Bundesstrafgericht Tribunal pénal fédéral Tribunale penale federale Tribunal penal federal
Numéro de dossier: BB.2011.41
Décision du 27 septembre 2011 Ire Cour des plaintes
Composition
Les juges pénaux fédéraux Tito Ponti, président, Emanuel Hochstrasser et Patrick Robert-Nicoud
la greffière Claude-Fabienne Husson Albertoni
Parties
A. Ltd, représentée par Me Reza Vafadar, avocat, recourante
contre
Ministère public de la Confédération, partie adverse
Objet
Gestion d'un compte sous séquestre (art. 266 al. 6
SR 312.0 Code de procédure pénale suisse du 5 octobre 2007 (Code de procédure pénale, CPP) - Code de procédure pénale CPP Art. 266 Exécution - 1 L'autorité pénale atteste dans l'ordonnance de séquestre ou dans un accusé de réception séparé la remise des objets et valeurs patrimoniales séquestrés. |
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1 | L'autorité pénale atteste dans l'ordonnance de séquestre ou dans un accusé de réception séparé la remise des objets et valeurs patrimoniales séquestrés. |
2 | Elle établit un inventaire des objets et valeurs séquestrés et les conserve de manière appropriée. |
3 | Si des immeubles sont séquestrés, une restriction au droit de les aliéner est ordonnée et mentionnée au registre foncier. |
4 | Le séquestre d'une créance est notifié aux débiteurs, qui sont informés du fait que le paiement en mains du créancier n'éteint pas la dette. |
5 | Les objets sujets à une dépréciation rapide ou à un entretien dispendieux ainsi que les papiers-valeurs et autres valeurs cotées en bourse ou sur le marché peuvent être réalisés immédiatement selon les dispositions de la loi fédérale du 11 avril 1889 sur la poursuite pour dettes et la faillite156. Le produit est frappé de séquestre. |
6 | Le Conseil fédéral règle le placement des valeurs patrimoniales séquestrées. |
SR 312.0 Code de procédure pénale suisse du 5 octobre 2007 (Code de procédure pénale, CPP) - Code de procédure pénale CPP Art. 393 Recevabilité et motifs de recours - 1 Le recours est recevable: |
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1 | Le recours est recevable: |
a | contre les décisions et les actes de procédure de la police, du ministère public et des autorités pénales compétentes en matière de contraventions; |
b | contre les ordonnances, les décisions et les actes de procédure des tribunaux de première instance, sauf contre ceux de la direction de la procédure; |
c | contre les décisions du tribunal des mesures de contrainte, pour autant que le présent code ne les qualifie pas de définitives. |
2 | Le recours peut être formé pour les motifs suivants: |
a | violation du droit, y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation, le déni de justice et le retard injustifié; |
b | constatation incomplète ou erronée des faits; |
c | inopportunité. |
Faits:
A. Le 24 juin 2005, le Ministère public de la Confédération (ci-après: MPC) a ouvert une enquête de police judiciaire contre B. pour blanchiment d’argent (art. 305bis
SR 311.0 Code pénal suisse du 21 décembre 1937 CP Art. 305bis - 1. Quiconque commet un acte propre à entraver l'identification de l'origine, la découverte ou la confiscation de valeurs patrimoniales dont il sait ou doit présumer qu'elles proviennent d'un crime ou d'un délit fiscal qualifié, est puni d'une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d'une peine pécuniaire.455 |
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1 | Quiconque commet un acte propre à entraver l'identification de l'origine, la découverte ou la confiscation de valeurs patrimoniales dont il sait ou doit présumer qu'elles proviennent d'un crime ou d'un délit fiscal qualifié, est puni d'une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d'une peine pécuniaire.455 |
2 | Dans les cas graves, l'auteur est puni d'une peine privative de liberté de cinq ans au plus ou d'une peine pécuniaire.459 |
a | agit comme membre d'une organisation criminelle ou terroriste (art. 260ter); |
b | agit comme membre d'une bande formée pour se livrer de manière systématique au blanchiment d'argent461; |
c | réalise un chiffre d'affaires ou un gain importants en faisant métier de blanchir de l'argent. |
3 | Le délinquant est aussi punissable lorsque l'infraction principale a été commise à l'étranger et lorsqu'elle est aussi punissable dans l'État où elle a été commise.462 |
SR 311.0 Code pénal suisse du 21 décembre 1937 CP Art. 314 - Les membres d'une autorité et les fonctionnaires qui, dans le dessein de se procurer ou de procurer à un tiers un avantage illicite, lèsent dans un acte juridique les intérêts publics qu'ils ont mission de défendre sont punis d'une peine privative de liberté de cinq ans au plus ou d'une peine pécuniaire. |
Dans ce contexte, le 2 octobre 2007, le MPC a ordonné le séquestre des avoirs déposés sous des relations appartenant notamment au groupe K. Limited (Londres) et à la société A. Ltd dont les ayants droit économiques sont C. et G. Ces valeurs sont aujourd’hui toujours bloquées.
B. Par courrier du 20 janvier 2011, la société A. Ltd a demandé au MPC de bien vouloir accepter le transfert d’un montant de CZK 100 mios de son compte no1 auprès de la banque O., faisant l’objet d’un blocage, à destination de la banque P., le montant concerné restant frappé de séquestre. Elle précisait: « le transfert envisagé permet à la société A. Ltd d’avoir un meilleur accès aux produits financiers en République tchèque en vue d’investissement de type conservateur » de ses avoirs dans ce dernier pays (act. 1.4). Suite à la demande du MPC, la société A. Ltd a précisé, par courrier du 8 février 2011, que les investissements envisagés sont des investissements dans des produits structurés en couronnes tchèques, possibilité que n’offre pas la banque O. (act. 1.6).
Le 17 mars 2011, le MPC a fait savoir à la société A Ltd que les explications fournies ne permettaient pas de considérer que les investissements projetés étaient sûrs au sens de l’ordonnance du 3 décembre 2010 sur le placement des valeurs patrimoniales séquestrées (ci-après: l’Ordonnance sur le placement; RS 312.057). Il a donc refusé ladite demande de transfert (act. 1.9).
A. Ltd a, le 31 mars 2011, demandé au MPC de réexaminer sa demande du 20 janvier 2011 alléguant que l’investissement envisagé devrait générer des intérêts de l’ordre de 7,4% soit un taux d’intérêts supérieur de 7,25% par an que celui proposé par la banque O. (0,25% brut par an, soit des intérêts nets après commission de l’ordre de 0,15%). Compte tenu du montant de CZK 100 mios concerné, A. Ltd invoquait la responsabilité du MPC pour le dommage encouru en cas de refus (act. 1.11).
Le 11 avril 2011, le MPC a réitéré son refus au motif que l’investissement proposé ne fournissait pas les garanties nécessaires pour être considéré comme un placement sûr et a renvoyé à sa décision du 17 mars 2011.
C. Par acte du 26 avril 2011, A. Ltd recourt contre cette décision. Elle conclut à l’annulation de cette dernière, partant à autoriser le transfert de CZK 100'000'000.-- du compte no1 auprès de la banque O. vers son compte auprès de la banque P., sous suite de frais et dépens.
Pour motifs, elle invoque entre autres que selon un rapport établi à sa demande par la société Q. en date du 17 mars 2011, les dommages qu’aurait subis A. Ltd auraient été établis de façon erronée par l’expert financier qui travaillait pour le Juge d’instruction fédéral. Elle soutient avoir fourni les indications nécessaires s’agissant des investissements envisagés. Par ailleurs, elle souligne que le produit structuré concerné est susceptible de bénéficier d’une double garantie et que le capital investi est de toute façon garanti avec un préavis de 30 jours. Enfin, elle relève que le refus de transfert contesté se traduit pour elle par une perte financière d’au moins CHF 364'420.-- l’an (act. 1). Elle souligne par ailleurs que le MPC, qui indique être à la fin de son enquête, chiffre le dommage subi par A. Ltd à USD 150 mios alors que CHF 700 mios sont bloqués; elle ne comprend donc pas pourquoi la différence est toujours sous séquestre. Elle invoque dès lors une violation du principe de la proportionnalité ainsi que du pouvoir d’appréciation du MPC et l’inopportunité de l’ordonnance querellée.
Dans sa réponse du 24 mai 2011, le MPC conclut au rejet du recours dans la mesure de sa recevabilité. Se référant à l’Ordonnance de placement, il maintient pour l’essentiel que les explications fournies par la recourante ne permettent pas de conclure qu’il s’agit d’un placement propre à conserver la substance des valeurs patrimoniales séquestrées. Il retient que le taux d’intérêt offert pour l’investissement auprès de la banque P. est très élevé ce qui dénote le risque de l’opération (act. 6).
Dans sa réplique, la recourante maintient ses conclusions (act. 8).
Les arguments et moyens de preuve invoqués par les parties seront repris, si nécessaire, dans les considérants en droit.
La Cour considère en droit:
1.
1.1 La Cour des plaintes examine d’office et en pleine cognition la recevabilité des recours qui lui sont adressés (ATF 122 IV 188 consid. 1 et arrêts cités).
1.2 Les décisions du MPC peuvent faire l’objet d’un recours devant la Cour de céans (art. 393 al. 1 let. a
SR 312.0 Code de procédure pénale suisse du 5 octobre 2007 (Code de procédure pénale, CPP) - Code de procédure pénale CPP Art. 393 Recevabilité et motifs de recours - 1 Le recours est recevable: |
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1 | Le recours est recevable: |
a | contre les décisions et les actes de procédure de la police, du ministère public et des autorités pénales compétentes en matière de contraventions; |
b | contre les ordonnances, les décisions et les actes de procédure des tribunaux de première instance, sauf contre ceux de la direction de la procédure; |
c | contre les décisions du tribunal des mesures de contrainte, pour autant que le présent code ne les qualifie pas de définitives. |
2 | Le recours peut être formé pour les motifs suivants: |
a | violation du droit, y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation, le déni de justice et le retard injustifié; |
b | constatation incomplète ou erronée des faits; |
c | inopportunité. |
SR 173.713.161 Règlement du 31 août 2010 sur l'organisation du Tribunal pénal fédéral (Règlement sur l'organisation du TPF, ROTPF) - Règlement sur l'organisation du TPF ROTPF Art. 19 - 1 La Cour des plaintes accomplit les tâches qui lui incombent en vertu des art. 37 et 65, al. 3, LOAP ou d'autres lois fédérales.28 |
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1 | La Cour des plaintes accomplit les tâches qui lui incombent en vertu des art. 37 et 65, al. 3, LOAP ou d'autres lois fédérales.28 |
2 | ...29 |
3 | La Cour des plaintes statue à trois juges sauf si la direction de la procédure est compétente. Elle peut statuer par voie de circulation s'il y a unanimité et que ni un juge, ni le greffier de la composition n'a requis de délibération.30 |
SR 312.0 Code de procédure pénale suisse du 5 octobre 2007 (Code de procédure pénale, CPP) - Code de procédure pénale CPP Art. 382 Qualité pour recourir des autres parties - 1 Toute partie qui a un intérêt juridiquement protégé à l'annulation ou à la modification d'une décision a qualité pour recourir contre celle-ci. |
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1 | Toute partie qui a un intérêt juridiquement protégé à l'annulation ou à la modification d'une décision a qualité pour recourir contre celle-ci. |
2 | La partie plaignante ne peut pas interjeter recours sur la question de la peine ou de la mesure prononcée. |
3 | Si le prévenu, le condamné ou la partie plaignante décèdent, leurs proches au sens de l'art. 110, al. 1, CP268 peuvent, dans l'ordre de succession, interjeter recours ou poursuivre la procédure à condition que leurs intérêts juridiquement protégés aient été lésés. |
SR 312.0 Code de procédure pénale suisse du 5 octobre 2007 (Code de procédure pénale, CPP) - Code de procédure pénale CPP Art. 396 Forme et délai - 1 Le recours contre les décisions notifiées par écrit ou oralement est motivé et adressé par écrit, dans le délai de dix jours, à l'autorité de recours. |
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1 | Le recours contre les décisions notifiées par écrit ou oralement est motivé et adressé par écrit, dans le délai de dix jours, à l'autorité de recours. |
2 | Le recours pour déni de justice ou retard injustifié n'est soumis à aucun délai. |
1.3 En l’espèce, la décision entreprise datée du 11 avril 2011 a été notifiée le lendemain (act. 1.1). Le recours déposé le 26 avril 2011 par le conseil de la recourante dont l’étude est à Genève l’a été en temps utile (art. 396 al. 1
SR 312.0 Code de procédure pénale suisse du 5 octobre 2007 (Code de procédure pénale, CPP) - Code de procédure pénale CPP Art. 396 Forme et délai - 1 Le recours contre les décisions notifiées par écrit ou oralement est motivé et adressé par écrit, dans le délai de dix jours, à l'autorité de recours. |
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1 | Le recours contre les décisions notifiées par écrit ou oralement est motivé et adressé par écrit, dans le délai de dix jours, à l'autorité de recours. |
2 | Le recours pour déni de justice ou retard injustifié n'est soumis à aucun délai. |
SR 312.0 Code de procédure pénale suisse du 5 octobre 2007 (Code de procédure pénale, CPP) - Code de procédure pénale CPP Art. 90 Computation des délais - 1 Les délais fixés en jours commencent à courir le jour qui suit leur notification ou l'évènement qui les déclenche. |
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1 | Les délais fixés en jours commencent à courir le jour qui suit leur notification ou l'évènement qui les déclenche. |
2 | Si le dernier jour du délai est un samedi, un dimanche ou un jour férié selon le droit fédéral ou cantonal, le délai expire le premier jour ouvrable qui suit. Le droit cantonal déterminant est celui du canton où la partie ou son mandataire a son domicile ou son siège.39 |
1.4 En tant qu’autorité de recours, la Ire Cour des plaintes examine avec plein pouvoir de cognition en fait et en droit les recours qui lui sont soumis (Message relatif à l’unification du droit de la procédure pénale du 21 décembre 2005, FF 2006 1057, 1296 in fine; Stephenson/Thiriet, Commentaire bâlois, Schweizerische Strafprozessordnung, no 15 ad art. 393; Keller, Kommentar zur Schweizerischen Strafprozessordnung [StPO], [Donatsch/Hansjakob/Lieber, éd.], no 39 ad art. 393; Schmid, Handbuch des schweizerischen Strafprozessrechts, Zurich/Saint-Gall 2009, no 1512).
2. En divers points de son recours et de sa réplique, la recourante conteste le bien-fondé du séquestre portant sur les valeurs figurant sur son compte no 1 auprès de la banque O. Il convient de rappeler que la décision attaquée porte exclusivement sur le refus de transférer, entre les comptes de la recourante auprès de deux banques différentes, une somme de CZK 100 millions. Ce qui excède cette question va au-delà de l’objet du recours et ne saurait être pris en considération. On relèvera dans ce contexte que dans sa première requête au MPC, la recourante a elle-même précisé « Il va sans dire que ce montant restera frappé de séquestre ordonné par le MPC » (act. 1.4). Sur ce point, le recours est donc irrecevable.
3. La recourante conteste le refus que lui oppose le MPC de transférer CZK 100 mios d’un compte séquestré auprès de la banque O. sur son compte en couronnes tchèques auprès de la banque P. en vue d’un investissement dans des produits structurés que n’offre pas la banque O.
3.1 Au 1er janvier 2011 est entrée en vigueur l’Ordonnance sur les placements susmentionnée (let. B). Adoptée par le Conseil fédéral conformément à l’art. 266 al. 4
SR 312.0 Code de procédure pénale suisse du 5 octobre 2007 (Code de procédure pénale, CPP) - Code de procédure pénale CPP Art. 266 Exécution - 1 L'autorité pénale atteste dans l'ordonnance de séquestre ou dans un accusé de réception séparé la remise des objets et valeurs patrimoniales séquestrés. |
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1 | L'autorité pénale atteste dans l'ordonnance de séquestre ou dans un accusé de réception séparé la remise des objets et valeurs patrimoniales séquestrés. |
2 | Elle établit un inventaire des objets et valeurs séquestrés et les conserve de manière appropriée. |
3 | Si des immeubles sont séquestrés, une restriction au droit de les aliéner est ordonnée et mentionnée au registre foncier. |
4 | Le séquestre d'une créance est notifié aux débiteurs, qui sont informés du fait que le paiement en mains du créancier n'éteint pas la dette. |
5 | Les objets sujets à une dépréciation rapide ou à un entretien dispendieux ainsi que les papiers-valeurs et autres valeurs cotées en bourse ou sur le marché peuvent être réalisés immédiatement selon les dispositions de la loi fédérale du 11 avril 1889 sur la poursuite pour dettes et la faillite156. Le produit est frappé de séquestre. |
6 | Le Conseil fédéral règle le placement des valeurs patrimoniales séquestrées. |
3.2 Selon les documents versés au dossier, l’investissement en « Private Equity » envisagé par la recourante qui devrait lui rapporter quelque 7,4 % d’intérêts pourrait prendre soit la forme d’une « promissory note » soit celle d’un « fiduciary loan » (act. 1.11b). Ainsi que le relève le MPC, la recourante n’a pas spécifié dans quel produit elle souhaitait investir. Cela n’importe cependant pas. En effet, il est patent qu’aucun desdits véhicules d’investissement envisagés ne saurait remplir les conditions énoncées dans l’Ordonnance précitée selon laquelle le placement doit être sûr. A ce titre, son art. 2 prend en effet comme élément de référence le taux des comptes d’épargne ou des comptes courants, soit des taux d’intérêt qui se situent de manière générale autour de 0,125%. Ainsi, le compte sur lequel les fonds de la recourante sont actuellement bloqués porte pour sa part un intérêt de 0.25% brut par an (act. 1.11a). La différence entre le taux de référence précité et celui proposé par les véhicules d’investissement envisagés par la recourante met en soi en exergue le caractère spéculatif du placement querellé. Par ailleurs, les informations succinctes fournies à ce sujet par la recourante ne permettent pas de réfuter cette appréciation et d’admettre que contrairement aux apparences le placement concerné pourrait quand même avoir un caractère conservatoire. Au contraire, comme le souligne à juste titre le MPC, la pièce intitulée « Investments opportunities » précise même que dans certaines circonstances les investisseurs peuvent ne pas récupérer l’intégralité du montant investi (act. 1.11b p. 2). La recourante fait valoir à ce titre qu’il s’agit là d’une formulation toute générale qui ne saurait prêter à conséquence dans le cas d’espèce. Il reste que les éléments actuellement au dossier ne permettent pas d’atténuer le caractère spéculatif du placement envisagé. Il convient en outre de rappeler que l’une des caractéristiques du « private equity » est son manque de transparence, les participations portant sur des entreprises non cotées qui ne sont pas contraintes par des règles de communication aussi strictes que celles faisant appel public à l’épargne (Pansard, Le capital investissement en Europe, quelle physionomie à terme pur ce marché en croissance accélérée, Risques et tendance no 3, juin 2007,
no 4.1). Par ailleurs, de façon générale, il s’avère que les placements en « private equity » comportent des risques considérables et peuvent entraîner des pertes qui peuvent elles aussi prendre une telle ampleur. Ils sont axés sur le long terme et nettement moins liquides que les actions négociées en bourse. En général, ils ne peuvent être vendus que des années après l’investissement initial. Il est par ailleurs possible que pendant une longue période, l’investisseur ne puisse disposer de son capital que de façon restreinte, voire plus du tout. Il n’y a de distributions qu’à partir du moment où l’investisseur a pu retirer son investissement. En principe, celui-ci ne peut pas prétendre sortir avant l’échéance. Les sociétés entrant en considération pour des placements en « private equity » sont dans certains cas largement financées par des fonds de tiers, de sorte qu’elle sont plus réactives que les entreprises établies aux fluctuations négatives du marché et aux hausses des taux d’intérêt. De plus, le risque d’insolvabilité et de faillite lié à ces sociétés est plus élevé que pour les entreprises cotées (Brochure de l’Association suisse des banquiers « Risques particuliers dans le commerce de titres », p. 38 no 178). Compte tenu de ces différents éléments, ce véhicule d’investissement ne saurait être qualifié de sûr au sens de l’ordonnance précitée. L’opération envisagée risque dès lors de porter atteinte à la substance des avoirs séquestrés et c’est donc à juste titre que le MPC ne l’a pas autorisée. Le fait, comme le soulève la recourante, que la banque P. possède une licence bancaire suisse octroyée par la FINMA et est donc soumise aux réglementations régissant l’activité bancaire dans notre pays n’y change rien. En effet, cet élément ne peut en tant que tel garantir que les avoirs bloqués en raison de leur origine délictueuse (arrêt du Tribunal fédéral 1B_270/2009 du 12 novembre 2009 consid. 3.3.2) seront conservés et que donc la valeur réelle de ce capital puisse être maintenue (BJP 2002 no 206; TPF 2009 31 consid. 2.6.2). Mal fondé, cet argument doit être rejeté.
4.
4.1 La recourante invoque également une violation du principe de la proportionnalité. Elle retient à cet égard notamment que le montant mis sous séquestre par le MPC est d’au moins quatre fois supérieur au dommage allégué par celui-ci dans le cadre de son enquête et qui se monte, au vu de l’audition finale de C., un des prévenus, le 29 mars 2011, à quelque USD 150 mios (act. 1.10). Elle annexe en outre le rapport qu’elle a commandé auprès de la société Q. et qui remet en cause les calculs et analyses effectués par l’expert financier auprès du Juge d’instruction fédéral (act. 1.10a). Le MPC ne s’est quant à lui pas prononcé sur la question de la proportionnalité.
4.2 A suivre la recourante, il faudrait autoriser l’investissement contesté dans la mesure où de toute façon selon elle, les sommes bloquées sont supérieures au montant du dommage allégué par le MPC dans ce dossier. Cette vision des choses correspond toutefois à une requête de levée de séquestre sur les fonds concernés, laquelle, on l’a vu ci-dessus (supra consid. 2), n’est pas l’objet du recours. Par ailleurs, la recourante omet que dans un arrêt du 12 novembre 2009, le Tribunal fédéral a souligné que les fonds qui figurent aujourd’hui sur le compte actuellement bloqué et dont la recourante souhaite investir une partie auprès de la banque P. proviennent de l’activité délictueuse des prévenus (arrêt du Tribunal fédéral 1B_ 270/2009
consid. 3.3.2). Dès lors, refuser ainsi que l’a fait le MPC le transfert de quelque CZK 100 mios en vue d’un placement qui pourrait porter atteinte à la substance des valeurs aujourd’hui sous séquestre n’est pas contraire au principe de la proportionnalité sachant notamment que le séquestre pénal se justifie aussi longtemps que subsiste une probabilité de confiscation (arrêt du Tribunal fédéral 1B_380/2010 du 14 mars 2011 consid. 4.1). En outre, dans un cas connexe visant un des prévenus et une autre des sociétés saisies dans cette affaire, la Haute Cour a spécifié dans un arrêt rendu en juillet de cette année - soit postérieur à l’audition finale de C. citée par la recourante pour arrêter le montant final des préjudices occasionnés - que le total des dommages tels qu’ils peuvent être actuellement estimés est provisoire. Elle précisait en outre que l’autorité de poursuite doit tenir compte de la probabilité que l’ensemble des détournements au détriment de la société H. n’ont pas encore été mis à jour (arrêt du Tribunal fédéral 1B_190/2011 du 7 juillet 2011 consid. 2.3). Du reste, on relèvera que, contrairement à ce que soutient le recours, l’audition finale de C. n’évoque pas, à titre de dommage, uniquement les USD 150 mios cités par la recourante, mais articule également les montants suivants: une perte pour la société H. de CZK 776 mios sous forme de perte de change lorsque la société minière a été vendue en juin 2003 (act. 1.10 p. 5), un préjudice pour cette dernière d’au moins CZK 703 mios correspondant à la plus-value qu’elle aurait pu réaliser sur un investissement basique sur les marchés de capitaux si les fonds en cause n’avaient pas été changé en USD et transférés à la société L. pour être utilisés dans l’intérêt exclusifs des prévenus (act. 1.10 p. 6), un préjudice à l’Etat tchèque pour un montant de CHF 149'630'298.-- en raison du prix de vente trop bas des actions de la société H. (act. 1.10 p. 6). Certes, la recourante fait valoir le rapport de Q. qui remet en cause ces différents éléments (act. 1.10a). Il appartiendra cependant au juge du fond de déterminer les montants définitifs des dommages éventuels découlant in casu des agissements mis à charge des prévenus. Enfin, le MPC annonce que l’acte d’accusation est attendu sous peu. En conséquence, le refus du MPC d’autoriser le
placement envisagé par la recourante ne viole pas le principe de la proportionnalité. Cet argument, mal fondé dans la mesure où il est recevable, doit également être rejeté. Par ailleurs, et pour les mêmes raisons que celles évoquées ci-dessus, on ne saurait considérer que la décision attaquée est inopportune.
5. En résumé, mal fondé, le recours doit être rejeté dans la mesure de sa recevabilité.
6.
6.1 En tant que partie qui succombe, la recourante se voit mettre à charge les frais, et ce en application de l’art. 428 al. 1
SR 312.0 Code de procédure pénale suisse du 5 octobre 2007 (Code de procédure pénale, CPP) - Code de procédure pénale CPP Art. 428 Frais dans la procédure de recours - 1 Les frais de la procédure de recours sont mis à la charge des parties dans la mesure où elles ont obtenu gain de cause ou succombé. La partie dont le recours est irrecevable ou qui retire le recours est également considérée avoir succombé. |
|
1 | Les frais de la procédure de recours sont mis à la charge des parties dans la mesure où elles ont obtenu gain de cause ou succombé. La partie dont le recours est irrecevable ou qui retire le recours est également considérée avoir succombé. |
2 | Lorsqu'une partie qui interjette un recours obtient une décision qui lui est plus favorable, les frais de la procédure peuvent être mis à sa charge dans les cas suivants: |
a | les conditions qui lui ont permis d'obtenir gain de cause n'ont été réalisées que dans la procédure de recours; |
b | la modification de la décision est de peu d'importance. |
3 | Si l'autorité de recours rend elle-même une nouvelle décision, elle se prononce également sur les frais fixés par l'autorité inférieure. |
4 | S'ils annulent une décision et renvoient la cause pour une nouvelle décision à l'autorité inférieure, la Confédération ou le canton supportent les frais de la procédure de recours et, selon l'appréciation de l'autorité de recours, les frais de la procédure devant l'autorité inférieure. |
5 | Lorsqu'une demande de révision est admise, l'autorité pénale appelée à connaître ensuite de l'affaire fixe les frais de la première procédure selon son pouvoir d'appréciation. |
6.2 Compte tenu de l’issue du recours, il ne sera pas octroyé de dépens.
Par ces motifs, la Ire Cour des plaintes prononce:
1. Le recours est rejeté dans la mesure de sa recevabilité.
2. Un émolument de CHF 1'500.--, réputé couvert par l’avance de frais acquittée, est mis à la charge de la recourante.
3. Il n’est pas alloué de dépens.
Bellinzone, le 28 septembre 2011
Au nom de la Ire Cour des plaintes
du Tribunal pénal fédéral
Le président: La greffière:
Distribution
- Me Reza Vafadar, avocat
- Ministère public de la Confédération
Indication des voies de recours
Dans les 30 jours qui suivent leur notification, les arrêts de la Ire Cour des plaintes relatifs aux mesures de contrainte sont sujets à recours devant le Tribunal fédéral (art. 79 et 100 al. 1 de la loi fédérale du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral; LTF). La procédure est réglée par les art. 90 ss
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire LTF Art. 90 Décisions finales - Le recours est recevable contre les décisions qui mettent fin à la procédure. |
Le recours ne suspend l’exécution de l’arrêt attaqué que si le juge instructeur l’ordonne (art. 103
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire LTF Art. 103 Effet suspensif - 1 En règle générale, le recours n'a pas d'effet suspensif. |
|
1 | En règle générale, le recours n'a pas d'effet suspensif. |
2 | Le recours a effet suspensif dans la mesure des conclusions formulées: |
a | en matière civile, s'il est dirigé contre un jugement constitutif; |
b | en matière pénale, s'il est dirigé contre une décision qui prononce une peine privative de liberté ferme ou une mesure entraînant une privation de liberté; l'effet suspensif ne s'étend pas à la décision sur les prétentions civiles; |
c | en matière d'entraide pénale internationale, s'il a pour objet une décision de clôture ou toute autre décision qui autorise la transmission de renseignements concernant le domaine secret ou le transfert d'objets ou de valeurs; |
d | en matière d'assistance administrative fiscale internationale. |
3 | Le juge instructeur peut, d'office ou sur requête d'une partie, statuer différemment sur l'effet suspensif. |