Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
{T 0/2}
6B 397/2015
Arrêt du 26 novembre 2015
Cour de droit pénal
Composition
MM. et Mme les Juges fédéraux Denys, Président,
Jacquemoud-Rossari et Rüedi.
Greffière : Mme Nasel.
Participants à la procédure
X.________,
recourant,
contre
Ministère public central du canton de Vaud, avenue de Longemalle 1, 1020 Renens VD,
intimé.
Objet
Ordonnance pénale, défaut, opposition réputée retirée,
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton de Vaud, Chambre des recours pénale, du 20 février 2015.
Faits :
A.
Par ordonnance pénale du 28 mai 2014, le Ministère public de l'arrondissement de Lausanne (ci-après: le ministère public) a notamment condamné X.________, ressortissant de la République populaire de Chine, pour faux dans les certificats et infraction à la LEtr à une peine pécuniaire de 90 jours-amende, à 70 fr. le jour, avec sursis pendant 2 ans, ainsi qu'à une amende de 700 fr., convertible en 10 jours de peine privative de liberté en cas de non-paiement fautif.
Cette ordonnance a été frappée d'opposition en temps utile par X.________, par l'intermédiaire de son avocat, Jean-Pierre Moser.
Le 6 octobre 2014, le Tribunal de police de l'arrondissement de Lausanne (ci-après: le tribunal de police), constatant le défaut de X.________ à l'audience du même jour, a prononcé que l'opposition formée le 12 juin 2014 par ce dernier était retirée et que l'ordonnance pénale rendue le 28 mai 2014 par le ministère public était définitive et exécutoire.
B.
Statuant par arrêt du 20 février 2015 sur le recours formé par X.________, la Chambre des recours pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud l'a rejeté.
En bref, il en ressort les faits suivants.
X.________ a été cité à comparaître à l'audience du tribunal de police du 6 octobre 2014 par avis du 26 juin 2014 adressé à lui personnellement ainsi qu'à son défenseur. La citation à l'adresse de X.________, communiquée sous pli recommandé, exigeait sa comparution personnelle et précisait que, s'il ne se présentait pas, l'opposition serait réputée retirée et l'ordonnance pénale déclarée exécutoire. X.________ a accusé réception du pli sous sa signature le 2 juillet 2014, l'envoi lui ayant été distribué au même moment.
L'avocat Jean-Pierre Moser est décédé le 28 juin 2014. Le 7 juillet 2014, le secrétariat du défunt a demandé au ministère public de « suspendre tout délai ou audience en cours et à venir, dans l'attente qu'un avocat suppléant soit désigné par le Président de la Chambre des avocats pour reprendre les affaires en cours ».
X.________ ne s'est ni présenté ni ne s'est fait représenter à l'audience du 6 octobre 2014. Il n'a pas non plus requis la désignation d'un défenseur d'office.
C.
X.________ forme un recours en matière pénale au Tribunal fédéral contre l'arrêt du 20 février 2015, concluant principalement à son admission et à la modification ou l'annulation des décisions du 20 février 2015 respectivement du 6 octobre 2014 ainsi qu'au renvoi de la cause à l'autorité de première instance pour nouvelle décision.
Invitée à se déterminer sur le recours, la cour cantonale y a renoncé, se référant aux considérants de sa décision. Le Ministère public central du canton de Vaud ne s'est pas déterminé.
Considérant en droit :
1.
Se fondant notamment sur la CEDH et les art. 29

SR 101 Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 Cst. Art. 29 Garanties générales de procédure - 1 Toute personne a droit, dans une procédure judiciaire ou administrative, à ce que sa cause soit traitée équitablement et jugée dans un délai raisonnable. |
1.1. L'art. 68 al. 2

SR 312.0 Code de procédure pénale suisse du 5 octobre 2007 (Code de procédure pénale, CPP) - Code de procédure pénale CPP Art. 68 Traductions - 1 La direction de la procédure fait appel à un traducteur ou un interprète lorsqu'une personne participant à la procédure ne comprend pas la langue de la procédure ou n'est pas en mesure de s'exprimer suffisamment bien dans cette langue. Pour les affaires simples ou urgentes, il peut être renoncé à une telle mesure, pour autant que la personne concernée y consente et que la direction de la procédure et le préposé au procès-verbal maîtrisent suffisamment bien la langue de cette personne. |

SR 101 Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 Cst. Art. 32 Procédure pénale - 1 Toute personne est présumée innocente jusqu'à ce qu'elle fasse l'objet d'une condamnation entrée en force. |
1.2. En matière d'ordonnance pénale, si l'opposant fait défaut aux débats sans être excusé et sans se faire représenter, son opposition est réputée retirée (art. 356 al. 4

SR 312.0 Code de procédure pénale suisse du 5 octobre 2007 (Code de procédure pénale, CPP) - Code de procédure pénale CPP Art. 356 Procédure devant le tribunal de première instance - 1 Lorsqu'il décide de maintenir l'ordonnance pénale, le ministère public transmet sans retard le dossier au tribunal de première instance en vue des débats. L'ordonnance pénale tient lieu d'acte d'accusation. |

SR 312.0 Code de procédure pénale suisse du 5 octobre 2007 (Code de procédure pénale, CPP) - Code de procédure pénale CPP Art. 355 Procédure en cas d'opposition - 1 En cas d'opposition, le ministère public administre les autres preuves nécessaires au jugement de l'opposition. |

SR 312.0 Code de procédure pénale suisse du 5 octobre 2007 (Code de procédure pénale, CPP) - Code de procédure pénale CPP Art. 356 Procédure devant le tribunal de première instance - 1 Lorsqu'il décide de maintenir l'ordonnance pénale, le ministère public transmet sans retard le dossier au tribunal de première instance en vue des débats. L'ordonnance pénale tient lieu d'acte d'accusation. |

SR 312.0 Code de procédure pénale suisse du 5 octobre 2007 (Code de procédure pénale, CPP) - Code de procédure pénale CPP Art. 205 Obligation de comparaître, empêchement et défaut - 1 Quiconque est cité à comparaître par une autorité pénale est tenu de donner suite au mandat de comparution. |

SR 312.0 Code de procédure pénale suisse du 5 octobre 2007 (Code de procédure pénale, CPP) - Code de procédure pénale CPP Art. 355 Procédure en cas d'opposition - 1 En cas d'opposition, le ministère public administre les autres preuves nécessaires au jugement de l'opposition. |

SR 312.0 Code de procédure pénale suisse du 5 octobre 2007 (Code de procédure pénale, CPP) - Code de procédure pénale CPP Art. 3 Respect de la dignité et procès équitable - 1 Les autorités pénales respectent la dignité des personnes impliquées dans la procédure, à tous les stades de celle-ci. |
l'opposant ait conscience des conséquences de son omission et qu'il renonce à ses droits en connaissance de cause (ATF 140 IV 82 consid. 2.3, 2.5 et 2.6 p. 84 s.). Le Tribunal fédéral a ainsi jugé que la fiction légale introduite par cette disposition ne s'applique en principe que si l'opposant a eu une connaissance effective de la convocation et des conséquences du défaut, l'abus de droit étant réservé (ATF 140 IV 82 consid. 2.7 p. 86).
1.3. Le principe de la bonne foi, concrétisé à l'art. 3 al. 2 let. a

SR 312.0 Code de procédure pénale suisse du 5 octobre 2007 (Code de procédure pénale, CPP) - Code de procédure pénale CPP Art. 3 Respect de la dignité et procès équitable - 1 Les autorités pénales respectent la dignité des personnes impliquées dans la procédure, à tous les stades de celle-ci. |
1.4. La cour cantonale a retenu que le tribunal de police avait exigé la comparution personnelle du recourant, lequel devait dès lors présenter de justes motifs à son absence, tout en constatant que l'on ne se trouvait pas dans un cas de défense d'office au sens de l'art. 132

SR 312.0 Code de procédure pénale suisse du 5 octobre 2007 (Code de procédure pénale, CPP) - Code de procédure pénale CPP Art. 132 Défense d'office - 1 La direction de la procédure ordonne une défense d'office: |
juillet 2014 était donc conforme au principe de la protection de la bonne foi indépendamment du décès du défenseur survenu pendente lite. En outre, elle était valide au regard des exigences de l'art. 85 al. 2

SR 312.0 Code de procédure pénale suisse du 5 octobre 2007 (Code de procédure pénale, CPP) - Code de procédure pénale CPP Art. 85 Forme des communications et des notifications - 1 Sauf disposition contraire du présent code, les communications des autorités pénales sont notifiées en la forme écrite. |

SR 312.0 Code de procédure pénale suisse du 5 octobre 2007 (Code de procédure pénale, CPP) - Code de procédure pénale CPP Art. 356 Procédure devant le tribunal de première instance - 1 Lorsqu'il décide de maintenir l'ordonnance pénale, le ministère public transmet sans retard le dossier au tribunal de première instance en vue des débats. L'ordonnance pénale tient lieu d'acte d'accusation. |
1.5. Le recourant soutient que la citation précitée aurait dû être traduite dans sa langue maternelle, compte tenu de sa « méconnaissance des langues occidentales » et du décès de son avocat. Au vu de ces circonstances, il n'aurait pas eu une connaissance effective de la convocation et des conséquences du défaut de sorte que son absence de comparution à l'audience fixée le 6 octobre 2014 par le tribunal de première instance ne permettait pas d'en déduire un retrait de son opposition.
Les questions de savoir si la citation à comparaître fait partie des actes de procédure les plus importants au sens de l'art. 68 al. 2

SR 312.0 Code de procédure pénale suisse du 5 octobre 2007 (Code de procédure pénale, CPP) - Code de procédure pénale CPP Art. 68 Traductions - 1 La direction de la procédure fait appel à un traducteur ou un interprète lorsqu'une personne participant à la procédure ne comprend pas la langue de la procédure ou n'est pas en mesure de s'exprimer suffisamment bien dans cette langue. Pour les affaires simples ou urgentes, il peut être renoncé à une telle mesure, pour autant que la personne concernée y consente et que la direction de la procédure et le préposé au procès-verbal maîtrisent suffisamment bien la langue de cette personne. |
Le recourant ne comprend pas le français, ce que la cour cantonale ne remet d'ailleurs pas en cause. Il ne peut dès lors être retenu qu'il a saisi la portée exacte de l'indication des conséquences du défaut figurant, en français, sur la citation à comparaître du 26 juin 2014. Cela est d'autant plus vrai qu'il n'a pas eu la possibilité de consulter son avocat, qui est décédé quelques jours avant qu'elle ne lui soit notifiée. Le recourant n'a ainsi pas eu une connaissance effective de la convocation et des conséquences du défaut. Dans ces circonstances particulières, il n'est pas possible de considérer que le recourant, par sa seule absence à l'audience du 6 octobre 2014, s'est désintéressé de la procédure pénale dirigée contre lui, partant qu'il a retiré par actes concluants son opposition en application de l'art. 356 al. 4

SR 312.0 Code de procédure pénale suisse du 5 octobre 2007 (Code de procédure pénale, CPP) - Code de procédure pénale CPP Art. 356 Procédure devant le tribunal de première instance - 1 Lorsqu'il décide de maintenir l'ordonnance pénale, le ministère public transmet sans retard le dossier au tribunal de première instance en vue des débats. L'ordonnance pénale tient lieu d'acte d'accusation. |
notifiée - et qu'il ait été capable de recourir auprès de la cour cantonale contre le prononcé rendu le 6 octobre 2014 par le tribunal de police avec l'aide d'une tierce personne, ne changent rien à cette appréciation. En effet, ces éléments ne révèlent pas un désintérêt du recourant pour la suite de la procédure ni ne laissent supposer qu'il n'entend pas donner suite à une convocation, bien au contraire. Au surplus, le tribunal de police avait connaissance du fait que le recourant n'était plus représenté lorsque la citation à comparaître lui a été notifiée le 2 juillet 2014 et qu'il n'était dès lors plus en mesure de comprendre la portée exacte des actes de procédure. Le recourant pouvait ainsi légitimement inférer de ces circonstances spéciales que la procédure serait poursuivie lorsqu'un avocat remplaçant reprendrait la défense de ses intérêts - ainsi que cela ressort d'ailleurs du courrier du secrétariat du défunt adressé au ministère public le 7 juillet 2014. On ne saurait par conséquent lui reprocher d'avoir sollicité l'aide d'une tierce personne qu'une fois le prononcé du 6 octobre 2014 notifié. L'attitude du recourant n'est dès lors pas incompatible avec le principe de la bonne foi. En tout état, compte tenu de
l'application restrictive qu'il y a lieu de donner à l'art. 356 al. 4

SR 312.0 Code de procédure pénale suisse du 5 octobre 2007 (Code de procédure pénale, CPP) - Code de procédure pénale CPP Art. 356 Procédure devant le tribunal de première instance - 1 Lorsqu'il décide de maintenir l'ordonnance pénale, le ministère public transmet sans retard le dossier au tribunal de première instance en vue des débats. L'ordonnance pénale tient lieu d'acte d'accusation. |
Par conséquent, la cour cantonale a violé le droit fédéral en considérant que l'opposition formée par le recourant à l'ordonnance pénale du 28 mai 2014 était réputée retirée. L'arrêt attaqué doit être annulé et la cause renvoyée à l'autorité précédente pour nouveau jugement.
2.
Vu le sort du recours, il n'y a pas lieu d'examiner les autres griefs soulevés par le recourant qui deviennent sans objet. Celui-ci, qui obtient gain de cause, ne supportera pas de frais (art. 66 al. 1

SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire LTF Art. 66 Recouvrement des frais judiciaires - 1 En règle générale, les frais judiciaires sont mis à la charge de la partie qui succombe. Si les circonstances le justifient, le Tribunal fédéral peut les répartir autrement ou renoncer à les mettre à la charge des parties. |
|
1 | En règle générale, les frais judiciaires sont mis à la charge de la partie qui succombe. Si les circonstances le justifient, le Tribunal fédéral peut les répartir autrement ou renoncer à les mettre à la charge des parties. |
2 | Si une affaire est liquidée par un désistement ou une transaction, les frais judiciaires peuvent être réduits ou remis. |
3 | Les frais causés inutilement sont supportés par celui qui les a engendrés. |
4 | En règle générale, la Confédération, les cantons, les communes et les organisations chargées de tâches de droit public ne peuvent se voir imposer de frais judiciaires s'ils s'adressent au Tribunal fédéral dans l'exercice de leurs attributions officielles sans que leur intérêt patrimonial soit en cause ou si leurs décisions font l'objet d'un recours. |
5 | Sauf disposition contraire, les frais judiciaires mis conjointement à la charge de plusieurs personnes sont supportés par elles à parts égales et solidairement. |

SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire LTF Art. 66 Recouvrement des frais judiciaires - 1 En règle générale, les frais judiciaires sont mis à la charge de la partie qui succombe. Si les circonstances le justifient, le Tribunal fédéral peut les répartir autrement ou renoncer à les mettre à la charge des parties. |
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1 | En règle générale, les frais judiciaires sont mis à la charge de la partie qui succombe. Si les circonstances le justifient, le Tribunal fédéral peut les répartir autrement ou renoncer à les mettre à la charge des parties. |
2 | Si une affaire est liquidée par un désistement ou une transaction, les frais judiciaires peuvent être réduits ou remis. |
3 | Les frais causés inutilement sont supportés par celui qui les a engendrés. |
4 | En règle générale, la Confédération, les cantons, les communes et les organisations chargées de tâches de droit public ne peuvent se voir imposer de frais judiciaires s'ils s'adressent au Tribunal fédéral dans l'exercice de leurs attributions officielles sans que leur intérêt patrimonial soit en cause ou si leurs décisions font l'objet d'un recours. |
5 | Sauf disposition contraire, les frais judiciaires mis conjointement à la charge de plusieurs personnes sont supportés par elles à parts égales et solidairement. |
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1.
Le recours est admis, l'arrêt attaqué est annulé et la cause est renvoyée à l'autorité cantonale pour nouvelle décision.
2.
Il n'est pas perçu de frais judiciaires.
3.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et au Tribunal cantonal du canton de Vaud, Chambre des recours pénale.
Lausanne, le 26 novembre 2015
Au nom de la Cour de droit pénal
du Tribunal fédéral suisse
Le Président : Denys
La Greffière : Nasel