130 III 35
5. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour civile dans la cause A. contre B. Ltd et cons. ainsi que Tribunal arbitral de Zurich (recours de droit public) 4P.100/2003 du 30 septembre 2003
Regeste (de):
- Art. 190 Abs. 2 lit. d IPRG; internationale Schiedsgerichtsbarkeit; Anspruch der Parteien auf rechtliches Gehör in einem kontradiktorischen Verfahren.
- Tragweite des Anspruchs auf rechtliches Gehör und des Prinzips des kontradiktorischen Verfahrens (E. 5). Verletzung des letzteren im vorliegenden Fall bejaht, da sich die rechtliche Würdigung des Schiedsgerichts auf eine Vertragsbestimmung stützt, die keine der Parteien als massgebend betrachtet und im Verfahren angerufen hatte (E. 6).
Regeste (fr):
- Art. 190 al. 2 let. d
SR 291 Loi fédérale du 18 décembre 1987 sur le droit international privé (LDIP)
LDIP Art. 190 - 1 La sentence est définitive dès sa communication.
1 La sentence est définitive dès sa communication. 2 Elle ne peut être attaquée que: a lorsque l'arbitre unique a été irrégulièrement désigné ou le tribunal arbitral irrégulièrement composé; b lorsque le tribunal arbitral s'est déclaré à tort compétent ou incompétent; c lorsque le tribunal arbitral a statué au-delà des demandes dont il était saisi ou lorsqu'il a omis de se prononcer sur un des chefs de la demande; d lorsque l'égalité des parties ou leur droit d'être entendues en procédure contradictoire n'a pas été respecté; e lorsque la sentence est incompatible avec l'ordre public. 3 En cas de décision incidente, seul le recours pour les motifs prévus à l'al. 2, let. a et b, est ouvert; le délai court dès la communication de la décision. 4 Le délai de recours est de 30 jours à compter de la communication de la sentence.152 - Portée du droit d'être entendu et du principe de la contradiction (consid. 5). Violation de celui-ci admise en l'occurrence, l'analyse juridique du tribunal arbitral reposant sur une disposition contractuelle qu'aucune des parties n'avait trouvée déterminante et discutée devant lui (consid. 6).
Regesto (it):
- Art. 190 cpv. 2 lett. d
SR 291 Loi fédérale du 18 décembre 1987 sur le droit international privé (LDIP)
LDIP Art. 190 - 1 La sentence est définitive dès sa communication.
1 La sentence est définitive dès sa communication. 2 Elle ne peut être attaquée que: a lorsque l'arbitre unique a été irrégulièrement désigné ou le tribunal arbitral irrégulièrement composé; b lorsque le tribunal arbitral s'est déclaré à tort compétent ou incompétent; c lorsque le tribunal arbitral a statué au-delà des demandes dont il était saisi ou lorsqu'il a omis de se prononcer sur un des chefs de la demande; d lorsque l'égalité des parties ou leur droit d'être entendues en procédure contradictoire n'a pas été respecté; e lorsque la sentence est incompatible avec l'ordre public. 3 En cas de décision incidente, seul le recours pour les motifs prévus à l'al. 2, let. a et b, est ouvert; le délai court dès la communication de la décision. 4 Le délai de recours est de 30 jours à compter de la communication de la sentence.152 - Portata del diritto di essere sentito e del principio del contraddittorio (consid. 5). In concreto la violazione di tale principio è stata ammessa, l'analisi giuridica del tribunale arbitrale essendo fondata su di una disposizione contrattuale che nessuna delle parti aveva ritenuto determinante né tantomeno discusso dinanzi ad esso (consid. 6).
Sachverhalt ab Seite 36
BGE 130 III 35 S. 36
A. A. et B. Ltd (ci-après: B.) ont conclu le 18 octobre 1994 un contrat portant sur la fabrication et la vente de cigarettes sous licence en Croatie. Certaines des marques de cigarettes qui devaient être produites par A. n'étaient pas propriété de B., mais de sociétés de son groupe avec lesquelles des accords annexes ont été passés. Ces contrats contiennent une clause d'arbitrage se référant aux règles de la CNUDCI et sont soumis au droit suisse. La coopération entre les parties s'était bien déroulée durant les premières années. Par lettre du 12 mars 1999, B. a reproché à A. de ne pas effectuer suffisamment de commandes pour approvisionner le marché croate en cigarettes des marques de son groupe; référence était faite dans ce courrier à la possibilité aménagée pour une partie, à l'art. 15 (A) du contrat du 18 octobre 1994, de mettre un terme anticipé aux relations contractuelles. Le 17 mars 1999, A. a contesté le grief qui lui était adressé et a proposé, mais vainement, à son interlocutrice de procéder à un contrôle conjoint du marché. Un nouvel échange de correspondances a suivi, sans que les parties ne trouvent de solution. Le 15 juin 1999, l'Agence croate pour la protection de la concurrence (ci-après: l'Agence) a rendu un décret provisionnel déclarant nulles plusieurs dispositions contractuelles liant A. et les différentes sociétés du groupe. B. a recouru auprès du Tribunal administratif de la République de Croatie. La décision provisoire a été remplacée par un décret du 5 novembre 1999 annulant certaines clauses du contrat du 18 octobre 1994. B. a derechef recouru contre cette décision. Par courrier du 16 février 2000, B. a déclaré mettre un terme immédiat au contrat du 18 octobre 1994 ainsi qu'aux accords conclus dans le cadre de celui-ci. Elle faisait valoir que le comportement de A. et les décisions de l'Agence rendaient impossible et inacceptable la poursuite des relations contractuelles. Elle se référait à l'art. 15 (A) du contrat lui conférant un droit de résiliation anticipée et à l'art. 15 (C) lui donnant le droit de résilier le contrat dans l'hypothèse où un acte ou une décision administrative en affecterait l'exécution, de même qu'à l'art. 20 du contrat obligeant les parties à obtenir toutes les autorisations nécessaires à la mise en oeuvre du contrat en Croatie. A. a contesté la rupture des relations
BGE 130 III 35 S. 37
contractuelles, mais B. a maintenu sa position par courrier du 8 mars 2000, en se prévalant à nouveau de l'art. 15 (C) (force majeure en cas d'acte ou de décision administrative) du contrat du 18 octobre 1994. B. a retiré ses recours contre les décisions de l'Agence en juillet 2000.
B. A. a contesté cette résiliation devant les juridictions croates, qui ont rendu le 7 juin 2000 une ordonnance de mesures provisionnelles faisant interdiction à B. et aux autres sociétés du groupe d'autoriser des tiers à produire ou distribuer les cigarettes visées dans les contrats passés entre les parties. La décision impartissait un délai de soixante jours à la requérante pour ouvrir une procédure arbitrale, ce que A. a fait par requêtes du 1er novembre 2000. Dans son mémoire de demande du 30 mai 2001, A. a conclu à la constatation du caractère abusif de la résiliation qui constituer ait une violation du contrat principal, ainsi qu'au paiement de 5'775'364,70 DEM à titre de dommages-intérêts, somme ramenée en cours de procédure à au moins 2'247'468,67 DEM ou 1'149'108,29 EUR, intérêts moratoires en sus. Les défenderesses ont conclu au rejet de l'action et ont déposé une demande reconventionnelle tendant à ce que le tribunal arbitral déclare nuls les différents contrats passés dans le cadre de la production et de la distribution des cigarettes du groupe B. Les parties ont encore échangé une réplique et une duplique, puis ont produit des mémoires après enquête. Par sentence finale du 11 mars 2003, le tribunal arbitral a rejeté tant la demande que la demande reconventionnelle. Cette sentence était accompagnée d'une opinion dissidente émanant de l'un des arbitres.
C. A. a déposé un recours de droit public au Tribunal fédéral fondé sur l'art. 190 al. 2 let. d
SR 291 Loi fédérale du 18 décembre 1987 sur le droit international privé (LDIP) LDIP Art. 190 - 1 La sentence est définitive dès sa communication. |
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1 | La sentence est définitive dès sa communication. |
2 | Elle ne peut être attaquée que: |
a | lorsque l'arbitre unique a été irrégulièrement désigné ou le tribunal arbitral irrégulièrement composé; |
b | lorsque le tribunal arbitral s'est déclaré à tort compétent ou incompétent; |
c | lorsque le tribunal arbitral a statué au-delà des demandes dont il était saisi ou lorsqu'il a omis de se prononcer sur un des chefs de la demande; |
d | lorsque l'égalité des parties ou leur droit d'être entendues en procédure contradictoire n'a pas été respecté; |
e | lorsque la sentence est incompatible avec l'ordre public. |
3 | En cas de décision incidente, seul le recours pour les motifs prévus à l'al. 2, let. a et b, est ouvert; le délai court dès la communication de la décision. |
4 | Le délai de recours est de 30 jours à compter de la communication de la sentence.152 |
Erwägungen
Extrait des considérants:
5. Selon l'art. 190 al. 2 let. d
SR 291 Loi fédérale du 18 décembre 1987 sur le droit international privé (LDIP) LDIP Art. 190 - 1 La sentence est définitive dès sa communication. |
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1 | La sentence est définitive dès sa communication. |
2 | Elle ne peut être attaquée que: |
a | lorsque l'arbitre unique a été irrégulièrement désigné ou le tribunal arbitral irrégulièrement composé; |
b | lorsque le tribunal arbitral s'est déclaré à tort compétent ou incompétent; |
c | lorsque le tribunal arbitral a statué au-delà des demandes dont il était saisi ou lorsqu'il a omis de se prononcer sur un des chefs de la demande; |
d | lorsque l'égalité des parties ou leur droit d'être entendues en procédure contradictoire n'a pas été respecté; |
e | lorsque la sentence est incompatible avec l'ordre public. |
3 | En cas de décision incidente, seul le recours pour les motifs prévus à l'al. 2, let. a et b, est ouvert; le délai court dès la communication de la décision. |
4 | Le délai de recours est de 30 jours à compter de la communication de la sentence.152 |
BGE 130 III 35 S. 38
réservés par l'art. 182 al. 3
SR 291 Loi fédérale du 18 décembre 1987 sur le droit international privé (LDIP) LDIP Art. 182 - 1 Les parties peuvent, directement ou par référence à un règlement d'arbitrage, régler la procédure arbitrale; elles peuvent aussi soumettre celle-ci à la loi de procédure de leur choix. |
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1 | Les parties peuvent, directement ou par référence à un règlement d'arbitrage, régler la procédure arbitrale; elles peuvent aussi soumettre celle-ci à la loi de procédure de leur choix. |
2 | Si les parties n'ont pas réglé la procédure, celle-ci sera, au besoin, fixée par le tribunal arbitral, soit directement, soit par référence à une loi ou à un règlement d'arbitrage. |
3 | Quelle que soit la procédure choisie, le tribunal arbitral doit garantir l'égalité entre les parties et leur droit d'être entendues en procédure contradictoire. |
4 | Une partie qui poursuit la procédure d'arbitrage sans faire valoir immédiatement une violation des règles de procédure qu'elle a constatée ou qu'elle aurait pu constater en faisant preuve de la diligence requise ne peut plus se prévaloir de cette violation ultérieurement.142 |
SR 291 Loi fédérale du 18 décembre 1987 sur le droit international privé (LDIP) LDIP Art. 190 - 1 La sentence est définitive dès sa communication. |
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1 | La sentence est définitive dès sa communication. |
2 | Elle ne peut être attaquée que: |
a | lorsque l'arbitre unique a été irrégulièrement désigné ou le tribunal arbitral irrégulièrement composé; |
b | lorsque le tribunal arbitral s'est déclaré à tort compétent ou incompétent; |
c | lorsque le tribunal arbitral a statué au-delà des demandes dont il était saisi ou lorsqu'il a omis de se prononcer sur un des chefs de la demande; |
d | lorsque l'égalité des parties ou leur droit d'être entendues en procédure contradictoire n'a pas été respecté; |
e | lorsque la sentence est incompatible avec l'ordre public. |
3 | En cas de décision incidente, seul le recours pour les motifs prévus à l'al. 2, let. a et b, est ouvert; le délai court dès la communication de la décision. |
4 | Le délai de recours est de 30 jours à compter de la communication de la sentence.152 |
BGE 130 III 35 S. 39
son jugement (ATF 126 I 97 consid. 2b, ATF 126 I 19 consid. 2c). En vertu de la règle "jura novit curia", il n'est en principe pas lié par les moyens de droit développés par les parties - sous réserve de l'hypothèse dans laquelle elles auraient convenu de limiter la mission du tribunal aux moyens juridiques qu'elles invoqueraient (avec la possibilité pour un plaideur qui contesterait une sentence ne respectant pas cette limitation de recourir pour violation de la règle "ne eat judex ultra petita partium" ou de soulever le moyen pris de l'incompétence du tribunal arbitral, soit les motifs des let. b et c de l'art. 190 al. 2
SR 291 Loi fédérale du 18 décembre 1987 sur le droit international privé (LDIP) LDIP Art. 190 - 1 La sentence est définitive dès sa communication. |
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1 | La sentence est définitive dès sa communication. |
2 | Elle ne peut être attaquée que: |
a | lorsque l'arbitre unique a été irrégulièrement désigné ou le tribunal arbitral irrégulièrement composé; |
b | lorsque le tribunal arbitral s'est déclaré à tort compétent ou incompétent; |
c | lorsque le tribunal arbitral a statué au-delà des demandes dont il était saisi ou lorsqu'il a omis de se prononcer sur un des chefs de la demande; |
d | lorsque l'égalité des parties ou leur droit d'être entendues en procédure contradictoire n'a pas été respecté; |
e | lorsque la sentence est incompatible avec l'ordre public. |
3 | En cas de décision incidente, seul le recours pour les motifs prévus à l'al. 2, let. a et b, est ouvert; le délai court dès la communication de la décision. |
4 | Le délai de recours est de 30 jours à compter de la communication de la sentence.152 |
BGE 130 III 35 S. 40
im poser à l'autorité de recours une révision au fond des sentences arbitrales (arrêt 4P.260/2000 du 2 mars 2001, consid. 6b). Cette attitude restrictive est combattue par POUDRET et BESSON, qui soulignent que la pratique arbitrale, certes variée, révèle une tendance à laisser aux parties la responsabilité d'apporter au débat les explications et même les preuves concernant leurs arguments juridiques; dans un tel contexte, ces auteurs estiment que les arbitres doivent se montrer plus prudents, et non plus audacieux, que le juge avant de substituer leurs arguments de droit à ceux des parties (POUDRET/ BESSON, ibidem). La nécessité pour l'arbitre de provoquer un débat contradictoire au sujet des questions de droit auxquelles les parties n'ont pas fait référence jusque-là est également soulignée par MICHAEL E. SCHNEIDER (Commentaire bâlois, n. 60 ad art. 182
SR 291 Loi fédérale du 18 décembre 1987 sur le droit international privé (LDIP) LDIP Art. 182 - 1 Les parties peuvent, directement ou par référence à un règlement d'arbitrage, régler la procédure arbitrale; elles peuvent aussi soumettre celle-ci à la loi de procédure de leur choix. |
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1 | Les parties peuvent, directement ou par référence à un règlement d'arbitrage, régler la procédure arbitrale; elles peuvent aussi soumettre celle-ci à la loi de procédure de leur choix. |
2 | Si les parties n'ont pas réglé la procédure, celle-ci sera, au besoin, fixée par le tribunal arbitral, soit directement, soit par référence à une loi ou à un règlement d'arbitrage. |
3 | Quelle que soit la procédure choisie, le tribunal arbitral doit garantir l'égalité entre les parties et leur droit d'être entendues en procédure contradictoire. |
4 | Une partie qui poursuit la procédure d'arbitrage sans faire valoir immédiatement une violation des règles de procédure qu'elle a constatée ou qu'elle aurait pu constater en faisant preuve de la diligence requise ne peut plus se prévaloir de cette violation ultérieurement.142 |
6.
6.1 En l'occurrence, le tribunal arbitral considère qu'il faut d'abord examiner les arguments des défenderesses pour qui la décision de l'Agence du 5 novembre 1999 rendrait nuls les contrats litigieux en application de l'art. 20
SR 220 Première partie: Dispositions générales Titre premier: De la formation des obligations Chapitre I: Des obligations résultant d'un contrat CO Art. 20 - 1 Le contrat est nul s'il a pour objet une chose impossible, illicite ou contraire aux moeurs. |
|
1 | Le contrat est nul s'il a pour objet une chose impossible, illicite ou contraire aux moeurs. |
2 | Si le contrat n'est vicié que dans certaines de ses clauses, ces clauses sont seules frappées de nullité, à moins qu'il n'y ait lieu d'admettre que le contrat n'aurait pas été conclu sans elles. |
BGE 130 III 35 S. 41
6.2 Il est vrai que la mise en oeuvre éventuelle de l'art. 20
SR 220 Première partie: Dispositions générales Titre premier: De la formation des obligations Chapitre I: Des obligations résultant d'un contrat CO Art. 20 - 1 Le contrat est nul s'il a pour objet une chose impossible, illicite ou contraire aux moeurs. |
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1 | Le contrat est nul s'il a pour objet une chose impossible, illicite ou contraire aux moeurs. |
2 | Si le contrat n'est vicié que dans certaines de ses clauses, ces clauses sont seules frappées de nullité, à moins qu'il n'y ait lieu d'admettre que le contrat n'aurait pas été conclu sans elles. |
SR 291 Loi fédérale du 18 décembre 1987 sur le droit international privé (LDIP) LDIP Art. 190 - 1 La sentence est définitive dès sa communication. |
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1 | La sentence est définitive dès sa communication. |
2 | Elle ne peut être attaquée que: |
a | lorsque l'arbitre unique a été irrégulièrement désigné ou le tribunal arbitral irrégulièrement composé; |
b | lorsque le tribunal arbitral s'est déclaré à tort compétent ou incompétent; |
c | lorsque le tribunal arbitral a statué au-delà des demandes dont il était saisi ou lorsqu'il a omis de se prononcer sur un des chefs de la demande; |
d | lorsque l'égalité des parties ou leur droit d'être entendues en procédure contradictoire n'a pas été respecté; |
e | lorsque la sentence est incompatible avec l'ordre public. |
3 | En cas de décision incidente, seul le recours pour les motifs prévus à l'al. 2, let. a et b, est ouvert; le délai court dès la communication de la décision. |
4 | Le délai de recours est de 30 jours à compter de la communication de la sentence.152 |