Urteilskopf

128 II 329

38. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour de droit public dans la cause SI Valverne A contre Etat de Genève et Commission fédérale d'estimation du 1er arrondissement (recours de droit administratif) 1E.5/2002 du 5 septembre 2002

Regeste (de):

Regeste (fr):

Regesto (it):


Sachverhalt ab Seite 329

BGE 128 II 329 S. 329

A.- La société anonyme SI Valverne A S.A. a été constituée en 1959, avec comme but statutaire l'achat, la vente, la construction, la location et l'exploitation d'immeubles. Cette société a acquis, le
BGE 128 II 329 S. 330

22 décembre 1959, une parcelle de 1540 m2 située sur le territoire de la commune de Vernier, à proximité de l'extrémité sud-ouest de la piste de l'Aéroport international de Genève. En 1960, SI Valverne A a construit une villa familiale sur sa parcelle. Le capital-actions de la société, appartenant alors à M., a été vendu en 1977 dans son intégralité soit à T. seul, soit à ce dernier et à G., qui était alors son épouse. Celle-ci est devenue actionnaire unique de la société en 1994, en acquérant les actions détenues par T. dans la liquidation du régime matrimonial.
B.- Le 27 août 1992, SI Valverne A a écrit au Département des travaux publics de la République et canton de Genève (actuellement: Département de l'aménagement, de l'équipement et du logement) pour demander une indemnité d'expropriation, en relation avec les nuisances causées par l'exploitation de l'aéroport. L'instruction de cette affaire a été suspendue jusqu'au mois de mai 1999. A ce moment-là, SI Valverne A a adressé à la Commission fédérale d'estimation du 1er arrondissement une demande en indemnisation, dans laquelle elle a précisé et complété ses prétentions à l'encontre de l'Etat de Genève, déjà annoncées en 1992. Le 1er septembre 1999, le Département fédéral de l'environnement, des transports, de l'énergie et de la communication a octroyé à l'Etat de Genève le droit d'expropriation, sur la base de la loi fédérale sur l'aviation (LA; RS 748.0), afin qu'il puisse faire ouvrir, par le Président de la Commission fédérale d'estimation du 1er arrondissement, une procédure dans laquelle il serait statué sur les prétentions de SI Valverne A. Devant la Commission fédérale d'estimation, l'Etat de Genève a contesté la réalisation de la condition de l'imprévisibilité (l'une des conditions, avec celles de la spécialité et de la gravité, auxquelles la jurisprudence subordonne l'octroi d'une indemnité pour l'expropriation des droits de voisinage à cause des immissions de bruit de l'aéroport). La Commission fédérale d'estimation a rendu le 12 avril 2002 sa décision sur les prétentions de SI Valverne A. Elle a rejeté la demande d'indemnité pour expropriation formelle des droits de voisinage, en considérant en substance que SI Valverne A abusait manifestement d'un droit en demandant une indemnité d'expropriation formelle, car c'est son actionnaire unique qui profiterait de cette indemnité; or cette actionnaire était au courant des nuisances provenant de l'exploitation de l'aéroport au moment de l'acquisition du capital-actions.
BGE 128 II 329 S. 331

C.- Agissant par la voie du recours de droit administratif, SI Valverne A a demandé au Tribunal fédéral d'annuler la décision de la Commission fédérale d'estimation, de lui reconnaître le droit à une indemnité pour expropriation formelle des droits de voisinage et de renvoyer l'affaire à l'autorité inférieure pour la suite de l'instruction. Le Tribunal fédéral a rejeté le recours.
Erwägungen

Extrait des considérants:

2. La contestation porte sur la réalisation de la condition de l'imprévisibilité, la recourante reprochant à la Commission fédérale d'estimation de l'avoir appliquée en prenant en considération la situation de son actionnaire unique, et non pas sa propre situation de propriétaire foncier.
2.1 D'après la jurisprudence, développée sur la base des art. 5
SR 711 Loi fédérale du 20 juin 1930 sur l'expropriation (LEx)
LEx Art. 5
1    Peuvent faire l'objet de l'expropriation les droits réels immobiliers, les droits résultant des dispositions sur la propriété foncière en matière de rapports de voisinage, en outre les droits personnels des locataires ou fermiers de l'immeuble à exproprier.
2    Ces droits peuvent être supprimés ou restreints soit définitivement, soit temporairement.
de la loi fédérale du 20 juin 1930 sur l'expropriation (LEx; RS 711) et 684 CC, la collectivité publique, en sa qualité d'expropriante, peut être tenue d'indemniser le propriétaire foncier voisin d'une route nationale, d'une voie de chemin de fer ou d'un aéroport s'il subit, à cause des immissions de bruit, un dommage spécial, imprévisible et grave (cf. ATF 124 II 543 consid. 3a p. 548 et 5a p. 551 et les arrêts cités). Seule la condition de l'imprévisibilité est en l'espèce litigieuse. S'agissant des nuisances du trafic aérien sur l'un des aéroports nationaux, le Tribunal fédéral a posé la règle selon laquelle on ne tient pas compte de la condition de l'imprévisibilité quand le bien-fonds exposé au bruit a été acquis par l'exproprié avant le 1er janvier 1961 (ATF 121 II 317 consid. 6b p. 334 ss). En revanche, si l'exproprié a acquis son bien-fonds à partir du 1er janvier 1961, on doit considérer que les effets de l'exploitation de l'aéroport, avec le développement du trafic aérien, étaient prévisibles voire connus, ce qui exclut l'octroi d'une indemnité d'expropriation fondée sur l'art. 5
SR 711 Loi fédérale du 20 juin 1930 sur l'expropriation (LEx)
LEx Art. 5
1    Peuvent faire l'objet de l'expropriation les droits réels immobiliers, les droits résultant des dispositions sur la propriété foncière en matière de rapports de voisinage, en outre les droits personnels des locataires ou fermiers de l'immeuble à exproprier.
2    Ces droits peuvent être supprimés ou restreints soit définitivement, soit temporairement.
LEx (ATF 128 II 231 consid. 2.2 p. 234; ATF 121 II 317 consid. 6c p. 337 s.).
2.2 Le Tribunal fédéral a déjà considéré que, dans certaines situations particulières, le propriétaire d'un bien-fonds acquis après le 1er janvier 1961 pouvait néanmoins se prévaloir de l'imprévisibilité des nuisances de l'aéroport. Ainsi, d'après la jurisprudence, la date d'acquisition de l'immeuble par le précédent propriétaire est déterminante quand la demande d'indemnité d'expropriation est présentée par son héritier, actuel propriétaire - à savoir lorsque celui-ci a
BGE 128 II 329 S. 332

acquis l'immeuble après le 1er janvier 1961 par la dévolution de la succession -, ou encore lorsque le transfert de propriété à celui qui prétend à une indemnité d'expropriation résulte d'une libéralité entre vifs faite à titre d'avancement d'hoirie (ATF 128 II 231 consid. 2.3 p. 235; ATF 121 II 317 consid. 6c p. 337). Dans ces situations-là, le transfert de propriété n'a donc pas les mêmes effets, du point de vue du droit à une indemnité pour l'expropriation de droits de voisinage, que le transfert résultant d'une vente immobilière (cf. ATF 128 II 231 consid. 2.3 p. 235; ATF 111 Ib 233 consid. 2a p. 235). Le Tribunal fédéral ne s'est en revanche jamais prononcé au sujet d'une autre situation particulière: celle de la vente, après le 1er janvier 1961, de toutes les actions d'une société immobilière elle-même propriétaire, déjà avant le 1er janvier 1961, d'un immeuble exposé au bruit provenant de l'exploitation d'un aéroport national. On peut se demander si la vente des actions doit être assimilée à la vente de l'immeuble lui-même, quand bien même aucune vente immobilière au sens des art. 216 ss
SR 220 Première partie: Dispositions générales Titre premier: De la formation des obligations Chapitre I: Des obligations résultant d'un contrat
CO Art. 216 - 1 Les ventes d'immeubles ne sont valables que si elles sont faites par acte authentique.
1    Les ventes d'immeubles ne sont valables que si elles sont faites par acte authentique.
2    Les promesses de vente et les pactes de préemption, d'emption et de réméré portant sur un immeuble ne sont valables que s'ils ont été passés en la forme authentique.79
3    Les pactes de préemption qui ne fixent pas le prix à l'avance sont valables en la forme écrite.80
CO n'a été conclue, puisque le patrimoine de la société immobilière demeure intact. Telle est précisément la question litigieuse en l'espèce: la recourante, ou expropriée, est en effet une société immobilière stricto sensu (SI), soit une société anonyme dont le capital-actions est réparti entre quelques actionnaires ou réuni en une seule main et dont l'activité consiste dans l'exercice du droit de propriété sur un ou quelques immeubles (définition donnée par ARNOLD SCHLAEPFER, in La vente du capital-actions d'une société anonyme immobilière, thèse Genève 1948, p. 39). Son capital-actions a été vendu en bloc en 1977, par l'actionnaire unique d'alors, soit aux deux époux T., soit au mari seul, l'instruction n'ayant pas permis d'établir plus en détail les circonstances de cette vente; cela n'est toutefois pas décisif car on peut sans autre assimiler à une société à actionnaire unique une société immobilière propriétaire d'une villa familiale dont les actionnaires sont des époux. Il ressort en outre clairement du dossier que depuis 1994, la société recourante a une actionnaire unique.
2.3 L'expropriation des "droits résultant des dispositions sur la propriété foncière en matière de rapports de voisinage" (on parle aussi d'"expropriation des droits de voisinage" - cf. GRÉGORY BOVEY, L'expropriation des droits de voisinage, thèse Lausanne 2000) est expressément prévue à l'art. 5 al. 1
SR 711 Loi fédérale du 20 juin 1930 sur l'expropriation (LEx)
LEx Art. 5
1    Peuvent faire l'objet de l'expropriation les droits réels immobiliers, les droits résultant des dispositions sur la propriété foncière en matière de rapports de voisinage, en outre les droits personnels des locataires ou fermiers de l'immeuble à exproprier.
2    Ces droits peuvent être supprimés ou restreints soit définitivement, soit temporairement.
LEx; les droits expropriés ne sont pas des "droits personnels" (comme les droits des locataires ou fermiers - cf. art. 5 al. 1
SR 711 Loi fédérale du 20 juin 1930 sur l'expropriation (LEx)
LEx Art. 5
1    Peuvent faire l'objet de l'expropriation les droits réels immobiliers, les droits résultant des dispositions sur la propriété foncière en matière de rapports de voisinage, en outre les droits personnels des locataires ou fermiers de l'immeuble à exproprier.
2    Ces droits peuvent être supprimés ou restreints soit définitivement, soit temporairement.
in fine LEx), mais bien des droits attachés à la propriété foncière en vertu des art. 679 ss
SR 210 Code civil suisse du 10 décembre 1907
CC Art. 679 - 1 Celui qui est atteint ou menacé d'un dommage parce qu'un propriétaire excède son droit, peut actionner ce propriétaire pour qu'il remette les choses en l'état ou prenne des mesures en vue d'écarter le danger, sans préjudice de tous dommages-intérêts.
1    Celui qui est atteint ou menacé d'un dommage parce qu'un propriétaire excède son droit, peut actionner ce propriétaire pour qu'il remette les choses en l'état ou prenne des mesures en vue d'écarter le danger, sans préjudice de tous dommages-intérêts.
2    Lorsqu'une construction ou une installation prive l'immeuble voisin de certaines de ses qualités, le propriétaire ne peut être actionné que si les dispositions régissant la construction ou l'installation en vigueur lors de leur édification n'ont pas été respectées.560
CC. C'est
BGE 128 II 329 S. 333

pourquoi la partie expropriée, dans une telle procédure, ne peut être que le propriétaire du bien-fonds exposé aux immissions excessives (cf. art. 684 al. 2
SR 210 Code civil suisse du 10 décembre 1907
CC Art. 684 - 1 Le propriétaire est tenu, dans l'exercice de son droit, spécialement dans ses travaux d'exploitation industrielle, de s'abstenir de tout excès au détriment de la propriété du voisin.
1    Le propriétaire est tenu, dans l'exercice de son droit, spécialement dans ses travaux d'exploitation industrielle, de s'abstenir de tout excès au détriment de la propriété du voisin.
2    Sont interdits en particulier la pollution de l'air, les mauvaises odeurs, le bruit, les vibrations, les rayonnements ou la privation de lumière ou d'ensoleillement qui ont un effet dommageable et qui excédent les limites de la tolérance que se doivent les voisins d'après l'usage local, la situation et la nature des immeubles.573
CC). La condition de l'imprévisibilité n'est pas une condition prévue par les art. 679 ss
SR 210 Code civil suisse du 10 décembre 1907
CC Art. 679 - 1 Celui qui est atteint ou menacé d'un dommage parce qu'un propriétaire excède son droit, peut actionner ce propriétaire pour qu'il remette les choses en l'état ou prenne des mesures en vue d'écarter le danger, sans préjudice de tous dommages-intérêts.
1    Celui qui est atteint ou menacé d'un dommage parce qu'un propriétaire excède son droit, peut actionner ce propriétaire pour qu'il remette les choses en l'état ou prenne des mesures en vue d'écarter le danger, sans préjudice de tous dommages-intérêts.
2    Lorsqu'une construction ou une installation prive l'immeuble voisin de certaines de ses qualités, le propriétaire ne peut être actionné que si les dispositions régissant la construction ou l'installation en vigueur lors de leur édification n'ont pas été respectées.560
CC; c'est une création de la jurisprudence du Tribunal fédéral, s'appliquant dans le cadre de l'art. 5
SR 711 Loi fédérale du 20 juin 1930 sur l'expropriation (LEx)
LEx Art. 5
1    Peuvent faire l'objet de l'expropriation les droits réels immobiliers, les droits résultant des dispositions sur la propriété foncière en matière de rapports de voisinage, en outre les droits personnels des locataires ou fermiers de l'immeuble à exproprier.
2    Ces droits peuvent être supprimés ou restreints soit définitivement, soit temporairement.
LEx, lorsque l'expropriation a pour objet des "droits de voisinage" (cf. ATF 121 II 317 consid. 5a p. 330/331 et les arrêts cités). Il ne s'agit donc pas, en l'occurrence, d'interpréter une norme du droit civil définissant la propriété foncière, ni de déroger à une règle existante, mais bien de préciser une notion jurisprudentielle dont la portée est limitée aux cas d'expropriation selon la législation fédérale.
2.4 La société anonyme à actionnaire unique ("Einmanngesellschaft") - notamment lorsqu'elle a pour but l'exploitation d'un immeuble - ne correspond pas à la société anonyme type, telle que la voulait le législateur, c'est-à-dire une grande société de caractère capitaliste et collectiviste qui exerce une activité commerciale ou industrielle (cf. SCHLAEPFER, op. cit., p. 38). Ce genre de société anonyme, création de la pratique, est néanmoins toléré en droit suisse et, malgré l'identité économique entre la société et l'actionnaire, on les traite en principe comme des sujets de droit distincts, avec des patrimoines séparés (cf. notamment ATF 92 II 160 consid. 1 p. 164; ATF 85 I 91 consid. 2 p. 97). Cependant, la jurisprudence tient parfois compte de l'identité économique entre la société et son actionnaire lorsque, dans les rapports de la société avec des tiers, le principe de la bonne foi en affaires exige qu'il soit fait abstraction de son indépendance formelle; on évite ainsi, le cas échéant, de consacrer un abus de droit (principe de la transparence [Durchgriff], déduit de l'art. 2
SR 210 Code civil suisse du 10 décembre 1907
CC Art. 2 - 1 Chacun est tenu d'exercer ses droits et d'exécuter ses obligations selon les règles de la bonne foi.
1    Chacun est tenu d'exercer ses droits et d'exécuter ses obligations selon les règles de la bonne foi.
2    L'abus manifeste d'un droit n'est pas protégé par la loi.
CC - cf. ATF 113 II 31 consid. 2c p. 36; ATF 112 II 503 consid. 3b p. 506; arrêt 4C.335/1999 du 25 août 2000, publ. in SJ 2001 I p. 186 consid. 5c).
2.5 La Commission fédérale d'estimation s'est inspirée de la jurisprudence précitée pour considérer que la société recourante ne pouvait pas se prévaloir de son indépendance juridique afin de demander une indemnité qui profiterait à son actionnaire unique. On peut s'interroger sur la pertinence de cette application du principe de la transparence dans un cas d'expropriation formelle, où seul le propriétaire foncier - la société immobilière en l'occurrence - est admis à faire valoir des prétentions à une indemnité. Cette question peut toutefois demeurer indécise.
BGE 128 II 329 S. 334

En effet, pour appliquer la condition de l'imprévisibilité, il y a lieu de prendre en considération l'analogie de fait entre l'actionnaire unique de la société dont le seul actif est un immeuble, et un propriétaire foncier. De même, quand l'actionnaire unique de cette société vend à un tiers l'ensemble de ses actions, il donne à son tour à l'acheteur une position analogue à celle du propriétaire de l'actif social, en l'occurrence à celle du propriétaire de l'immeuble (cf. JEAN-JACQUES FATTON, La vente de toutes les actions d'une société immobilière, thèse Lausanne 1949, p. 41). La vente en bloc des actions équivaut économiquement à une vente immobilière, quand bien même elle s'en distingue sur le plan du droit civil, notamment à propos des exigences de forme, des conditions de la garantie, etc. (FATTON, op. cit., p. 43, 62 ss; ARTHUR MEIER-HAYOZ, Commentaire bernois, vol. IV/1/2, n. 75 ad art. 657
SR 210 Code civil suisse du 10 décembre 1907
CC Art. 657 - 1 Les contrats ayant pour objet le transfert de la propriété ne sont valables que s'ils sont reçus en la forme authentique.
1    Les contrats ayant pour objet le transfert de la propriété ne sont valables que s'ils sont reçus en la forme authentique.
2    Les dispositions pour cause de mort et le contrat de mariage demeurent soumis aux formes qui leur sont propres.
CC; HANS GIGER, Commentaire bernois, vol. VI/2/1/3, n. 20 ad art. 216
SR 220 Première partie: Dispositions générales Titre premier: De la formation des obligations Chapitre I: Des obligations résultant d'un contrat
CO Art. 216 - 1 Les ventes d'immeubles ne sont valables que si elles sont faites par acte authentique.
1    Les ventes d'immeubles ne sont valables que si elles sont faites par acte authentique.
2    Les promesses de vente et les pactes de préemption, d'emption et de réméré portant sur un immeuble ne sont valables que s'ils ont été passés en la forme authentique.79
3    Les pactes de préemption qui ne fixent pas le prix à l'avance sont valables en la forme écrite.80
CO). Cela étant, dans l'application de certaines normes du droit fédéral, on assimile la vente des actions d'une société immobilière à la vente de l'immeuble lui-même: il en va ainsi, en particulier, en matière d'autorisation pour l'acquisition d'immeubles par des personnes à l'étranger (cf. art. 4 al. 1 let. e
SR 211.412.41 Loi fédérale du 16 décembre 1983 sur l'acquisition d'immeubles par des personnes à l'étranger (LFAIE)
LFAIE Art. 4 Acquisition d'immeubles - 1 Par acquisition d'immeubles on entend:
1    Par acquisition d'immeubles on entend:
a  l'acquisition d'un droit de propriété, de superficie, d'habitation ou d'usufruit sur un immeuble;
b  la participation à une société sans personnalité juridique mais ayant la capacité d'acquérir et dont le but réel est l'acquisition d'immeubles;
c  l'acquisition d'un droit de propriété ou d'usufruit sur une part d'un fonds immobilier lorsque celle-ci ne fait pas l'objet d'un marché régulier, ou sur une part d'un patrimoine analogue;
cbis  l'acquisition d'un droit de propriété ou d'usufruit sur une action d'une SICAV immobilière dont les actions ne font pas l'objet d'un marché régulier, ou sur une action d'un patrimoine analogue.
d  ...
e  l'acquisition d'un droit de propriété ou d'usufruit sur une part d'une personne morale dont le but réel est l'acquisition d'immeubles, si les parts de cette personne morale ne sont pas cotées auprès d'une bourse en Suisse;
f  la constitution et l'exercice d'un droit d'emption, de préemption ou de réméré sur un immeuble ou une part au sens des let. b, c et e;
g  l'acquisition d'autres droits, qui confèrent à leur titulaire une position analogue à celle du propriétaire d'un immeuble.
2    Est assimilé à une acquisition d'immeubles le fait, pour une personne morale ou une société sans personnalité juridique mais ayant la capacité d'acquérir, de conserver, lors du transfert à l'étranger de son siège statutaire ou réel, un droit sur un immeuble dont l'acquisition n'est pas soustraite au régime de l'autorisation en vertu de l'art. 2, al. 2, let. a.12
de la loi fédérale sur l'acquisition d'immeubles par des personnes à l'étranger [LFAIE; RS 211.412.41]; JEAN-CHRISTOPHE PERRIG, L'acquisition d'immeubles en Suisse par des personnes à l'étranger, thèse Lausanne 1990, p. 210 ss), ou dans des cas d'application de la loi fédérale sur le droit foncier rural (LDFR; RS 211.412.11 - cf. art. 4 al. 2
SR 211.412.11 Loi fédérale du 4 octobre 1991 sur le droit foncier rural (LDFR)
LDFR Art. 4 Dispositions spéciales sur les entreprises agricoles - 1 Les dispositions spéciales de la présente loi relatives aux entreprises agricoles s'appliquent aux immeubles qui constituent, seuls ou avec d'autres immeubles, une entreprise agricole.
1    Les dispositions spéciales de la présente loi relatives aux entreprises agricoles s'appliquent aux immeubles qui constituent, seuls ou avec d'autres immeubles, une entreprise agricole.
2    Les dispositions sur les entreprises agricoles s'appliquent aussi aux participations majoritaires à des personnes morales dont les actifs consistent principalement en une entreprise agricole.
3    Les dispositions sur les entreprises agricoles ne s'appliquent pas aux immeubles agricoles qui:
a  font partie d'une entreprise agricole au sens de l'art. 8;
b  peuvent être soustraits de l'entreprise agricole avec l'approbation de l'autorité compétente en matière d'autorisation.
et 61 al. 3
SR 211.412.11 Loi fédérale du 4 octobre 1991 sur le droit foncier rural (LDFR)
LDFR Art. 61 Principe - 1 Celui qui entend acquérir une entreprise ou un immeuble agricole doit obtenir une autorisation.
1    Celui qui entend acquérir une entreprise ou un immeuble agricole doit obtenir une autorisation.
2    L'autorisation est accordée lorsqu'il n'existe aucun motif de refus.
3    Sont des acquisitions, le transfert de la propriété, ainsi que tout autre acte juridique équivalant économiquement à un transfert de la propriété.
LDFR; BEAT STALDER, in Christoph Bandli et al., Le droit foncier rural, Brugg 1998, n. 19 ss ad art. 61
SR 211.412.11 Loi fédérale du 4 octobre 1991 sur le droit foncier rural (LDFR)
LDFR Art. 61 Principe - 1 Celui qui entend acquérir une entreprise ou un immeuble agricole doit obtenir une autorisation.
1    Celui qui entend acquérir une entreprise ou un immeuble agricole doit obtenir une autorisation.
2    L'autorisation est accordée lorsqu'il n'existe aucun motif de refus.
3    Sont des acquisitions, le transfert de la propriété, ainsi que tout autre acte juridique équivalant économiquement à un transfert de la propriété.
LDFR; cf. aussi ATF 127 III 90 consid. 5a p. 97; ATF 97 I 548 consid. 2b p. 550), ou encore à propos de l'approbation de l'autorité tutélaire pour la vente d'immeubles du pupille, prévue à l'art. 404
SR 210 Code civil suisse du 10 décembre 1907
CC Art. 404 - 1 Le curateur a droit à une rémunération appropriée et au remboursement des frais justifiés; ces sommes sont prélevées sur les biens de la personne concernée. S'il s'agit d'un curateur professionnel, elles échoient à son employeur.
1    Le curateur a droit à une rémunération appropriée et au remboursement des frais justifiés; ces sommes sont prélevées sur les biens de la personne concernée. S'il s'agit d'un curateur professionnel, elles échoient à son employeur.
2    L'autorité de protection de l'adulte fixe la rémunération. Elle tient compte en particulier de l'étendue et de la complexité des tâches confiées au curateur.
3    Les cantons édictent les dispositions d'exécution et règlent la rémunération et le remboursement des frais lorsque les sommes afférentes ne peuvent être prélevées sur les biens de la personne concernée.
CC (cf. ALBERT GULER, Commentaire bâlois, n. 7 ad art. 404
SR 210 Code civil suisse du 10 décembre 1907
CC Art. 404 - 1 Le curateur a droit à une rémunération appropriée et au remboursement des frais justifiés; ces sommes sont prélevées sur les biens de la personne concernée. S'il s'agit d'un curateur professionnel, elles échoient à son employeur.
1    Le curateur a droit à une rémunération appropriée et au remboursement des frais justifiés; ces sommes sont prélevées sur les biens de la personne concernée. S'il s'agit d'un curateur professionnel, elles échoient à son employeur.
2    L'autorité de protection de l'adulte fixe la rémunération. Elle tient compte en particulier de l'étendue et de la complexité des tâches confiées au curateur.
3    Les cantons édictent les dispositions d'exécution et règlent la rémunération et le remboursement des frais lorsque les sommes afférentes ne peuvent être prélevées sur les biens de la personne concernée.
CC). Pareille appréciation économique des faits, lors de la vente des actions d'une société immobilière, est également courante en droit fiscal (cf. notamment ATF 85 I 91 consid. 3 p. 99 ss; URS P. GÄHWILER, Die Besteuerung der Immobiliengesellschaft und der daran Beteiligten, thèse Saint-Gall 1991, p. 131 ss; OLIVIER BOURGEOIS, Le statut fiscal des sociétés immobilières dans les cantons de Vaud et de Genève, thèse Lausanne 1964, p. 191 ss). Pour déterminer si le propriétaire actuel de l'immeuble peut se prévaloir de la condition de l'imprévisibilité, la jurisprudence admet déjà que le juge de l'expropriation doit dans certaines circonstances apprécier la situation sous l'angle économique (cf. ATF 128 II 231
BGE 128 II 329 S. 335

consid. 2.4.2.4 p. 239 à propos du caractère successoral du transfert de la propriété dans le cadre familial). Une telle appréciation économique s'impose dans le cas particulier: il faut examiner si la personne qui domine la société immobilière, ou son actionnaire unique, pouvait prévoir les nuisances de l'aéroport au moment où elle a obtenu la disposition effective de l'immeuble en acquérant le capital-actions; en d'autres termes, la vente en bloc des actions doit de ce point de vue être assimilée à la vente de l'immeuble lui-même, la société immobilière (soit l'expropriée) ne pouvant se prévaloir de l'imprévisibilité qu'au cas où son capital-actions n'aurait pas changé de mains depuis le 1er janvier 1961 (voire dans l'hypothèse où ces actions auraient ensuite été transmises par voie successorale, cf. supra, consid. 2.2). Il en résulte que, dans le cas particulier, la Commission fédérale d'estimation était fondée à considérer que la condition de l'imprévisibilité n'était pas satisfaite, le capital-actions de la société recourante n'appartenant plus, au moment de l'ouverture de la procédure d'expropriation, à la personne qui le détenait le 1er janvier 1961. Le recours de droit administratif doit donc être rejeté.
Information de décision   •   DEFRITEN
Document : 128 II 329
Date : 05 septembre 2002
Publié : 31 décembre 2003
Source : Tribunal fédéral
Statut : 128 II 329
Domaine : ATF - Droit administratif et droit international public
Objet : Expropriation formelle, droits de voisinage (art. 5 LEx). Pour l'application de la condition de l'imprévisibilité, lorsque


Répertoire des lois
CC: 2 
SR 210 Code civil suisse du 10 décembre 1907
CC Art. 2 - 1 Chacun est tenu d'exercer ses droits et d'exécuter ses obligations selon les règles de la bonne foi.
1    Chacun est tenu d'exercer ses droits et d'exécuter ses obligations selon les règles de la bonne foi.
2    L'abus manifeste d'un droit n'est pas protégé par la loi.
404 
SR 210 Code civil suisse du 10 décembre 1907
CC Art. 404 - 1 Le curateur a droit à une rémunération appropriée et au remboursement des frais justifiés; ces sommes sont prélevées sur les biens de la personne concernée. S'il s'agit d'un curateur professionnel, elles échoient à son employeur.
1    Le curateur a droit à une rémunération appropriée et au remboursement des frais justifiés; ces sommes sont prélevées sur les biens de la personne concernée. S'il s'agit d'un curateur professionnel, elles échoient à son employeur.
2    L'autorité de protection de l'adulte fixe la rémunération. Elle tient compte en particulier de l'étendue et de la complexité des tâches confiées au curateur.
3    Les cantons édictent les dispositions d'exécution et règlent la rémunération et le remboursement des frais lorsque les sommes afférentes ne peuvent être prélevées sur les biens de la personne concernée.
657 
SR 210 Code civil suisse du 10 décembre 1907
CC Art. 657 - 1 Les contrats ayant pour objet le transfert de la propriété ne sont valables que s'ils sont reçus en la forme authentique.
1    Les contrats ayant pour objet le transfert de la propriété ne sont valables que s'ils sont reçus en la forme authentique.
2    Les dispositions pour cause de mort et le contrat de mariage demeurent soumis aux formes qui leur sont propres.
679 
SR 210 Code civil suisse du 10 décembre 1907
CC Art. 679 - 1 Celui qui est atteint ou menacé d'un dommage parce qu'un propriétaire excède son droit, peut actionner ce propriétaire pour qu'il remette les choses en l'état ou prenne des mesures en vue d'écarter le danger, sans préjudice de tous dommages-intérêts.
1    Celui qui est atteint ou menacé d'un dommage parce qu'un propriétaire excède son droit, peut actionner ce propriétaire pour qu'il remette les choses en l'état ou prenne des mesures en vue d'écarter le danger, sans préjudice de tous dommages-intérêts.
2    Lorsqu'une construction ou une installation prive l'immeuble voisin de certaines de ses qualités, le propriétaire ne peut être actionné que si les dispositions régissant la construction ou l'installation en vigueur lors de leur édification n'ont pas été respectées.560
684
SR 210 Code civil suisse du 10 décembre 1907
CC Art. 684 - 1 Le propriétaire est tenu, dans l'exercice de son droit, spécialement dans ses travaux d'exploitation industrielle, de s'abstenir de tout excès au détriment de la propriété du voisin.
1    Le propriétaire est tenu, dans l'exercice de son droit, spécialement dans ses travaux d'exploitation industrielle, de s'abstenir de tout excès au détriment de la propriété du voisin.
2    Sont interdits en particulier la pollution de l'air, les mauvaises odeurs, le bruit, les vibrations, les rayonnements ou la privation de lumière ou d'ensoleillement qui ont un effet dommageable et qui excédent les limites de la tolérance que se doivent les voisins d'après l'usage local, la situation et la nature des immeubles.573
CO: 216
SR 220 Première partie: Dispositions générales Titre premier: De la formation des obligations Chapitre I: Des obligations résultant d'un contrat
CO Art. 216 - 1 Les ventes d'immeubles ne sont valables que si elles sont faites par acte authentique.
1    Les ventes d'immeubles ne sont valables que si elles sont faites par acte authentique.
2    Les promesses de vente et les pactes de préemption, d'emption et de réméré portant sur un immeuble ne sont valables que s'ils ont été passés en la forme authentique.79
3    Les pactes de préemption qui ne fixent pas le prix à l'avance sont valables en la forme écrite.80
LDFR: 4 
SR 211.412.11 Loi fédérale du 4 octobre 1991 sur le droit foncier rural (LDFR)
LDFR Art. 4 Dispositions spéciales sur les entreprises agricoles - 1 Les dispositions spéciales de la présente loi relatives aux entreprises agricoles s'appliquent aux immeubles qui constituent, seuls ou avec d'autres immeubles, une entreprise agricole.
1    Les dispositions spéciales de la présente loi relatives aux entreprises agricoles s'appliquent aux immeubles qui constituent, seuls ou avec d'autres immeubles, une entreprise agricole.
2    Les dispositions sur les entreprises agricoles s'appliquent aussi aux participations majoritaires à des personnes morales dont les actifs consistent principalement en une entreprise agricole.
3    Les dispositions sur les entreprises agricoles ne s'appliquent pas aux immeubles agricoles qui:
a  font partie d'une entreprise agricole au sens de l'art. 8;
b  peuvent être soustraits de l'entreprise agricole avec l'approbation de l'autorité compétente en matière d'autorisation.
61
SR 211.412.11 Loi fédérale du 4 octobre 1991 sur le droit foncier rural (LDFR)
LDFR Art. 61 Principe - 1 Celui qui entend acquérir une entreprise ou un immeuble agricole doit obtenir une autorisation.
1    Celui qui entend acquérir une entreprise ou un immeuble agricole doit obtenir une autorisation.
2    L'autorisation est accordée lorsqu'il n'existe aucun motif de refus.
3    Sont des acquisitions, le transfert de la propriété, ainsi que tout autre acte juridique équivalant économiquement à un transfert de la propriété.
LEx: 5
SR 711 Loi fédérale du 20 juin 1930 sur l'expropriation (LEx)
LEx Art. 5
1    Peuvent faire l'objet de l'expropriation les droits réels immobiliers, les droits résultant des dispositions sur la propriété foncière en matière de rapports de voisinage, en outre les droits personnels des locataires ou fermiers de l'immeuble à exproprier.
2    Ces droits peuvent être supprimés ou restreints soit définitivement, soit temporairement.
LFAIE: 4
SR 211.412.41 Loi fédérale du 16 décembre 1983 sur l'acquisition d'immeubles par des personnes à l'étranger (LFAIE)
LFAIE Art. 4 Acquisition d'immeubles - 1 Par acquisition d'immeubles on entend:
1    Par acquisition d'immeubles on entend:
a  l'acquisition d'un droit de propriété, de superficie, d'habitation ou d'usufruit sur un immeuble;
b  la participation à une société sans personnalité juridique mais ayant la capacité d'acquérir et dont le but réel est l'acquisition d'immeubles;
c  l'acquisition d'un droit de propriété ou d'usufruit sur une part d'un fonds immobilier lorsque celle-ci ne fait pas l'objet d'un marché régulier, ou sur une part d'un patrimoine analogue;
cbis  l'acquisition d'un droit de propriété ou d'usufruit sur une action d'une SICAV immobilière dont les actions ne font pas l'objet d'un marché régulier, ou sur une action d'un patrimoine analogue.
d  ...
e  l'acquisition d'un droit de propriété ou d'usufruit sur une part d'une personne morale dont le but réel est l'acquisition d'immeubles, si les parts de cette personne morale ne sont pas cotées auprès d'une bourse en Suisse;
f  la constitution et l'exercice d'un droit d'emption, de préemption ou de réméré sur un immeuble ou une part au sens des let. b, c et e;
g  l'acquisition d'autres droits, qui confèrent à leur titulaire une position analogue à celle du propriétaire d'un immeuble.
2    Est assimilé à une acquisition d'immeubles le fait, pour une personne morale ou une société sans personnalité juridique mais ayant la capacité d'acquérir, de conserver, lors du transfert à l'étranger de son siège statutaire ou réel, un droit sur un immeuble dont l'acquisition n'est pas soustraite au régime de l'autorisation en vertu de l'art. 2, al. 2, let. a.12
Répertoire ATF
111-IB-233 • 112-II-503 • 113-II-31 • 121-II-317 • 124-II-543 • 127-III-90 • 128-II-231 • 128-II-329 • 85-I-91 • 92-II-160 • 97-I-548
Weitere Urteile ab 2000
1E.5/2002 • 4C.335/1999
Répertoire de mots-clés
Trié par fréquence ou alphabet
société immobilière • actionnaire unique • droit de voisinage • capital-actions • tribunal fédéral • société anonyme • indemnité d'expropriation • lausanne • exproprié • expropriation formelle • recours de droit administratif • propriété foncière • exploitant de l'aéroport • loi fédérale sur l'aviation • loi fédérale sur l'acquisition d'immeubles par des personnes à l'étranger • loi fédérale sur le droit foncier rural • vente d'immeuble • calcul • vue • droit civil
... Les montrer tous
SJ
2001 I S.186