M A. Entscheidungen des Bundesgerichls als oberster Zivilgerichtsinstanz.

Or, en l'espèce, l'intention du propriétaire du gege de transférer au
créancier la possession mediate de la chose est établie par l'acte du
13 mars 1903, dans lequel la defenderesse déclare donner en garantie au
créancier de son fiancé les titres déposés chez Pictet & Cie. L'intention
du créancier d'acquérir cette possession médiate résulte du fait meme
qu'il a accepté cette déclaratiou. Quant à l'avis à donner au détenteur
immédiat, soit à Pictet & C, il semble qu'il n'a pas été donné par
la défenderesse elle-meme, mais par le créancier. Si en principe on
peut soutenir, comme pour la constitution d'un gage postérieur d'une
chose déjà engagée (art. 217
SR 220 Erste Abteilung: Allgemeine Bestimmungen Erster Titel: Die Entstehung der Obligationen Erster Abschnitt: Die Entstehung durch Vertrag
OR Art. 217 - 1 Ist ein Grundstückkauf bedingt abgeschlossen worden, so erfolgt die Eintragung in das Grundbuch erst, wenn die Bedingung erfüllt ist.
1    Ist ein Grundstückkauf bedingt abgeschlossen worden, so erfolgt die Eintragung in das Grundbuch erst, wenn die Bedingung erfüllt ist.
2    Die Eintragung eines Eigentumsvorbehaltes ist ausgeschlossen.
CO) que l'avis en question doit émaner du
propriétaire de la chose, il est des cas dans Iesquels le créancier
doit etre considéré comme agissant au nom du propriétaire, lorsque,
par exemple, il a été convenu entre parties de procéder ainsi ou que
le propriétaire était d'accord que l'avis fùt donné par le créancier
(cf. arrèt rendu par le Tribunal federal les 5 et 11 octobre 1895, dans
la cause Banque cantonale vaudoise c. Vancher, RO 21 p. 1082 et suiv.,
surtout consid. 4 p. 1101).

L'accord de la défenderesse sur la maniere dont il a été procédé en
l'espèce ressort, ainsi que l'instance cantonale l'a admis, de l'ensemble
des circonstances de la cause. La lettre du 2 mars adressée par demoiselle
Huguenin à son fiancé montre qu'elle voulait faire sen possible pour
l'aider à vaincre les difficultés pécuniaires dans lesquelles il se
débattait. Elle s'en remettait a lui et à Ossent pour trouver les moyens
pratiques d'arriver à ce but, autorisait son fiancé ä. montrer la lettre
du 2 mars à des tiers et lui donnait en quelque sorte carte blanche. Plus
tard, elle sjgne une déclaration par laquelle elle s'engage à répondre
pour une summe qu'elle laisse le soin à son fiancé et au créancier
(ie determiner, donnant ainsi un véritable blanc-seing. Puis elle s'est
rendue à Genève avec son fiancé chez Pictet & Cie. De tout cela il kaut
conclure que la défenderesse, après avoir signé la declaration du 13 mars
1903, entendait remettre à son fiancé et au créancier Ossent le sein de
remplir les formalités nécessaires pour rendre valable son engagement.

VU. Erfinduugspatente. N° 83. 631

Enfin, si Pictet & Ciécrivaient le 9 mai 1903 à demoisselle Huguenin
qu'ils ne pouvaient accepter sa declaration, sic'est que, par erreur, ils
creyaient qu'il s'agissait d'une cesSion des titres et qu'ils rappelaient
que ces titres ne pouvalent etre remis à des tiers sans le consentemeut
de l'usu'fruitière. Ils ont, par contre, informe le créancier Ossent
qu'ils ne se dessaisiraient des titres qu'à. bonne enseigne, et parlà
ils admettaient detenir pour le créancier. D'ailleurs la declaration
d'adhésion de la part du détenteur du gage n'est méme pas uécessaire pour
la validité du gage; il suffit que par le fait de l'avis à lui donné
le détenteur de l'objet ait requ l'ordre de le détenir à l'avenir au
nom du créancier gagiste à qui le propriétuire de cet objet l'a engagé
(cf. l'arrét cité plus haut, RO 21 p. 1101).

]] résulte des considérants qui précèdent que le gage consenti par
la défenderesse & été valablement constitué et que les conclusions
liberatoires de la défenderesse doivent etre :rejetées.

Par ces motifs,

le Tribunal fédéral prononce: Le recours est écarté et le jugement
attaqué est confirmé.

VII. Erfindungspatente. Brevets d'invention.

88. Arrèt du 16 octobre 1909 dans la cause Rouiller, de'f. et rec.,
centre Torriani & Sie, dem. et int.

Invention susceptible d'ètre brevetée conformément a la LF sur les
brevets d'invention du 29juiu 1888 (machine à polir la creusur'e de
pier-res fines}. Défaut de nouveauté de l'invention brevetée, art. 10
chifi're 1 LF : invention suffisamment connuen au sens de l'art. 2 LF.

A. Le 22 mars 1902, les demandeurs Torriani & Cie se sont·kajt délivrer
par le Bureau federal de la propriété intellectuelle, à. Berne, un brevet
d'invention, n° 26297, pour une

632 A. Entscheidungen des Bundesgerlehts als oberster
Zivilgerichtsinstans.

machine a polir la creusure dle pierres fines . Ils out in-

diqué comme suit l'objet de leur invention dans les quatre--

revendications contenues dans l'exposé d'invention joint au

bievet . 1. Une machine a polir la creusure de pierres fines, ca-

ractérisée par un outil polisseur rotatif, ayant une tete en

V

U

de rotation de l'outil et qui est porté par un premier sup-

B

V

la creusure d'une ierre destinée à etre fixée sur un seP

cond support, de telle faeon que l'axe de l'outil coupe l'axe'

du second support;

2° Une machine telle que revendiquée sous chiffre i,...

dont l'outil polisseur rotatif est pourvu d'une tete sphé rique;

3° Une machine telle que revendiquée sous chiiîre 1,

dont l'outil poiisseur rotatif est pourvu d'une tète sphé-

ro'idale. 4° Dans une machine telle que revendiquée sous chiff. 1,

le premier support ayant une partie @ fixée sur la verge d'un.

tour et une partie pivotante ] peitant l'outil polisseur ro tatif.
L'exposé de l'invention contient en outre les renseigue-

ments suivants sur le genre du travailà effectuer et sur le-

but de l'invention .

Ce travail (polissage de la creusure de pierres fines) se fait jusqu'ici
de la maniere suivaute: La pierre creuse à polir est fixée axialement
sur l'extrémité de la breche ro tative d'un tour et un outil en cuivre
ou autre matière, tenu a la main ou por-té par une broche non rotative
placée dans le prolongement de la broche, est pressé dans la.

v

v

autre poudre ou pate à polir. Or, la vitesse de rotation de la pierre
ainsi montée sur le tour varie du fonds aux bords de la creusure de
la pierre, étant nulle en son point central et maximale sur les bords;
il en résulte que le polissage

& U V U &

&

di

forme de corps de revolution dont l'axe coincide avec l'axe--

port destiné à permettre l'introduction dela dite tete dans.

creusure, après avoir été garni de diamantine ou d'une--

obtenu de la sorte est nul au centre et va en angmentantss

Vil. Erfindungspatente. N° 83. 633

vers les bords de la crensure. Il arrive meme fréquemment qu'il se forme
un petit teten au centre de la creu Sure... Au surplus, eu vertu de la
force centrifuge, la poudre ou pate a polir est constamment projetee du
centre vers les bords de la creusure, ce qui rend le polissage encore
plus difficile. La machine qui forme l'objet de la présente invention
est destinée à remédier aux deux inconvenients relatés ci-dessus.

B. Ayant appris que le défendeur Rouiller utilisait une machine
constituant, à. leur avis, une contrefacon de la leur, Torriani & Cie
ont requis de la Cour de justisice civile de Genève la nomination d'un
expert charge de dire si la machine Rouiller est une contrefaqon de la
machine Torriani.

L'expert Thury a déposé le 3 octobre 1906 un rapport dans lequel il expose
que les points indiqués dans la revendication 1 soit, le fait que l'outil
porte-pierre et l'outil polisseur sont l'un et l'autre rotatifs et que
leurs deux axes se coupeut sont cemmuns aux deux machines; le but de
cette disposition est bien celui décrit dans le brevet 26297. Il y a
une divergence en ce qui concerne le support de l'outil polisseur qui,
dans la machine Torriani, pivote tout entier, tandis que dans la machine
Rouiller il est fixe, ajusté une "fois pour toutes dans la position la
plus favorable : c'est l'ou--

V'

ende

U

til polisseur seul qui se déplace à la main pour présenter la

tete à l'attaque de la pierre.

Torriani & Cie ont assigné Rouiller pour :

1° Ou'ir dire que la machine Rouiller, décrite par M. Thury, constitue
une contre fagon de celle hrevetée sous n° 26 297.

2° S'entendre condamner à leur payer la somme de 10000 fr. a titre de
dommages-intéréts.

3° Ou'ir ordonner la confiscation et la destruction de la machine
expertisée et de toutes celles analogues en la possession de Rouiller.

4° Ou'ir commettre un hnissier à ces fins.

5° S'enteudre faire défense de fabriquer, vendre ou utiliser a l'avenir
des machines semblabics in celle qui fait l'objet du brevet 26 297.

634 &. Entscheidungen des Bundesgeriehts als oberster
Zivilgerichtsinstanz.

6° Ou'ir ordonner la publication du jugement à intervenir dans tous
les journaux de Genève et dans la Feuille des avis officials aux frais
de Rouiller.

7° S'entendre condamner aux dépens.

C. Rouiller a conclu à ce que la Cour

1° dise que la prétendue invention de Torriani & Gi° n'est. pas nouvelle
et ne peut donner lieu à un brevet.

2° déclare nu! et de nul effet le brevet n° 26297 que Torri'ani et Cie
se sont fait délivrer le 22 mars 1902.

3° rejette la demande de Torriani & C.

4° condamne Torriani & Cie à lui payer 500 fr. à titre de'

dommages-intérèts avec les dépens.

Il a motivé ces conclusions en disant en substance que sa machine n'était
pas une imitation de la machine Torriani,. que celle-ci ne constituait
pas une invention au sens de la. loi et qu'au eni-plus, lors de la prise
du brevet, le principe" en était déjà cormu et réalisé; le caractère de
nouveauté de l'invention manquerait donc en tout état de cause.

D. La Cour a commis trois experts charges :

1° De décrire la machine Torriani, de dire si elle constitue une
invention, si elle produit un effet nouveau et utile, si, àla date de
demande du brevet, mars 1902, elle était suffisamment connue en Suisse
pour pouvoir etre exécutée par unhomme du métier.

2° De décrire la machine Rouiller et de dire si elle est une imitation
de la machine Torriani.

Les experts ont déposé leur rapport le 5 décembre 1907. Ils indiquent
comme machines antérieures a la machine Torriani et comme pouvant
présenter des analogies avec celle-ci notamment les machines sui-vantes: .

1° Machine Naville décrite dans la lettre suivante de M. Naville du 14
novembre 1906:

Je puis affirmer qu'en 1900-1901 nous avons utilisé une machine
pour le polissage des creusures des contre-pivots saphir servant à
l'industrie. Cette machine était composée de deux parties: l'une... était
fixée sur l'étahli, elle avait naturellement un axe qui tournait
rapidement... au bout de

Vil. Erfindnngspaiente. N° 83. 635-

cet axe il y avait une pince américaine pour fixer la pierre. L'autre
partie se composait simplement d'un mécanismeou support dans lequel était
fixe également un arbre ou axe aussi mù par une courroie. Ce support
pouvait se fixer à volente sur l'établi ou se tenir a la main dans la
position la plus favorable pour le polissage des creusuresss qui est
naturellement de préseuter la breche à polir en biais dans Ia creusure
de la pierre. L'axe qui portait l'outil' à polir coupait donc l'axe qui
portait la pierre à. un degré variable comme l'entendait le polisseur.

Quatre ouvriers, dont les déclarations sont transcrites au rapport
affirment avoir vu cette machine chez M. Naville.

2° Machine Biirkle, dont les experts déclarent qu'elle est semblable a
la machine Torriani.

3° Machine de l'Ecole d'horlogerie de Genève.

4° Machine Junod, à anens, composée de deux axes derotation inclinés
l'un sur l'autre, tournant en sens inverse et dont l'un porte la pierre
et l'autre le polissoir.

Les experts ajoutent que ces machines ont en général été tenues secrètes,
mais qu'elles ont cependant pu etre connuessi de quelques ouvriers. Puis
ils concluent de la facon suivaute :

La machine de M. Torriani a pu etre inventée parlui sans qu'il connùt
les machines antérieures, faute de publicité. La question de savoir
si dans ces conditions il s'agit d'une invention brevetable est une
question de droit... La machine produit un effet utile...; elle produit un
progrès technique. Nous ne pouvons dire s'il s'agit d'un effet. nouveau,
de parties originales, ni Si la combinaison est lerésultat d'une idée
creatrice, à. cause des machines antéricures citees ci-dessus, dont elle
constitue par rapport à quelques-lines un perfectionnement....

La machine (Rouiller) comporte deux axes tournant en sens inverse dont
l'une porte la. pierre et l'autre le po lissoir....

Les machines (Torriani et Rouiller) sontsemblables en. ce qui concerne
les'deux points suivants:

8 di U dI

U

UVVVVUUUU

v

836 A. Entscheidungen des Bundesgerichts als oberster
Zivilgerichtsinstanz.

a. Les deux axes tournent en sens inverse et font un si angle entre eux. _

b. Le polissoir est mobile; la pierre est fixée sur Faxe tournant fixe.

Les machines different par les points snivants :

c. La machine Torriani utilise un mouvement angulaire pour éloigner
et rapprocher le polissoir de la pierre a polir, la machine Rouiller
utilise un mouvement recti ligne.

d. Le brevet Torriani mentionue que i'outil poiissoir... est termine
par une Sphere. M. Bouiller emploie plutòt une tige cylindrique non
travaillée.

Nous ne mettons aucune importance à ce fait du polis soir à. tete
sphérique ou non; car l'outil est bien plus teudre que la pierre et
prend tout de suite la forme de la creusnre, en général sphérique. -

Pour antant que Ia machine Torriani peut étre estimée nouvelle, la
machine Rouiller l'imite dans sa conception générale, mais elle en
diiière sur le mode de mouvement du polissoir....

E. Au cours des enquètes ordonnées par la Cour, deux des experts et de
nombrex témoins ont été entendus.

On peut relever ce qui snit dans leurs dépositions :

L'export Vulliéty estime que le principe de la machine Torriani était déjà
connu; c'est le meme que celui qui est "réalisé dans la machine Junod.
L'ouvrier Rouge a travaillé avec la machine Naville : c le polissoir était
fixé à I'établi au moyen d'un crochet et fonc tionnait avec la courroie
de transmission. Forcément les axes se croisaient quaudeon se servait du
polissoir.... Les axes tournaient en sens inverse. Junod a collaboré à
l'invention de la machine Junod en 1895-1896. Il declare : D'après moi,
la seule difference qu'il y ait (entre les machines Junod et Torriani),
c'est que s le polissoir de la machine Junod peut polir la pierre avec _
un mouvement de gauche à droite et de haut en bas ou excentrique, tandis
que le polissoir dela machine Torriani

9

U

eVI}. Erfindungspatente. N° 83. 637

s'emploie contre la pierre sans pouvoir faire le mouvement :
excentrique.... Pendant la vie de M. Junon, la machine a été tenue très
secrète. 11 ne sait cependant si les quatre -ouvriers qui travaillaient
avec lui ont tenu le secret.

Menthonnex a travaiiié avec la machine Naville. Tous les ouvriers
pouvaient voir fonctionner cette machine, aucune recommandation n'avait
été faite à ce sujet.

Chapuis a également travaillé avec cette machine. ll dé-clare : Les
deux parties de la machine marchaient avec une transmission. Les deux
axes étaient fixes; ils arri vaient a se croiser par le balancement du
tuyau du polis) SOll'.

Klemenz : Dans la machine Naviile les deux arbres tour: naient en
sens inverse.

L'export Ghavannes estime que le brevet Torriani est va,ia'oie
indépendamment de la question d'antériorité.... Sons réserve de la
question de publicité et de la date, la ma chine J unod à Lucens serait
une antériorité.

Jnnod fils declare que du vivant de sen pere cinq ou six si ouvriers
travaillaient a cette machine; on leur avait recommandé le secret.

Naviile confirme sa declaration écrite : Cette machine se trouvait
dans mon bureau où tous mes ouvriers pouvaient la voir. J'en avais 25
ou trente, presque tous ont essayé cette machine, je l'ai gardée 6 on
8 mois ; c'était un essai; _ comme les ouvriers n'étaient pas contents
de la concor rence que cette machine pouvait leur faire, nous l'avons
renvoyée... (à NeW-York).

F. Par arrét du 29 mai 1909, la Cour de jnstice civile :a ordonué la
confiscation et la destruction des machines Rouiller comme constituant une
controfacon de la machine P. Torriani & Cie, brevetée le 31 aoùt 1903,
n° 26297, a fait défense à. Rouiller de fabriquer, vendre ou utiiiser a
l'avenir des machines semblables et l'a condamné à. payer a Torriani &
Cie la somme de 1500 fr.

La Cour a admis que la machine Torriani constituait une finvention,
que Rouiller n'a pas réussi à prouver qu'avant

A5 35 n _ 1909 43

638 A. Entscheidungen des Bundesgerichts als oberster
Zivilgerichtsiustanz.

1902 l'application mécanique du travail de polissage des pierres
industrielles était déjà tombé dans le domaine public. C'est sans droit
que Rouiller a copié la machine Torriani.

Il v a lieu de relever dans cet arrèt que la Cour a écarté du débat
la photographie de la machine Bürkie, en application de l'art. 71 Cpc,
Rouiller n'ayant pas produit cette photographic aux demandeurs et ceux
ci n'ayant pas été dans la possibilité de s'en expliquer.

G. C'est contre cet arrèt que Rouiller a, en temps utile,. recouru au
Tribunal federal en concluant à ce qu'il plaise à celui-ci : '

Annuler l'arret rendu par la Cour de justice civile du canton de Genève,
et cela fait :

1° Dire que la prétendue invention de Torriani & Cie n'est pas nouvelle
et ne pouvait donner lieu à brevet.

2° Déclarer nul et de nul effet le brevet n° 26297 que ss

Torriani & Cie se sont fait délivrer le 22 mars 1902. 3° Rejeter toutes
les demandes de Torriani &: Cie contre Rouiller.

Stamani sur ces fails et considérané en droit :

1. La première question qui se pose est celle de savoir si la machine
pour laquelle Torriani & Cie ont pris un brevet eonstitue une invention
, au sens que la loi attachea ce terme, c'est à-dire si elle a apporté
une solution nouvelle, originale, d'un problème technique. Il s'agit
donc tout d'abord de rechercher en quoi consistait le problème.

Dans leur exposé d'invention, les demandeurs expliquent que le polissage
de la creusure des pierres fines s'effectue en général en pressant un
instrument polisseur non rotatif dans la creusure de la pierre fixée
sur une breche rotative...

Ce procédé présente deux inconvénients : la vitesse de rota-

tion étant nulle au point central de la creusure, le polissage

à ce point central est nul lui aussi; il se forme donc un teton au
centre de la crensure. En outre, en vertu de la force centrifugo, la
poudre à polir qui garnit le polissoir est rejetee sur les bords de la
creusure. Il résulte de ces deuxVil. Erfindungspatente. N° 83. 689

inconvenients un poljssage irrégulier, soit plus imparfait à mesure
qu'on se rapproche du centre de la creusure. Le problème consistait
donc à découvrir un moyen de supprimer les deux obstacles naturels qui
s'opposaient à un polissage régulier. Il s'est trouve résolu le jour où
l'on a construit une machine composée d'un outil porte-pierre et d'un
outil polisseur l'un et l'antro rotatif et dont les axes se coupaient,
de maniere à ce que l'outil polisseur rotatif attaquåt de biais la
creusure. Il fallait la réunion de ces deux conditions rotation des deux
outils et axes se coupant pour que le point mort - soit le point où le
polissage ne se falsait pas fut supprimé : si les axes des deux outils
s'étaient coupés sans d'ailleurs que l'ontil polisseur fut rotatif,
il serait denleuré un point mort au centre de la creusure pnisque
le point où la vitesse de rotation de la pierre est nulle se serait
trouvé en contact avec un outil polisseur immobile. Et d'autre part,
si l'outil polisseur avait été rotatif, mais place dans le meme axe que
l'outil porte-pierre, le point où la vitessede rotation de la creusure
est nulle aurait coincide avec le point où la Vitesse de rotation de
l'outil polisseur est nulle elle aussi. Au contraire, la realisation
simultanee des deux conditions supprime le point mort : le point
mort de la creusure se trouve en contact avec une partie de l'outil
polisseur animée d'un mouvement de rotation, de meine que le point mort
de l'outil polisseur se trouve applique sur les horcls de la creusure,
o'est à-dire à un endroit où la pierre est animée d'un mouvement de
rotation. En d'autres termes, les parties de l'outil polisseur où la
vitesse de rotation est la plus lalble se trouvent en contact avec les
parties de la creusure où la vitesse de rotation est la plus forte, et
réciproquement; le frottement a lieu dès lors avec une intensité egale
sur toute la surface de la creusure et par conséquent le polissage est
régulier. En outre, la force centrifugo projette la poudre à polir loin
du centre de l'outil polisseur, soit justement dans la direction du
centre de la creusure où le polissage doit etre le plus parfait,

Ces deux caractères de la machine sont indiqnés dans la

640 A. Entscheidungen des Bundesgerichts als oberster
Zivilgerichtsinstanz.

revendication 1. Quant à ceux indiqués dans les revendications 2 et 3, on
doit les regarder comme sans importance : la forme de la tete de l'outil
polissiseur est en effet indifferente, puisque cet outil est plus tendre
que ia pierre et que son extrémité prend donc forcément, an cours du
travail, la forme de la creusure. Ainsi la forme particuliere donnée
par Torriani & Cie a la tete de l'outil polisseur ne peut constituer
une invention brevetable.

Il résulte de ce qui précède que l'invention a consisté à utiliser un
outil polisseur anime d'un mouvement rotatif et attaquant de hiais la
creusure. C'était bien 1a une facon originale de résondre le problème
technique et d'utiliser les forces naturelles de maniere à supprimer le
teton au centre de la creusure et a obtenir un résultat nouveau, soit
un polissage uniforme sur toute la surface de la creusure. Ce procédé
nouvean se caractérise comme une invention, an sensss de la loi federale.

2. Mais il reste à rechercher si cette invention était nouvelle ,
c'est-à-dire si, au moment où Torriani & Cie se sont fait délivrer
le brevet, d'autres n'avaient pas déjà résolu le meme problème de la
meme kacken et si leurs machines n'étaient pas suffisamment connues
pour pouvoir etre exécutées par un homme du métier (LF sur les brevets
d'invention, art. 2). C'était à. Rouiller, qui conclut à la nullité
du brevet, a apporter la preuve du défaut de nouveanté de l'invention
brevetee, soit à prouver

a. qu'avant 1902, il existait déjà des machines présentant les caractères
décrits ci-dessus comme constitutifs de l'invention ;

b. que ces inventions antérieures avaient recu une publicité snffisante
pour exclure le caraetère de nouveanté de Pinvention Torriani.

En ce qui concerne le premier point, on peut écarter d'emblée la machine
de l'Ecole d'horlogerie de Genève et la machine Devenoge. Les analogies
qu'elles peuvent présenter avec la machine Torriani ne se rapportent
jnstement pas aux caractères constitutifs de l'invention. Ni dans l'une
ni dansVll. Erfindnngspatenie. N° 83. 641

l'autre les axes des outils ne se croisent, de maniere à permettre
l'attaqueîîde biais. Par contre la machine Jnnod, inventée en 1895
1896, est composée de deux outils l'outil porte-pierre et l'ontil
polisseur animes tous deux d'un mouvement rotatif et dont les axes se
coupent. Elle résout donc le problème du polissage de la creusure de la
meme fegen que la machine Torriani. Elle diflère de celle ci par le fait
que l'extrémité de l'outil polisseur décrit un mouvement périphérique
qu'on ne retrouve pas dans la machine Torriani. Elle possède donc un
élément qui manque à cette dernière. Mais par contre les deux caractères
constituant l'invention Torriani se retrouvent dans la machine Junod. Ils
se retrouvent également dans la machine que M. Naville a fait venir
d'Amérique et a utilisée à Genève en 1900-1901. Certains témoins
ont déclaré que cette machine était toute differente de la machine
Torriani. Il est possible qu'il existät des divergences au point de
vue de l'apparence extérieurs et des details de construction. Mais
l'essentiei était le meme: il résulte en effet de la lettre Naville et
des dépositions de i'enquéte que l'outil porte-pierre et l'outil polisseur
étaient rotatifs et que leurs axes se croisaient. La diflérence principale
paraît avoir consisté en ce que le support de l'outil polisseur pouvait à
volonté ètre fixé ou tenu à la main, tandis que dans la machine Torriani
il est fixe. Cette difference est sans intérét en l'espèce, du moment
que d'autre part les caractéristiques de la machine Torriani existent
toutes dans la machine Naville.

Ainsi, contrairement à ce qn'a estimé le tribunal de première instance-,
on doit reconnaître qu'avant 1902 il existait deux machines tout an moins
qui résolvaient, de la méme facon que la machine Torriani, le problème
du polissage de la creusure des pierres fines. Dans ces conditions on
peut laisser de còté la machine Bürkle et se dispenser de rechercher
si c'est avec raison que la Cour de justîce civile & écarté du débat
la photographic de cette machine qui présentait des analogies avec la
machine Torriani.

3. Mais l'antériorité des machines Neville et Junod

642 A. Entscheidungen des Bundesgerichts als oberster
Zivilgerichtsinstanz.n'est pas de nature à elle seule a exclure le
caractère de nouveauté de l'invention Torriani. Il faut encore que les
machines antérieures aient été coemucs avant 1902, au sens de l'art. 2 LF
de 1888. Ainsi que le Tribunal federal l'a decide a piusieurs reprises
(voir, entre autres, arréts du 16 juillet 1894, Schelling et Stänin
c. Ruegg et Boiler, R0 20 p. 682 consid. 5; et du 4 juin 1898, Pictet
c. Société chimique des Usines du Rhone, RO 24 II p. 470 consid. 4),
pour qu'une invention soit réputée connue, il ne suffit pas qu'elle
ait été portée à la connaissance de quelques personnes, il faut qu'elle
ait dépassé le cercle des confidente, des personnes; astreintes à. la
discrétion (cf. Kohler, Handbuch des Patentrechts, p. 193) de telle sorte
qu'elle puisse etre exécutée par un homme du métier. On peut se demander
si cette publicité a existé en ce qui concerne la machine Junoci qui était
tenue secrète et qui n'a été montrée qu'à de rares ouvriers auxquels le
secret avait été recommandé. Mais on ne peut avoir les meines doutes à
propos de la machine No.-ville; pendant plusieurs mois elle a fonctionné
a la vue de nombreux ouvriers sans qu'aueune recommendation de silence
leur ait été faite; elle était donc certainement assez connue pour qu'un
homme du métier pùt la copier.

Dans ces conditions, l'invention de Torriani & Cje n'était plus nouvelle
au moment où ils ont pris leur brevet. L'action en nullité du'brevet doit
donc etre admise en ce qui concerne l'objet tant de la revendication
principale 1 que des revendications 2 et 3. Par contre, il n'y a pas
lieu de l'admettre relativement à. la revendicatîon 4; en effet, la faoon
dont le support de l'outil polisseur pivote pour rapprocher le polissoir
de la pierre est particulière a la machine Torriani; on ne rencontre ce
mouvement ni dans la machine Rouiller ni dans aucune des autres machines.

L'action en nullité du brevet étant admise relativement à l'objet des
revendications 1, 2 et 3 et la controfacon n'ayant justementîpas porté
sur l'objet de la revendication 4 la seule pour laquelle le brevet soit
maintenu , il s'en suit que les conclusions des demandeurs doivent etre
écartées en leur entier.VII. Erfindungspatente. N° 84. 643 Par ces motifs,
le Tribunal fédéral

prononce: Le recours est partiellement admis etl'arrét de la Cour

{le just-ice civile de Genève du 29 mai 1909 est réformé en

ce sens que les eonclusions des demandeurs sont écartées et que le
brevet n° 26 297 délivré à. Torriani le 22 mars 1902, estdéclaré nul et
de mil effet en ce qui concerne les revendications 1, 2 et 3 de l'exposé
d'invention, toutes autres conclusions du defendeur étant écartées.

84. Arrèt du 27 novembre 1909 dans la come J . Îvlégevet & Cie, de'/. et
1" rec., contre Société des Moteurs Daimler, dom., et Le rec.

Recours en réforme dirigé contre un jugement préparatoire, en meme
temps que contre le jugement au fond (art. 58 al. 2 OJF}. Action
pour contrefaqon d'un objet breveté et contre-action en nullità du
brevet. (App-arei] destiné au refroidissement, au moyen de l'air, de
l'eau refrigerante des moteurs à explosion, dit radiateur nid d'abeilles
.) Conclusion nouvelle (demande d'une nouvelle expertise) ne pouvant
etre présentée devant le Tribunal fédéral (art. 80 OJF). Contrefaqon
doloslve établie. Nullité du brevet à. cause du défaut de nouveauté de
l'invention (art. 2 et 10 chiffre 1 LF du 29 juin 1888)? Application de
la Convention du 18 avril 1892 entre la. Suisse et l'Alle'magne conc. la
protection réciproque des brevets (art. 3 et 4). Bénéflce de l'art-. 4
LF. de 1888? Déchéance du 'brevet pour cause de non-application de
l'invention, conformément à l'art. 9 01111?er 3 LF, modifié par Part. 5 de
la. Convention précitée, ou pour cause de refus des demandes de licence
suisses, conformément à l'art. 9 chifl're 4 LF? Art. 20 LF, non applicable
conformément à l'art. 7 de la. Convention préeitée. Portée de l'action
civile prévue à. l'art. 25 LF de 1888 et à. l'art. 39 LF du 21 juin 1907
: L' indemnité due au titulaire du hrevet ou la réparation de son
dommage , dont parlent ces dispositions légales, comprend nècessairement
et à tout le moins la restitu-
Information de décision   •   DEFRITEN
Document : 35 II 631
Date : 16. Oktober 1909
Publié : 31. Dezember 1909
Source : Bundesgericht
Statut : 35 II 631
Domaine : BGE - Zivilrecht
Objet : M A. Entscheidungen des Bundesgerichls als oberster Zivilgerichtsinstanz. Or, en


Répertoire des lois
CO: 217
SR 220 Première partie: Dispositions générales Titre premier: De la formation des obligations Chapitre I: Des obligations résultant d'un contrat
CO Art. 217 - 1 Les ventes conditionnelles d'immeubles ne sont inscrites au registre foncier qu'après l'avènement de la condition.
1    Les ventes conditionnelles d'immeubles ne sont inscrites au registre foncier qu'après l'avènement de la condition.
2    Le pacte de réserve de propriété ne peut être inscrit.
Répertoire de mots-clés
Trié par fréquence ou alphabet
outil • tribunal fédéral • brevet d'invention • vue • analogie • action en nullité • original • autorisation ou approbation • dommages-intérêts • décision • presse • quant • mois • possession médiate • destruction • montre • communication • première instance • salaire • membre d'une communauté religieuse
... Les montrer tous