123 II 49
8. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour de droit public du 20 février 1997 dans la cause B. et R. contre Tribunal administratif du canton de Vaud et Office de contrôle des habitants et de police des étrangers du canton de Vaud (recours de droit administratif)
Regeste (de):
- Art. 7 ANAG und Art. 105 Abs. 2 OG; Aufenthaltsbewilligung, Scheinehe, Rechtsmissbrauch, Prüfungsbefugnis, Sachverhalts- und Rechtsfragen.
- Bestehen nicht genügend auf eine Scheinehe hindeutende Anhaltspunkte, so darf nicht einzig aufgrund von ihnen darauf geschlossen werden, dass es einem Rechtsmissbrauch gleichkommt, sich auf eine bestehende Ehe zu berufen (E. 4 und 5).
- Ungenügende Sachverhaltserhebung, Fehlen einer klaren Unterscheidung zwischen Sachverhalts- und Rechtsfragen; Zurückweisung an das kantonale Verwaltungsgericht (E. 6).
Regeste (fr):
- Art. 7
LSEE et art. 105 al. 2
OJ; autorisation de séjour, mariage fictif, abus de droit, pouvoir d'examen, questions de fait et de droit.
- Des indices insuffisants de mariage fictif ne permettent pas à eux seuls de retenir un abus du droit à se prévaloir d'un mariage existant (consid. 4 et 5).
- Etat de fait incomplet, absence de distinction claire des questions de fait et de droit; renvoi au tribunal administratif cantonal (consid. 6).
Regesto (it):
- Art. 7 LDDS e art. 105 cpv. 2 OG; permesso di dimora, matrimonio fittizio, abuso di diritto, potere d'esame, accertamenti di fatto e di diritto.
- Indizi insufficienti per ammettere che vi sia un matrimonio fittizio non permettono, di per sé, di ritenere che vi sia abuso di diritto nel prevalersi di un matrimonio esistente (consid. 4 e 5).
- Stato di fatto incompleto, assenza di una chiara distinzione tra gli accertamenti di fatto e di diritto; rinvio al tribunale cantonale amministrativo (consid. 6).
Sachverhalt ab Seite 49
BGE 123 II 49 S. 49
A.- B., ressortissante roumaine née en 1957, est entrée en Suisse en 1990. Après avoir sollicité en vain une demande d'asile, elle a été refoulée le 25 mai 1992.
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Par la suite, elle a épousé A., ressortissant suisse né en 1941, et a obtenu en janvier 1993 une autorisation de séjour, laquelle a également été délivrée à sa fille, R., ressortissante roumaine née en 1979 d'un premier mariage. Par décision du 16 novembre 1995, notifiée le 23 novembre 1995, l'Office cantonal de contrôle des habitants et de police des étrangers du canton de Vaud (ci-après: l'Office cantonal) a refusé de renouveler les autorisations de séjour de B. et de sa fille, considérant que l'intéressée s'était mariée uniquement dans le but d'éluder les dispositions de police des étrangers. Par arrêt du 3 septembre 1996, le Tribunal administratif a rejeté le recours déposé par l'intéressée contre cette décision, considérant que le point de savoir si le mariage était fictif pouvait rester indécis car, de toute façon, l'intéressée invoquait abusivement un mariage qui n'existait plus que formellement pour obtenir une prolongation de son autorisation de séjour et de celle de sa fille.
B.- Agissant le 4 octobre 1996 par la voie du recours de droit administratif, B., qui intervient également pour sa fille, demande au Tribunal fédéral d'annuler l'arrêt du Tribunal administratif du 3 septembre 1996 et d'inviter l'Office cantonal à renouveler leurs autorisations de séjour. L'Office cantonal s'en remet aux déterminations du Tribunal administratif, qui renonce à déposer des observations. L'Office fédéral des étrangers conclut au rejet du recours dans la mesure où il est recevable. Le Tribunal fédéral admet le recours et renvoie l'affaire au Tribunal administratif pour complément d'instruction et nouvelle décision.
Erwägungen
Extrait des considérants:
4. a) En l'espèce, l'autorité intimée a retenu que la recourante affirmait être tombée amoureuse de son futur mari dès leur première rencontre en 1992. Toutefois, interrogés par la police en mai 1995 dans le cadre d'une enquête pénale, les époux avaient tous deux fait allusion à un mariage blanc, de sorte que l'on pouvait douter de leur volonté de créer une véritable union conjugale. Toujours selon l'autorité intimée, la question du caractère fictif du mariage pouvait cependant rester indécise car, de toute façon, la recourante invoquait abusivement un mariage qui n'existait plus que formellement pour obtenir la prolongation de son autorisation de séjour et de celle de sa fille. En effet, l'intéressée, qui après le refus
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de sa demande d'asile ne cachait pas son intérêt à épouser un Suisse, avait été présentée à son futur époux par une amie et avait proposé à celui-ci une somme d'argent en échange d'un mariage. Or, il était évident qu'elle tirait d'une telle union des avantages manifestes en matière de police des étrangers. En outre, bien qu'elle durât toujours, la vie commune des époux avait été marquée par de nombreux incidents et, surtout, par l'activité de prostituée régulièrement exercée par la recourante en plein accord avec son époux. L'autorité intimée concluait ainsi à l'existence manifeste d'un abus de droit et précisait encore que l'intention, récemment exprimée par l'époux, d'adopter sa belle-fille, ne pouvait renverser cette très forte présomption. b) Dans son mémoire de recours, l'intéressée déclare qu'elle-même et son époux forment maintenant un véritable couple, qu'elle a définitivement renoncé à se prostituer, qu'elle dispose d'une formation d'infirmière acquise en Roumanie et qu'elle a suivi en Suisse un cours d'auxiliaire de santé organisé par la Croix-Rouge. A titre de faits nouveaux, elle indique qu'elle a passé les examens sanctionnant le cours suivi et qu'elle a effectué un stage du 10 juin au 9 septembre 1996 dans un hôpital, lequel lui a délivré un certificat attestant qu'elle avait exécuté ses tâches consciencieusement et avec ponctualité. Par ailleurs, elle souligne que la volonté de son époux d'adopter sa fille date en réalité de quelques années déjà.
5. a) Lorsque le recours de droit administratif est dirigé, comme en l'espèce, contre la décision d'une autorité judiciaire, le Tribunal fédéral ne peut revoir les faits constatés dans la décision que s'ils sont manifestement inexacts ou incomplets ou s'ils ont été établis au mépris de règles essentielles de procédure (art. 105 al. 2
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police des étrangers, vie conjugale houleuse, activité de prostituée. Le dossier révèle en outre un élément pertinent supplémentaire en faveur du mariage fictif: l'époux, né en 1941, est de seize ans plus âgé que la recourante, née en 1957. bb) Toutefois, il ne faut pas sous-estimer d'autres indices allant en sens contraire. Notamment, ainsi que l'a constaté l'autorité intimée, les époux vivent toujours ensemble. De plus, il ressort du dossier, soit des procès-verbaux d'interrogatoires des époux par la police les 19 mai, 31 mai et 7 juillet 1995, que la vie commune - avec la fille de la recourante - dure pratiquement depuis le mariage du 27 novembre 1992, soit depuis près de quatre ans lors de la décision attaquée du 3 septembre 1996. Puis, selon ces mêmes déclarations, les époux ont eu, voire ont toujours selon la recourante, des relations sexuelles. En outre, l'intéressée a produit devant l'autorité cantonale trente-quatre photos, portant sur une période de novembre 1992 à juin 1995, qui montrent pour la plupart les époux enlacés lors du mariage, lors de vacances en Roumanie ou lors de festivités diverses, et qui ont une apparence de vérité. Enfin, le consentement du père de R. du 19 octobre 1993, figurant au dossier, à l'adoption de sa fille par A., établit que des démarches ont effectivement été entreprises en vue de cette adoption il y a trois ans déjà. cc) Ainsi, les indices qui se dégagent de l'arrêt attaqué et du dossier sont divergents; ils ne permettent donc pas de conclure à un mariage fictif. En particulier, il est significatif que la vie commune dure pratiquement depuis le mariage de manière ininterrompue, même si c'est avec des hauts et des bas. c) L'autorité intimée a laissé ouverte la question du mariage fictif car, de toute façon, la recourante invoquait abusivement un mariage qui n'existait plus que formellement. Le Tribunal administratif a tiré cette conclusion essentiellement des indices de mariage fictif qu'il avait rassemblés. Toutefois, de tels indices ne suffisent pas à fonder un abus de droit au sens de la jurisprudence (ATF 121 II 97 consid. 4a p. 103/104). L'art. 7 al. 2
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permettent de retenir l'abus de droit soient réunis. Or, il s'agit-là d'une situation différente, soit le maintien d'un mariage, qui n'existe plus que formellement, dans le seul but d'obtenir une autorisation de séjour. Au demeurant, dans ce cadre, il n'est pas exclu de tenir également compte des faits constituant des indices de mariage fictif, s'ils sont manifestement établis, pour déterminer s'il y a abus de droit. d) D'autres éléments que les indices de mariage fictif mentionnés au considérant b ci-dessus ressortent, non pas de l'arrêt attaqué, mais des procès-verbaux précités, et laissent penser que le mariage de la recourante n'est qu'un cadre fictif maintenu pour des raisons étrangères à l'accomplissement d'une vie conjugale et familiale protégée par l'art. 7 al. 1
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de l'union conjugale, retirée par la suite. Enfin, il a déclaré: "Maintenant, j'ai vraiment envie de divorcer (...). Je reconnais que j'ai fait une connerie d'accepter ce mariage en blanc." Ainsi, certains indices laissent penser que les époux maintiennent leur mariage pour d'autres motifs que la vie conjugale. Toutefois, ces éléments ne sont pas suffisamment établis pour conclure à l'abus de droit; des informations essentielles manquent au dossier. En particulier, on ignore si et à quelles conditions les époux ont l'intention de poursuivre la vie commune. On ne sait pas non plus si l'époux de la recourante a toujours l'intention d'adopter sa belle-fille, soit, notamment, si une demande formelle a finalement été déposée. Enfin, il n'est pas établi que les allégués de la recourante à l'intention de l'autorité intimée, selon lesquels elle aurait commencé une nouvelle formation dans le domaine de la santé, soient avérés. De même, on ignore si le contrat de bail du salon de massage a été résilié, ce qui devrait normalement être le cas si la recourante a effectivement changé d'activité.
6. a) La restriction du pouvoir d'examen découlant de l'art. 105 al. 2
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Par ailleurs, la limitation de l'art. 105 al. 2
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BGE 123 II 49 S. 55
Si le Tribunal fédéral dispose d'un pouvoir d'examen limité en ce qui concerne l'examen des faits, il applique d'office et librement le droit fédéral. Compte tenu de cette différence dans le pouvoir d'examen, et pour que le but visé par l'extension des cas où intervient l'art. 105 al. 2
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