300 civllrectitspilege.

des Urteils der Polizeikammer aufgefasst, und nichts hindert das
Bundesgericht, dieser Auffassung beizutreten, da die nach Art. 32
Abs. 1 Markenschutzgesetz gestattete Publikation nicht nur in einem
Strasprozesse, sondern auch im Civilprozess ausgesprochen werden farm,
Und überdies nach konstanter bundesgerichtlicher Praxis die Publikation
eine Art des Schadenersatzes gemäss Art. 51 Abs. 1 O.-Jt. bildet. Im
vorliegenden Falle erscheint nun die Publikation namentlich in
Berücksichtigung des hohen Verschuldens des Beklagten als durchaus
gerechtfertigt; doch dürfte die von der Vorinstanz verfügte Publikation in
drei Blättern den Klågern genügende Genugthunng verschaffen, und ist ihr
weitergehender Antrag abzulehnen. Bemerkt sei nur, dass die Publikation
sich aus das Dispositiv des angesochtenen und des bundesgerichtlichen
Urteils zu beschränken hat. Demnach hat das Bundesgericht erkannt:

Die Berufung beider Parteien wird als unbegründet abgewiesen, und somit
das Urteil der Polizeikammer des Appellationsund Kassationshoses des
Kantons Bern vom 3. Dezember 1898 in allen Teilen bestätigt.

36. Arréä du 10 juin 1899 dans la. cause Rass-Suchard et Ci8 contre
Chevrette.

Imitation d'une marque de fabrique consistant en mots et figures; element
essentîel de la mal-que. Art. 6, 24 litt. a ed loi sur les marques de
fabrique, etc. Publication du jugemont, art. 32, eod.

A. La maison Rnss-Suchard et C, a Neuchatel, a déposé plusieurs marques
de fabrique destinées a etre apposées sur les différentes variétés de
chocolat de sa fabrication. Elle a déposé entre autres, le 25 septembre
1883, une marque pour la variété dite chocolat suisse, et le 15 juin
1885, une autre pour la variété dite chocolat des ménages.

En février 1888, s'étant apergue que Louis Chevrette,[V. Fabrikund
Haudelsmarken. N° 36. 301

fabricant de chocolat à. Genève, mettait en vente, sous les dénominations
de chocolat du Leman et de e chocolat des ménages perfectionné, des
produits revétus d'etiquettes imitant les deux marques susindiquées, elle
l'invita à renoncer immédiatement a l'usage de ces étiquettes. Ghevrette
protesta qu'il n'avait jamais eu l'intention d'imiter la marque Snchard,
mais s'engagea en meme temps à changer la sienne.

En décembre 1888 et janvier 1889 eut lieu entre parties un échange de
lettres dans lesquelles Russ Suchard et Cje se plaignaient de ce que
Chevrette ne tenait pas son engagement et qui aboutit à la stipulation
d'une convention, en date du 9 janvier 1889, par laquelle Chevrette
s'engageait notamment à ne plus faire usage d'étiquettes, boîtes, papier
a lettre, enveloppes, etc., portant en quelque maniere que ce seit une
imitation de la marque de fabrique de RussSuchard et Cie.

En novembre 1890, ces derniers constatèrent que Chevrette imitait une
autre de leurs marques, celle du chocolat économique. Ensuite de
réclamations de leur part, une nouvelle convention fut conclue, le 30
novembre, par laquelle celle du 9 janvier 1889 était déclarée applicable
à toutes les marques deposées par la maison Buss-Suchard et Cie et
spécialement à leur etiquette chocolat économique.

En septembre 1890, Russ Suchard et Cie avaient modifié leur marque pour
le chocolat des ménages et en avaient effectué le dépòt le 17 du meme
mois sous n° 3183. Chevrette ayant imité cette nouvelle marqne en 1895,
ils lui écrivirent en lui rappelant son engagement. Il répondit, comme
lors des précédentes réclamations, qu'il n'avait pas en l'intention
d'imiter la marque de Suchard et Cie, mais que toutefois il voulait bien
changer ses étiquettes. Sur sa demande, il obtint un délai pour écouler
son stock d'étiquettes.

Russ-Suchard et Cie ayant constaté en 1898 que Ohevrette imitait de
nouveau leur marque chocolat des me'nages demandèrent a la Cour de
Justice de Genève l'autorisation de saisir en mains de Chevrette et de
divers négociants

302 Civilrechtspflege.

les produits de chocolat portant la marque contrefaite, ainsi que
les enveloppes, étiquettes, cartes, réclames, tableaux, prospectus,
pierres lithographiques, clichés, ou tous autres ustensiles pourvus
de cette marque. Autorisée par ordonnance du 6 juillet, la saisie ent
lieu le surlendemain et porta sur une certaine quantité d'étiquettes,
de chocolat et de moules portant la marque incriminée.

B. Par exploit du 5 aoùt 1898, Russ-Suchard et 01° ont ensuite ouvert
action à Chevrette concluant:

1° A la validation de la saisie ci-dessus ;

2o à ce que la destruction des marques, enveloppes et emballages portant
la marque imitée soit ordonnée, ainsi que celle des ustensiles ayant
servi à fabriquer cette marque ;

3° à ce qu'il soit fait défense a Chevrette de fabriquer, vendre ou
mettre en vente des chocolate pourvus de la marque saisie ;

4° à ce que Ohevrette soit condamné à, leur payer la somme de 20 000
francs a titre de dommages-intérèts;

5° a la publication du jugement dans trois journaux de Genève, trois
journaux de Neuchatel et six autres journaux suisses, au choix des
demandeurs et aux frais de Chevrette.

Déjà, antérieurement à la notification de cet exsiploit, so1t par lettre
du 11 juillet 1898, Chevrette avait écrrt à, RussSuchard et Cie dans
les termes résumés ci-après :

A ma rentrée de voyage, j'ai connaissance des démarches que vous avez
ordonnées au sujet des étiquettes et moules portant les mots chocolat
des ménages. Les premieres sont du domaine public, puisque tous les
chocolatiers sulssesz à l'exception de trois, s'en servent. Quant aux
moules qul ont été saisis dans mon usine, il y a trento et un an que je
les emploie. Ges deux points établis et sans vonloir discuter la question
de droit, pour éviter toute nouvelle complication, Je dénomme à partir
de ce jour cette qualité de chocolat chocolat des amateurs du Leman,
j'en dépose la marque et je vous prie de bien vouloir donner les ordres
nécessan'es pour que je puisse déplier les chocolats saisis. -

Donnaut suite à, cette communication, Chevrette déposaIV. Fabrikund
Handelsmarken. N° 36, 303

effectivement le 28 juillet sous n° 10 271 une marque dite chocolat
des amateurs du Leman!

Estimant que cette marque n'était qu'une nouvelie forme d'imitation de la
leur, Russ-Suchard et Cie amplifièrent leurs conclusions introductives
d'instance et demandèrent aussi la radiation de la marque n° 10271,
ainsi que la destruction

de toutes les étiquettes, emballages, marchandises, factnres,

prospectus ou cartes-réclame portant la dite marque.

0. Le défendeur a conclu à liberation des fins de la demande, et
reconventionnellement a ia radiation de la marque inscrite au nom de
Russ-Suchard et Cie sous n° 3183 et à la condamnation des demandeurs au
paiement d'une indemnité de 20 000 francs. Il soutenait n'avoir jamais
imité les marques des demandeurs et declarait que s'il avait toujours
cédé à leurs réclamations, c'était par gain de paix. S'expliquant ensuite
sur les conclusions de la demande, il prétendait que la marque n° 3183
de Russ Suchard et Gie n'était pas nouvelle et devait ètre annulée,
les mots chocolat (les ménages étant depuis longtemps tombés dans le
domaine public. Quant à la prétention des demandeurs de faire annuler
la marque chocolat des amateurs du Leman, elle serait étrange, les
deux marques étant, d'après le défendeur, oomplètement différentes.

D. Par arrèt du 25 février 1899, la Cour de Justice de Genève a valide la
saisie pratiquée le 8 juillet 1898 à la requète de Russ-Suchard et Gie
pour autant qu'elle a porte sur les étiquettes et enveloppes revétues
de la marque chocolat des ménages; ordonné la destruction de ces

étiquettes et enveloppes; fait défense à Chevrette de fabriquer, vendre
ou mettre en vente des marchandises revètues de la dite marque; débouté
Ohms-rette de sa

demande en radiation de la marque enregistrée par les de-

mandeurs, le 17 septembre 1890, sous n° 3183 et condamné

le dit à payer aux demandeurs la somme de 1000 francs à

titre de dommages-intéréts, avec intéréts de droit dès la date

du jugement; deboute les demandeurs de leur conclusion

en radiation de la marque enregistrée par le défendeur le xxv, 2. 1899 2-0

304 Civilrechtspflege.

25 juillet 1898 sous n° 10 271; autorisé les demandeurs à publier une
fois le jugement rendu, aux frais du cléfeudeur, dans la Feuille d'aver
officieèèe du canton de Genève; débouté les parties de toutes plus
ampies conclusions.

E. Par declaration du 24 mars 1899, Russ-Suchard et Ciò ont interjeté
recours en reforme contre ce jugement, concluant à ce qu'il plaise au
Tribunal fédéral :

1° Ordonner la radiation de la marque (( chocolat des amateurs du Leman
déposée par Ghevrette le 25 juillet 1898;

2° ordonuer en couséquence la destruction de toutes les étiquettes et
emballages revètus de la dite marque;

3° commettre à ces fins l'huissier H. Martin pour qu'il procede a la
dite destruction conjointement avec celle de la. marque contrefaite ((
chocolat des ménages;

4° condamuer Chevrette a payer aux recourants la somme de 20 000 francs
à titre de dommages-intéréts;

5° ordonner la publication de l'arrét à intervenir dans trois journaux
de Genève, trois de Neuchatel et six autres journaux suisses au choix
des recourants et aux frais de Chevrette.

A l'audience de ce jour, le conseil et représentant des recourants a
declare retirer la conclusion du recours relative aux dommages-intérèts.

F. Le conseil de l'intimé a conclu au rejet du recours.

Considémnt en. droit :

1. De toutes les questions qui formaient l'objet du litige

devant l'instance cantonale, deux seules, celle de la radia-si

tion de la marque n° 10 271 déposée par Chevrette et celle concernant
la publication du jugement rendu par la Cour deJustice de Genève et de
celui à, rendre par l'instance fédérale sont soumises à l'appréciation
du Tribunal fédéral.

2. Les recourants Russ Suchard et Cie soutiennent que la marque portant
la mention c( chocolat des amateurs du Léman, déposée par l'intimé
Chevrette, le 25 juillet 1898, sous n° 10271, n'est qu'une imitation
de celle qu'ils ont déposée le 17 septembre 1890, sous n° 3183, pour
leurIV. Fahrikund Handelsmarken. N° 36. 305

ox chocolat des ménages , ils en demandent en consé-

quence la radiation. La question se pose done de savoir si les deux
marques dont il s'agit different suffisamment l'une de l'autre pour qu'une
confusion entre elles ne soit pas facile (art. 6 de la loi federale du
26 septembre 1890) ou, en d'autres termes, pour que le public ne puisse
pas étre induit en erreur (art. 24, lettre a, leg. cit.)

En renoncant a interjeter recours du jugement de la Cour de justice de
Genève qui a écarté sa conclusion en radiation de la marque chocolat des
ménages déposée Par les recourauts, Ghevrette a reconnu que cette marque
a droit à la protection legale. Il n'y a donc plus lieu de revenir sur la
question de savoir si, bien que la denomination (( chocolat des ménages
) soit tombée dans le domaine public, les recon-rants lui ont donné, en
l'employant comme marque de fabrique, un aspect extérieur suffisamment
original pour l'individualiser et pour acquérir ainsi un droit personnel,
non sur la dénomination elle meme, mais sur la forme figurative qu'elle a
recue dans leur marque. Cette question a été tranchée affirmativement par
l'instance cantonale, dont le prononcé est passe en force sur ce point.

Avant d'examiner si la marque incriminée apparaît en elle-meme, par
ses caractères extérieurs, comme une imitation illicite de celle des
recourants, il y a lieu d'observer ce qui suit:

Les précédents de sieur Chevrette et les circonstances dans lesquelles
s'est effectué le dépöt de la marque cho-

colat des amateurs du Leman autorisent a admettre qu'en

l'adoptant l'intimé s'est non seulement inspiré de la marque des
recourants pour le chocolat des ménages , mais qu'il s'est proposé de
l'imiter, tout en y apportant des modifications dans le but de maintenir
sa nouvelle marque dans les limites d'une imitation permise. Quant aux
antecedente, il résulte des faits de la cause que depuis de longues années
Chevrette s'était fait pour ainsi dire une spécialité de l'imitation
des marques Russ-Suchard et Cie pour en revètir les chocolate de sa
fabrication. Il suffit de rappeler ici qu'il a

306 Civilrechtspflege.

lui-meme reconnu, dans deux conventions portant sa signature, qu'il
s'était rendu coupable d'imitation. En ce qui concerne spécialement
la marque Chocolat des amateurs du Leman, sa comparaison avec la
marque Suchard démontre à l'évidence que dans sa distribution générale
elle s'inspire de celle-ei. Or on ne saurait admettre que ce soit là
le résultat d'une Coincidence fortuite. Si Ghevrette ne voulait pas
imiter la marque Suchard, il avait à sa disposition un nombre infini de
combinaisons figuratires propres à rendre toute confusion impossible. Si
entre toutes les combinaisons possibles il a donné la preference à
celle qui se rapprochait de la marque Suchard, c'est qu'évidemment
son intention était d'imiter cette dernière. Gela ne suffit pas, sans
doute, pour démontrer qu'il Y a eu imitation illicite. Mais l'intention
d'imiter étant établie, on doit d'autant plus facilenient adniettre que la
confusion entre les deux marques est possible, car il est à présumer que
l'imitateur n'aurait pas imité la marqusse d'autrui s'il n'avait pas cru
pouvoir spéculer sur la possibilité d'une confusion; son appreciation à,
cet égard a toute la valeur de celle d'un homme du inétier, qui connait
les habitudes du public.

3. La marque Russ-Suchard et Gif'n° 3183 présente un double caractère:
elle est verbale en tant qu'elle comprend les mots cc chocolat des
ménages, destinés a désigner la qualité du produit qu'elle revèt; elle
est figurative en tant que ces mots sout groupes d'uue maniere originale
et entourés d'autres éléments figuratifs qui donnent à la marque un aspect
caractéristique. Ainsi qu'il a déjà été dit, la denonomination chocolat
des ménages n'est plus susceptible d'appropriation, étaut tombée dans
le domaine public; au surplus, l'élément verbal de la marque Chevrette
cousistaut dans les mots chocolat des amateurs du Leman est absolument
different de celui de la marque Russ-Suchard et Cie. La question de
l'imitation ne se pose donc que par rapport à. l'élément figuratif.

L'instauce cantonale l'a tranchée dans le sens négat'if. Elle est partie
du point de vue, juridiquement exact, queIV. Fabrikund Handelsmarken. N°
38. 307

pour qu'il y ait imitation illicite, il faut que la marque incri-

minée reproduise les caractères essentiels de la marque antérieure;
mais elle a estimé que tel n'était pas le cas dans l'espèce et que des
lors les deux marques pouvaient coexister. Les recourants soutiennent
que cette decision implique une erreur de droit en ce sens que la Cour
n'aurait pas fait une saine appreciation des caracteres essentiels de
leur marque, qui se retrouveraient, suivant eux, dans la marque contestée.

Le caractère distinctif et la physionomie propre d'une marque figurative
résultent non des details du dessin, mais de l'aspect général de la
mai-que, c'est cet aspect qui détermine l'impression qu'elle produit
sur les sens et qu'elle laisse dans le souvenir de l'acheteur. Aussi le
Tribunal fédéral a-t-il toujours admis que pour juger s'il y a imitation,
il faut comparer l'aspect d'ensemble des deux marques en présence.
L'art. 6 de la loi diSpose du reste expressément qu'une nouvelle
marque'si reproduisant certaines figures d'une marque déjà inscrite,
peut revendiquer la protection legale si dans son ensemble elle differe
suffisamment de celles déjà enregistrées.

Ces principes posés, il y a lieu de rechercher quels sont les elements
essentiels de la marque de Russ-Suchard et Cie. Cette marque est
composée de la maniere suivante: Les mots: Chocolat des ménages,
imprimés en caractères gras et originaux, sont distribués sur deux
lignes. Une troisième ligne est occupée par les mots Ph. Suchard et
une quatrième par les mots garanti pur cacao et sucre. Le mot chocolat
forme une espèce d'arc de cercle. Les mots Ph. Suchard sont imprimés
dans une houcle formée par le jambage droit de la majuscule M du mot
Ménages. Dans la partie gauche de la marque se trouve une vignette,
représentant une famille a table, encadrée en haut par le mot chocolat
et en bas par le jambage de gauche dela iettre M. Deux petites cigognes,
dont l'une est posée sur un nid placé audessus du M, taudis que l'autre
vole au-dessus du mot Ménages, complètent le dessin.

308 Civilrechtspflege.

L'instance cantonale a admis que l'élélnent essentiel de cette marque est
formé par les mots chocolat des ménages. Mais c'est là. une erreur. ll
se peut sans doute, ainsi que le Tribunal federal l'a admis dans la cause
Grézier c. Bonnet et ()je (Rec. off. XXH, p. 1113 et suiv.) que dans
une marque qui est à la fois verbale et figurative l'élément essentiel
soit constitué par la partie verbale, meme lorsqu'il n'infiue pas sur
la determination de l'aspect général de la marque, s'il est prouvé que
les acheteurs ont de preference égard a cet élément. Mais pour que ce
principe soit applicable, il est indispensable que le propriétaire de la
marque ait un droit personnel sur les mots qui en constituent l'élément
verbal. Si, au contraire, ces mots sont dans le domaine public, il est
juridiquement impossible qu'ils puissent constituer l'élément essentiel
de la marque, car cet élément doit étre difiérent dans chaque marque. Or
Russ-Suchard et Cie n'ont aucun droit personnel sur la denomination
chocolat des ménages, tombée dans le domaine public. Le Tribunal federal
a d'ailleurs juge que la difference de l'élément ver-bal de deux marques,
meme lorsque celui ci n'est pas tombe dans le domaine public, ne sui'fit
pas à exclure l'imitation, lorsqu'elle n'a pas pour eflet de changer
l'aspect général de la marque. (Voir arret en la cause Lever c. Schuler
et C°, Rec. off. XXII, p. 588 et suiv., consid. è.)

Le caractère distinctif de la marque Russ-Snchard ne doit donc pas etre
cherche dans la denomination chocolat des ménages , mais bien dans
l'aspect d'eusemble résultant de la forme et de la disposition de ces
mots, ainsi que des autres éléments qui composent cette marque. Or,
si l'on compare au point de vue de leur aspect extérieur les deux
marques en conflit, on voit que tous les éléments importante de
la marque Russ-Suchard se retrourent dans la marque Chevrette, au
moins dans leurs traits fondamentaux: la disposition du mot chocolat
s'y rapproche aussi d'un are de eercle; l'élément verbal est de méme
distribué en quatre lignee, dont la première commence vers ia gauche,
la seconde vers le centre de la marque et Ia troisième plus à droite,[V,
Fabrikund Handelsmarken. N° 38. 309

Landis que la quatrième, formée des mots (( garanti pur cacao et sucre,
est disposée parallèlement à. la troisième et à la meme distance que dans
la marque Suchard; comme dans cette dernière, les mots de la troisieme
ligne sont encadrés par la boucle du jambage d'une lettre de la seconde
ligne; la vignette est aussi placée dans la partie à. gauche de la marque
et représente également des personnes a table; enfin les deux marques
sont de meine grandeur et ssimprimées sur du papier de meme couleur
quoique de nuance differente. Ges divers points de ressemblance ont pour
résultat que l'aspect général de la marque Chevrette est sinon identique,
du moins très semblable à celui de la marque Russ-Suchard et laisse
reconnaitre à première vue que l'élément figuratif des deux marques
procede de la meme pensée. Il est vrai que presque tous les details
de la marque -ll1evrette different de ceux de la marque Russ Suchard.
Outre l'élément verba], les caractères de l'impression sont différents;
la vignette, au lieu d'etre encadrée parle jamhage da M, est entourée par
le C; de plus, elle représente seulement une dame et une fillette à table,
tandis que dans la maque Russ-Suchard elle représente toute une famille;
enfin les petites cigognes sont remplacées par une branche de feuillage
qui enguirlande la lettre C. Mais toutes ces différenccs, quelque
importantes qu'elles puissent paraître, ne sont que des differences de
detail, qui n'alterent pas l'aspect général de la marqne et n'empéchent
pas que l'acheteur, anquel il sera rarement donné de pouvoir comparer
les deux marques, ne puisse facilement prendre l'nne pour l'autre. La
principale de ces differences est évidemment celle qui résuite de la
substitution des mots chocolat des amateurs du Leman a ceux de ((
chocolat des ménages Ph. Suchard. Toutefois, etant donne qu'il s'agit
de la protection non pas de l'élément verba], mais seulement de l'élément
figura-tif. de la marque, cette difference n'a pas d'importance déciswe,
attendu que les mots chocolat des amateurs du peman sont disposés de
maniere à n'exercer qu'une falble influence sur l'aspect général de la
marque au point de vue de sa

310 Givilrechtspflege.

différenciation d'avec la marque Suchard. La circonstance que cette
dernière porte le nom du fabricant Ph. Suchard, v tandis qu'a la
meme place la marque Chevrette porte les mots du Leman, ainsi que,
au-dessous de la vignette, le mot (( Genève, ne suffit pas non plus
à. différencier suffifisamment l'aspect général des deux marques. (Voir
arrét déjà cité, Rec. off., XXII, p. 590, en haut.) Il ne pourrait en
étre autrement que s'il était prouvé que dans le commerce du chocolat
l'acheteur attache une importance particulière à l'indication du nom du
fabricant ou du lien de provenance. Mais cela n'a pas méme été allégué
et le fait de l'imitatiou indique déjà le contraire, Ghevrette ayant
évidemment eu l'intention, ainsi qu'il a été dit plus haut, de spéculer
sur la possibilité d'une confusion de la part des acheteurs entre se.
marque et celle de Russ-Suchard. Celui qui veut adOpter une marque
ayant a sa disposition toute l'infinie variété des signes figuratifs que
l'imagination peut suggérer, on est en droit d'exiger de lui qu'il use de
cette liberté pour adopter une marque qui se distingue nettement de celles
déjà euregistrées, au meins en tant qu'elles lui sont connues (comp.
arrèt du Tribunal fédéral en matière de raison de commerce Rec. off., XXI,
p. 229, consid. 2). Or ce n'est certainement pas ainsi qu'a agi l'intimé.

De ces considérations il résulte que la marque chocolat des amateurs du
Leman, )) déposée par l'intimé, doit etre considérée comme une imitation
illicite de celle déposée par Russ-Suchard et Cie pour leur chocolat
des ménages, et qu'en conséquence elle doit etre radiée.

4. Quant a la question de la publication du jugement, il s'agit uniquement
de savoir s'il y a lieu d'accueillir les conclusions du recours tendant
a obtenir que cette publication ait lieu non seulement dans la Feud-Ze
d'am's officielle de Genève, mais aussi dans divers autres journaux
suisses au ehoix des reeourants. A cet égard, le Tribunal fédéral n'est
lié par aucune disposition précise de la loi et la solution dépend
exclnsivement de l'appréciation des circoustances. Or cette appreciation
démontre que la publicité ordonnée n'est"-:-siÎ-siî-niu.esi,-.-siMMss'-w'
-

.};' WMWMKsissswètsiiéM-F-ffiay g .:sk

IV. Fabrikund Handelsmarken. N° 38. 311--

pas suffisante. Chevrette n'en est pas à sen premier essai d'imitatiou
des marques de la maison Russ Suchard et ses antéeédents permettent
d'affirmer que l'on est en présence-si d'une imitation dolosive bien
caractérisée. Il résulte en outredu dossier qu'il ne vendait pas du
chocolat seulement à. Genève, mais également dans d'autres cantons
suisses où la publication par la Feuille d'am's officielle de Genève
demeurerait absolument inconnue. Enfin Ghevret'te a lui-meine déclaré
devant l'instance cantonale qu'il était d'accord pourque le jugement ä,
intervenir recùt une grande publicité. IL se justifie des Iors d'ajouter
a la publication dans la Feu-ille d'auis officielie de Genève celle dans
trois autres journaux. suisses au choix des recourants.

Par ces motifs,

Le Tribunal federal prononce:

Le recours est declare fonde et le jugement de la Courcivile de Genève,
du 25 février 1899, est reforme partiellement en ce sens:

1° Qnesles recourants Russ-Suchard et Cie sont admis: dans leur conclusion
tendant

a) à la radiation de la marque deposée par L. Ghevretteau Bureau fédéral
de la propriété intellectuelle à Berne, le 25 juillet 1898, sous n°
10 271, et

b) àîla destruction des étiquettes et embailages revétus dela dite marque;

2° que le dispesitif du present arrét, ainsi que la partie non modifiée
du dispositif du jugement canton-al, serontsi publiés une fois aux frais
de l'intimé dans la Feuiläe d'aoisss officielle de Genève et dans trois
autres journaux suisses au; choix des recourants.
Information de décision   •   DEFRITEN
Document : 25 II 300
Date : 10. Juni 1899
Publié : 31. Dezember 1899
Source : Bundesgericht
Statut : 25 II 300
Domaine : BGE - Zivilrecht
Objet : 300 civllrectitspilege. des Urteils der Polizeikammer aufgefasst, und nichts hindert


Répertoire de mots-clés
Trié par fréquence ou alphabet
chocolat • tribunal fédéral • domaine public • destruction • acheteur • quant • vue • dommages-intérêts • droit personnel • original • fabricant • tombe • doute • imprimé • cacao • décision • marque figurative • calcul • action en justice • effet
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