
condamné Hirsch à lui payer, à. titre de dommages intérets, la. somme
de 300 francs avec intéréts à

606 A. Oberste Zivilgerichtsinsîanz. ]. Materiellrechtliche
Entscheidungen.

5 0/0 des l'introduction de la demande, plus 200 francs sausintéréts a
teneur de l'art. 277 Cpc neuchatelois.

Hirsch a, en temps utile, recouru au Tribunal federal contre ce jugement
en concluant à liberation des conclusions de la demande et à. la radiation
de la marque déposée par M. Rueiî sous n° 8134.

Statua/nt sur ces faits et conside'rant en droit :

1. Sans contester la regularité de l'enregistrement de

la marque et de sa transmission au demandeur, le défeudeursi

par une série de moyens qu'il y a lieu d'examiuer successivement -prétend
que M. Ruefl ne peut invoqner la protection legale.

Tout d'abord il soutient que la maison Eichberg s'est sei-vie aux
Etats-Unis,il y a fort longtemps, des mots Lady Cora , que c'est saus
droit que Rueii frères ont déposé comme marque'ces mots qui ne leur
appartenaient pas et que le demandeur ne peut donc se mettre au bénéfice
d'un dépòt qui constitue une usurpation illicite.

Sur ce point, l'instance cantonale a constaté en fait que

c'est avec le consentement de la maison Eichberg, soit de-

ses successeurs Stein & Cie, que Ruff frères ont déposé en leur nom la
marque Lady Gora . Il résulte de cette constatation, qui n'est point
en contradictiou avec les pièces du dossier, que les prétendus droits
préférabies de Eichberg ne peuvent étre opposés au demandeur puisqu'ils
lui ont été cédés. Le défendeur n'a donc pas réussi a détruire la
présomption établie a l'art. 5 de la loi federale sur les marques,
suivant laquelle le premier déposant d'une marque en est aussi le
véritabie ayant-droit .

2. En second lieu, Hirsch prétend que le demandeur est dechu de la
protection legale par le motif prévu a l'art 9 de la loi sur les marques
(défaut d'usage pendant trois ans). En procédure il &. ailégué que Ruefl
n'avait jamais exploité la marque et que, dans tous les cas, depuis dix
ans il ne l'evait plus utilisée. Cette afflrmation s'est révélée comme
absolumentinexacte; il est en effet constant que la marque Lady Cora a
été employee sans interruption jusqu'enBerufungsinstanz : 5. Fabrikund
Handelsmarken. N° 87. 607

1898 et depuis 1902. Vu les preuves fournies par le demandeur, Hirsch
a alors modifié son argumentation et il a soutenu en plaidoirie devant
l'instance cantonale que, au moins en 1899, 1900 et 1901, la marque
n'avait pas été exploite'e. Le tribuual cantoria] a estimé avec raisou
que ce fait n'était pas établi. Il s'agit, il est vrai, d'un fait négatif
dont on ne peut exiger que la preuve absolue soit rapportée par celui
qui l'articule. Mais le défeudeur n'a pas meme rendu vraisemblable son
allégation et, d'autre part, le demandeur ne pouvait etre tenu d'en
démontrer l'inexactitude puisque c'est seulement apres la clòture de
la procédure probatoire que Hirsch lui a donné la forme qu'elle revét
aujourd'hui. Ruefl, auquel jusqu'a ce moment on objectait que la marque
n'avait jamais été employee et que dans tous les cas elle ne l'était
plus depuis dix ans, pouvait se contenter d'établir qu'il l'avait
exploitée dès le début et qu'il l'exploitait encore dans les années qui
ont précédé le procès; en rapportant cette preuve il a créé du méme coup
une présomption d'usage continu. Hirsch n'a pas détruit cette présomption
et il est inutile dès lors de rechercher si à supposer que veritablement
le demandeur ent cessé d'utiliser la marque de 1899 è, 1902 le defendeur
pourrait encore invoquer ce fait ou si l'on ne doit pas plutòt admettre
que, par suite de la reprise de l'exploitation depuis nombre d'aunées,
l'exception de déchéance est elle-meme frappée de forclusion.

3. Enfin le défendeur dénie au demandeur le droit d'employer comme marque
les mots Lady Cora en prétendant que ces mots sont tombés dans le
domaine public par suite de i'usage qui existe, notamment en Amérique,
d'apposer uu prénom féminin sur les moutres, soit pour en faciliter la
vente aux personnes ayant ce prénom, soit pour permettre au négociant
de distinguer les différents genres de montres qui se trouvent dans
son catalogue.

La loi federale considère comme propriété publique et par conséquent comme
impropres a servir de marques de fabrique les dénominations génériques,
c'est-à-dire celles qui, au lieu d'individualiser un produit en le
rattachant à. tel

808 A. Oberste Zivilgerichtsinstanz. I. Materiellrechtliche
Entscheidungen.

fabricant ou àtel commercant, se bornent à en indiquer la nature ou
les qualités et en constituent ainsi la désignation nécessaire. Une
dénominatiou arbitraire à l'origine peut devenir générique par l'usage
qui en est fait ; du moment où elle est tombée dans le domaine public,
du moment où l'on sis'en sert pour designer, non plus seulement le
produit special auquel elle était attachée au début, mais d'une facon
générale des _choses de la meme espèce, l'usage exclusif ne peut plus
en etre revendiqué par personne.

Mais il ne résulte pas des faits de la cause que ces principes justifient
la conclusion que prétend en tirer le reconrant. Les mots Gora ou Lady
Cora ne constituent pas la désignation nécessaire d'une montre on d'une
partie de montre et l'usage qui existerait aux Etats-Unis d'apposer
sur les montres un prénom féminin n'est pas de nature 'à rendre tous
les prénoms féminins impropres à servir de marques de fabrique pour ce
genre d'articles. Il est possible que, par suite de cet usage, certains
prénoms employés communément pour designer telles espèces de montres,
ou toutes espèces de montres, soient tombées dans le domaine public et
ne puissent plus par conséquent etre employees comme marques. Mais rien
ne permet de supposer que ce soit le cas du prénom Cora (avec ou sans le
pré'fixe Lady ). Le défendeur n'a pas prouvé que ce prénom particulier
ait jamais été apposé sur d'autres montres que celles fabriquées par
la maison Rueff et les experts déclarent qu'il n'a aucune notoriété
quelconque en matière horlogère. Il se caractérise donc bien comme une
dénomination de fantaisie pouvant servir de marque de fabrique.

4. Les concinsions du recourant tendant à la radiation de la marque du
défendeur devant ainsi ètre écartées, il reste à chercher si cette marque
a été imitée illicitement par Hirsch. Cela est incontestable. L'élément
essentiel de la marque est le nom Cora ; c'est ce nom qui attire
l'attention de l'acheteur et qui reste grave dans son esprit. L'emploi
seul de ce mot doit donc ètre considéré comme illicite et il importe peu
des lors que le défendeurBerufungsinstanz : 5. Fabrikund Bandelsmarken. N°
87. 609

n'ait pas reproduit en outre l'élément figuratif de la marque et le
préfixe Lady , qui ne joueut qu'un role tout à fait accessoire. Les
experts désigués par l'instance cantonale sont, il est vrai, d'un avis
different sur ce point; mais la question de savoir ce qui constitue une
imitation an sens de la loi fédérale sur les marques de fabrique est
une question de droit pour la solution de laquelle le Tribunal fédéral
n'est pas lie a l'appréciation des experts.

C'est donc avec raison que le tribuna] cantonal a interdit à Hirsch
d'employer à l'avenir le mot Cora pour ses produits.Le défendeur est,
de plus, responsable du dommage que l'imitation illicite de la marque
du demandeur a causé a ce dernier; il a en effet commis une faute en ne
recherchant pas avec un sein suffisant si le nom Lady Cora n'était pas
déjà utilisé comme marque; or il n'est pas nécessaire que le contrefacteur
ait agi avec dol pour que sa responsebilité civile soit engagée; elle
existe meme en cas de simple kaute (LF de 1890, art. 25 al. 3; BO 35 II
p. 462).

Il n'est pas possible de fixer avec précision le montant du dommage subi
par le demandeur; l'instance cantonale l'a -évalué ex aequo ez bono
a 500 fr., en comprenant dans ce Chiffre une somme de 200 fr. allouée
en vertu du Code de procédure civile neuchàtelois (art. 377), pour les
honoraires d'avocat demeurant à la charge du demandeur. La somme de 300
fr. accordée à titre de dommages intérèts en sus de cette indemnité de
procédure, ne peut pas étre regardée comme excessive.

Par ces motifs, Le Tribunal fédéral prononce : Le recours est écarté.
Information de décision   •   DEFRITEN
Document : 36 II 604
Date : 13. Mai 1910
Publié : 31. Dezember 1910
Source : Bundesgericht
Statut : 36 II 604
Domaine : BGE - Zivilrecht
Objet : 604 A. Oberste Zivilgerichtsinstauz. [. Materiellrechtliche Entscheidungen. Quant


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Trié par fréquence ou alphabet
montre • domaine public • tribunal fédéral • dommages-intérêts • calcul • fabricant • question de droit • ayant droit • titre • prolongation • décision • membre d'une communauté religieuse • responsabilité de droit privé • protection des marques • neuchâtel • code de procédure civile suisse • illicéité • produit d'imitation • suppression • déclaration • communication • procédure civile • preuve absolue • plaidoirie • tombe • vue • quant • acheteur
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