119 V 277
39. Arrêt du 16 juillet 1993 dans la cause Caisse de pensions de l'Etat de Vaud contre T. et Tribunal des assurances du canton de Vaud
Regeste (de):
- Art. 4 Abs. 2 BV: Anspruch auf eine Witwerrente; Übergangsrecht.
- - Gesetz vom 28. Juni 1984 über die Pensionskasse des Kantons Waadt, in Kraft seit 1. Januar 1985. Ab diesem Datum hat der überlebende Ehepartner eines bei der Pensionskasse des Kantons Waadt versicherten Beamten unabhängig vom Geschlecht unter bestimmten Voraussetzungen Anspruch auf Hinterlassenenleistungen (Art. 60). Vor diesem Datum konnte der Witwer solche Leistungen nur unter sehr eingeschränkten Voraussetzungen geltend machen.
- - Gesetzmässigkeit der Übergangsnorm von Art. 132 Abs. 1, wonach der Witwer einer Versicherten, die vor dem 1. Januar 1985 pensioniert wurde, jedoch nach diesem Datum gestorben ist, nur eine Rente unter den nach altem Recht geltenden Voraussetzungen erwerben kann.
- - Art. 4 Abs. 2 BV ist nicht rückwirkend anwendbar.
Regeste (fr):
- Art. 4 al. 2
SR 101 Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999
Cst. Art. 4 Langues nationales - Les langues nationales sont l'allemand, le français, l'italien et le romanche.
- - Loi du 18 juin 1984 sur la Caisse de pensions de l'Etat de Vaud, en vigueur depuis le 1er janvier 1985. Depuis cette date, le conjoint survivant d'un fonctionnaire affilié à la Caisse de pensions de l'Etat de Vaud a droit à une pension de survivant, à des conditions déterminées, sans distinction de sexe (art. 60). Auparavant, le veuf ne pouvait prétendre une telle pension qu'à des conditions très restrictives.
- - Légalité d'une disposition de droit transitoire de la loi précitée (art. 132 al. 1), d'après laquelle le veuf d'une assurée qui avait pris sa retraite avant le 1er janvier 1985, mais qui est décédée après cette date, ne peut bénéficier d'une pension de survivant qu'aux conditions de l'ancien droit.
- - L'art. 4 al. 2
SR 101 Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999
Cst. Art. 4 Langues nationales - Les langues nationales sont l'allemand, le français, l'italien et le romanche.
Regesto (it):
- Art. 4 cpv. 2 Cost.: diritto a rendita di vedovo; diritto transitorio.
- - Legge del 18 giugno 1984 sulla Cassa pensioni del Canton Vaud, in vigore dal 1o gennaio 1985. Dopo detta data il congiunto di un funzionario, affiliato alla Cassa pensioni del Canton Vaud, ha diritto alla pensione per superstiti, a condizioni determinate, senza distinzione di sesso (art. 60). In precedenza il vedovo non poteva pretendere la pensione che a condizioni molto restrittive.
- - Legalità di una disposizione di diritto transitorio della legge precitata (art. 132 cpv. 1) secondo la quale il vedovo di un'assicurata pensionata prima del 1o gennaio 1985 e decessa dopo tale data non può essere posto al beneficio di pensione che alle condizioni del vecchio diritto.
- - L'art. 4 cpv. 2 Cost. non esplica effetto retroattivo.
Sachverhalt ab Seite 278
BGE 119 V 277 S. 278
A.- Pierrette T., née en 1919, mariée, était affiliée à la Caisse de pensions de l'Etat de Vaud (CPEV) en sa qualité de fonctionnaire. A partir du 1er août 1978, elle a bénéficié d'une pension de retraite, jusqu'à son décès survenu le 24 octobre 1991. Le mari de la défunte, Philippe T., né en 1919, lui-même fonctionnaire retraité de l'Etat de Vaud depuis 1981, a fait valoir auprès de la CPEV son droit à une pension de conjoint survivant en application de l'art. 60 let. b de la loi du 18 juin 1984 sur la Caisse de pensions de l'Etat de Vaud, en vigueur depuis le 1er janvier 1985 (RSV 1.7; en abrégé: LCPV), qui dispose ce qui suit: "Le conjoint d'un assuré ou d'un pensionné qui décède a droit à une pension jusqu'à sa mort ou son remariage, (...)
b) s'il a 45 ans révolus; (...)"
La CPEV a refusé de faire droit à cette demande en se fondant sur l'art. 132 al. 1 LCPV d'après lequel: "Lorsque la retraite, l'invalidité définitive ou la mort est survenue avant l'entrée en vigueur de la présente loi, les pensions et les suppléments temporaires servis par la Caisse, ainsi que les pensions qui en découleront, sont dus sans modification conformément à la législation abrogée." Or, selon l'art. 50 de la loi du 12 décembre 1951 sur la Caisse de pensions (aLCPV), le veuf d'une assurée ou pensionnée n'avait pas droit à une pension, sauf dans des cas exceptionnels d'invalidité totale ou de ressources notoirement insuffisantes.
B.- Après être intervenu en vain auprès du conseil d'administration de la CPEV, Philippe T. a ouvert action, le 13 février 1992, devant le Tribunal des assurances du canton de Vaud en concluant, notamment, à l'allocation de la pension litigieuse. Par jugement du 18 juin 1992, la Cour cantonale a admis la demande, avec suite de dépens, et a invité la caisse défenderesse à statuer
BGE 119 V 277 S. 279
sur la quotité de la rente de veuf à servir au demandeur, ainsi que sur la date à partir de laquelle cette prestation est due.
C.- La CPEV interjette recours de droit administratif contre ce jugement qu'elle demande, implicitement, d'annuler. Philippe T. conclut au rejet du recours, avec suite de frais et dépens. Quant à l'Office fédéral des assurances sociales (OFAS), il en propose également le rejet, au terme d'un préavis circonstancié. Les moyens des parties et les observations de l'autorité fédérale de surveillance seront exposés dans le corps de l'arrêt pour autant que de besoin.
Erwägungen
Considérant en droit:
1. (Recevabilité et pouvoir d'examen).
2. En procédure cantonale, l'intimé s'était fondé sur un premier moyen qui a toutefois été écarté par les juges cantonaux. Il soutenait qu'aux termes de l'art. 132 al. 1 LCPV, le fait déterminant son droit à une pension de survivant n'était pas la retraite de son épouse, antérieure au 1er janvier 1985, mais la mort de celle-ci survenue, elle, après cette date. Il en résulterait que la règle de droit transitoire ne lui serait pas opposable dans le cas particulier. C'est avec raison que le tribunal cantonal n'a pas retenu cette interprétation de la disposition légale en cause. En effet, la norme de base, c'est-à-dire l'art. 60 LCPV distingue clairement deux catégories de personnes dont le décès ouvre droit, à des conditions déterminées, à une pension de conjoint survivant: les assurés et les pensionnés. Or, il est constant que depuis le 1er août 1978, feue Pierrette T. faisait partie de la seconde catégorie. C'est donc bien une pension de survivant "découlant" de la pension de retraite servie à son épouse que l'intimé réclame à la recourante. A cet égard et contrairement à ce que celui-ci allègue de manière répétée dans ses mémoires, le fait qu'il est lui-même un ancien fonctionnaire de l'Etat de Vaud ayant cotisé à la caisse de pension pendant près de quarante ans avant de bénéficier d'une pension de retraite est sans incidence sur son droit à une pension de conjoint survivant. Dès lors, s'il est bien exact que le droit éventuel de l'intimé à une pension de survivant résulte du décès de Pierrette T., il n'en demeure pas moins qu'au regard de l'art. 132 al. 1 LCPV, c'est la date à laquelle est né le droit de la défunte à une pension de retraite, c'est-à-dire le jour où elle a troqué
BGE 119 V 277 S. 280
son statut d'assurée contre celui de pensionnée, qui est déterminante. Or, il est constant que cette date est antérieure à l'entrée en vigueur du nouveau droit.
3. a) Aussi bien, pour accueillir la demande, les juges cantonaux ont-ils suivi un autre raisonnement: se référant aux principes développés par la Cour de céans dans l'arrêt ATF 116 V 198, ils ont considéré que l'art. 132 al. 1 LCPV avait pour effet, en ce qui concerne le droit à une pension de conjoint survivant, de prolonger de manière indue une situation inégalitaire contraire au principe constitutionnel de l'égalité entre les sexes (art. 4 al. 2
SR 101 Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 Cst. Art. 4 Langues nationales - Les langues nationales sont l'allemand, le français, l'italien et le romanche. |
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BGE 119 V 277 S. 281
La recourante arguë d'autre part du fait que la pension de conjoint survivant "n'a pas d'existence propre, tant en droit que du point de vue de son financement; elle ne fait que découler de la prestation de retraite principale". Dans le cas d'espèce, Pierrette T. a bénéficié d'une pension de retraite non seulement avant l'entrée en vigueur de la nouvelle LCPV mais aussi avant le 14 juin 1981. Or, si, avant cette dernière date, son mari n'aurait pu invoquer le principe d'égalité des sexes pour se faire reconnaître le droit à une pension de conjoint survivant, il ne le peut pas non plus aujourd'hui, sous peine de donner à l'art. 4 al. 2
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4. a) Si l'aspect actuariel ne saurait être négligé, le recours doit cependant être admis pour une raison purement juridique, ainsi qu'on va le voir. En effet, la situation qui se présente en l'espèce diffère fondamentalement de celle qui existait dans l'arrêt ATF 116 V 198. Dans ce dernier cas, le gouvernement saint-gallois avait expressément maintenu une inégalité de traitement entre les sexes dans une disposition réglementaire nouvelle promulguée postérieurement au 14 juin 1981, ce qui justifiait une intervention du juge après l'expiration du "délai de grâce" concédé aux cantons pour se conformer à l'art. 4 al. 2
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BGE 119 V 277 S. 282
le droit de Pierrette T. à une pension de retraite est né le 1er août 1978, sous l'empire de la loi de 1951, et c'est donc aussi d'après cette loi que le droit de son conjoint à une pension de survivant doit être déterminé. Il est en effet établi, ainsi qu'on l'a vu, que dans le système vaudois, le droit à la pension de conjoint survivant est un accessoire du droit à la pension de retraite. On ne voit dès lors pas pourquoi le nouveau droit devrait s'appliquer à la pension du conjoint survivant alors que le droit à la pension de retraite du conjoint décédé résultait de l'ancien droit. C'est ce que le législateur cantonal a voulu signifier en édictant l'art. 132 LCPV qui ne réserve que certaines exceptions à ce principe, dont aucune n'entre en ligne de compte ici (cf. art. 132 al. 2 LCPV). b) Au demeurant, la solution contraire aurait des effets pratiques difficilement mesurables car ce n'est pas seulement dans le domaine des pensions de conjoint survivant que l'ancien droit consacrait des inégalités de traitement entre les sexes. C'est dans cette mesure surtout que l'aspect financier de la question intervient puisque si, d'une manière générale, on mettait systématiquement les anciens assurés, aujourd'hui pensionnés, au bénéfice de nouvelles dispositions instaurant l'égalité de traitement entre les sexes, cela engendrerait à n'en pas douter une augmentation des coûts qui pourrait se révéler considérable et qui, en l'absence de réserves constituées à cette fin par les institutions de prévoyance, devrait être financée par les assurés de la génération actuelle. Cela nécessiterait donc, à l'évidence, une décision de l'autorité politique et n'est plus du ressort du juge (ATF 117 V 327; MEYER-BLASER, RDS 111/1992 II p. 410; WEBER-DÜRLER, Grenzen des Rechtsschutzes bei der Gleichberechtigung, in L'égalité entre hommes et femmes - un mandat politique pour le législateur, Mélanges Margrith Bigler-Eggenberger [1993], p. 352). C'est par conséquent à bon droit que le conseil d'administration de la recourante a refusé d'allouer à l'intimé la pension de conjoint survivant qu'il demandait. Il y a lieu, en conséquence, d'admettre le recours et d'annuler le jugement attaqué.
Dispositiv
Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce: Le recours est admis et le jugement du Tribunal des assurances du canton de Vaud du 18 juin 1992 est annulé. La demande du 13 février 1992 est rejetée.