Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
6B 1226/2016
Arrêt du 16 février 2018
Cour de droit pénal
Composition
MM. et Mmes les juges Denys, Président,
Jacquemoud-Rossari, Oberholzer, Rüedi et Jametti.
Greffier : M. Thélin.
Participants à la procédure
A.________,
représenté par Me Marc Henzelin, avocat,
recourant,
contre
Ministère public du canton de Genève;
X.________ et
Y.________,
représentés par Me Christian Tamisier, avocat,
intimés.
Objet
procédure pénale; formalisme excessif
recours contre l'arrêt de la Cour de justice du canton de Genève, Chambre pénale de recours, du 23 septembre 2016 (ACPR/611/2016).
Considérant en fait et en droit :
1.
Le 27 octobre 2010, A.________ a déposé plainte pénale auprès des autorités judiciaires genevoises contre X.________ et Y.________ pour abus de confiance, gestion déloyale, faux dans les titres et escroquerie; il s'est constitué partie civile selon le droit de procédure alors en vigueur. Le plaignant imputait aux deux personnes dénoncées des malversations dans la gestion de ses avoirs, lesquels avaient été successivement déposés auprès de deux banques de Genève, toujours au nom de la société B.________ Corp. enregistrée au Panama. Le plaignant se disait l'ayant droit économique de cette société. Il a plus tard déposé une plainte complémentaire.
Les autorités ont ouvert une instruction. Des perquisitions ont été opérées auprès de banques en Suisse et, par la voie de l'entraide judiciaire, en Israël. La police a effectué des auditions. Le Ministère public a tenu neuf audiences. Il a entendu A.________ et il lui a notifié ses communications et ordonnances à titre de plaignant. Il a formellement articulé diverses préventions contre l'une et l'autre des personnes dénoncées. Il a plus tard averti les parties que l'instruction serait prochainement close; il envisageait de renvoyer Y.________ en jugement et d'ordonner un classement en faveur de X.________. Les parties ont pris position.
Par acte d'accusation du 2 mai 2016, le Ministère public a renvoyé Y.________ en jugement relativement à certaines préventions. Par ordonnance du même jour, il a rejeté les réquisitions de preuves encore pendantes de ce prévenu et il a classé la procédure relativement aux autres préventions articulées contre lui. Aussi par ordonnance du 2 mai 2016, le Ministère public a rejeté les réquisitions de preuve supplémentaires du plaignant et il a classé la procédure ouverte contre X.________.
Nul n'a mis en doute la qualité d'A.________ pour prendre part à la cause en qualité de partie.
2.
Usant de la voie du recours, A.________ a déféré les deux ordonnances de classement à la Chambre pénale de recours de la Cour de justice.
Cette autorité a statué le 23 septembre 2016. Après jonction des deux recours, elle les a déclarés irrecevables. Selon son arrêt, A.________ ne jouit d'aucun droit sur les avoirs déposés au nom de B.________ Corp.; en conséquence, faute d'être lésé par les malversations dénoncées, il n'a qualité ni pour déposer plainte selon les art. 30 al. 1
SR 311.0 Code pénal suisse du 21 décembre 1937 CP Art. 30 - 1 Si une infraction n'est punie que sur plainte, toute personne lésée peut porter plainte contre l'auteur. |
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1 | Si une infraction n'est punie que sur plainte, toute personne lésée peut porter plainte contre l'auteur. |
2 | Si le lésé n'a pas l'exercice des droits civils, le droit de porter plainte appartient à son représentant légal. Si l'ayant droit est sous tutelle ou sous curatelle de portée générale, le droit de porter plainte appartient également à l'autorité de protection de l'adulte.20 |
3 | Le lésé mineur ou placé sous curatelle de portée générale a le droit de porter plainte s'il est capable de discernement.21 |
4 | Si le lésé meurt sans avoir porté plainte ni avoir expressément renoncé à porter plainte, son droit passe à chacun de ses proches. |
5 | Si l'ayant droit a expressément renoncé à porter plainte, sa renonciation est définitive. |
SR 312.0 Code de procédure pénale suisse du 5 octobre 2007 (Code de procédure pénale, CPP) - Code de procédure pénale CPP Art. 382 Qualité pour recourir des autres parties - 1 Toute partie qui a un intérêt juridiquement protégé à l'annulation ou à la modification d'une décision a qualité pour recourir contre celle-ci. |
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1 | Toute partie qui a un intérêt juridiquement protégé à l'annulation ou à la modification d'une décision a qualité pour recourir contre celle-ci. |
2 | La partie plaignante ne peut pas interjeter recours sur la question de la peine ou de la mesure prononcée. |
3 | Si le prévenu, le condamné ou la partie plaignante décèdent, leurs proches au sens de l'art. 110, al. 1, CP268 peuvent, dans l'ordre de succession, interjeter recours ou poursuivre la procédure à condition que leurs intérêts juridiquement protégés aient été lésés. |
Agissant par la voie du recours en matière pénale, A.________ requiert le Tribunal fédéral d'annuler l'arrêt de la Cour de justice et de renvoyer la cause à cette autorité pour nouvelle décision.
3.
En tant qu'A.________ prétend à des droits de parties à la procédure pénale et qu'il tient ces droits pour violés par l'arrêt d'irrecevabilité de la Cour de justice, il a au regard de l'art. 81 al. 1 let. b
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire LTF Art. 81 Qualité pour recourir - 1 A qualité pour former un recours en matière pénale quiconque: |
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1 | A qualité pour former un recours en matière pénale quiconque: |
a | a pris part à la procédure devant l'autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire, et |
b | a un intérêt juridique à l'annulation ou à la modification de la décision attaquée, soit en particulier: |
b1 | l'accusé, |
b2 | le représentant légal de l'accusé, |
b3 | le ministère public, sauf pour les décisions relatives à la mise en détention provisoire ou pour des motifs de sûreté, à la prolongation de la détention ou à sa levée, |
b4 | ... |
b5 | la partie plaignante, si la décision attaquée peut avoir des effets sur le jugement de ses prétentions civiles, |
b6 | le plaignant, pour autant que la contestation porte sur le droit de porter plainte, |
b7 | le Ministère public de la Confédération et les autorités administratives participant à la poursuite et au jugement des affaires pénales administratives selon la loi fédérale du 22 mars 1974 sur le droit pénal administratif56. |
2 | Une autorité fédérale a qualité pour recourir si le droit fédéral prévoit que la décision doit lui être communiquée.57 |
3 | La qualité pour recourir contre les décisions visées à l'art. 78, al. 2, let. b, appartient également à la Chancellerie fédérale, aux départements fédéraux ou, pour autant que le droit fédéral le prévoie, aux unités qui leur sont subordonnées, si l'acte attaqué est susceptible de violer la législation fédérale dans leur domaine d'attributions. |
4.
Le recourant tient l'arrêt d'irrecevabilité pour contraire aux principes de la bonne foi et de la protection contre le formalisme excessif.
Le formalisme excessif est un aspect particulier du déni de justice prohibé par l'art. 29 al. 1
SR 101 Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 Cst. Art. 29 Garanties générales de procédure - 1 Toute personne a droit, dans une procédure judiciaire ou administrative, à ce que sa cause soit traitée équitablement et jugée dans un délai raisonnable. |
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1 | Toute personne a droit, dans une procédure judiciaire ou administrative, à ce que sa cause soit traitée équitablement et jugée dans un délai raisonnable. |
2 | Les parties ont le droit d'être entendues. |
3 | Toute personne qui ne dispose pas de ressources suffisantes a droit, à moins que sa cause paraisse dépourvue de toute chance de succès, à l'assistance judiciaire gratuite. Elle a en outre droit à l'assistance gratuite d'un défenseur, dans la mesure où la sauvegarde de ses droits le requiert. |
SR 101 Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 Cst. Art. 5 Principes de l'activité de l'État régi par le droit - 1 Le droit est la base et la limite de l'activité de l'État. |
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1 | Le droit est la base et la limite de l'activité de l'État. |
2 | L'activité de l'État doit répondre à un intérêt public et être proportionnée au but visé. |
3 | Les organes de l'État et les particuliers doivent agir de manière conforme aux règles de la bonne foi. |
4 | La Confédération et les cantons respectent le droit international. |
La Cour de justice retient avec pertinence que lorsque des infractions ont été perpétrées au préjudice d'une organisation dotée de la personnalité juridique, telle une société anonyme, l'ayant droit ou l'actionnaire unique dominant cette personne morale n'a pas qualité de lésé selon l'art. 115 al. 1
SR 312.0 Code de procédure pénale suisse du 5 octobre 2007 (Code de procédure pénale, CPP) - Code de procédure pénale CPP Art. 115 - 1 On entend par lésé toute personne dont les droits ont été touchés directement par une infraction. |
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1 | On entend par lésé toute personne dont les droits ont été touchés directement par une infraction. |
2 | Sont toujours considérées comme des lésés les personnes qui ont qualité pour déposer plainte pénale. |
SR 312.0 Code de procédure pénale suisse du 5 octobre 2007 (Code de procédure pénale, CPP) - Code de procédure pénale CPP Art. 118 Définition et conditions - 1 On entend par partie plaignante le lésé qui déclare expressément vouloir participer à la procédure pénale comme demandeur au pénal ou au civil. |
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1 | On entend par partie plaignante le lésé qui déclare expressément vouloir participer à la procédure pénale comme demandeur au pénal ou au civil. |
2 | Une plainte pénale équivaut à une telle déclaration. |
3 | La déclaration doit être faite devant une autorité de poursuite pénale avant la clôture de la procédure préliminaire. |
4 | Si le lésé n'a pas fait spontanément de déclaration, le ministère public attire son attention dès l'ouverture de la procédure préliminaire sur son droit d'en faire une. |
SR 312.0 Code de procédure pénale suisse du 5 octobre 2007 (Code de procédure pénale, CPP) - Code de procédure pénale CPP Art. 382 Qualité pour recourir des autres parties - 1 Toute partie qui a un intérêt juridiquement protégé à l'annulation ou à la modification d'une décision a qualité pour recourir contre celle-ci. |
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1 | Toute partie qui a un intérêt juridiquement protégé à l'annulation ou à la modification d'une décision a qualité pour recourir contre celle-ci. |
2 | La partie plaignante ne peut pas interjeter recours sur la question de la peine ou de la mesure prononcée. |
3 | Si le prévenu, le condamné ou la partie plaignante décèdent, leurs proches au sens de l'art. 110, al. 1, CP268 peuvent, dans l'ordre de succession, interjeter recours ou poursuivre la procédure à condition que leurs intérêts juridiquement protégés aient été lésés. |
En revanche, la Cour perd de vue que le recourant a pu prendre part à titre de partie, sans que sa qualité ne fût jamais mise en doute ni par le Ministère public ni par les adverses parties, à une instruction complexe et prolongée. Ce plaideur ne devait pas raisonnablement prévoir que sa qualité serait contestée pour la première fois lors d'un recours cantonal contre des ordonnances du Ministère public. Dans ces conditions, les garanties constitutionnelles présentement invoquées imposaient à la Cour d'avertir le recourant que sa qualité était sujette à caution; elles imposaient aussi de lui impartir un délai approprié pour qu'il pût éventuellement prendre position, d'une part, et pour que B.________ Corp. pût intervenir dans la procédure de recours et adhérer aux conclusions déjà présentées par le plaideur qui se dit son ayant droit, d'autre part (voir l'arrêt 1B 194/2012 du 3 août 2012 concernant le recours introduit au nom d'une communauté héréditaire). L'arrêt attaqué appert contraire auxdites garanties et il doit être annulé pour ce motif.
5.
Au regard de la nature procédurale du vice examiné et dès lors que le Tribunal fédéral n'a pas traité la cause sur le fond, ne préjugeant ainsi pas de l'issue de la cause, il peut être procédé au renvoi à la Cour de justice sans ordonner préalablement un échange d'écritures (ATF 133 IV 293 consid. 3.4.2 i.f. p. 296).
6.
Des dépens doivent être alloués au recourant, à la charge du canton de Genève.
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1.
Le recours est admis, l'arrêt de la Cour de justice est annulé et la cause est renvoyée à cette autorité pour nouvelle décision.
2.
Il n'est pas perçu d'émolument judiciaire.
3.
Le canton de Genève versera une indemnité de 3'000 fr. au recourant, à titre de dépens.
4.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour de justice du canton de Genève.
Lausanne, le 16 février 2018
Au nom de la Cour de droit pénal
du Tribunal fédéral suisse
Le président : Denys
Le greffier : Thélin