Urteilskopf

110 II 163

33. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour civile du 3 avril 1984 dans la cause De Girolamo contre Aluminium Suisse S.A. (recours en réforme)
Regeste (de):

Regeste (fr):

Regesto (it):


Sachverhalt ab Seite 163

BGE 110 II 163 S. 163

A.- Alberto de Girolamo, ressortissant italien, né en 1940, a été engagé en 1964 par Aluminium Suisse S.A. (ci-après: Alusuisse), pour son usine de Chippis, en qualité d'ouvrier. Bon travailleur, il fut nommé chef de série aux fours dès le 1er mai 1971. Le 12 novembre 1974, alors qu'il travaillait à l'usine, il fut frappé à la tête, sur le côté gauche, par un tuyau conduisant de l'air comprimé, qui s'était détaché d'un appareil auquel il devait fournir de la pression et qui s'était mis à "gigoter" de manière désordonnée, tout en restant pris à un crochet porte-outils. Victime vraisemblablement d'une lésion du rocher de l'oreille interne, de Girolamo a perdu toute ouïe du côté gauche. Selon une expertise technique, le risque que ce tuyau atteigne un travailleur, au moment où il s'est dégagé, était de 1/100'000; toutefois, ce tuyau s'était déjà arraché de la même manière à de
BGE 110 II 163 S. 164

nombreuses reprises; il pouvait devenir dangereux lorsqu'il restait pris au crochet porte-outils; s'il venait à frapper un ouvrier, celui-ci pouvait être blessé, voire déséquilibré et même renversé dans un four. Le chef d'équipe, tout comme les ouvriers, était en mesure de se rendre compte du danger et il aurait été aisé de remédier à cette situation; l'expert technique a préconisé dans ce sens un dispositif simple et peu coûteux. La Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents (CNA) a admis le cas et reconnu au travailleur une invalidité de 12% (60% de 20%).
B.- Le 6 mai 1983, le Tribunal cantonal du canton du Valais a rejeté une demande de Girolamo, tendant au paiement par Alusuisse de dommages-intérêts et d'une indemnité de 6'000 francs pour tort moral.
C.- Le Tribunal fédéral admet partiellement le recours en réforme du demandeur et condamne la défenderesse à lui payer 5'000 francs avec intérêt à 5% dès le 12 novembre 1974.
Erwägungen

Extrait des considérants:

1. (Selon la jurisprudence (ATF 104 II 259), la responsabilité de l'employeur pour le dommage consécutif à un accident professionnel suppose une faute grave de l'employeur lui-même ou, s'il s'agit d'une personne morale, d'un organe au sens de l'art. 55
SR 210 Code civil suisse du 10 décembre 1907
CC Art. 55 - 1 La volonté d'une personne morale s'exprime par ses organes.
1    La volonté d'une personne morale s'exprime par ses organes.
2    Ceux-ci obligent la personne morale par leurs actes juridiques et par tous autres faits.
3    Les fautes commises engagent, au surplus, la responsabilité personnelle de leurs auteurs.
CC; l'employeur ne répond pas de la faute d'un auxiliaire selon les art. 55
SR 220 Première partie: Dispositions générales Titre premier: De la formation des obligations Chapitre I: Des obligations résultant d'un contrat
CO Art. 55 - 1 L'employeur est responsable du dommage causé par ses travailleurs ou ses autres auxiliaires dans l'accomplissement de leur travail, s'il ne prouve qu'il a pris tous les soins commandés par les circonstances pour détourner un dommage de ce genre ou que sa diligence n'eût pas empêché le dommage de se produire.30
1    L'employeur est responsable du dommage causé par ses travailleurs ou ses autres auxiliaires dans l'accomplissement de leur travail, s'il ne prouve qu'il a pris tous les soins commandés par les circonstances pour détourner un dommage de ce genre ou que sa diligence n'eût pas empêché le dommage de se produire.30
2    L'employeur a son recours contre la personne qui a causé le préjudice, en tant qu'elle est responsable du dommage.
et 101
SR 220 Première partie: Dispositions générales Titre premier: De la formation des obligations Chapitre I: Des obligations résultant d'un contrat
CO Art. 101 - 1 Celui qui, même d'une manière licite, confie à des auxiliaires, tels que des personnes vivant en ménage avec lui ou des travailleurs, le soin d'exécuter une obligation ou d'exercer un droit dérivant d'une obligation, est responsable envers l'autre partie du dommage qu'ils causent dans l'accomplissement de leur travail.47
1    Celui qui, même d'une manière licite, confie à des auxiliaires, tels que des personnes vivant en ménage avec lui ou des travailleurs, le soin d'exécuter une obligation ou d'exercer un droit dérivant d'une obligation, est responsable envers l'autre partie du dommage qu'ils causent dans l'accomplissement de leur travail.47
2    Une convention préalable peut exclure en tout ou en partie la responsabilité dérivant du fait des auxiliaires.
3    Si le créancier est au service du débiteur, ou si la responsabilité résulte de l'exercice d'une industrie concédée par l'autorité, le débiteur ne peut s'exonérer conventionnellement que de la responsabilité découlant d'une faute légère.
CO; art. 129 al. 2
SR 220 Première partie: Dispositions générales Titre premier: De la formation des obligations Chapitre I: Des obligations résultant d'un contrat
CO Art. 101 - 1 Celui qui, même d'une manière licite, confie à des auxiliaires, tels que des personnes vivant en ménage avec lui ou des travailleurs, le soin d'exécuter une obligation ou d'exercer un droit dérivant d'une obligation, est responsable envers l'autre partie du dommage qu'ils causent dans l'accomplissement de leur travail.47
1    Celui qui, même d'une manière licite, confie à des auxiliaires, tels que des personnes vivant en ménage avec lui ou des travailleurs, le soin d'exécuter une obligation ou d'exercer un droit dérivant d'une obligation, est responsable envers l'autre partie du dommage qu'ils causent dans l'accomplissement de leur travail.47
2    Une convention préalable peut exclure en tout ou en partie la responsabilité dérivant du fait des auxiliaires.
3    Si le créancier est au service du débiteur, ou si la responsabilité résulte de l'exercice d'une industrie concédée par l'autorité, le débiteur ne peut s'exonérer conventionnellement que de la responsabilité découlant d'une faute légère.
LAMA, 44 LAA.)
2. L'art. 129
SR 220 Première partie: Dispositions générales Titre premier: De la formation des obligations Chapitre I: Des obligations résultant d'un contrat
CO Art. 101 - 1 Celui qui, même d'une manière licite, confie à des auxiliaires, tels que des personnes vivant en ménage avec lui ou des travailleurs, le soin d'exécuter une obligation ou d'exercer un droit dérivant d'une obligation, est responsable envers l'autre partie du dommage qu'ils causent dans l'accomplissement de leur travail.47
1    Celui qui, même d'une manière licite, confie à des auxiliaires, tels que des personnes vivant en ménage avec lui ou des travailleurs, le soin d'exécuter une obligation ou d'exercer un droit dérivant d'une obligation, est responsable envers l'autre partie du dommage qu'ils causent dans l'accomplissement de leur travail.47
2    Une convention préalable peut exclure en tout ou en partie la responsabilité dérivant du fait des auxiliaires.
3    Si le créancier est au service du débiteur, ou si la responsabilité résulte de l'exercice d'une industrie concédée par l'autorité, le débiteur ne peut s'exonérer conventionnellement que de la responsabilité découlant d'une faute légère.
LAMA ne restreint pas la responsabilité de l'employeur quant au paiement d'une indemnité à titre de réparation morale (ATF 104 II 263 consid. 5, ATF 88 II 526, ATF 86 I 256, ATF 81 II 553 s. consid. 4, ATF 72 II 314 s. consid. 2, 432 s. consid. 7). Selon l'art. 47
SR 220 Première partie: Dispositions générales Titre premier: De la formation des obligations Chapitre I: Des obligations résultant d'un contrat
CO Art. 47 - Le juge peut, en tenant compte de circonstances particulières, allouer à la victime de lésions corporelles ou, en cas de mort d'homme, à la famille une indemnité équitable à titre de réparation morale.
CO, le juge peut, en tenant compte de circonstances particulières, allouer à la victime de lésions corporelles une indemnité équitable à titre de réparation morale. La règle s'applique également en matière contractuelle (art. 99 al. 3
SR 220 Première partie: Dispositions générales Titre premier: De la formation des obligations Chapitre I: Des obligations résultant d'un contrat
CO Art. 99 - 1 En général, le débiteur répond de toute faute.
1    En général, le débiteur répond de toute faute.
2    Cette responsabilité est plus ou moins étendue selon la nature particulière de l'affaire; elle s'apprécie notamment avec moins de rigueur lorsque l'affaire n'est pas destinée à procurer un avantage au débiteur.
3    Les règles relatives à la responsabilité dérivant d'actes illicites s'appliquent par analogie aux effets de la faute contractuelle.
CO), en cas de violation par l'employeur de son obligation de veiller à la santé et à l'intégrité corporelle du travailleur (art. 328
SR 220 Première partie: Dispositions générales Titre premier: De la formation des obligations Chapitre I: Des obligations résultant d'un contrat
CO Art. 328 - 1 L'employeur protège et respecte, dans les rapports de travail, la personnalité du travailleur; il manifeste les égards voulus pour sa santé et veille au maintien de la moralité. En particulier, il veille à ce que les travailleurs ne soient pas harcelés sexuellement et qu'ils ne soient pas, le cas échéant, désavantagés en raison de tels actes.124
1    L'employeur protège et respecte, dans les rapports de travail, la personnalité du travailleur; il manifeste les égards voulus pour sa santé et veille au maintien de la moralité. En particulier, il veille à ce que les travailleurs ne soient pas harcelés sexuellement et qu'ils ne soient pas, le cas échéant, désavantagés en raison de tels actes.124
2    Il prend, pour protéger la vie, la santé et l'intégrité personnelle du travailleur, les mesures commandées par l'expérience, applicables en l'état de la technique, et adaptées aux conditions de l'exploitation ou du ménage, dans la mesure où les rapports de travail et la nature du travail permettent équitablement de l'exiger de lui.125
CO; cf. ATF 106 II 134 ss). Il n'est pas nécessaire d'examiner si l'employeur répond aussi en qualité de propriétaire d'ouvrage au sens de l'art. 58
SR 220 Première partie: Dispositions générales Titre premier: De la formation des obligations Chapitre I: Des obligations résultant d'un contrat
CO Art. 58 - 1 Le propriétaire d'un bâtiment ou de tout autre ouvrage répond du dommage causé par des vices de construction ou par le défaut d'entretien.
1    Le propriétaire d'un bâtiment ou de tout autre ouvrage répond du dommage causé par des vices de construction ou par le défaut d'entretien.
2    Est réservé son recours contre les personnes responsables envers lui de ce chef.
CO, car l'étendue de sa diligence est pratiquement la même, quel que soit le fondement de sa responsabilité (ATF 90 II 229).
BGE 110 II 163 S. 165

a) L'art. 328 al. 2
SR 220 Première partie: Dispositions générales Titre premier: De la formation des obligations Chapitre I: Des obligations résultant d'un contrat
CO Art. 328 - 1 L'employeur protège et respecte, dans les rapports de travail, la personnalité du travailleur; il manifeste les égards voulus pour sa santé et veille au maintien de la moralité. En particulier, il veille à ce que les travailleurs ne soient pas harcelés sexuellement et qu'ils ne soient pas, le cas échéant, désavantagés en raison de tels actes.124
1    L'employeur protège et respecte, dans les rapports de travail, la personnalité du travailleur; il manifeste les égards voulus pour sa santé et veille au maintien de la moralité. En particulier, il veille à ce que les travailleurs ne soient pas harcelés sexuellement et qu'ils ne soient pas, le cas échéant, désavantagés en raison de tels actes.124
2    Il prend, pour protéger la vie, la santé et l'intégrité personnelle du travailleur, les mesures commandées par l'expérience, applicables en l'état de la technique, et adaptées aux conditions de l'exploitation ou du ménage, dans la mesure où les rapports de travail et la nature du travail permettent équitablement de l'exiger de lui.125
CO impose à l'employeur de prendre, pour protéger la vie et la santé du travailleur, les mesures commandées par l'expérience, applicables en l'état de la technique, et adaptées aux conditions de l'exploitation ou du ménage, dans la mesure où les rapports de travail et la nature du travail permettent équitablement de l'exiger de lui. Il lui appartient en particulier d'instruire les travailleurs de manière adéquate et de pourvoir les machines et installations dont ils se servent de dispositifs de sécurité suffisants pour empêcher la réalisation de risques avec lesquels on peut compter (ATF 102 II 19, ATF 100 II 354, ATF 95 II 137 ss), même si le degré de probabilité n'en est pas considérable (ATF 95 II 141). Or le Tribunal cantonal admet avec raison, sans que cela soit contesté par la défenderesse, que l'installation de celle-ci comportait un danger dont elle n'a pas suffisamment protégé les travailleurs. Comme le constate le jugement attaqué, le chef d'équipe avait observé à bien des reprises que le tuyau transmettant l'air comprimé se détachait et qu'il pouvait alors être dangereux lorsqu'il restait accroché au crochet porte-outils; or il a omis de remédier à ce défaut ou de le signaler au service de sécurité de l'entreprise qui aurait pu faire le nécessaire. Ainsi que la cour cantonale le relève, il était possible d'obvier à cet inconvénient à peu de frais. L'art. 328 al. 2
SR 220 Première partie: Dispositions générales Titre premier: De la formation des obligations Chapitre I: Des obligations résultant d'un contrat
CO Art. 328 - 1 L'employeur protège et respecte, dans les rapports de travail, la personnalité du travailleur; il manifeste les égards voulus pour sa santé et veille au maintien de la moralité. En particulier, il veille à ce que les travailleurs ne soient pas harcelés sexuellement et qu'ils ne soient pas, le cas échéant, désavantagés en raison de tels actes.124
1    L'employeur protège et respecte, dans les rapports de travail, la personnalité du travailleur; il manifeste les égards voulus pour sa santé et veille au maintien de la moralité. En particulier, il veille à ce que les travailleurs ne soient pas harcelés sexuellement et qu'ils ne soient pas, le cas échéant, désavantagés en raison de tels actes.124
2    Il prend, pour protéger la vie, la santé et l'intégrité personnelle du travailleur, les mesures commandées par l'expérience, applicables en l'état de la technique, et adaptées aux conditions de l'exploitation ou du ménage, dans la mesure où les rapports de travail et la nature du travail permettent équitablement de l'exiger de lui.125
CO n'a donc pas été respecté. L'employeur en est responsable (art. 101
SR 220 Première partie: Dispositions générales Titre premier: De la formation des obligations Chapitre I: Des obligations résultant d'un contrat
CO Art. 101 - 1 Celui qui, même d'une manière licite, confie à des auxiliaires, tels que des personnes vivant en ménage avec lui ou des travailleurs, le soin d'exécuter une obligation ou d'exercer un droit dérivant d'une obligation, est responsable envers l'autre partie du dommage qu'ils causent dans l'accomplissement de leur travail.47
1    Celui qui, même d'une manière licite, confie à des auxiliaires, tels que des personnes vivant en ménage avec lui ou des travailleurs, le soin d'exécuter une obligation ou d'exercer un droit dérivant d'une obligation, est responsable envers l'autre partie du dommage qu'ils causent dans l'accomplissement de leur travail.47
2    Une convention préalable peut exclure en tout ou en partie la responsabilité dérivant du fait des auxiliaires.
3    Si le créancier est au service du débiteur, ou si la responsabilité résulte de l'exercice d'une industrie concédée par l'autorité, le débiteur ne peut s'exonérer conventionnellement que de la responsabilité découlant d'une faute légère.
et 55
SR 220 Première partie: Dispositions générales Titre premier: De la formation des obligations Chapitre I: Des obligations résultant d'un contrat
CO Art. 55 - 1 L'employeur est responsable du dommage causé par ses travailleurs ou ses autres auxiliaires dans l'accomplissement de leur travail, s'il ne prouve qu'il a pris tous les soins commandés par les circonstances pour détourner un dommage de ce genre ou que sa diligence n'eût pas empêché le dommage de se produire.30
1    L'employeur est responsable du dommage causé par ses travailleurs ou ses autres auxiliaires dans l'accomplissement de leur travail, s'il ne prouve qu'il a pris tous les soins commandés par les circonstances pour détourner un dommage de ce genre ou que sa diligence n'eût pas empêché le dommage de se produire.30
2    L'employeur a son recours contre la personne qui a causé le préjudice, en tant qu'elle est responsable du dommage.
CO).
b) Le jugement attaqué ne contient aucun fait permettant de retenir une faute concurrente à la charge du travailleur. Il n'est en particulier pas établi qu'il aurait pu voir "gigoter" le tuyau, avant que celui-ci ne vienne le frapper à la tête. Par ailleurs, il portait un casque, certainement selon les instructions de service. Enfin, on ne saurait guère lui reprocher de n'avoir pas avisé précédemment le service de sécurité du risque que pouvait comporter, pour les travailleurs, un débranchement du tuyau. c) La cour cantonale a rejeté la demande de réparation morale par le motif qu'aucune faute ne peut être imputée à l'employeur personnellement et que la lésion subie "n'est pas très importante"; elle ajoute que le demandeur n'a pas subi d'hospitalisation ou de long traitement, que sa surdité unilatérale ne le gêne pas dans son travail d'agriculteur et qu'elle ne saurait guère le priver de certains plaisirs de la vie. Selon la jurisprudence, l'application de l'art. 47
SR 220 Première partie: Dispositions générales Titre premier: De la formation des obligations Chapitre I: Des obligations résultant d'un contrat
CO Art. 47 - Le juge peut, en tenant compte de circonstances particulières, allouer à la victime de lésions corporelles ou, en cas de mort d'homme, à la famille une indemnité équitable à titre de réparation morale.
CO n'exige pas de faute personnelle du responsable (ATF 104 II 263 s. consid. 5).
BGE 110 II 163 S. 166

Le rapport des fautes est cependant un élément qui peut être déterminant pour l'octroi ou le refus d'une réparation morale. En l'espèce, l'employeur doit répondre d'une faute de son auxiliaire, qui n'est pas vénielle, alors que le travailleur n'en a commis aucune. Pour autant que le préjudice soit assez grave, le principe d'une réparation correspond donc à l'équité. L'octroi d'une réparation morale pour lésions corporelles exige également que celles-ci aient une certaine importance (cf. ATF 89 II 400). Or il faut tenir pour importantes des atteintes qui privent la victime d'un organe ou rendent celui-ci impropre à sa fonction (cf. art. 122 ch. 1 al. 2
SR 311.0 Code pénal suisse du 21 décembre 1937
CP Art. 122 - Est puni d'une peine privative de liberté d'un à dix ans quiconque, intentionnellement:
a  blesse une personne de façon à mettre sa vie en danger;
b  mutile le corps d'une personne, un de ses membres ou un de ses organes importants ou rend ce membre ou cet organe impropre à sa fonction, cause à une personne une incapacité de travail, une infirmité ou une maladie mentale permanentes, ou défigure une personne d'une façon grave et permanente;
c  fait subir à une personne toute autre atteinte grave à l'intégrité corporelle ou à la santé physique ou mentale.
CP; OFTINGER, Schweizerisches Haftpflichtrectht, p. 300). Le Tribunal fédéral en a fréquemment jugé ainsi à propos d'atteintes à la vue (cf. par ex. ATF 104 II 190, ATF 102 II 21, ATF 89 II 26, ATF 81 II 170). Il a aussi confirmé un jugement cantonal allouant une indemnité de 8'000 francs à la victime, responsable d'une faute concurrente, qui avait subi une fracture du crâne avec commotion cérébrale, 40 jours d'hospitalisation et la perte totale de l'ouïe à droite; il releva à cette occasion l'importance d'une telle infirmité dans la vie sociale et pour la victime du point de vue psychologique, compte tenu aussi d'une atteinte possible à l'autre oreille, dans l'avenir (Rep. 1971 p. 226, résumé au JdT 1973 I 471; cf. aussi arrêt non publié du 29 janvier 1980, cité par HÜTTE, Die Genugtuung, feuille III 48). On retrouve la même conception en jurisprudence cantonale (cf. HÜTTE, op.cit., feuille III 22, relatant un arrêt du Tribunal cantonal vaudois du 10 avril 1970; OFTINGER, op.cit., I p. 300, citant Rep. 1960 p. 291) et en doctrine (HÜTTE, op.cit., p. I/24, suivant la classification proposée par un auteur allemand, range la perte d'une oreille ou la perte complète de l'ouïe d'un côté parmi les lésions corporelles graves, soit dans le groupe 4 d'une division en 6 catégories, dans le sens croissant de gravité). La perte complète de l'ouïe, d'un côté, est de nature à diminuer notablement la perception par la victime du monde extérieur, ce qui peut être sensible dans de nombreuses activités de la vie professionnelle et de la vie courante; elle est aussi propre à restreindre l'agrément de la vie. Elle accroît le risque d'une surdité totale; de ce fait la victime est aussi exposée à ressentir davantage les effets d'une baisse de l'ouïe de l'autre côté, notamment en raison de l'âge. En 1976, le Tribunal fédéral a confirmé un jugement cantonal accordant en principe 8'000 francs de réparation morale pour la perte d'un oeil (ATF 102 II 21 s.). Si la perte de
BGE 110 II 163 S. 167

l'ouïe d'un seul côté sera d'ordinaire moins pénible pour la victime que la perte d'un oeil, qualitativement, la perte est comparable et justifie l'octroi d'une réparation. Au cas particulier, la perte de l'ouïe est totale du côté gauche; de toute évidence, la lésion est irréversible et le demandeur, âgé de 34 ans lors de l'accident, devra s'accommoder de cette infirmité sa vie durant. L'importance de l'atteinte est en outre montrée par son incidence sur l'invalidité, fixée par la CNA à 12%. Compte tenu de l'importance de l'ouïe dans la vie d'un homme, ainsi que de l'évolution de la jurisprudence quant aux montants alloués (cf. ATF 108 II 434, ATF 107 II 349), il y a lieu d'accorder au demandeur une indemnité de 5'000 francs à titre de réparation morale.
Information de décision   •   DEFRITEN
Document : 110 II 163
Date : 03 avril 1984
Publié : 31 décembre 1985
Source : Tribunal fédéral
Statut : 110 II 163
Domaine : ATF - Droit civil
Objet : Responsabilité de l'employeur, tort moral. Responsabilité de l'employeur ayant omis une mesure de sécurité (art. 328 al.


Répertoire des lois
CC: 55
SR 210 Code civil suisse du 10 décembre 1907
CC Art. 55 - 1 La volonté d'une personne morale s'exprime par ses organes.
1    La volonté d'une personne morale s'exprime par ses organes.
2    Ceux-ci obligent la personne morale par leurs actes juridiques et par tous autres faits.
3    Les fautes commises engagent, au surplus, la responsabilité personnelle de leurs auteurs.
CO: 47 
SR 220 Première partie: Dispositions générales Titre premier: De la formation des obligations Chapitre I: Des obligations résultant d'un contrat
CO Art. 47 - Le juge peut, en tenant compte de circonstances particulières, allouer à la victime de lésions corporelles ou, en cas de mort d'homme, à la famille une indemnité équitable à titre de réparation morale.
55 
SR 220 Première partie: Dispositions générales Titre premier: De la formation des obligations Chapitre I: Des obligations résultant d'un contrat
CO Art. 55 - 1 L'employeur est responsable du dommage causé par ses travailleurs ou ses autres auxiliaires dans l'accomplissement de leur travail, s'il ne prouve qu'il a pris tous les soins commandés par les circonstances pour détourner un dommage de ce genre ou que sa diligence n'eût pas empêché le dommage de se produire.30
1    L'employeur est responsable du dommage causé par ses travailleurs ou ses autres auxiliaires dans l'accomplissement de leur travail, s'il ne prouve qu'il a pris tous les soins commandés par les circonstances pour détourner un dommage de ce genre ou que sa diligence n'eût pas empêché le dommage de se produire.30
2    L'employeur a son recours contre la personne qui a causé le préjudice, en tant qu'elle est responsable du dommage.
58 
SR 220 Première partie: Dispositions générales Titre premier: De la formation des obligations Chapitre I: Des obligations résultant d'un contrat
CO Art. 58 - 1 Le propriétaire d'un bâtiment ou de tout autre ouvrage répond du dommage causé par des vices de construction ou par le défaut d'entretien.
1    Le propriétaire d'un bâtiment ou de tout autre ouvrage répond du dommage causé par des vices de construction ou par le défaut d'entretien.
2    Est réservé son recours contre les personnes responsables envers lui de ce chef.
99 
SR 220 Première partie: Dispositions générales Titre premier: De la formation des obligations Chapitre I: Des obligations résultant d'un contrat
CO Art. 99 - 1 En général, le débiteur répond de toute faute.
1    En général, le débiteur répond de toute faute.
2    Cette responsabilité est plus ou moins étendue selon la nature particulière de l'affaire; elle s'apprécie notamment avec moins de rigueur lorsque l'affaire n'est pas destinée à procurer un avantage au débiteur.
3    Les règles relatives à la responsabilité dérivant d'actes illicites s'appliquent par analogie aux effets de la faute contractuelle.
101 
SR 220 Première partie: Dispositions générales Titre premier: De la formation des obligations Chapitre I: Des obligations résultant d'un contrat
CO Art. 101 - 1 Celui qui, même d'une manière licite, confie à des auxiliaires, tels que des personnes vivant en ménage avec lui ou des travailleurs, le soin d'exécuter une obligation ou d'exercer un droit dérivant d'une obligation, est responsable envers l'autre partie du dommage qu'ils causent dans l'accomplissement de leur travail.47
1    Celui qui, même d'une manière licite, confie à des auxiliaires, tels que des personnes vivant en ménage avec lui ou des travailleurs, le soin d'exécuter une obligation ou d'exercer un droit dérivant d'une obligation, est responsable envers l'autre partie du dommage qu'ils causent dans l'accomplissement de leur travail.47
2    Une convention préalable peut exclure en tout ou en partie la responsabilité dérivant du fait des auxiliaires.
3    Si le créancier est au service du débiteur, ou si la responsabilité résulte de l'exercice d'une industrie concédée par l'autorité, le débiteur ne peut s'exonérer conventionnellement que de la responsabilité découlant d'une faute légère.
328
SR 220 Première partie: Dispositions générales Titre premier: De la formation des obligations Chapitre I: Des obligations résultant d'un contrat
CO Art. 328 - 1 L'employeur protège et respecte, dans les rapports de travail, la personnalité du travailleur; il manifeste les égards voulus pour sa santé et veille au maintien de la moralité. En particulier, il veille à ce que les travailleurs ne soient pas harcelés sexuellement et qu'ils ne soient pas, le cas échéant, désavantagés en raison de tels actes.124
1    L'employeur protège et respecte, dans les rapports de travail, la personnalité du travailleur; il manifeste les égards voulus pour sa santé et veille au maintien de la moralité. En particulier, il veille à ce que les travailleurs ne soient pas harcelés sexuellement et qu'ils ne soient pas, le cas échéant, désavantagés en raison de tels actes.124
2    Il prend, pour protéger la vie, la santé et l'intégrité personnelle du travailleur, les mesures commandées par l'expérience, applicables en l'état de la technique, et adaptées aux conditions de l'exploitation ou du ménage, dans la mesure où les rapports de travail et la nature du travail permettent équitablement de l'exiger de lui.125
CP: 122
SR 311.0 Code pénal suisse du 21 décembre 1937
CP Art. 122 - Est puni d'une peine privative de liberté d'un à dix ans quiconque, intentionnellement:
a  blesse une personne de façon à mettre sa vie en danger;
b  mutile le corps d'une personne, un de ses membres ou un de ses organes importants ou rend ce membre ou cet organe impropre à sa fonction, cause à une personne une incapacité de travail, une infirmité ou une maladie mentale permanentes, ou défigure une personne d'une façon grave et permanente;
c  fait subir à une personne toute autre atteinte grave à l'intégrité corporelle ou à la santé physique ou mentale.
LAMA: 129
Répertoire ATF
100-II-352 • 102-II-18 • 104-II-190 • 104-II-259 • 106-II-134 • 107-II-349 • 108-II-434 • 110-II-163 • 72-II-311 • 81-II-159 • 81-II-547 • 86-I-256 • 88-II-516 • 89-II-26 • 89-II-396 • 90-II-227 • 95-II-132
Répertoire de mots-clés
Trié par fréquence ou alphabet
tort moral • responsabilité de l'employeur • outil • tribunal cantonal • tribunal fédéral • aluminium • lésion corporelle • quant • tennis • vue • mesure de protection • preuve facilitée • membre d'une communauté religieuse • suva • réduction • dommages-intérêts • calcul • faute propre • autorisation ou approbation • titre
... Les montrer tous
JdT
1973 I 471