Urteilskopf

100 Ia 305

44. Arrêt de la IIe Cour civile statuant comme Chambre de droit public du 26 septembre 1974 dans la cause X. contre Neuchâtel, autorité tutélaire de surveillance.
Regeste (de):

Regeste (fr):

Regesto (it):


Sachverhalt ab Seite 306

BGE 100 Ia 305 S. 306

A.- Le 15 août 1964, X., àgée à l'époque de 20 ans, a donné naissance hors mariage à une fille. Le 3 août 1965, l'autorité tutélaire du district de Neuchâtel a institué avec l'accord de la mère une tutelle sur l'enfant, qui a été placée.
B.- Le 23 septembre 1971, X. a entrepris des démarches pour obtenir la puissance paternelle sur sa fille. Elle faisait valoir que les motifs (instabilité) qui avaient justifié la mise sous tutelle de l'enfant avaient disparu. L'autorité tutélaire neuchâteloise a rejeté la requête. Le 8 juin 1972, X. a repris la procédure. Mais malgré un rapport attestant que la mère s'était stabilisée et serait apte à exercer la puissance paternelle sur sa fille, l'autorité tutélaire neuchâteloise a maintenu la tutelle.
C.- X. a recouru contre cette décision auprès de l'autorité tutélaire de surveillance. Celle-ci a rejeté le recours. Sans mettre en doute les capacités de la mère, elle a estimé qu'il serait préjudiciable pour l'enfant et la famille où elle est placée de modifier la situation; elle a admis que la mère n'avait pas l'intention de reprendre sa fille dans l'immédiat, mais a estimé ce risque réel, vu les mauvais rapports entre la mère et la famille nourricière.
D.- X. a déposé un recours de droit public au Tribunal fédéral contre cette décision, dont elle demande l'annulation. Elle conclut également à l'annulation de la décision de l'autorité tutélaire, au renvoi du dossier à l'autorité cantonale et à l'attribution de la puissance paternelle.
BGE 100 Ia 305 S. 307

Erwägungen

Considérant en droit:

2. L'autorité tutélaire peut conférer la puissance paternelle sur un enfant naturel à la mère (art. 324 al. 3
SR 210 Code civil suisse du 10 décembre 1907
CC Art. 324 - 1 Si une administration diligente n'est pas suffisamment assurée, l'autorité de protection de l'enfant prend les mesures nécessaires pour protéger les biens de l'enfant.
1    Si une administration diligente n'est pas suffisamment assurée, l'autorité de protection de l'enfant prend les mesures nécessaires pour protéger les biens de l'enfant.
2    Elle peut, en particulier, donner des instructions concernant l'administration et, lorsque les comptes et le rapport périodiques ne suffisent pas, exiger une consignation ou des sûretés.
3    Pour la procédure, le for et la compétence, les dispositions sur la protection de l'enfant sont applicables par analogie.
CC) et, lorsque la filiation paternelle résulte d'une reconnaissance ou d'un jugement déclaratif de paternité, à l'un ou l'autre des parents (art. 325 al. 3
SR 210 Code civil suisse du 10 décembre 1907
CC Art. 325 - 1 S'il n'y a pas d'autre façon d'empêcher que les biens de l'enfant soient mis en péril, l'autorité de protection de l'enfant en confie l'administration à un curateur.
1    S'il n'y a pas d'autre façon d'empêcher que les biens de l'enfant soient mis en péril, l'autorité de protection de l'enfant en confie l'administration à un curateur.
2    L'autorité de protection de l'enfant agit de même lorsque les biens de l'enfant qui ne sont pas administrés par les père et mère sont mis en péril.
3    S'il est à craindre que les revenus des biens de l'enfant ou les montants prélevés sur ces biens ne soient pas utilisés conformément à la loi, l'autorité de protection de l'enfant peut également en confier l'administration à un curateur.
CC). En application de ce principe, l'art. 311 al. 2
SR 210 Code civil suisse du 10 décembre 1907
CC Art. 311 - 1 Si d'autres mesures de protection de l'enfant sont demeurées sans résultat ou paraissent d'emblée insuffisantes, l'autorité de protection de l'enfant prononce le retrait de l'autorité parentale:399
1    Si d'autres mesures de protection de l'enfant sont demeurées sans résultat ou paraissent d'emblée insuffisantes, l'autorité de protection de l'enfant prononce le retrait de l'autorité parentale:399
1  lorsque, pour cause d'inexpérience, de maladie, d'infirmité, d'absence, de violence ou d'autres motifs analogues, les père et mère ne sont pas en mesure d'exercer correctement l'autorité parentale;
2  lorsque les père et mère ne se sont pas souciés sérieusement de l'enfant ou qu'ils ont manqué gravement à leurs devoirs envers lui.
2    Si le père et la mère sont déchus de l'autorité parentale, un tuteur est nommé à l'enfant.
3    Lorsque le contraire n'a pas été ordonné expressément, les effets du retrait s'étendent aux enfants nés après qu'il a été prononcé.
CC prévoit le remplacement du curateur par un tuteur lorsque l'autorité tutélaire juge inopportun d'attribuer la puissance paternelle à l'un des parents. La loi a donc entendu laisser à l'appréciation de l'autorité l'attribution de la puissance paternelle sur un enfant illégitime à l'un de ses parents, ou sa mise sous tutelle. La solution choisie doit cependant être conforme aux règles du droit et de l'équité (art. 4
SR 210 Code civil suisse du 10 décembre 1907
CC Art. 4 - Le juge applique les règles du droit et de l'équité, lorsque la loi réserve son pouvoir d'appréciation ou qu'elle le charge de prononcer en tenant compte soit des circonstances, soit de justes motifs.
CC).
3. La recourante fait valoir que la décision de maintenir sa fille sous tutelle est arbitraire, viole l'art. 4
SR 101 Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999
Cst. Art. 4 Langues nationales - Les langues nationales sont l'allemand, le français, l'italien et le romanche.
Cst. et lèse son droit à la liberté personnelle. a) ...
b) Lorsque la loi laisse une décision à l'appréciation d'une autorité, le Tribunal fédéral n'intervient que si celle-ci a dépassé son pouvoir d'appréciation et a tranché d'une manière arbitraire. Tel est le cas lorsque la décision repose sur une appréciation insoutenable des circonstances, qu'elle est évidemment inconciliable avec les règles du droit et de l'équité, que l'autorité a tenu compte de circonstances qui n'avaient aucune importance, ou a laissé de côté des éléments décisifs (RO 89 I 9/10; 96 I 429 consid. 2; 98 Ia 451 consid. 2 et 457/58 consid. 2; 99 Ia 563 consid. 2). c) L'autorité cantonale a confirmé la décision de l'autorité tutélaire et refusé de confier à la recourante la puissance paternelle sur sa fille. Elle a considéré que même si la mère présentait des qualités certaines et était liée avec son enfant, il y avait un risque qu'elle la reprenne prématurément et abruptement, vu les mauvaises relations qu'elle entretient avec la famille nourricière. On peut tenir pour constant qu'un changement de milieu brusque et intervenant sans préparation serait préjudiciable à l'enfant. En revanche, il ne fait pas de doute que les motifs qui ont justifié à l'époque la décision de priver la mère de la puissance paternelle n'existent plus: la recourante s'est stabilisée et est
BGE 100 Ia 305 S. 308

actuellement en état, tant d'un point de vue objectif que subjectif, de s'occuper de son enfant. Le principal motif invoqué à l'appui du maintien de la tutelle réside dans ce risque de transplantation brutale de l'enfant. Il n'apparaît certes pas être inexistant, vu les relations entre la recourante et la famille nourricière. Mais il ne ressort pas du dossier que la recourante ne soit pas consciente du fait qu'elle pourrait gravement perturber sa fille en la reprenant sans préparation, ni qu'elle ait un caractère impulsif ou irréfléchi. Elle s'est déclarée disposée à préparer le retour de sa fille - comme le reconnaît d'ailleurs l'autorité cantonale - et il n'y a pas de motif, à l'heure actuelle, de penser que la recourante ait l'intention de prendre des mesures brutales préjudiciables à sa fille. Rien ne fait craindre que l'hypothèse envisagée par l'autorité cantonale pourrait se réaliser dans un avenir prochain. Au surplus, la décision de maintenir la tutelle a été prise en considération de facteurs qui n'auraient pas dû jouer de rôle, savoir l'intérêt de la famille nourricière. Enfin, l'autorité cantonale ne s'est pas demandé si le maintien de la tutelle était la seule manière de sauvegarder les intérêts de l'enfant, ou si ce but ne pourrait pas être atteint par des mesures moins graves. Le Service vaudois de la protection de la jeunesse, qui a procédé à une enquête sur la recourante, a relevé ce qui suit dans son rapport du 21 décembre 1973: X. est "parfaitement consciente qu'un changement brutal et non préparé pourrait perturber son enfant. (Elle) accepterait, dans une telle éventualité, qu'un Service social tel que le nôtre (avec l'accord bien entendu de l'Office médico-pédagogique) l'aide à apprécier si un tel changement est souhaitable pour l'enfant et souhaité par lui et que, si une telle décision était prise, nous l'aidions ainsi que la famille nourricière à préparer ce retour." Il aurait donc été possible, dans ces conditions, de prendre acte des intentions de la recourante, de lui imposer l'obligation de collaborer avec le Service de l'enfance et de ne pas reprendre sa fille sans avoir obtenu l'accord préalable de ce service. La décision de priver la recourante de la puissance paternelle était arbitraire si la gravité de cette mesure se révélait disproportionnée au but à atteindre. Or l'autorité cantonale ne s'est pas même demandé si les intérêts de l'enfant ne
BGE 100 Ia 305 S. 309

pourraient pas être protégés par de simples restrictions à l'exercice de la puissance paternelle. d) Pour que la tutelle se justifie, il faut que l'intérêt de l'enfant soit mis en danger d'une manière sérieuse et concrète, et qu'il ne soit pas possible de le protéger autrement. La seule possibilité éloignée d'un danger ne suffit pas. Normalement, celui des parents capable d'exercer la puissance paternelle a un droit naturel à se la voir attribuer (HEGNAUER, Komm. ad art. 324
SR 210 Code civil suisse du 10 décembre 1907
CC Art. 324 - 1 Si une administration diligente n'est pas suffisamment assurée, l'autorité de protection de l'enfant prend les mesures nécessaires pour protéger les biens de l'enfant.
1    Si une administration diligente n'est pas suffisamment assurée, l'autorité de protection de l'enfant prend les mesures nécessaires pour protéger les biens de l'enfant.
2    Elle peut, en particulier, donner des instructions concernant l'administration et, lorsque les comptes et le rapport périodiques ne suffisent pas, exiger une consignation ou des sûretés.
3    Pour la procédure, le for et la compétence, les dispositions sur la protection de l'enfant sont applicables par analogie.
-327
SR 210 Code civil suisse du 10 décembre 1907
CC Art. 327 - 1 Les père et mère répondent, de la même manière qu'un mandataire, de la restitution des biens de l'enfant.
1    Les père et mère répondent, de la même manière qu'un mandataire, de la restitution des biens de l'enfant.
2    Ils doivent le prix de vente des biens aliénés de bonne foi.
3    Ils ne sont tenus à aucune indemnité pour les prélèvements qu'ils étaient en droit de faire pour l'enfant ou pour le ménage.
CC, n. 204). La tutelle ne doit être instituée que lorsque des motifs font apparaître que l'attribution de la puissance paternelle serait nettement préjudiciable. Il aurait incombé à l'autorité cantonale de prendre en considération le fait que l'enfant doit, dans toute la mesure du possible, entretenir des relations étroites avec ses parents et, s'agissant d'une fille, avec sa mère. Ce n'est possible que si celle-ci a une certaine responsabilité et assume ses tâches dans l'éducation de sa fille. En l'espèce, l'enfant a une dizaine d'années actuellement et il n'était pas admissible, en l'absence d'éléments suffisamment précis et graves, de renvoyer à plus tard l'attribution de la puissance paternelle à la recourante. Le recours doit donc être admis en tant qu'il est recevable.
Information de décision   •   DEFRITEN
Document : 100 IA 305
Date : 26 septembre 1974
Publié : 31 décembre 1975
Source : Tribunal fédéral
Statut : 100 IA 305
Domaine : ATF- Droit constitutionnel
Objet : La loi laisse l'attribution de la puissance paternelle sur un enfant illégitime à l'un de ses parents ou sa mise sous tutelle


Répertoire des lois
CC: 4 
SR 210 Code civil suisse du 10 décembre 1907
CC Art. 4 - Le juge applique les règles du droit et de l'équité, lorsque la loi réserve son pouvoir d'appréciation ou qu'elle le charge de prononcer en tenant compte soit des circonstances, soit de justes motifs.
311 
SR 210 Code civil suisse du 10 décembre 1907
CC Art. 311 - 1 Si d'autres mesures de protection de l'enfant sont demeurées sans résultat ou paraissent d'emblée insuffisantes, l'autorité de protection de l'enfant prononce le retrait de l'autorité parentale:399
1    Si d'autres mesures de protection de l'enfant sont demeurées sans résultat ou paraissent d'emblée insuffisantes, l'autorité de protection de l'enfant prononce le retrait de l'autorité parentale:399
1  lorsque, pour cause d'inexpérience, de maladie, d'infirmité, d'absence, de violence ou d'autres motifs analogues, les père et mère ne sont pas en mesure d'exercer correctement l'autorité parentale;
2  lorsque les père et mère ne se sont pas souciés sérieusement de l'enfant ou qu'ils ont manqué gravement à leurs devoirs envers lui.
2    Si le père et la mère sont déchus de l'autorité parentale, un tuteur est nommé à l'enfant.
3    Lorsque le contraire n'a pas été ordonné expressément, les effets du retrait s'étendent aux enfants nés après qu'il a été prononcé.
324 
SR 210 Code civil suisse du 10 décembre 1907
CC Art. 324 - 1 Si une administration diligente n'est pas suffisamment assurée, l'autorité de protection de l'enfant prend les mesures nécessaires pour protéger les biens de l'enfant.
1    Si une administration diligente n'est pas suffisamment assurée, l'autorité de protection de l'enfant prend les mesures nécessaires pour protéger les biens de l'enfant.
2    Elle peut, en particulier, donner des instructions concernant l'administration et, lorsque les comptes et le rapport périodiques ne suffisent pas, exiger une consignation ou des sûretés.
3    Pour la procédure, le for et la compétence, les dispositions sur la protection de l'enfant sont applicables par analogie.
325 
SR 210 Code civil suisse du 10 décembre 1907
CC Art. 325 - 1 S'il n'y a pas d'autre façon d'empêcher que les biens de l'enfant soient mis en péril, l'autorité de protection de l'enfant en confie l'administration à un curateur.
1    S'il n'y a pas d'autre façon d'empêcher que les biens de l'enfant soient mis en péril, l'autorité de protection de l'enfant en confie l'administration à un curateur.
2    L'autorité de protection de l'enfant agit de même lorsque les biens de l'enfant qui ne sont pas administrés par les père et mère sont mis en péril.
3    S'il est à craindre que les revenus des biens de l'enfant ou les montants prélevés sur ces biens ne soient pas utilisés conformément à la loi, l'autorité de protection de l'enfant peut également en confier l'administration à un curateur.
327
SR 210 Code civil suisse du 10 décembre 1907
CC Art. 327 - 1 Les père et mère répondent, de la même manière qu'un mandataire, de la restitution des biens de l'enfant.
1    Les père et mère répondent, de la même manière qu'un mandataire, de la restitution des biens de l'enfant.
2    Ils doivent le prix de vente des biens aliénés de bonne foi.
3    Ils ne sont tenus à aucune indemnité pour les prélèvements qu'ils étaient en droit de faire pour l'enfant ou pour le ménage.
Cst: 4
SR 101 Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999
Cst. Art. 4 Langues nationales - Les langues nationales sont l'allemand, le français, l'italien et le romanche.
Répertoire ATF
100-IA-305 • 89-I-8 • 96-I-425 • 98-IA-449 • 99-IA-561
Weitere Urteile ab 2000
I_9/10
Répertoire de mots-clés
Trié par fréquence ou alphabet
autorité tutélaire • autorité cantonale • intérêt de l'enfant • tribunal fédéral • vue • pouvoir d'appréciation • reprenant • doute • autorité tutélaire de surveillance • tennis • mesure moins grave • rapport entre • autorisation ou approbation • enfant né hors mariage • neuchâtel • danger • recours de droit public • décision • répartition des tâches • calcul
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