Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
1E.11/2006 /col

Arrêt du 28 juin 2006
Ire Cour de droit public

Composition
MM. les Juges Féraud, Président,
Aeschlimann et Fonjallaz.
Greffier: M. Jomini.

Parties
les époux Z.________,
Y.________ et X.________,
A.________ et B.________,
recourants et expropriés,
tous représentés par Me Jacques Philippoz, avocat,

contre

Commission fédérale d'estimation du 3e arrondissement, c/o Me Alphonse-Marie Veuthey, avocat, secrétaire de la CFE,
Energie Ouest Suisse (EOS) SA, expropriante, représentée par Me Chantal Ducrot, avocate,

Objet
expropriation, retard à statuer,

recours de droit administratif contre la Commission fédérale d'estimation du 3e arrondissement.

Faits:
A.
Une procédure d'expropriation (procédure sommaire) a été ouverte en 1997 à la requête de la société anonyme L'Energie de l'Ouest-Suisse, afin de permettre à cette société d'acquérir certains droits nécessaires au passage des conducteurs d'une nouvelle ligne électrique aérienne (ligne 380/132 kV EOS-CFF Saint-Triphon - Chamoson) sur le territoire de la commune de Saint-Maurice, en particulier sur la parcelle n° 1370, propriété des frères B.________ et A.________, et sur la parcelle n° 2515, appartenant à X.________ et Y.________ (les époux Z.________ ont l'usufruit de cet immeuble). Dans ces deux cas, une procédure d'estimation a été ouverte à la fin de l'année 2000 par le Président de la Commission fédérale d'estimation du 3e arrondissement.
Par deux décisions distinctes du 27 février 2002, la Commission fédérale a statué sur les prétentions des frères A.________ et B.________, d'une part, et sur celles des consorts X.________. Y.________, Z.________, d'autre part. Dans les deux cas, les expropriés ont recouru au Tribunal fédéral. Les recours de droit administratif ont l'un et l'autre été admis par arrêt du 22 juillet 2003: les deux décisions de la Commission fédérale ont été annulées, avec renvoi de l'affaire à cette autorité pour nouvelle décision (arrêt 1E.14/2002 dans la cause A.________ et B.________, publié aux ATF 129 II 420; arrêt 1E.17/2002 dans la cause X.________, Y.________, Z.________). Le Tribunal fédéral a mentionné, dans chaque arrêt, les lacunes de la décision d'estimation, puis donné des indications sur les points restant à traiter (cf. consid. 8 de l'arrêt 1E.14/2002 et consid. 8 de l'arrêt 1E.17/2002).
B.
Après le renvoi des affaires en première instance, dans le cadre de la procédure probatoire, un architecte - non membre de la Commission fédérale - a été désigné le 9 janvier 2004 comme expert spécial, avec la mission d'estimer le prix du marché des deux immeubles précités. Cet architecte a déposé le 25 décembre 2004 deux rapports d'expertise (un par immeuble). La fixation des indemnités dues à cet expert spécial a fait l'objet d'une contestation. Par un arrêt rendu le 20 mars 2006, le Tribunal fédéral a déclaré irrecevable un recours formé par l'architecte contre les décisions du 7 octobre 2005 par lesquelles le Président de la Commission fédérale arrêtait le montant de ses honoraires (arrêt 1E.5/2006).
C.
Agissant conjointement, les frères A.________ et B.________ et les consorts X.________, Y.________. Z.________ ont déposé le 5 mai 2006 auprès du Tribunal fédéral un recours de droit administratif, pour déni de justice formel. Ils se plaignent de l'absence de décision définitive sur l'indemnisation environ six ans après l'ouverture de la procédure d'estimation. Ils concluent à ce que la Commission fédérale soit "sommée de statuer dans les plus brefs délais, à savoir notamment rendre une décision concernant la surexpertise demandée par la partie expropriante EOS S.A., et rendre une décision finale d'expropriation dans des délais extrêmement brefs, avec date limite".
La Commission fédérale a produit son dossier en présentant quelques observations au sujet de l'instruction. Dans sa réponse du 7 juin 2006, cette autorité indique que les parties ont été citées à une audience fixée le 9 juin 2006. Le Tribunal fédéral a ensuite été informé que cette audience avait été reportée au 26 juillet 2006, à la requête de l'expropriante, et que le Président demanderait aux parties d'exprimer leur avis concernant une éventuelle nouvelle expertise.
Invitée à répondre au recours, la société EOS s'en remet à justice.

Le Tribunal fédéral considère en droit:
1.
Conformément à l'art. 77 al. 1
SR 711 Bundesgesetz vom 20. Juni 1930 über die Enteignung (EntG)
EntG Art. 77
1    Der Entscheid der Schätzungskommission unterliegt der Beschwerde an das Bundesverwaltungsgericht.
2    Soweit dieses Gesetz nichts anderes bestimmt, richtet sich das Verfahren nach dem Verwaltungsgerichtsgesetz vom 17. Juni 200589.
3    Im Verfahren vor dem Bundesverwaltungsgericht gegen Entscheide über die Festsetzung der Entschädigung sind neue Begehren zulässig, soweit sie nachweisbar nicht schon vor der Schätzungskommission gestellt werden konnten.
de la loi fédérale sur l'expropriation (LEx; RS 711), la voie du recours de droit administratif est ouverte contre les décisions des commissions d'estimation. Aux termes de l'art. 97 al. 2
SR 711 Bundesgesetz vom 20. Juni 1930 über die Enteignung (EntG)
EntG Art. 77
1    Der Entscheid der Schätzungskommission unterliegt der Beschwerde an das Bundesverwaltungsgericht.
2    Soweit dieses Gesetz nichts anderes bestimmt, richtet sich das Verfahren nach dem Verwaltungsgerichtsgesetz vom 17. Juni 200589.
3    Im Verfahren vor dem Bundesverwaltungsgericht gegen Entscheide über die Festsetzung der Entschädigung sind neue Begehren zulässig, soweit sie nachweisbar nicht schon vor der Schätzungskommission gestellt werden konnten.
OJ, lorsqu'une autorité, sans droit, refuse de statuer ou tarde à se prononcer, son silence est assimilé à une décision. En l'occurrence, les recourants, parties expropriées dans deux procédures pendantes - qui ont qualité pour agir selon l'art. 78 al. 1
SR 711 Bundesgesetz vom 20. Juni 1930 über die Enteignung (EntG)
EntG Art. 78
1    Zur Beschwerde sind neben den Hauptparteien auch die Grundpfandgläubiger, Grundlastberechtigten und Nutzniesser als Nebenparteien berechtigt, soweit sie infolge des Entscheides der Schätzungskommission zu Verlust gekommen sind.
2    Die Gegenpartei kann innert zehn Tagen nach Empfang der Mitteilung von der Beschwerde beim Bundesverwaltungsgericht den Anschluss erklären und dabei selbständige Anträge stellen.91 Diese sind gleichzeitig zu begründen. Der Anschluss fällt dahin, wenn die Beschwerde zurückgezogen oder wenn auf sie nicht eingetreten wird.
LEx -, reprochent précisément à la Commission intimée un retard à statuer. Il y a donc lieu d'entrer en matière.
2.
Comme toute partie à une procédure judiciaire ou administrative, l'exproprié a droit, en vertu de la Constitution fédérale, à ce que sa cause soit jugée dans un délai raisonnable (art. 29 al. 1
SR 101 Bundesverfassung der Schweizerischen Eidgenossenschaft vom 18. April 1999
BV Art. 29 Allgemeine Verfahrensgarantien - 1 Jede Person hat in Verfahren vor Gerichts- und Verwaltungsinstanzen Anspruch auf gleiche und gerechte Behandlung sowie auf Beurteilung innert angemessener Frist.
1    Jede Person hat in Verfahren vor Gerichts- und Verwaltungsinstanzen Anspruch auf gleiche und gerechte Behandlung sowie auf Beurteilung innert angemessener Frist.
2    Die Parteien haben Anspruch auf rechtliches Gehör.
3    Jede Person, die nicht über die erforderlichen Mittel verfügt, hat Anspruch auf unentgeltliche Rechtspflege, wenn ihr Rechtsbegehren nicht aussichtslos erscheint. Soweit es zur Wahrung ihrer Rechte notwendig ist, hat sie ausserdem Anspruch auf unentgeltlichen Rechtsbeistand.
Cst.). L'autorité viole cette garantie constitutionnelle lorsqu'elle ne rend pas la décision qu'il lui incombe de prendre dans le délai prescrit par la loi ou dans un délai que la nature de l'affaire ainsi que toutes les autres circonstances font apparaître comme raisonnable. Il faut se fonder à ce propos sur des éléments objectifs; entre autres critères sont notamment déterminants le degré de complexité de l'affaire, l'enjeu que revêt le litige pour l'intéressé ainsi que le comportement de ce dernier et celui des autorités compétentes. La durée du délai raisonnable n'est pas influencée par des circonstances étrangères au problème à résoudre, notamment une organisation déficiente ou une surcharge structurelle (cf., à propos de l'art. 29 al. 1
SR 101 Bundesverfassung der Schweizerischen Eidgenossenschaft vom 18. April 1999
BV Art. 29 Allgemeine Verfahrensgarantien - 1 Jede Person hat in Verfahren vor Gerichts- und Verwaltungsinstanzen Anspruch auf gleiche und gerechte Behandlung sowie auf Beurteilung innert angemessener Frist.
1    Jede Person hat in Verfahren vor Gerichts- und Verwaltungsinstanzen Anspruch auf gleiche und gerechte Behandlung sowie auf Beurteilung innert angemessener Frist.
2    Die Parteien haben Anspruch auf rechtliches Gehör.
3    Jede Person, die nicht über die erforderlichen Mittel verfügt, hat Anspruch auf unentgeltliche Rechtspflege, wenn ihr Rechtsbegehren nicht aussichtslos erscheint. Soweit es zur Wahrung ihrer Rechte notwendig ist, hat sie ausserdem Anspruch auf unentgeltlichen Rechtsbeistand.
Cst. et de la garantie correspondante déduite auparavant de l'art. 4 al. 1 aCst.: ATF 125 V 188 consid. 2a p. 191, 373 consid. 2b/aa p. 375; 119 Ib 311 consid. 5b p. 325; 119 III 1 consid. 2 p. 3; 107 Ib 160 consid. 3c p. 165; 103 V 190 consid. 3c p. 195).
Il est vrai que, dans les deux dossiers en cause, des éléments présentant une certaine complexité ont déjà dû être pris en considération (cf. ATF 129 II 420 consid. 4 à 7 p. 427 ss); il n'est pas exclu que d'autres questions complexes se posent encore, dans le cadre de la procédure d'estimation. Cela étant, le cadre juridique des mesures d'instruction nécessaires, ainsi que la portée des constatations de fait requises, ont été précisés dans les deux arrêts du Tribunal fédéral du 22 juillet 2003 (arrêts 1E.14/2002 et 1E.17/2002). Dans le système de la loi fédérale sur l'expropriation, il incombe en principe au président de composer la commission "de telle sorte que les membres disposent autant que possible des connaissances spéciales nécessaires" (art. 40 de l'ordonnance concernant les commissions fédérales d'estimation [RS 711.1]), et la désignation d'experts spéciaux, non membres de la commission, est exceptionnelle (art. 49 de ladite ordonnance). Or il ne ressort pas des observations de la Commission fédérale, ni des deux dossiers qu'elle a produits, que les opérations d'estimation auraient avancé de manière significative depuis les arrêts précités du 22 juillet 2003, que ce soit par la mise en oeuvre des experts membres de
l'autorité (les assesseurs nommés par le Conseil fédéral ou les gouvernements cantonaux) ou par le recours à des experts spéciaux. Les seules explications données au retard dans le traitement des deux procédures sont sans pertinence, puisqu'elles se rapportent à l'organisation du secrétariat de la Commission fédérale (la distance géographique entre les lieux de travail du président et du secrétaire) et à des aspects secondaires (la rémunération de l'expert spécial, certains défauts formels des écritures des expropriés). Dans ces conditions, les expropriés sont manifestement fondés à se plaindre d'un retard injustifié à statuer sur le fond. Le recours de droit administratif doit donc être admis.
Il y a lieu d'inviter la Commission fédérale à rendre sa nouvelle décision, dans les deux causes (cf. consid. 8 de l'arrêt 1E.14/2002 et consid. 8 de l'arrêt 1E.17/2002), avant la fin de l'année 2006.
3.
Le présent arrêt doit être rendu sans frais. Les recourants, assistés d'un avocat, ont droit à des dépens, à la charge de la Confédération; cette indemnité sera payée par la Caisse du Tribunal fédéral.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
1.
Le recours de droit administratif est admis et la Commission fédérale d'estimation du 3e arrondissement est invitée à rendre avant le 31 décembre 2006 sa nouvelle décision, conformément à ce qui est prévu d'une part au considérant 8 de l'arrêt du Tribunal fédéral du 22 juillet 2003 dans la cause 1E.14/2002, et d'autre part au considérant 8 de l'arrêt du Tribunal fédéral du 22 juillet 2003 dans la cause 1E.17/2002.
2.
Il n'est pas perçu d'émolument judiciaire.
3.
Une indemnité de 1'000 fr., à titre de dépens, sera versée aux recourants, solidairement entre eux, par la Caisse du Tribunal fédéral.
4.
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des recourants et de la société expropriante, ainsi qu'à la Commission fédérale d'estimation du 3e arrondissement.
Lausanne, le 28 juin 2006
Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse
Le président: Le greffier:
Information de décision   •   DEFRITEN
Document : 1E.11/2006
Date : 28. Juni 2006
Publié : 06. Juli 2006
Source : Bundesgericht
Statut : Unpubliziert
Domaine : Grundrecht
Objet : recours pour déni de justice (retard à statuer)


Répertoire des lois
Cst: 29
SR 101 Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999
Cst. Art. 29 Garanties générales de procédure - 1 Toute personne a droit, dans une procédure judiciaire ou administrative, à ce que sa cause soit traitée équitablement et jugée dans un délai raisonnable.
1    Toute personne a droit, dans une procédure judiciaire ou administrative, à ce que sa cause soit traitée équitablement et jugée dans un délai raisonnable.
2    Les parties ont le droit d'être entendues.
3    Toute personne qui ne dispose pas de ressources suffisantes a droit, à moins que sa cause paraisse dépourvue de toute chance de succès, à l'assistance judiciaire gratuite. Elle a en outre droit à l'assistance gratuite d'un défenseur, dans la mesure où la sauvegarde de ses droits le requiert.
LEx: 77 
SR 711 Loi fédérale du 20 juin 1930 sur l'expropriation (LEx)
LEx Art. 77
1    La décision de la commission d'estimation peut faire l'objet d'un recours devant le Tribunal administratif fédéral.
2    À moins que la présente loi n'en dispose autrement, la procédure est régie par la loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal administratif fédéral90.
3    De nouvelles conclusions sont recevables dans la procédure devant le Tribunal administratif fédéral contre des décisions relatives à la fixation de l'indemnité s'il est établi qu'elles ne pouvaient être prises devant la commission.
78
SR 711 Loi fédérale du 20 juin 1930 sur l'expropriation (LEx)
LEx Art. 78
1    Ont qualité pour recourir les parties principales, ainsi que les titulaires de droits de gage, de charges foncières et d'usufruits, dans la mesure où la décision de la commission d'estimation leur fait subir une perte.
2    La partie adverse peut, dans le délai de dix jours à compter de la réception du recours par le Tribunal administratif fédéral, se joindre à ce recours et prendre des conclusions comme si elle avait formé un recours indépendant.91 Ces conclusions doivent être motivées. Lorsque le recours principal est retiré ou qu'il est déclaré irrecevable, le recours joint devient caduc.92
OJ: 97
Répertoire ATF
103-V-190 • 107-IB-160 • 119-IB-311 • 119-III-1 • 125-V-188 • 129-II-420
Weitere Urteile ab 2000
1E.11/2006 • 1E.14/2002 • 1E.17/2002 • 1E.5/2006
Répertoire de mots-clés
Trié par fréquence ou alphabet
tribunal fédéral • recours de droit administratif • exproprié • procédure d'estimation • calcul • architecte • greffier • incombance • délai raisonnable • droit public • décision • constitution fédérale • refus de statuer • ordonnance concernant les commissions fédérales d'estimation • société anonyme • ligne électrique • communication • indemnité • accès • fausse indication
... Les montrer tous